METSÄ- 08

Taehyung était paralysé sur place.

Non pas qu'il ne souhaitait pas bouger, mais il ne parvenait pas à agiter ne serait-ce qu'un doigt de pied; il lui semblait que les épaisses bourrasques de vent qui sifflaient autour de lui l'immobilisaient complètement.
C'était à peine s'il parvenait à respirer convenablement. Il se sentait vaguement nauséeux, ses tympans bourdonnaient et son cœur palpitait douloureusement fort dans sa poitrine.

Le baigneur se planta face à lui, traversant la tornade en frôlant l'épaule de Taehyung, projetant quelques gouttelettes autour de lui.Le soleil miroitait sur sa peau presque translucide tant elle était claire, qui luisait à cause de l'eau.
De ses yeux grands ouverts, Taehyung ne pouvait qu'observer le rouquin au visage blême, une basket dans la main, et le garçonnet aux cheveux noirs s'incliner profondément devant l'étrange bonhomme mentholé, qui, poing sur les hanches, semblait les disputer.
Le citadin tentait d'ailleurs de faire fi de sa nudité, complètement exposée.

L'étrange voix tourbillonnait dans son crâne, en une inaudible complainte lugubre, le distrayant de la drôle de scène qui se jouait devant lui. Son cœur se pinça dans son torse à l'entente de cette étrange mélodie, qui semblait venir tout droit des cieux tant elle était belle; et pourtant, les notes s'effaçaient de son crâne aussitôt qu'elle y résonnaient, comme s'il ne devait jamais, au grand jamais, se rappeler de cette ode insaisissable.
Ses yeux commençaient sérieusement à piquer.
Une grosse larme roula sur sa pommette, rapidement suivit par sa jumelle. Il ne savait pas vraiment s'il pleurait à cause de ses paupières tressautant furieusement sans qu'il puisse fermer les yeux, ou à cause de la profonde tristesse qui l'envahissait au fur et à mesure que résonnait la mélodie dans sa tête.

«-Arrête de me fixer ainsi! », cingla la voix, brisant net la mélopée.

Alors, il comprit que le grondement venait de l'homme à la peau blanche, qui le fusillait amèrement du regard.
J'aimerai bien, pensa t-il.
Et comme si l'autre parvenait à lire dans ses pensées, le châtain reprit contrôle de son corps, couinant en manquant de perdre l'équilibre alors que le vent, qui l'étreignait si fortement auparavant, disparut brusquement. Taehyung cligna des paupières jusqu'à ce que ses globes oculaires soient suffisamment ré-hydratés pour qu'il puisse regarder en face de lui, essuya ses joues et releva timidement la tête, les doigts de pieds fourmillants.

Le baigneur courroucé soupira dédaigneusement dès qu'il croisa son regard, et un long frisson couru le long de l'échine du jeune citadin.

«-Jimin, tu me l'apportes dans mes appartements. Quant à toi, Jeongguk, tu ramasseras mon kimono afin qu'il soit nettoyé ce soir. Oh, et, bien sûr, vous rangerez le service à thé. Faites vite, je sens qu'il va pleuvoir. »

Il claqua des doigts et, d'une démarche princière; le dos droit, la tête haute et les épaules bien en arrière, s'éloigna lentement, regagnant le temple, toujours entièrement nu.

Un ange passa. Les deux jeunes garçons semblaient s'être ratinés sur place. Le rouquin, le cou enfoncé dans le col de son joli kimono de lin, chuchota quelques mots à l'oreille de son voisin. Alors que l'autre grimaçait, il toussota, plongeant son regard dans les yeux de Taehyung, qui était franchement perdu.
En ronchonnant, Jeongguk s'éclipsa au pas de course, d'une démarche bondissante, presque enfantine, se hâtant d'obéir aux ordres du plus pâlichon d'entre tous.

«-Jeongguk! Si tu t'occupes de ranger tout ce qu'on a sorti, je m'occuperai de nettoyer le kimono du maître!, hurla l'homme-renard, alors que le noiraud était déjà loin.

- Du maître? C'est ultra mégalo, comme surnom. Les mots s'étaient échappés de sa bouche, que le rouquin couvrit prestement de sa main, comme si le-dit maître était susceptible de les entendre.

- Chut! Je vais finir par croire que tu es réellement idiot, toi. Il ne faut pas parler de Yoongi-sama ainsi, il entend tout! Tout! C'est le vent qui lui rapporte le moindre de nos propos. Enfin, c'est ce qu'il dit... D'ailleurs, c'est quoi ton nom? Parce que Yoongi-sama, lui il veut qu'on l'appelle maître, ou altesse, ou son excellence, mais il aime bien aussi Yoongi-sama. En fait, on peut l'appeler de plein de façons, tant qu'on ne l'apostrophe pas par son prénom tout seul. Une fois, je l'ai fait, et il m'a-

- Taehyung. C'est Taehyung, mon prénom.

- D'accord, Taehyung! Je peux t'appeler Tae? Le jeune garçon remit la large ceinture qui maintenait les pans de son kimono, l'obi, si Taehyung ne se trompait guère,en place. Les yeux du citadin s'attardèrent sur la taille fine du rouquin, qui souriait, ses yeux en croissant de lune se plissant jusqu'à disparaître. Jeongguk, j'aime bien l'appeler gguki...
En même temps, lui, ça fait... Pouah! Au moins quatre-vingt six ans qu'on se connait!
En âge humain, ça fait beaucoup, non? Nous pas trop trop. C'est même ridiculement court. Enfin, ça peut paraître long, parce qu'à part prendre le thé et obéir aux ordres, ici, on a pas grand chose à faire... Mais je parle, je parle, et le temps file! Il remonta les manches de son kimono, soudainement agité, et agrippa le poignet du châtain. Il faut que je t'emmène voir le maître! »

Plus de quatre-vingt ans? Pourtant, tout deux semblaient être bien, bien, bien plus jeunes... Avant que Taehyung ne puisse l'interroger, Jimin agrippa son poignet, le tirant vers le temple, laissant Jeongguk s'affairer dans le jardin. Le jeune coréen n'avait même pas eu le temps de remettre correctement ses baskets, dont les lacets traînaient sur l'herbe humide. Une grosse goutte de pluie s'écrasa sur le bout de son nez. De là où ils étaient leur parvenait les ronchonnements exaspérés de Jeongguk qui, les bras chargés d'étoffe, tentait tant bien que mal de ramener le service à thé, qui oscillait dangereusement entre ses mains, dans le temple.

Taehyung déglutit difficilement. Il avait un mauvais pressentiment. Peut être parce que le ciel venait de tempêter, secoué par le grondement du tonnerre, comme l'autre l'avait prédit.
Ou bien parce que Jimin, l'air bien plus sérieux qu'auparavant, lui intimait de se dépêcher afin de ne pas faire attendre le maître.

«-J'espère qu'il ne sera pas trop méchant, tout de même... Jimin se tourna vers lui, son doigt posé sur son menton, une moue boudeuse sur les lèvres; Il semblait de bonne humeur, peut-être qu'il ne te mangera pas! Ce serait chouette... T'as l'air plutôt sympa, pour un humain! »

Taehyung manqua de s'étouffer alors que l'homme-renard s'éloignait nonchalamment en haussant les épaules.
Décidément, il sentait que ce Yoongi-sama n'était pas du genre à plaisanter.

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