Chapitre 34

Le lendemain matin, nous nous réunîmes tous dans la cuisine.

- Donc, on part à sa recherche, ça y est ? s'enquit Eline.

- C'est le moment, oui, acquiesça Enda.

- Pouvons-nous savoir où il se trouve ? l'interrogeai-je.

- Pas très loin. Selon mes informateurs, il n'a pas bougé ces dernières semaines et se cache encore dans les Alpes.

- Informateurs ? Mais vous ne sortez jamais de Camden...

- C'est eux qui viennent à moi, rétorqua-t-elle en m'indiquant de sa tête un coin de la pièce.

Un tout petit oiseau de rien de tout se tenait sur le bord d'une étagère, en train de faire sa toilette.

- C'est quand même bien pratique, ton truc, fit remarquer Eline.

- Dominique se cache dans un bunker qu'il a réhabilité il y a quelques années déjà. Mon plan est très simple : Mia, tu nous téléportes là-bas, on entre à l'intérieur, on retrouve Dominique, on le tue et on revient à l'heure pour manger.

- Simple et efficace, approuva Mike.

- Vous pensez vraiment que ça peut-être aussi facile ? me méfiai-je.

- Je n'accepterais pas que ça se passe autrement.

- J'aimerais juste attirer l'attention sur un petit détail. Je ne peux pas me téléporter dans un endroit que je ne connais pas.

- J'y ai déjà songé, répondit la reine. Silver, vous pouvez entrer dans les esprits, n'est-ce pas ?

Celui-ci se redressa, visiblement étonné qu'elle fasse appel à lui.

- Si vous entrez dans la tête de Lilo, vous pourrez voir l'emplacement de ce bunker, puis le montrer à Mia. Elle pourra ensuite tous nous amener là-bas.

- Lilo ?

- Lilo, l'oiseau venu me donner des nouvelles ce matin !

- Enda, ce n'est pas évident pour tout le monde, lui expliqua Eline en se penchant vers elle.

Pendant qu'elles discutaient ensemble, Silver se leva et s'approcha doucement de l'oiseau pour ne pas l'effrayer. Je l'entendis murmurer quelque chose, sûrement pour lui demander l'autorisation de le toucher. Quand il revint s'asseoir à mes côtés, ma curiosité prit le dessus.

- Alors, comment c'est d'être dans la tête d'un oiseau ?

- Assez étrange, rit-il. Je te montre l'endroit ?

J'acquiesçai vivement et il prit ma main dans la sienne. Dans mon esprit, plein d'images se succédaient rapidement. J'avais d'abord du mal à me concentrer sur ce que je voyais, puis petit à petit, je discernai une montagne, un chemin, une grotte et une porte blindée.

- C'est bon ?

- Je visualise l'endroit, confirmai-je.

- Très bien, alors allons-y ! s'enthousiasma la fée.

- On ne devrait pas prévenir Lazarus et Moïra qu'on s'en va, quand même ?

- Ils sont déjà au courant. J'ai demandé à Aaron hier soir d'appeler votre oncle et nous avons averti Moïra ce matin avant de vous rejoindre.

- Hier soir, hein ? sourit Mike.

- Ce n'est pas le moment, merci, râla Aaron.

Après avoir décidé qui seraient les premiers à se téléporter avec moi, je commençai à faire les allers-retours. Une fois tout le monde sur place, je sentis la nervosité monter en moi. , nous y étions. Je ne savais pas du tout à quoi m'attendre et j'anticipai le pire. En même temps, une équipe de trois vampires, deux enchanteurs et une reine des fées devait faire le poids contre un homme, non ? Un homme complètement fou, mais un homme quand même.

- Mia, vous nous faites entrer ? m'interrogea Enda en me tendant une couronne d'olivier.

Je posai cette dernière sur ma tête et me concentrai sur la porte blindée. Grâce à mes pouvoirs amplifiés, je ressentis toute sa densité. Face à elle, j'ouvris mes mains et les rapprochai lentement, afin de réduire sa taille. Une fois qu'elle ne fut pas plus grande qu'un briquet, je la pris dans ma paume et l'envoyai valser ailleurs à l'aide d'une pichenette.

Eline et Mike s'avancèrent à ma hauteur.

- Toc, toc, toc, fit le vampire.

- Qui est là ? demanda Eline en retour.

- Ton pire cauchemar.

- Non, mais... tu es censé faire un jeu de mots ! Pas faire un flop comme ça... râla-t-elle.

- Je fais ce que je veux.

- Vous réglerez ça plus tard, intervint Silver. Pour le moment, je propose d'entrer et de voir si un comité d'accueil nous attend.

- Oh, oui ! Du sang frais, s'extasia Eline.

- Calme-toi, la jeunette, la tempéra aussitôt Mike.

- Un peu plus d'action ne serait pas de refus, intima la reine des fées en nous dépassant. On y va ?

Le cœur battant, je la suivis de près. Silver me rejoignit et glissa sa main dans la mienne. Ce n'était pas grand-chose, mais ce geste aida à calmer un peu mon anxiété grandissante.

Tout va bien se passer.

Je l'espère.

Nous marchâmes de concert, dans un long couloir dont je n'arrivais pas à distinguer la fin. Je m'attendais à voir apparaître un bataillon de soldats, armés jusqu'aux dents, nous sauter dessus. Tout était vide. Mais au lieu d'apaiser mon angoisse, cela l'amplifia d'autant plus.

Calme-toi, Mia. Si tu continues comme ça, tu vas nous faire une crise cardiaque avant qu'on ne le retrouve.

Je sentis à travers notre lien toute l'inquiétude qu'il ressentait pour moi et je réalisais que je devais l'écouter. S'il se faisait du souci pour moi en pleine action, cela pouvait lui porter préjudice et il pouvait être blessé. Cela ne pouvait pas se produire.

Après avoir descendu des escaliers et traversé un autre conduit, nous aperçûmes une porte entrouverte au loin d'où s'échappait une lumière. Quand nous fûmes presque arrivés devant, Mike, impatient, utilisa son pouvoir pour l'ouvrir entièrement.

À l'intérieur, tout était renversé, comme si une bataille avait déjà eu lieu. Derrière un bureau, affalé dans un fauteuil, Dominique nous attendait, une bouteille de whisky à la main.

- Je me demandais quand vous arriveriez tous. Surtout toi, Mia.

- Que s'est-il passé ?

- Tu parles de cette pièce ? Du bunker vide ? De moi ?

Il partit dans un grand éclat de rire sinistre qui me fit frissonner d'effroi.

Il est complètement saoul.

Sans blague.

- Tu m'as tout enlevé. Tout.

- Je n'ai rien fait du tout. Vous ne pouvez vous en prendre qu'à vous-même, rétorquai-je.

- À cause de ta petite escapade d'il y a quelques semaines, tous les gouvernements ont perdu confiance en moi. Ils ont décidé de fermer tous les centres. On ne peut plus faire d'expérience. Ils estiment que c'est trop dangereux et certains pensent même qu'éthiquement, faire des tests sur des enfants n'est pas moral.

- Et ça vous étonne ? Évidemment que c'est mal !

Un autre éclat de rire sombre et sinistre. Cet homme me faisait peur. Il avait beau être seul dans cette pièce, je ne me sentais pas moins en danger. Que comptait-il faire ? J'étais tout de même en partie rassurée d'apprendre que ces centres avaient été obligés de fermer.

- Je t'attendais, tu sais.

- J'ai cru le comprendre.

Oui, mais pourquoi t'attendait-il ?

Il avait raison. Pourquoi ?

- Je vois qu'Aaron a retrouvé sa place dans le petit groupe. Comme c'est mignon. Tu ne me dis pas bonjour, Aaron ? Après tout ce que nous avons vécu ensemble ? Tu te plaisais ici, pourtant.

Du coin de l'œil, j'aperçus Enda se placer instinctivement devant mon ami pour le protéger.

- Et ne serait-ce pas une fée que nous avons là ? C'est encore mieux !

Il veut dire par là ?

Je n'en ai aucune idée. Mais restons sur nos gardes.

- Vous avez conscience que vous ne ressortirez pas d'ici vivant ? l'interrogea la fée.

- Oh, je le sais, ma jolie, je le sais. Mais je ne serais pas forcément le seul.

Le sourire qu'il lui lança me glaça le sang. Quelque chose ne tournait pas rond, mais je ne savais pas quoi, je n'arrivais pas à mettre le doigt dessus. La panique s'insinuait sous ma peau et une sueur froide se formait dans mon dos.

- Bon, on ne va pas continuer à papoter comme ça encore deux heures, si on passait à l'action ? s'exclama Mike.

Il s'avançait vers Dominique, quand nous entendîmes des bruits de pas s'approcher de nous. Je me retournai vers le couloir et aperçus tant d'hommes, que je n'aurais su dire combien il y en avait.

- Je croyais que tout le monde vous avait lâché, demandai-je, abasourdie.

- Cela n'empêche pas qu'il me reste des hommes qui croient encore en mon projet et ont décidés de me suivre malgré tout.

Dominique claqua des doigts et aussitôt, les soldats bougèrent dans un seul mouvement, se ruant sur nous. Ils étaient si nombreux et il y avait si peu de place que je me sentais submergée, je ne savais pas du tout quoi faire. Tandis que mes amis se lançaient dans la bataille, sans la moindre hésitation, je restais une fois de plus sidérée face à toute cette violence. Comme si tout était au ralenti autour de moi, j'ouvris grand les yeux, ne sachant où donner de la tête.

Mia, s'il te plaît, on a besoin de toi ! Tu ne peux pas rester immobile ainsi, c'est comme ça que tu es la plus vulnérable. Bats-toi !

L'intervention de Silver me sortis de ma torpeur. Mes yeux clignèrent à plusieurs reprises, je pris une grande inspiration et levai les mains devant moi.

- Assez ! criai-je alors.

Plus personne ne bougea. C'était comme s'ils s'étaient tous transformés en statue de cire.

J'en avais assez de tout ça. Je n'en pouvais plus de ce conflit. Je ne supportais plus cet homme et tout ce qu'il représentait. Nous n'allions pas encore tous nous battre. Je me concentrai sur eux, pensai à une destination, comme un désert, loin d'ici. Une fois disparus, je me retournai vers mes amis et d'un geste de la main, je leur redonnai la possibilité de se mouvoir.

Désolée...

Ne t'excuse pas.

Je me retournai vers Dominique, qui affichait toujours le même air satisfait.

- Impressionnant. Il y a tant de choses que l'on aurait pu faire ensemble, toi et moi. Nous aurions pu découvrir la véritable ampleur de tes pouvoirs... vraiment, c'est dommage.

Je le fusillai du regard. Dégoutée par cet homme.

- Ça finit ici, Dominique. Vous ne sortirez pas de ce bunker sans nous, le menaçai-je.

- Qui a dit que nous sortirions d'ici ?

Cette fois-ci, c'était sûr, mon cœur allait me lâcher. Il tenait un détonateur dans ses mains et avant que je ne puisse réagir, il appuya sur le bouton, déclenchant une succession d'explosions tout autour de nous. J'avais si peur. Peur comme ça ne m'était jamais arrivé. Nous allions tous mourir. Mes amis. Silver.

Non, ce n'était pas possible, je ne le permettrai pas. L'adrénaline parcourait mes veines et instinctivement, je sus ce que je devais faire. J'ouvris mes bras en grand et tout se figea à nouveau. Des éclats de pierres restaient suspendus dans les airs et un départ de flammes ne demandait qu'à s'étendre.

Il faut que vous partiez tous ! Tout va s'écrouler et je ne sais pas combien de temps je vais réussir à tenir comme ça.

Je ne pars pas sans toi.

Silver. Attrape Dominique et sortez d'ici. Je peux me téléporter une fois que je vous saurais tous à l'abri.

Fais vite, je t'en supplie.

Je sentis ma concentration vaciller et l'explosion reprit vie l'espace d'une seconde. Juste assez pour que la chaleur du feu me lèche les mains.

On est dehors, tu peux venir.

Je me focalisai sur mon pouvoir de téléportation, mais tout recommença à bouger autour de moi et une partie de la pièce s'écroula sous la force de la déflagration.

Mia, tu fais quoi ?

Je fermai les yeux et m'obligeai à calmer ma respiration erratique. J'étais seule, au fin fond d'un bunker, à tenter de maîtriser une explosion et j'étais littéralement effrayée. De l'autre côté de notre lien, je pouvais sentir l'inquiétude de Silver se faire de plus en plus forte.

Ce n'est pas le moment de paniquer, je t'en supplie. Respire. Calme-toi et reviens-moi.

Petit à petit, je réussis à reprendre le dessus. Je me tenais toujours droite, les bras écartés dans une tentative de garder le contrôle sur la situation.

Aies confiance en toi, tout va bien se passer.

Je pris alors une grande inspiration et avant de la relâcher, je me téléportai en dehors de cet enfer qui ne demandait qu'à s'écrouler.

Je me matérialisai dehors et m'écroulai aussitôt. Silver se précipita pour me retenir avant que je ne touche le sol.

- Je suis là, je te tiens, murmura-t-il en m'embrassant sur le sommet de la tête.

Nous restâmes ainsi enlacés de longues minutes durant lesquelles je luttai contre une envie de vomir. J'avais eu si peur.

Quand enfin, je pus rester droite sans avoir le vertige, je me tournai vers le reste du groupe.

- Je suis désolée, je...

- Tu viens de nous sauver la vie, Mia, m'interrompit Aaron. Ne t'excuse surtout pas.

Eline s'approcha de moi et me serra fort contre elle. Je répondis à son embrassade, soulagée qu'elle aille bien. Au-dessus de son épaule, j'aperçus alors Dominique, aux mains de Mike.

- Il ne va pas tenter de s'enfuir ? m'inquiétai-je.

- Non, je lui ai intimé de ne rien tenter. Sinon, il a pour ordre de s'arracher les ongles avec les dents, m'expliqua Silver avec un sourire diabolique.

Tu peux être super effrayant, quand tu t'y mets.

Il haussa les épaules et croisa les bras sur son torse, sans jamais quitter Dominique des yeux.

- Je peux m'occuper de lui, si vous voulez, proposa Mike. Il me suffit de pas grand-chose pour lui faire le coup du lapin.

- Non !

Tous se tournèrent vers moi, attendant que je m'explique.

- Quand bien même je suis sûre qu'il ne manquerait à personne, je ne veux pas le tuer. Je ne veux pas m'abaisser à son niveau.

La reine Enda s'avança vers moi et posa une main réconfortante sur mon épaule.

- C'est une sage décision, Mia. Et si vous ne comptez pas le tuer, j'aurais une proposition à vous faire : dans mon royaume, il existe une prison de laquelle personne ne peut s'échapper. Je vous fais le serment qu'il regrettera de ne pas être mort.

Elle me fixait de ses yeux bleus et je vis dans son regard toute sa détermination. J'acquiesçai alors lentement. C'était une bonne solution.

Une fois de retour dans le repère de Moïra, je ne rêvais que d'une seule chose : dormir. Mais mes amis m'amenèrent de force dans la cuisine et m'obligèrent à m'asseoir à table.

- Je suis épuisée, grommelai-je.

- D'abord, tu manges quelque chose et ensuite tu pourras dormir pendant trois jours, si tu le souhaites. Mais tu dois reprendre des forces, tu es blanche comme un linge, déclara Eline.

Moïra, qui nous attendait de pied ferme, s'occupa de me préparer à manger.

- Ce n'est pas censé être interdit ? lui demandai-je d'une voix faible en la voyant utiliser ses pouvoirs.

- Il y a des situations pour lesquelles il faut savoir contourner ses propres règles, ma jolie.

Quelques secondes plus tard, elle déposa un bol rempli de soupe, du pain, du fromage et une tasse de thé. J'avalai mon repas et dus reconnaître que cela me fit beaucoup de bien. Pourtant, à la fin, je piquais du nez et éprouvai beaucoup de mal à rester éveillée. Silver s'approcha alors, passa un bras sous mes jambes, l'autre dans mon dos, et me porta ainsi tout contre lui.

Endors-toi, mon cœur, tu es en sécurité maintenant.

*

Lorsque j'ouvris les yeux, je me sentis revigorée. Je tournai la tête, n'aperçus personne dans le lit et ne pus m'empêcher d'éprouver une pointe de déception. Je pensais que Silver serait à mes côtés à mon réveil.

Après m'être étirée, j'allai prendre une douche et me dépêchai de m'habiller pour sortir de la chambre. Ne sachant pas trop où se trouvaient mes amis, je décidai de me rendre dans la cuisine et les y trouvai tous attablé, en grande discussion. Silver fut le premier à me remarquer, évidemment. Il se leva et s'approcha de moi à une vitesse surhumaine.

Je pensais que tu serais avec moi, dans le lit.

Et je pensais vraiment que tu dormirais beaucoup plus longtemps. Excuse-moi, Mia.

Il replaça une mèche de mes cheveux derrière une oreille et prit mon visage entre ses mains, puis déposa un baiser sur mes lèvres. Nous nous dirigeâmes ensuite vers la table, où je m'assis entre lui et Eline.

- Comment ça va, ma poule ?

- Beaucoup mieux que... en fait je n'ai aucune idée de quel jour on est, combien de temps j'ai dormi... c'est très bizarre, comme sensation.

- Tu as dormi une journée complète, plus une nuit.

- Donc on est juste le lendemain ?

J'observai mes amis, tour à tour. Ils semblaient tous fatigués, mais soulagés. Je remarquai alors qu'il manquait une personne à l'appel.

- Où est passé Enda ?

Silver m'expliqua alors qu'elle avait tenu à partir au plus vite afin de pouvoir emprisonner Dominique dès que possible. Mike et Aaron s'étaient chargés de les accompagner jusqu'aux portes de son royaume et était rentrés seulement deux heures avant mon réveil. J'étais étonnée de constater qu'Aaron n'avait pas voulu l'accompagner plus loin. J'apprendrais plus tard qu'ils avaient décidé de ne pas poursuivre leur relation et de continuer leur chemin séparément.

- Tu ne regrettes pas de l'avoir laissé partir avec elle ? m'interrogea Eline.

- Non. Elle aussi a perdu de la famille à cause de lui. Moi, tout ce que je souhaite, c'est de savoir qu'il ne pourra plus faire de mal. S'il est enfermé dans une cellule, quelque part au fin fond du royaume des fées, ça m'est bien égal.

J'attrapai une tranche de pain et de la confiture que j'étalai dessus. Avant de la manger, je relevai les yeux vers mes amis.

- Alors, ça y est ? C'est fini ? Plus de course poursuite, plus besoin de se cacher, de vivre dans la peur ?

Mike me décocha un sourire et leva son verre de sang.

- Tu es libre de vivre une vie triste et monotone.

J'éclatai de rire. Un rire libérateur, qui fit s'envoler mes derniers doutes. J'étais libre.

Libre d'être moi.

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