-Chapitre 73-
Félix et Lisa étaient partis à cheval. La jeune fille avait troqué sa robe de tissu fin contre un pantalon large aux cuisses et resserré aux chevilles, des boots de cuir marron, et une chemise fluide ouverte sur sa gorge. Elle avait remonté ses cheveux en un chignon coiffé décoiffé, et avait enfilé une petite sacoche de cuir brun en bandoulière.
Ils n'avaient qu'un cheval pour deux, alors elle était montée derrière Félix qui dirigeait le cheval sur les sentiers de terre.
Lisa avait emporté les notes de Hyunjin, ainsi qu'une boussole et une gourde d'eau, et deux petits pains ronds et dorés enveloppés dans un linge.
Ils se dirigèrent vers la grotte à l'est du village, prenant bien soin de ne pas se rapprocher trop près des grands sentiers, préférant couper par les champs et rester à l'abri des regards.
Ils mirent plus de quatre heures à rejoindre les bords de la rivière, et Félix proposa de descendre du cheval pour qu'il puisse s'abreuver, et qu'eux même puissent se dégourdir les jambes et terminer le trajet à pied.
Lisa accepta. Elle n'était pas très difficile à vivre et de bonne compagnie, mais on sentait qu'elle avait été tenue à l'écart de tout. Néanmoins, elle connaissait tous les secrets du Roi, ainsi que l'existence de la Terre et des missions pour s'y rendre.
— Raconte-moi ton voyage... souffla-t-elle avec curiosité.
— Il y a un peu plus d'un an, nous avons été envoyés sur Terre afin de piller certaines ressources... des vivres, des tissus, de l'énergie, mais aussi des matériaux, des médicaments... bref, tout ce qui aurait pu être bénéfique pour Métrarth.
— Pourquoi ne pas avoir mis la communauté au service de la fabrication ? demanda Lisa.
— Quoi ? grimaça Félix.
— Oui, les habitants auraient pu se charger de faire plus de nourriture, de cultiver davantage, avec de nouveaux procédés, d'inventer de nouveaux médicaments... ils avaient déjà ceux de la Terre, il suffisait de les reproduire en prenant exemple sur leur formule, pourquoi les voler ?
— Oh, parce que le Roi... notre bon Roi s'imagine qu'il est plus simple de piller que de mettre la communauté au courant des avancées technologiques... répondit Félix en enjambant les hautes herbes qui bordaient la rivière.
— Il en est toujours au même point qu'il y a vingt ans... souffla-t-elle. Il n'a pas évolué... il veut garder la population sous contrôle... mais il va faire mourir cette planète si nous ne nous étendons pas davantage.
— Je le sais... enfin, je l'ai compris il y a peu.
— C'est le voyage qui t'a ouvert les yeux ?
— Oui, et j'ai appris à développer des sentiments... ça a tout changé.
— Je comprends... mon père était comme ça... il m'a appris.
— Alors tu avais des sentiments et des émotions depuis toute petite ?
— Oui, mais bien moins développé que les tiennes. J'étais seule avec lui, je n'ai vu personne d'autre durant des années.
— Mais tu étais libre. Et ça, ça change tout.
— La liberté a un prix, Félix.
— Lequel ?
— Il faut te battre pour l'obtenir... le Roi ne cèdera jamais... à cause de sa femme.
— Sa femme ? questionna-t-il.
— Oui... quand j'étais petite, le Roi faisait beaucoup de voyages sur Terre... mon père l'a accompagné plus d'une fois. Il a rencontré sa femme là-bas... je sais qu'ils étaient très amoureux, et qu'ils ont eu Hyunjin... le Prince. Enfin, c'est l'histoire que mon père m'a racontée... Mais durant l'accouchement, la mère de Hyunjin a perdu la vie... et le Roi est remonté seul sur Métrarth avec un enfant qu'il a toujours vu comme le responsable de la perte de sa femme...
— Oh...
Félix ignorait cette histoire, et il ne savait pas très bien s'il croyait la jeune fille, néanmoins, il l'écoutait attentivement.
— Je crois que le Roi a fait taire ses sentiments... parce qu'il avait trop de peine d'avoir perdu sa femme... depuis il maudit les Terriens, et il refuse que nous développions des émotions au risque de ne plus rien maitriser.
— Je crois que tu as un regard sur les choses étonnant, Lisa... répondit Félix. Tu as surement vu juste... nous allons devoir éliminer le Roi, nous n'avons pas le choix.
Ils marchèrent encore une petite heure jusqu'à arriver aux abords d'une gigantesque cascade au milieu d'une dense végétation.
— Je n'étais jamais venu ici... je ne connaissais pas cet endroit, avoua-t-il.
— C'est normal, c'est assez loin du village, et les Métrarthiens s'aventurent rarement aussi loin dans la forêt.
— Tu crois que l'entrée de la grotte est derrière la cascade ?
Lisa se mit à sourire de façon beaucoup plus séductrice que depuis leur rencontre, et elle s'assit sur un rocher pour ôter ses chaussures.
— Je crois qu'il n'y a qu'un seul moyen de le savoir...
Elle ôta son pantalon, dévoilant de longues jambes fuselées, et déboutonna sa chemise qu'elle laissa tomber au sol. Elle ne portait plus qu'une sorte de petite culotte nouée par des cordons sur les côtés de ses hanches, sa poitrine restant à nu. Puis sous le regard de Félix, elle plongea dans l'eau profonde, mais claire, et remonta à la surface en riant.
— Allez, viens !
Félix n'avait jamais vu d'autres filles nues qu'Irène. Il était subjugué parce que Lisa était très jolie et vraiment attirante. Cependant, elle ne dégageait rien en rapport avec Irène, et la voir ainsi lui rappela qu'une femme l'attendait. Son cœur se serra, et il ôta ses propres vêtements pour la rejoindre.
Ils nagèrent jusqu'à la cascade, puis accédèrent à l'autre côté. Félix grimpa sur une roche, et découvrit un petit passage menant à une grotte sous la montagne. Il tendit la main à la jeune fille qui le rejoignit, et ils suivirent le chemin jusqu'à une grande pièce humide et sombre. Dans un petit coin se tenait un coffre de bois vermoulu. Félix souleva le haut du coffre, et trouva une pochette de cuir qu'il attrapa et ouvrit. À l'intérieur, un flacon de verre renfermait un liquide bleu clair. Il le repositionna dans la pochette, et regarda Lisa.
— Il avait raison... il est bien là.
— Alors, ne perdons pas de temps... il faut aller à la base.
Le temps qu'on arrive, il sera presque deux heures du matin, ce qui nous laisse le temps de finaliser la formule et de rentrer.
— Et ensuite ? demanda Félix apeuré.
— Ensuite ?
— Oui, qu'est-ce qu'on fera ? Est-ce qu'il faut qu'on traque Yeong-Jin et qu'on se jette sur lui pour lui injecter le sérum ? Et après ? Les gardes ne suivront jamais...
— Il faut qu'on en parle avec Hyunjin, mais j'ai une idée...
**
— Quoi ?!! Non, c'est pas possible !!! gémit Jungkook dans un cri désespéré. Fais quelque chose !
Minho l'attrapa de nouveau sous les aisselles pour le faire reculer du corps inerte de Taehyung, alors qu'il se débattait sauvagement.
Jin, Hoseok, Yoongi et Wonyoung éclairaient la pièce de leurs téléphones, alors que Hatsue rapportait une chandelle qu'elle posa sur la commode. Sun-Kyung se réveillait doucement, tandis que Jin s'agenouillait à ses côtés pour l'aider à reprendre ses esprits.
— Putain de merde, faites quelque chose !!! s'époumona Jungkook le regard affolé et le teint livide.
Namjoon restait bouche bée devant Taehyung dont il tenait la main sans qu'il ne parvienne à se réveiller. Il lui donna quelques légères claques sur les joues, mais sans succès, le corps du plus jeune resta inanimé.
— Putain, mais t'es médecin, oui ou merde !!!!! tempêta Jungkook en le regardant d'un air désespéré, son souffle ne parvenant plus à atteindre ses poumons.
— Je...
Jungkook parvint un instant à se défaire de Minho, et attrapa la main de son aîné, les larmes ravageant ses joues.
— J't'en prie, hyung... sauve-le... le laisse pas mourir...
Minho le fit reculer, et avec toute sa force, l'entraina en dehors de la chambre et ferma la porte derrière lui.
Namjoon regardait dans le vague, n'entendant que les battements de son propre cœur, la situation étant beaucoup trop stressante et chaotique pour qu'il parvienne à reprendre ses esprits. Néanmoins, il sentit une claque sèche et vive lui brûler la joue, quand les petits yeux noirs de Yoongi se posèrent dans les siens.
— Putain fais quelque chose ! Réagis !
Namjoon secoua la tête vivement et posa ses yeux sur le corps de Taehyung, avant de prendre les devants. Il desserra le col de sa chemise, ôta sa ceinture, et déboutonna son haut pour accéder à sa poitrine. Il vérifia son pouls inexistant, et commença les compressions sur son torse, avant de se pencher pour souffler dans sa bouche, prenant bien soin de renverser sa tête vers l'arrière. Il recommença plusieurs fois, ses genoux le blessant contre le parquet de la chambre, et son souffle s'amenuisant à mesure de l'effort. Et au bout de presque une minute, l'oxygène s'engouffra de nouveau dans la cage thoracique de Taehyung, qui posa ses yeux gris sur Namjoon en tremblant de peur.
— C'est bon, c'est bon... prends le temps... j'suis là... souffla-t-il en le prenant dans ses bras.
Les autres, qui avaient retenu leur souffle, laissèrent éclater leur soulagement, tandis que Yoongi se jetait sur Namjoon pour l'enlacer.
— Putain, merci... merci, t'es un héros...
Wonyoung ouvrit la porte et interpella Jungkook qui donna un coup d'épaule à Minho et se jeta à genoux aux côtés de Taehyung. Il attrapa son visage entre ses paumes et éclata en sanglots.
— Hyung... putain de merde, hyung, j'ai eu si peur... ne refait jamais ça !!! Tu entends ?!
— Laissons-les... souffla Hoseok.
Jin aida Sun-Kyung à se relever et tout le monde sortit de la chambre pour laisser les deux amoureux ensemble. Jungkook serrait le corps de son petit ami contre le sien vraiment fort, assez fort pour qu'il émette une réserve et souffle :
— Tu m'écrases, je vais étouffer...
— Pardon ! lâcha Jungkook en se reculant.
Il renifla, et contempla son visage fatigué toujours entre ses mains. Les cernes avaient creusé ses yeux couleurs de pluie, et son teint était aussi terne qu'une vieille feuille de papier journal. Ses membres tremblaient, et il était gelé.
— Il faut que tu manges ! Attends ! s'empressa-t-il de dire en se levant.
Il récupéra la couverture sur le lit et enroula son corps dedans, avant d'embrasser sa joue.
— Ne refais jamais ça... tu m'entends ?
— Oui... c'est promis...
— Je refuse que tu sauves encore des gens si c'est pour te mettre en danger, c'est clair ?
— Oui...
— Je t'aime hyung... n'écourte pas le temps qu'il nous reste... je n'aurais jamais dû partir, tout à l'heure.
— Ce n'est rien, je comprends que tu sois sous pression, on l'est tous...
— Non... à partir de maintenant, je refuse de te quitter, ne serait-ce que quelques secondes.
Taehyung esquissa un sourire fatigué et posa sa tête contre l'épaule de Jungkook.
— Alors ça veut dire que tu vas me suivre partout ?
— Partout !
— Vraiment partout ?
— Oui ! Partout !
— Mais partout, partout ?
— Hyung !!!! râla Jungkook.
— Pardon...
Jungkook embrassa le bout de son nez et l'aida à se redresser et à s'allonger sur le lit. Il rabattit les couvertures sur lui, et caressa ses cheveux.
— Je vais te ramener à manger... reste ici.
— Mais ce n'est pas mon lit.
— On s'en fiche de ça, hyung. Je vais prévenir Hatsue... tu vas dormir ici, tu as besoin de repos.
Il embrassa sa tempe et s'éclipsa jusqu'à la cuisine. Leur hôte avait disposé des bougies un peu partout dans l'appartement afin de les éclairer, et Jungkook ouvrit le réfrigérateur pour constater qu'il n'y avait plus de lumière. Vivre en 2023 sans électricité, c'était vraiment compliqué.
— Hatsue...
— Oui mon garçon ?
— Est-ce que Taehyung peut dormir dans ton lit ? Juste pour cette nuit, il est épuisé après ce qu'il a traversé.
— Bien sûr, ne t'en fais pas... prenez le lit, je dormirais dans le salon. Et puis je vais essayer de joindre la base pour avoir des informations, alors je risque d'être éveillée très tard, autant que vous en profitiez.
— Merci... souffla-t-il. Est-ce que je peux prendre quelque chose à lui donner à manger ?
— Oui, attends !
Elle le poussa légèrement pour accéder au réfrigérateur, et sortit tout un tas de nourriture froide qui ne nécessitait pas de cuisson.
— Il faudra s'en contenter, nous n'avons plus de micro-ondes ni de four.
— Ne t'inquiète pas, ça ira très bien.
Jungkook subtilisa un plateau et installa la nourriture dessus. Il y avait là des œufs durs, des samak kimbap, des biscuits, un yaourt à la vanille, et avant de s'éclipser vers la chambre, il attrapa le sachet de pain de mie et la confiture de fraises.
En passant devant Sun-Kyung, il lui délivra un sourire désolé, mais ne s'attarda pas sur son cas. Elle était très gentille, et elle devait certainement vivre un moment compliqué si elle se souvenait de tout. Mais il n'y avait plus vraiment de place pour les états d'âme et la politesse. Jungkook avait fait son choix. Taehyung avait besoin de lui, il l'aimait, c'était de lui qu'il voulait prendre soin. Alors elle attendrait.
Il se faufila dans la chambre, essayant de ne rien heurter dans le noir, et Taehyung éclaira son passage à l'aide de la lampe torche de son téléphone. Il posa le plateau sur le lit et grimpa aux côtés de Taehyung.
— J'ai vu avec Hatsue, on peut rester ici cette nuit. En revanche, il n'y a qu'un repas froid, tu as fait disjoncter tout le quartier ! plaisanta-t-il.
— J'ai cru comprendre, oui... ça ira, je n'ai pas très faim, déclara-t-il en regardant le contenu du plateau.
— Ah non ! Kim, tu vas manger, tu as besoin de forces ! gronda Jungkook en lui préparant une tartine de pain de mie à la confiture.
Ils dînèrent en tête à tête, à l'écart du reste du groupe. Bien sûr, Taehyung avait besoin de repos et de calme après ce qu'il avait traversé, mais il y avait aussi en eux, l'envie de s'isoler et de passer du temps rien qu'à deux.
Jungkook était épuisé, également. La peur de perdre prématurément son petit-ami avait retourné toute son âme et il se rendait compte d'à quel point tout cela allait être compliqué et douloureux le moment venu.
Des questions auxquelles il n'avait pas encore pensé fleurissaient dans son esprit et lui filaient la nausée. Est-ce que ce serait long ? La comète n'allait pas tout souffler sur son passage en une seconde, le processus prendrait certainement plusieurs minutes. Plusieurs minutes durant lesquelles il aurait tout le loisir de se voir mourir, et d'en faire de même pour Taehyung. Imaginer Taehyung perdre la vie devant ses yeux lui était une pensée insoutenable.
Une fois qu'ils eurent grignoté, Jungkook posa le plateau par terre, au pied du lit, et souleva les couvertures pour se glisser à l'intérieur. Le corps de Taehyung peinait à se réchauffer, alors il se lova contre lui, et caressa son ventre en embrassant son cou.
— Dors, maintenant... il est tard.
— Je n'ai pas sommeil.
Jungkook claqua sa langue contre son palais, et dans la nuit, resserra son étreinte sur son corps, collant son torse au dos de Taehyung.
— Tu mens, Kim. Je sais que ce genre de pratique te fatigue, alors repose-toi... s'il te plait...
— D'accord...
**
— Est-ce que tu veux en parler ?
— J'en sais rien...
— Tu as l'air secoué, quand même... déclara Jin à Sun-Kyung. Ce serait peut-être bon de te libérer de tout ça.
— Je ne sais même plus ce qui est vrai, de ce que j'ai inventé... je ne fais plus la différence entre la réalité, et mes souvenirs ou ce que mon cerveau invente... je suis totalement perdue.
— Pourquoi ton cerveau aurait inventé quoi que ce soit à ce sujet ? demanda-t-il en s'asseyant sur le sofa à côté de la baie vitrée du salon.
Sun-Kyung observait les étoiles, et au milieu, ce petit point plus brillant que les autres.
— Tu sais que demain, elle sera encore plus proche ? On la verra même en pleine journée...
— Je sais... enfin, j'imagine.
La lèvre inférieure de la jeune fille tremblait légèrement, et ses prunelles humides contemplaient sans relâche les cieux à la recherche d'une réponse à toutes ses questions.
— Est-ce que c'est... effrayant ? demanda-t-il.
— Prodigieusement effrayant.
— Raconte-moi...
— Pourquoi ?
— Parce que je n'ai rien d'extraordinaire dans ma vie... j'ai quitté mes parents... je vivais avec eux depuis mon enfance. J'ai toujours été aimé et choyé par ma mère et mon père... je faisais des études et je travaillais dur pour obtenir un bon poste... j'ai un peu négligé ma vie sentimentale au profit de mes études, mais j'ai toujours eu de bons amis autour de moi... souffla-t-il en balayant la pièce du regard. Pourtant, je me sens vide...
— Vide ?
— Oui. Je n'ai jamais connu un amour passionné. Celui de Taehyung et Jungkook me fait envie... ils s'aiment tellement. Ou encore Yoongi et Jimin. Tu ne les as jamais connus ensemble, mais je t'assure que c'est vraiment beau. Yoongi a tenu plus de trois ans...
— Comment ça, il a attendu ?
— Lorsqu'il a rencontré Jimin, il a tout de suite su que c'était lui. Et pendant trois ans, il n'a jamais détourné les yeux de lui... il l'a aimé comme chacun de nous aimerait être aimé un jour... et il l'a sauvé, au détriment de sa propre vie... il s'est sacrifié.
— Il a fait ça ?! s'étonna la jeune fille.
— Oui. Il n'y avait qu'une seule place dans la navette pour Métrarth lorsque Félix et Irène sont rentrés chez eux... alors il a contraint Jimin à monter. Il devait rencontrer le Roi, mais finalement, c'est Jimin qui est là-haut. Alors peut-être que Yoongi va mourir, comme nous tous, mais il aura au moins le cœur léger, parce que celui qu'il aime est sain et sauf. Il vivra... expliqua-t-il en laissant son regard contempler son ami.
Yoongi était attablé avec Namjoon, et tous les deux buvaient une bière en discutant à la lueur de la flamme de la bougie.
— Je l'envie... j'envie son courage. En fait, j'envie chacun d'eux.
— Toi aussi tu as ta place parmi eux, murmura Sun-Kyung.
— Non. Yoongi a un courage que je n'aurais jamais... une force de caractère. Namjoon il... c'est Namjoon quoi... il est presque médecin, et ce soir, il vient de sauver la vie de Taehyung. Hoseok, il est encore peu sûr de lui, mais il a cette chaleur et cette bienveillance qui fait de vous un ami heureux. Lorsque vous êtes ami avec Hoseok, vous êtes forcément heureux à ses côtés, parce qu'il fera tout pour que vous soyez épanoui. Jungkook... Jungkook est le plus fort d'entre nous... psychologiquement j'entends. Il a perdu ses parents et sa petite amie dans un accident de voiture. Il a eu beaucoup d'opérations du genou, et malgré ça, il a rencontré Taehyung... et depuis qu'il le connait, il prend soin de lui chaque jour, comme la prunelle de ses yeux. Cette rencontre l'a ouvert et l'a adouci. Et Taehyung... il est... particulier... unique, et exceptionnel... il ne ressemble à personne ici, et je suis convaincu qu'il était la bonne personne pour Kook.
— Et toi ?
— Quoi, moi ? demanda Jin.
— Toi, tu es... qui exactement ?
— J'te l'ai dit... un étudiant qui ne pourra jamais exercer. Je n'ai ni petite-amie ni particularité exceptionnelle... seulement un destin tragique.
— Ne dis pas ça.
Jin esquissa un sourire, et tourna le regard vers elle.
— Et toi ? Qui es-tu vraiment, Sun-Kyung ?
De nouveau, les yeux de la jeune femme s'embrumèrent, et elle resserra le châle posé sur ses épaules.
— Je ne suis pas certaine.
— Essaye... intima doucement Jin.
Elle prit une grande inspiration et s'installa à côté de lui, son épaule touchant la sienne. Elle cala timidement ses mains entre ses cuisses, et observa les autres discuter et rire ensemble.
— Je crois... je crois que j'étais une enfant heureuse. Je me contentais de peu, de bonheurs simples et de la présence des gens que j'aimais. J'ai toujours beaucoup aimé les animaux, parce qu'ils sont plus fidèles que les gens... plus francs, et plus doux, aussi. Je crois que c'est pour ça que je suis devenue vétérinaire. Quand j'ai emménagé à Busan avec mes grands-parents, suite à mon agression à Séoul, j'étais plutôt renfermée. J'avais du mal à parler, à m'ouvrir aux autres, et je restais souvent seule au lycée. Alors un jour, mon grand-père a garé sa vieille camionnette dans l'allée de la maison, et il en a sorti un carton qu'il m'a tendu. Je me rappelle que c'était un jour d'été, ou de printemps... le soleil se couchait sur la mer, et le ciel était orangé. Il faisait bon, et c'était un jour heureux, malgré mon moral en berne. Quand j'ai ouvert le carton, j'ai vu ce petit chiot, avec ses grands yeux et son air perdu... et j'ai fondu en larmes.
— Tu étais ému qu'on t'offre un chien, c'est normal. Les chiots font toujours cet effet.
— Non. J'étais triste... affreusement triste, parce que dans ses yeux, il était effrayé. Il avait été arraché à sa famille, à sa mère, et il n'avait plus personne... exactement comme moi. Peu à peu, on a appris à se connaitre, et Geppetto est devenu mon meilleur ami. Il m'a aidé à faire face à ce trou, qui était là, en plein milieu de ma vie. J'avais été droguée, et je ne parvenais pas à me souvenir ce que j'avais vécu.
— Et aujourd'hui ?
— Aujourd'hui j'ai retrouvé les pièces manquantes de mon puzzle...
— Est-ce que c'est agréable ? D'enfin avoir une vision globale sur ta vie ? Ou est-ce que finalement, l'histoire que tu as découverte ne te convient pas ?
Une larme roula sur la joue de Sun-Kyung, et mourut sur ses lèvres.
— C'est plus compliqué que ça... je suis enfin complète... mais j'ai mal.
— Pourquoi ?
— Parce que je sais ce que c'est d'aimer de la même manière que Jungkook aime Taehyung.
— C'est plutôt un sentiment agréable, l'amour, non ?
— Oui. Mais là c'est effrayant. C'est trop intense, trop violent... si je me trouvais devant Hyunjin, j'aurais l'impression de le connaitre parfaitement, et en même temps, de faire face à un étranger. Nous ne nous sommes pas vus depuis des années, et pourtant j'ai des souvenirs très intimes avec lui. J'ai le souvenir de lui avoir confié ma vie, et mon cœur... mais de l'avoir perdu aussi vite que je l'avais trouvé.
— Je comprends... j'aimerais te dire que tu vas le revoir, mais je n'ai aucune certitude. Ce doit être très déstabilisant d'attendre si intensément de revoir quelqu'un, sans être sûr que cette rencontre va aboutir, mais tu dois garder espoir, et-
— Non. Tu ne comprends pas... je n'ai pas fait ça pour espérer le revoir... j'ai fait ça pour moi, parce que j'avais besoin de me retrouver, d'enfin savoir qui j'étais vraiment. Je n'attends rien de ces prochains jours... je n'espère rien. Mon bonheur a déjà eu lieu par le passé, à moi d'en faire le deuil.
— Alors... pourquoi tu pleures ? demanda Jin sans comprendre vraiment les sentiments de Sun-Kyung.
— Je pleure parce que je ne suis plus une étrangère pour moi-même... parce qu'enfin je peux mourir en sachant qui je suis.
**
Lisa et Félix avaient repris la route pour la base, le flacon de sérum enfermé dans la petite trousse de cuir. Ils n'auraient pas de deuxième chance, ils devaient parvenir à s'introduire dans le laboratoire, à finaliser la formule, et à l'ajouter à une seringue. Ensuite, ils rejoindraient Hyunjin et tous les trois, ils devraient s'introduire chez le Roi lorsqu'il serait endormi de préférence, afin de lui injecter le liquide bleu. Si ce plan ne fonctionnait pas, alors il faudrait se rendre à l'évidence, il n'y aurait plus aucun espoir pour la Terre et les êtres qu'ils aimaient restés là-bas. La seule et dernière solution serait de sauter dans une navette, et d'aller eux-mêmes les chercher, en espérant pouvoir à nouveau atterrir sur Métrarth à leur retour. Mais si Yeong-Jin était toujours en possession de ses moyens à ce moment-là, il y a fort à parier que jamais il ne les laisserait atterrir une nouvelle fois, et les laisserait périr dans l'espace. L'occasion serait trop bonne pour lui.
Ils chevauchèrent un moment, jusqu'à ce que le ciel se couvre, et que le vent se lève. La température frôla le négatif, et alors qu'ils se rapprochaient de la base, Félix émit une réserve.
— Il faut trouver une autre entrée, on doit être recherché, les environs doivent être surveillés.
— Il y a la porte à l'ouest.
— À l'ouest ?
— Oui, le deuxième poste avancé.
— Tu connais beaucoup de choses secrètes ici...
— Mon père a travaillé avec le Roi... il était son conseiller personnel. J'étais petite, mais j'ai grandi avec toutes ses histoires... il a voulu me les raconter, pour que je puisse me tenir prête le jour où j'en aurais besoin.
— Ton père savait qu'un jour, tu serais mené à te rebeller contre le Roi ?
— Oui... il lui a été fidèle très longtemps, jusqu'à découvrir la supercherie. Lorsqu'il a pris connaissance de la base et de tout ça, Yeong-Jin a essayé de le tenir avec les voyages sur Terre... il l'accompagnait partout, et comme il était aux premières loges et qu'il lui donnait l'impression d'être important, il avait son silence. Mais mon père n'a jamais voulu ça pour la population... il était profondément bienveillant, et il estimait qu'il y avait une meilleure façon de gouverner.
— Je ne l'ai pas connu, mais j'aurais beaucoup aimé ton père... personne ne revient indemne d'un voyage sur Terre.
Félix se tut un instant, et Lisa demanda :
— Tu crois que les autres Métrarthiens qui ont été envoyés sur Terre et qui vont revenir vont avoir changé eux aussi ?
— J'imagine... comme je disais, on ne revient pas indemne d'un voyage sur Terre. Mais il y aura des dizaines et des dizaines de navettes... alors le temps que tout le monde arrive et rentre chez soi, il y aura certainement une grande fête.
— Pourquoi tes amis ne montent pas dans une autre navette pour rentrer avec les autres ? questionna Lisa.
— On y a pensé... sourit tristement Félix. Mais c'est compliqué... ils doivent rejoindre un autre pays, mais surtout, convaincre les Métrarthiens déjà présents et les gardes de les laisser monter à bord.
— Parfois, il faut savoir se battre... souffla-t-elle.
— Je sais... mais je refuse que l'un d'entre eux soit blessé, où que les gardes préviennent le Roi... que ça fasse tout capoter, et qu-
— Capoter ?
Félix lâcha un rire clair.
— Tu n'es jamais allée sur Terre, toi...
Tout ça lui faisait penser à Jimin. Il espérait que le jeune garçon allait bien, mais ne pouvait pas en être certain. Tant qu'ils n'auraient pas réussi à intercepter le Roi, ni lui ni Hyunjin ne pourrait lui venir en aide.
Ils arrivèrent aux abords d'une montagne gigantesque, avec en son pied, une seule et unique porte. Certainement des escaliers, ou un couloir, devait mener aux souterrains.
Par chance, même si la zone était délimitée par un grillage, il n'y avait que deux gardes devant cette porte. Certes, armés, mais s'ils réfléchissaient correctement, ils devraient s'en sortir aisément.
Il jeta un regard en coin à Lisa, et reporta son attention sur les deux hommes au loin, dont la fatigue semblait avoir pris possession.
L'un d'eux titubait maladroitement, alors que l'autre était appuyé contre le mur. Personne ne passait par ici, l'entrée principale étant de l'autre côté, à des kilomètres. Alors ce poste devait être vraiment ennuyeux, pensa Félix.
Il tourna le regard vers Lisa, et lui fit un grand sourire. Elle mit quelques instants avant de saisir le message, puis se mit à rougir légèrement, avant d'esquisser à son tour un sourire joueur. Elle descendit de cheval avec l'aide de Félix, et il l'imita, attachant son cheval un peu plus loin. Alors qu'il contournait le grillage, Lisa derrière lui, il lui fit la courte échelle afin qu'elle atteigne l'autre côté, et lui se contenta d'escalader.
Dans sa démarche se voulant virile, il déchira sa chemise, et s'égratigna le flanc, réprimant un cri de douleur. Un filet de sang coula le long de sa taille, mais il n'y prêta pas attention. Si Félix paraissait concentré, et qu'il se permettait de sourire et de faire de l'humour, il n'oubliait pas Irène. C'était pour elle, pour eux, et pour tous les innocents qui allaient périr sur Terre qu'il faisait ça. Elle lui manquait, et à sa façon Lisa lui rappelait Irène. Elle était douce et fine, comme elle.
Ils avancèrent le long de la montagne, et gagnèrent l'arrière du poste de surveillance. Alors qu'il lui indiquait d'un signe de tête qu'il était prêt en ramassant une grosse pierre sur le sol, elle s'avança en direction des deux gardes avec assurance. Félix sentait son cœur battre à tout rompre, son sang bouillait dans ses veines, et sa respiration se précipita.
— Hey !!! Vous !!! héla le garde en remontant son arme en direction de la jeune femme.
— Bien le bonjour messieurs ! dit-elle de façon claire.
— Qu'est-ce que vous faites ici ?! C'est formellement interdit aux habitants ! Retournez au village !!
— Eh bien c'est-à-dire que j'ai besoin de vous...
— Quoi ?!
— Je revenais des champs quand mon cheval est devenu incontrôlable... il est parti au galop et il m'a éjecté un peu plus loin... je me suis réveillée il y a peu, mais il semble s'être coincé entre des roches par-là, expliqua-t-elle en montrant du doigt l'horizon. Vous pourriez m'aider à le sortir de là ?
Le premier homme la toisa, avant de jeter un œil à son collègue, l'air dubitatif.
— Qu'est-ce qu'on fait ? demanda-t-il.
— J'en sais rien... tu veux aller voir ?
— Quoi, tout seul avec elle ?!
Lisa lui envoya un sourire, suivit d'un regard enjôleur, et passa sa langue sur ses lèvres de façon aguicheuse.
— S'il vous plait... minauda-t-elle. Vous avez l'air fort...
L'homme lâcha un rire niais, et se ressaisit avant qu'elle ne le regarde avec des yeux ronds.
— Je suis désolé...
— Quoi ?
— Ça va faire mal.
— Hein ?
Mais avant qu'il n'ait pu se rendre compte de quoi que ce soit, Félix lui avait assené un fort coup sur la tête avec l'énorme pierre qu'il brandissait au-dessus de sa tête.
Le deuxième homme se retourna vers lui, et un coup de feu détonna au moment où Lisa lui donna un coup de pied. Félix cogna son crâne à l'aide de la pierre, et le deuxième garde tomba au sol, inanimé.
Il y eut alors deux réactions.
La première, celle de Félix qui observait les deux filets de sang épais et rapides courir sur la terre, et s'échapper de la tête des gardes. Puis celle de Lisa, qui hurla :
— Ta jambe !!
Félix baissa le regard vers sa cuisse, et alors que jusqu'ici, il ne ressentait rien, une vive et fracassante douleur lui engourdit la cuisse jusqu'à la hanche. Il gémit de douleur en manquant de tomber au sol.
— Félix !!! cria Lisa en le rattrapant de justesse.
Il s'affala sur elle dans une lamentation, et elle l'aida à s'asseoir.
— Putain de merde... souffla-t-il en regardant le trou sur sa cuisse déverser du sang sur son pantalon.
— T'inquiète pas... on va te soigner !
Sans attendre, elle ôta le tissu qui nouait ses cheveux, et le passa autour de sa cuisse pour limiter la propagation du sang. Elle serra aussi fort qu'elle le put, et soupira en posant ses mains sur ses cuisses.
— Il faut y aller... on n'a plus beaucoup de temps... est-ce que ça va aller ?
— Oui, il le faut, aide-moi... rétorqua-t-il.
Elle l'aida à se lever, puis attrapa une des armes gisant au sol. Elle passa la sangle autour de son corps, et soutint Félix d'un bras, puis ouvrit la porte de l'autre. Au moins, ils auraient de quoi se défendre s'ils rencontraient des difficultés.
**
Taehyung avait eu du mal à s'endormir. Il était habitué aux lumières de la ville, même à Séoul. Et là, l'absence totale d'enseignes le perturbait. Mais l'épuisement après avoir ramené les souvenirs de Sun-Kyung était intense et ses paupières se firent lourdes.
C'est aux alentours de quatre heures du matin qu'il ouvrit les yeux, le corps de Jungkook, toujours collé au sien, et ses bras enroulés autour de sa taille. Son menton était posé sur son épaule, et son visage tombait dans sa nuque, si bien qu'il sentait son souffle chaud lui chatouiller le cou.
Il esquissa un sourire, et repoussa ses fesses vers l'arrière, les faisant entrer en contact avec le sexe de Jungkook. N'obtenant aucune réaction, il ondula ses hanches contre son corps, et entendit l'autre grogner contre son épiderme. Il s'esclaffa légèrement, et attrapa ses mains pour en poser une sur son torse, et l'autre sur son sexe.
Jungkook ouvrit les yeux, et soupira lourdement en sentant son érection naitre peu à peu entre ses cuisses. Malgré ça, il décolla son bassin des fesses de Taehyung, et embrassa sa nuque, avant de fermer à nouveau les yeux. Taehyung fronça les sourcils, et recula pour recommencer son geste, mais fut arrêté par les mains de Jungkook qui se vissèrent sur ses hanches.
— Non, souffla-t-il.
Un chouinement de mécontentement résonna dans la chambre, et Jungkook claqua sa langue contre son palais.
— Quoi ?!
Taehyung se tortilla pour se retourner face à lui, et observer ses yeux noirs dans l'obscurité.
— Tu n'as pas envie ?
— Il faut que tu te reposes...
— J'aurais le temps de me reposer quand je serais mort ! Fais-moi l'amour... souffla-t-il en glissant ses bras autour de son cou, et en se rapprochant de lui pour l'embrasser.
Jungkook répondit plutôt froidement au baiser, et se recula rapidement en détournant le visage.
— C'est mieux que tu te reposes.
— Mais j-
— Hyung ! coupa-t-il. Vraiment... repose-toi.
Les yeux de Taehyung s'emplirent de larmes, et il se tourna dos à son petit-ami. Jamais depuis son arrivée sur Terre, et depuis leur rapprochement, Jungkook ne l'avait rejeté comme il venait de le faire. Il se sentait humilié, blessé, et son cœur lui faisait atrocement mal.
Jungkook observa à travers la fenêtre, et dans le ciel, il fixa le point brillant qui lui paraissait peut-être plus gros qu'il y a quelques heures. Est-ce que lorsque le jour se lèverait, il serait toujours là, plus proche encore de la Terre qu'en cet instant ? Un sanglot étouffé le tira de ses pensées, et il se rapprocha de son petit-ami.
— Hyung...
Taehyung renifla sans répondre, tandis que Jungkook réitérait.
— Hyung... j'suis désolé.
— Non, ça va.
Il posa sa main sur son épaule, mais l'autre l'en dégagea agressivement. Jungkook se redressa alors et plaqua son dos contre le matelas, puis monta à califourchon sur lui en bloquant ses poignets de chaque côté de sa tête.
— Arrête ça ! Arrête de culpabiliser ! grogna-t-il.
— Je ne comprends pas ce que tu dis... je ne sais pas ce que tu essayes de faire... moi je t'aime, c'est tout... pleura-t-il.
Jungkook arqua ses sourcils vers le bas, et laissa son corps glisser sur celui de Taehyung. Son visage s'échoua dans son cou, et ses mains dans les siennes, leurs doigts s'entrelaçant. Sa poitrine tremblait, prise de petits sanglots.
— Pardon... mais c'est trop dur... s'excusa Jungkook.
— Pourquoi ? haleta Taehyung.
La blessure était plus douloureuse que prévu. Se faire rejeter n'était pas agréable du tout, et surtout, Taehyung ne parvenait pas à comprendre pourquoi. Est-ce qu'il avait fait quelque chose de mal ? Ses larmes coulèrent le long de ses tempes, trempant son oreiller, et rougissant son visage.
— Parce qu'à chaque fois c'est plus intense, plus profond. À chaque fois je tombe encore plus amoureux de toi, hyung... alors... savoir que je vais te perdre... comme tout à l'heure... c'est pas possible ! souffla-t-il en laissant sa voix trembler et l'émotion le gagner.
Taehyung laissa ses yeux gris parcourir le visage de Jungkook dans la pénombre, et ne put s'empêcher de réprimer plusieurs sanglots.
— Alors, quoi ? Tu me rejettes ? Tu te prépares à ne plus me regarder, à ne plus rien vouloir partager ? On ne refera plus jamais l'amour jusqu'à la fin ? Et je suis censé accepter et vivre avec ça le temps qu'il me reste ?! demanda-t-il en sanglotant, le visage tordu de douleur.
La respiration de Jungkook se bloqua dans sa poitrine, lui procurant une immense douleur et serrant sa gorge. Sa voix presque inaudible ressemblait à un sanglot écrasé de souffrance.
— C'est trop dur... gémit Jungkook. C'est trop dur, hyung... j'y arriverai pas...
— Mais moi je t'aime... je t'aime tellement... c'est impossible pour moi de ne plus te regarder ou te toucher... aime-moi encore, s'il te plait... ne m'enlève pas ça... gémit-il.
Jungkook avait trop chaud. Tout son corps était secoué de tremblements, et le sel de ses larmes lui brulait les joues. Il renifla, et caressa la lèvre inférieure de Taehyung, ses yeux noirs butant dans les siens. Il fondit sur ses lèvres, et lui donna un baiser profond, leurs souffles entrecoupés et anarchiques. Leurs langues se trouvèrent et se chevauchèrent sensuellement pendant de longues minutes, jusqu'à ce que chacun se calme et que leurs pleurs s'achèvent.
Puis ils se séparèrent et se fixèrent durant un moment. Jungkook frotta son nez contre celui de Taehyung qui souffla contre ses lèvres :
— Ne me laisse pas...
Il agrippa ses mains à son t-shirt, et l'attira à lui pour presser ses lèvres contre les siennes.
— Je suis à toi... jusqu'à la fin...
— Je t'aime, hyung... murmura Jungkook en laissant les larmes le submerger de nouveau. C'est trop dur... j'ai l'impression de t'aimer encore plus à chaque fois, j'arriverais pas à affronter ça. Je refuse d'avoir encore plus mal.
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