Partie 9

Il se jeta sur le canapé après avoir viré veston et cravate. Lilian grimaça, comme s'il s'apprêtait à chialer à nouveau.

« Je vais faire monter des plats du Chinois, proposa Eddy. On s'offrira une jolie petite soirée en amoureux. »

Il prit son amant sur ses genoux. D'abord réticent, Lilian se détendit. Au point de plaquer sur la bouche d'Eddy un ardent baiser. Leurs langues se mélangèrent en proportion de leurs frustrations réciproques. Lilian avait déboutonné la chemise d'Eddy et lui caressait la poitrine. Ces frôlements, ajoutées à la pression des fesses fermes contre ses cuisses provoquèrent chez Eddy un début de bandaison. Le jeune homme se souleva et s'installa face à Eddy, les jambes écartées, de façon à ce que leurs sexes entrent en contact. Puis il fit aller et venir son membre sur celui d'Eddy, à travers la double barrière de coton et de pure laine. Chaque mouvement mettait ce dernier en transe. Conscient de l'effet produit, Lilian déboutonna sa braguette et extirpa d'autant plus facilement sa verge qu'il ne portait jamais de slip. Eddy l'imita. Dans un bel ensemble, les deux hommes se libérèrent de l'entrave de leur pantalon. Ne rencontrant plus aucun obstacle, les sexes dressés se frottèrent l'un contre l'autre. Eddy avait agrippé les frêles épaules de Lilian qui le regardait droit dans les yeux, sans ciller. Il sentait son désir monter au rythme des passages de la trique dure sur son propre membre. Qui de nous deux explosera le premier ? se demandait-il. Il penchait pour Lilian qui tenait moins bien la distance. En effet, de longs jets tièdes aspergèrent son gland et coulèrent le long de sa cuisse. Lilian s'affaissa sur le torse d'Eddy en gémissant. Ce dernier caressa la chevelure bouclée d'une main machinale.

« Mets-moi ! murmura Lilian à son oreille, d'une voix à la fois suppliante et tentatrice. »

Le jeune homme se détacha d'Eddy pour se renverser sur le dos, les genoux relevés dans une posture de total abandon. Eddy contempla un instant le corps à sa merci, puis, saisissant Lilian par les hanches, il orienta son sexe vers la raie où il s'était enfoui tant de fois. L'anus dilaté n'avait nul besoin de lubrifiant. Comme d'habitude, Eddy apprécia le confort de ce trou de balle à la fois sec et moelleux. Il le connaissait par cœur, mais aimait y revenir quand il en avait marre des coups vite faits avec des mecs de hasard. Peut-être un jour épouserait-il Lilian, rien que pour emmerder le vieux Lyme.

Lilian contractait ses fesses pour mieux retenir son partenaire. Il abandonna les poignets d'Eddy auxquels il s'agrippait et se branla avec vigueur ; sa respiration devenait saccadée. 

« Oh ! oui ! oh ! oui, je vais jouir », répétait-il, comme son partenaire lui assénait de grands coups de bite. 

Qu'est-ce qu'il attend ? s'agaça Eddy. Lui-même était sur le point de gicler. Enfin, Lilian se lâcha dans une série de braiments. L'orgasme d'Eddy survint alors, à la manière d'un geyser.

« Ouf ! Ça fait du bien après le stress du boulot et le mail de Grand-papa, soupira-t-il en retirant du cul de Lilian son sexe dégoulinant de foutre. »

Il se laissa retomber de côté. Les tentatives de Lilian de le câliner se heurtèrent à un : 

« Toi, comme crampon...je me demande pourquoi je t'emmène à Grimley.

— Tu as peur de t'embêter, dit Lilian sans sourciller.

— Je pourrais très bien dégoter un mignon petit péquenot »

En même temps qu'il prononçait ces paroles, une image fugace passa devant les yeux d'Eddy : celle d'une silhouette mince avec tout ce qu'il fallait là où il fallait. « En réalité, affirma Lilian avec arrogance, tu te sers de moi pour défier ton grand-père.

— Possible. »

Eddy prit Lilian par le cou et écrasa ses lèvres sur la bouche molle. Au tour de Lilian de se dégager. Visiblement, quelque chose le turlupinait. « Tu vas me présenter à lord Lyme comme ton copain officiel? finit-il par demander.

— Doucement ; avec lui, il faut y aller mollo. Tu seras un ami, c'est tout

— On pourra dormir dans la même chambre, j'espère.

— Je ne pense pas, le vieux est formaliste. Ça ne m'empêchera pas de te rendre visite

— En catimini, soupira Lilian. Eh bien ! Ça va être gai ! »

Eddy se mit à rire.


Selon Al, lord Lyme s'agitait beaucoup trop en prévision du retour de son petit-fils. Il avait fait nettoyer de fond en comble les appartements de l'aile nord. « Edwin aime que tout soit nickel », avait-il expliqué. Il avait offert à Al une superbe chemise de lin jaune malgré les protestations du jeune homme qui lui assurait n'avoir besoin de rien.

« Tu rayonneras comme un soleil, là-dedans », avait dit lord Lyme.

La couleur mettait en valeur sa peau mate et ses cheveux noirs, comme Al put le constater en se regardant dans la glace de sa chambre. À croire que le vieillard voulait le refiler à son Edwin. Mais le fait que ce dernier venait avec un ami rendait cette hypothèse peu probable.

Avant de descendre pour attendre les visiteurs avec lord Lyme, Al ouvrit le premier tiroir de sa table de nuit où il planquait la chevalière de cet individu abject. Il l'avait portée un temps avant de la ranger tant sa vue lui donnait la gerbe. Aujourd'hui, il se sentait détaché.

Debout sur le perron, lord Lyme fixait avidement l'allée par où la voiture remonterait. Il se tenait très droit alors que ces derniers jours, il avait paru se tasser. Un sourire radieux éclairait son visage. Al put mesurer l'amour immense qu'il portait à son petit-fils ; son cœur se serra. Cet Edwin le méritait si peu. Son préjugé défavorable à son sujet était contrebalancé par une certaine curiosité.

Un bruit de moteur se fit entendre.

« C'est lui ! » s'écria lord Lyme, ému.

Ce ronron évoquait à Al un événement désagréable. Les poils de ses bras se hérissèrent. Les sens en alerte, il guetta l'apparition de la voiture. Il s'entendit demander à lord Lyme quelle en était la marque.

« Une Jaguar », répondit celui-ci d'un ton joyeux.

À ce nom, Al faillit tomber dans les pommes. La Jaguar. Ce ne pouvait être une coïncidence. Il ferma les yeux pour ne pas voir déboucher l'engin de derrière les bouleaux. Il naviguait en plein cauchemar. Le crissement des pneus sur les petits cailloux, le contact coupé, les portières claquées et par-dessus tout, cette voix qu'il conservait intacte dans sa mémoire, chaude et envoûtante.

« Vous avez l'air de péter la forme, Grand père.

— Oui, je vais mieux, Dieu merci. Je regrette de t'avoir dérangé pour rien. »

Il pense le contraire, se dit Al. À quel jeu joue-t-il ? Il souleva les paupières et vit Eddy. Ce salaud n'avait pas changé en un an, toujours aussi blond et athlétique. L'homme à ses côtés lui parut hautain et antipathique. Il observait Al comme s'il s'était agi d'une merde.

« Lilian Croft, mon ami, dit Eddy négligemment.

— Enchanté, monsieur, fit lord Lyme après avoir détaillé le gus de haut en bas. Edwin, je te présente Albert, mon secrétaire. Albert, voici Edwin Merinvale, mon petit-fils.

Leurs regards se croisèrent pour la première fois, sans qu'Eddy marque d'émotion. Al, de son côté, s'efforçait de discipliner le désordre de ses pensées.

« Un secrétaire ? répéta Eddy d'un ton machinal.

— Oui, il met au net mes mémoires pour la postérité.

— Ah ! Parfait. »

Délibérément, Al ignora la main tendue qui retomba le long du corps. Eddy fronça les sourcils mais ne releva pas l'impair. Al avait du mal à endurer son odieuse présence. Comment ce type pouvait-il être le petit-fils de lord Lyme, ce vieil homme plein de bonté ? Une nœud s'était formé dans sa gorge et l'étouffait. Toujours au mépris de la politesse, il tourna les talons et se précipita à l'intérieur de la maison.


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