07 | CONCERT IMPROVISÉ & VIRÉE EN CABRIOLET
𝐴𝑙𝑜𝑖̈𝑠 𝑃𝑒𝑟𝑟𝑖𝑛
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ALOÏS ÉTAIT PLUTÔT CONTENT QUE SA SOIRÉE RÉPÉTITION NE SE SOIT PAS TERMINÉE EN PUGILAT.
Après la crise de drama queen de Céleste, les quatre adolescents n'avaient guère eu le goût de se mettre au travail et s'étaient plutôt contentés de migrer jusqu'à la chambre d'Aloïs. Élie avait allumé la console de jeu tout juste rafistolée avec du ruban adhésif, bientôt suivi par Delphine. Barnabé s'était contenté de s'affaler sur le lit du rouquin, comme il le faisait depuis tant d'années déjà. Seul Aloïs n'avait pas perdu sa motivation - et pourtant vu les réflexions de Cél' il y aurait eu de quoi - et était toujours à la recherche d'une chanson que tous appréciaient.
Puis il y avait eu l'appel de Céleste, une ou deux heures plus tard et bientôt, les cinq adolescents se gavaient des délicieux cupcakes au caramel de la brune. La hache de guerre paraissait avoir été enterrée entre Élie et Céleste, bien que les deux adolescents gardaient leurs distances, et Aloïs devait avouer qu'il préférait les voir rire ensemble plutôt que de se disputer. Delphine fredonnait gaiement une chanson des Beatles, coupant court aux sons de mastications qui planaient entre les cinq adolescents.
- Et du coup, vous avez répété pendant mon absence ? s'enquit soudainement Céleste en léchant le glaçage sur ses doigts.
- Nan on a fait les otaries et on a glandé chacun de notre côté, avoua Barnabé avant d'avaler tout rond sa dernière bouchée. Y a qu'Aloïs qui a continué à travailler, mais mieux vaut ne pas parler de cela car on va finir par s'engueuler de nouveau.
Élie approuva les dires de son ami d'un bref hochement de tête.
- Et vous êtes toujours partants pour qu'on répète ? ajouta Céleste alors Delphine cessait de chantonner. Parce que si c'est le cas, je promets d'être sage et de ne pas stresser. Vous savez, j'ai réfléchi et c'est vrai que je paniquais un peu pour rien : après tout, y aucune raison que l'anniversaire de la fille du maire se passe mal.
- J'suis d'accord avec toi, approuva Delphine en se redressant. À quinze ans on aime à peu près tout et on n'est pas encore trop chiante. Puis si jamais c'est le cas, y a bien quelqu'un qui lui remettra les pendules à l'heure.
- Ça, j'en suis pas si sûr, contra Barnabé en pouffant nerveusement. Si elle est aussi agaçante qu'Ambre Langlet, une fille de l'aumônerie, on n'a pas fini de vouloir la trucider. Pas vrai Aloïs ?
- Une vraie petite peste, affirma le rouquin en soupirant.
Lui aussi connaissait bien Ambre Langlet, la fille du seul médecin de Saint-Lac. Même plus que bien si on comptait le nombre de fois où ils étaient "sortis" ensemble lors des camps d'été qu'organisait la paroisse de Saint-Lac et de Montdesbois. Elle avait un an de moins que le restant des membres du groupe et en dépit des apparences, elle était bien loin d'être aussi innocente qu'un ange. Avec ses longues mèches onyx et ses traits nippons, la jeune fille ressemblait à une de ces poupées de porcelaine : magnifique à l'extérieur mais terriblement machiavélique à l'intérieur.
Aloïs ne comptait plus le nombre de fois où elle l'avait harcelé pour qu'il l'emmène faire un tour dans sa deux chevaux, ni le nombre de fois où elle l'avait mené en bateau sous prétexte qu'il n'était pas assez impliqué dans leur relation. Néanmoins quand tu as quatorze ans, des dents pas très droites et un fort penchant pour la discrétion, s'impliquer dans une relation que tu souhaites cacher à tes parents n'est guère la plus confortable des situations. Combien de fois Aloïs avait-il dû mentir à ses parents et leur faire croire qu'il s'était cogné lorsqu'il revenait avec un suçon - un suçon bordel ! - de son camp ? Combien de stratagèmes avait-il dû inventer simplement pour éviter de la croiser dans la rue ?
Aloïs avait cessé de faire le décompte depuis bien longtemps désormais.
- D'ailleurs, tu as eu des nouvelles du maire ? poursuivit le rouquin en se tournant vers Céleste.
- Pas la moindre, rétorqua-t-elle, visiblement déçue. J'espère qu'il aura la présence d'esprit de me l'envoyer demain matin et non une heure avant l'anniversaire de sa fille.
- Vu sa tête, tu ferais mieux de prier, ironisa Barnabé, désormais à moitié allongé sur la jeune femme. Je fais pas confiance à ce type en matière d'organisation : il a des dents trop blanches pour être honnête.
Élie approuva d'un hochement de tête et ses lunettes rondes suivirent le mouvement.
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Minuit avait toujours été une bonne heure pour répéter, contrairement à ce que les parents d'Aloïs pensaient. Déjà ces derniers avaient-ils ordonné aux Alphapabêtes de baisser le volume afin de ne pas déranger les voisins, ce qu'ils avaient fait, non sans l'augmenter dès qu'ils avaient tourné le dos. Ils avaient enfin réussi à se mettre d'accord sur le morceau qu'ils jouaient et après de nombreuses propositions, ils avaient jeté leur dévolu sur "I want you back" des Jackson 5.
Certes, ce genre de musique n'allait sûrement pas plaire à une collégienne de la trempe de Mademoiselle Guibon - c'était quoi son nom d'ailleurs ? -, mais du moment que ça leur plaisait à eux, c'était le plus important.
- Oh, baby, give me one more chance.
Won't you please let me, back in your heart, chantait Céleste en claquant des doigts, debout face au microphone.
Derrière elle, Delphine s'éclatait contre les caissons de sa batterie, jonglant avec adresse entre les différents rythmes et tonalités. Sa chevelure bouclée volait gracieusement dans son dos, tel un halo duveteux et un sourire sincère s'étirait sur ses lèvres. Barnabé au clavier se chargeait des cœurs de la chanson et ne cessait de répéter les termes "I want you back". Quant à Élie et Aloïs, tous deux grattaient frénétiquement leur guitare à l'aide de vieux métronome bariolés.
Aloïs était content de voir que tout se finissait bien, que Céleste avait pris conscience de ses torts et avait souhaité se racheter plutôt que de les laisser dans le pétrin. Puis elle avait ramené des cupcakes et il fallait tout de même préciser que c'était les meilleurs de la terre. Aloïs était également heureux de jouer en compagnie de ses amis, un de ces refrains entêtants datant de plusieurs décennies déjà mais qui rassemblait toujours autant les gens. C'était génial, c'était magique, c'était tout ce que le rouquin pouvait rêver de mieux pour cette fin de journée.
Et ce manège aurait pu continuer pendant de nombreuses heures encore, si le père d'Aloïs n'avait pas décidé de pointer son nez pour la dixième fois de la soirée.
- Aloïs ! s'écria son géniteur depuis la porte du sas d'entrée. Il est minuit passé ! Alors si toi et tes copains ne voulez pas que les voisins portent plainte pour tapage nocturne, vous feriez mieux d'arrêter !
Aloïs ne distinguait pas la silhouette de son géniteur, cachée derrière la rangée de vélos entassés près de la porte. Toutefois, il le connaissait assez pour savoir que son visage pâle avait tourné au saumon et que ses mèches rousses étaient plus qu'ébouriffées. Un air courroucé se faisait ressentir dans sa voix endormie, aussi Aloïs et ses amis cessèrent immédiatement leur concert.
- On va tout ranger papa, informa le gringalet aux taches de rousseurs. Tu peux retourner te coucher, maintenant.
Monsieur Perrin grommela un vague "bonne nuit" avant de fermer la porte derrière lui. Les parents d'Aloïs avaient été les seuls à accepter que les Alphapabêtes répètent dans leur garage, aussi les membres jugeaient-ils normal de respecter les ordres qu'ils leur donnaient - bien que par moment, ils ne pouvaient s'empêcher de les contester -, ayant trop peur de se voir retirer un tel privilège. Voilà pourquoi Delphine, Barnabé, Élie et Céleste s'étaient empressés de ranger convenablement leurs instruments à la demande du quinquagénaire.
Et voilà pourquoi un quart d'heure plus tard, ils étaient tous entassés dans la deux chevaux rubis d'Aloïs.
- Vous êtes sûrs que vous voulez pas dormir à la maison ce soir ? interrogea pour la cinquième fois Aloïs alors qu'il s'engageait dans les rues étroites de Saint-Lac.
- C'est gentil de proposer mais si je rentre pas tout de suite, ma mère va s'inquiéter, répondit Delphine en se pinçant les lèvres.
Elle était d'ailleurs en train de pianoter sur son téléphone et si Aloïs ne la connaissait pas aussi bien, il aurait juré que ceci n'était qu'une excuse bidon. Assis sur le siège passager, Céleste était la première à descendre, étant celle habitant le plus près de chez les Perrin. Elle avait baissé la fenêtre de la deux chevaux et caressait distraitement l'air filant sous ses doigts. Aloïs avait baissé le toit en toile, transformant la petite voiture vintage en cabriolet.
Il y tenait à sa voiture, le petit Aloïs, comme si c'était son propre enfant. Il s'agissait d'un cadeau de son grand-père, ancien mécanicien et collectionneur de vieille Citroën. Il lui avait fait don le jour de ses dix-huit, il y avait de cela quelques mois, et Aloïs lui avait promis qu'il en prendrait grand soin. Ses amis l'avaient tout de suite adoptée, plus pour son aspect rétro que pour son efficacité - Élie se partageait une Golf avec sa sœur et Barnabé conduisait parfois la Mercedes de ses parents, enfin, une fois tous les six mois. Ils lui avaient même donnée un nom, Jacqueline, en référence à son ancien propriétaire, grand-père Jacques.
La petite voiture rubis se gara le long du trottoir et après avoir salué tout le monde, Céleste regagna son chez soi. Aloïs attendit qu'elle soit rentrée avant de redémarrer. La voûte céleste étoilée offrait un spectacle des plus impressionnants et le rouquin n'aurait cessé de l'admirer s'il n'avait pas été au volant. Ils traversèrent quelques chemins pavés qui ne manquèrent pas de les secouer - heureusement qu'il n'avait pas mis le toit - et arrivèrent bientôt dans le lotissement de Barnabé et de Delphine.
- Merci pour la promenade mec, lança Barnabé en tapant dans la main de son meilleur ami.
- Bouge Barn' ! s'empressa de répliquer Delphine en le poussant hors de la deux chevaux. Ma mère va me tuer si je me dépêche pas !
Barnabé leva les yeux au ciel mais se décala tout de même pour la laisser passer. Ils saluèrent préstement leurs deux amis puis s'engouffrèrent dans l'obscurité de la nuit. Il n'y avait plus qu'Élie désormais, assis sur la banquette arrière couleur crème. La prochaine destination du rouquin n'était autre que Montdesbois, le village qui ne dormait point.
- Je suis content que vous vous soyez réconciliés avec Céleste, avoua Aloïs en passant la première.
- Ouais, moi aussi.
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Bonnn les choses se sont calmées finalement ahah
J'espère que ce chapitre vous aura plu ! N'hésitez pas à me faire part de vos avis en commentaires ou encore à cliquer sur la petite étoile si vous l'avez apprécié !
Comme vous aurez pu le constater, j'ai publié deux chapitres aujourd'hui et par conséquent, il n'y en aura pas demain.
Je me suis rendue compte que si je publiais un chapitre à chaque fois, ça me ferait terminer la publication de cette histoire en pleine semaine de révisions, ce qui n'est pas super. Voilà pourquoi j'accélère le rythme afin de ne pas trop empiéter sur mon programme.
Puis j'ai décidé de les publier aujourd'hui car je vais à la BU demain, et je vais travailler toute la journée (réviser pour la colle de lundi mdrr #PACESvie). Soooo j'aurai pas trop le temps ce week-end de faire autre chose mdrr.
J'espère que vous comprendrez !
Et sur cette dernière note je vous donne rendez-vous samedi prochain (ou peut-être vendredi encore) !
capu ton cygne ✶
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