Concours Illusion Du Passé #1

Voici mon texte pour le premier concours Illusion du Passé d'AileduDragon

La pénombre laissa place aux chauds rayons de l'aube. Le soleil, en se levant, caressait de ses doigts doux la nature toute entière, ranimant les êtres vivants qui sortaient de leur sommeil profond. Petit à petit, les animaux engourdis sortaient de leurs terriers, de leurs couches, de leurs nids, et commençaient à s'éparpiller dans la vaste plaine. Une petite brise fraîche et agréable chatouillait les arbres, faisant bruisser les feuilles vertes. Une nouvelle journée tranquille venait de débuter.

Plus loin, un ruisseau à l'onde calme et chantante étendait son cours à travers des bosquets et des prairies. De gracieux saules pleureurs courbés par les années, mais encore vigoureux, encadraient son cours, trempant leurs longs bras dans la rivière. Un aulne valétudinaire, dont l'écorce fissurée était recouverte de caprifoliacées fleuries, s'élevait et projetait son ombre sur l'eau fraîche et pure. Ce matin-là, alors que l'astre divin commençait sa course céleste, la surface du cours d'eau se troubla, et six nymphes émergèrent du milieu de la source.

- Il est temps de se lever, mes sœurs, le soleil nous a déjà devancé. La nature nous attend. Allez, venez!

Elles sortirent gracieusement de l'eau, leur chevelure ruisselante brillant dans la lumière qui les enveloppait. Toutes les six étaient des naïades, divinités de l'eau aux pieds légers et aux mains magiques. Elles avaient pour mission de s'occuper d'une portion du monde, un espace qui s'étendait à six kilomètres de la source de leur ruisseau. Elles devaient soigner les arbres, nourrir les animaux, s'occuper des moissons, élever les jeunes oiseaux, et ainsi de suite. Elles avaient de la chance, les humains n'avaient pas encore découvert leur territoire. Ailleurs, cette espèce qui se croyait supérieure aux autres avait coupé les arbres, chassé les animaux, bouché les cours d'eau. Ces derniers étaient essentiels à la survie des naïades, qui ne pouvaient pas vivre sans eau fraîche et propre.

Mais, pour le moment, tout allait bien. La journée s'annonçait belle. Le travail fut amorcé rapidement, et, au cours de la matinée, la nature s'épanouit sous les doigts fleuris et agiles des nymphes, qui mettaient toute leur énergie dans leur tâche.

La première alerte arriva vers le milieu de la matinée. Un tremblement minime fit tomber quelques feuilles d'arbres, avant de s'intensifier progressivement, croissant en vigueur et en magnitude, ébranlant la terre, et avec elle tout ce qui se trouvait dessus, secouant le sol comme un tapis que l'on agite dehors pour se débarrasser de la poussière. Des arbres s'écroulaient, les rivières bouillonnaient, la terre était creusée de profonds sillons, des crevasses s'ouvraient, caverneuses et hideuses. Le paysage entier fut défiguré en un instant.

Les naïades se regardèrent, effarées. Leur monde parfait venait de s'écrouler en très peu de temps. Leur chère nature, qu'elles avaient passé des jours, des semaines, des mois, des années à soigner, venait d'être détruite. Mais elles ne restèrent pas longtemps inactives. Même si la forêt, la plaine, le ruisseau semblaient ruinés, elles pouvaient encore réparer les dégâts. Elles se mirent à l'œuvre, usant de leur pouvoir sur la nature pour faire renaître des pousses, boucher des crevasses, refleurir des plantes. Elles replacèrent le cours d'eau dans son lit, relevaient les arbres, recouvraient la terre nue d'une nouvelle couche d'herbe fraîche et luxueuse.

Après plusieurs heures, le paysage avait repris une forme acceptable. Le travail des nymphes avait été un succès; tout doucement, la nature guérissait.

Mais, au moment où le dernier arbre venait d'être remis sur pied, une onde sonore se propagea dans l'air. Dans le ciel apparurent des météores brillants, roches enflammées qui tombaient de l'éther, se dirigeant vers la terre à une vitesse prodigieuse. Les nymphes n'eurent le temps que de se mettre à l'abri dans une grotte avant que la pluie d'astéroïdes ne rencontre la surface dure et rigide de la terre.

Ce fut un désastre.

Des cratères s'ouvrirent partout, la terre n'était plus qu'un champ de bataille pilonné par les aérolithes. Les champs étaient criblés de trous, les arbres étaient fauchés, Une chaleur intense se dégagea, et les flammes lancèrent leur combat contre la nature. Elles couraient comme des lévriers orange dans les prairies, ne laissant qu'un sillage noir et fumant derrière elles. Les forêts s'embrasèrent comme des torches, crépitant et craquant, grésillant et éclatant, toute forme d'humidité s'évaporant instantanément sous l'action du brasier. Après peu de temps, tout le paysage n'était qu'un tas sombre, sec et brûlant.

Les nymphes prirent connaissance de ce paysage alors qu'elles sortaient de la grotte. Même si elles avaient vu de nombreux désastres avant, c'était le plus grand cataclysme auquel elles avaient assisté. La nature n'était pas que détruite, tout était rasé. Ce qui avait survécu aux météorites avait été anéanti par le feu. Il allait falloir remettre la terre en place, semer de nouvelles plantes, prendre soin de nouvelles pousses, creuser de nouvelles sources. Au moins, s'il y avait une seule consolation, c'était que les restes de la nature d'avant, toutes ces cendres, seraient fertiles, et permettrait une croissance plus rapide et féconde.

Les six Naïades étaient graduellement rejointes par d'autres nymphes, dont les habitats avaient aussi été ruinés. Petit à petit, leur nombre grandit, elles formaient un groupe à la taille imposante. Ça allait être à elles de reconstruire le nouveau monde, en unissant leurs forces, elles pourraient atteindre ce but.

C'est alors qu'une vision les pétrifia. Encore plus que le tremblement de terre, encore plus que les météorites et le feu, ce qu'elles voyaient les figeait d'appréhension, de peur, d'effroi.

Au loin, silhouettée contre l'horizon, une rangée de bulldozer avançait.

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