-Chapitre 46-

Deux jours s'étaient écoulés depuis la disparition de Jungkook à bord de l'étrange objet volant qu'avait distingué Yoongi dans le ciel noir aux abords de Séoul.

Après une longue conversation avec Félix et Irène, il avait compris que la venue des étrangers n'était pas sans dommages pour la Terre qui était menacée par une météorite.

Depuis, il se posait beaucoup de questions. Trop de questions.

Pourquoi les scientifiques n'avaient pas vu cette météorite ? Si les Métrarthiens en avaient connaissance alors les gens qui travaillaient pour la Nasa et tout le bordel devaient être au courant eux aussi, non ? Pourquoi personne n'en parlait aux infos, au journal télévisé ou dans les médias ?!

Ensuite, il y avait le cas de Jimin à gérer. Parce que depuis qu'il avait eu accès à toutes les informations sur Métrarth, la météorite et tout ce qui s'ensuivait, il était ingérable. Il tapait des phases étranges, entre crises de panique et crises de larmes, incapable de se contrôler. Alors Yoongi l'avait autorisé à rester chez lui, parce que Jimin refusait de rentrer dans l'immense appartement de ses parents et d'y rester seul pendant qu'ils s'occupaient de leurs affaires sans se soucier de lui.

Jimin refusait de rester seul, tout simplement parce qu'il était effrayé. Il était soucieux de la suite des évènements et Yoongi le trouvait parfois à regarder le ciel avec appréhension. Lui aussi s'inquiétait, mais c'était différent. Il cherchait quoi faire, comment agir, et surtout, il attendait des nouvelles de Jungkook. Il était parvenu à contraindre Félix à obtenir des informations de la part de Minho mais le jeune garçon n'était pas très coriace. Il était doux, c'était ce qui le caractérisait. Il n'était pas fait pour endosser le rôle du mec teigneux qui exige des informations des autres et les contraint à parler. Félix était beaucoup trop innocent pour ça.

Yoongi avait séché les cours aussi, ne voyant plus l'intérêt de se contraindre à supporter toute cette pression s'il était voué à mourir. Jimin s'était rendu à la fac ce matin à contrecœur, le regard humide et ses lèvres tirant vers le bas. Yoongi avait promis de venir le chercher à la fin de ses cours à dix-sept heures et de l'emmener manger tout ce qu'il voudrait ensuite.

Durant la journée, il avait fait pas mal de recherches sur les météorites et il avait regardé des tonnes de reportages. Mais ils disaient tous la même chose. En fonction de la grosseur du corps céleste, il était probable que toute vie sur Terre soit anéantie. Alors à moins qu'il s'agisse d'un petit caillou, vu la taille du monstre et la force avec laquelle elle fonçait directement sur eux, il y avait peu de chance pour qu'une forme de vie s'en tire indemne.

Il y avait bien des bunkers souterrains, mais si les médias n'avertissaient pas la population, rien ne pourrait être mis en œuvre. Cependant, elle serait normalement visible à l'œil nu quelques jours avant de frapper la surface de la Terre. Ainsi, elle créerait le chaos général et une panique gigantesque, parce qu'il n'y aurait plus aucune issue.

Yoongi s'allongea sur son lit et appuya sur le contact de Felix, puis il attendit que les tonalités basculent sur son répondeur. Il claqua sa langue contre son palais et réitéra la manip plusieurs fois jusqu'à ce que la voix extrêmement grave de Félix ne résonne au bout du fil. C'était particulièrement étonnant que ce garçon si doux et si pur possède un timbre de voix si bas.

— T'as des nouvelles ?

— Non, j'en ai pas, hyung, et c'est pas la peine de me harceler ! Je suis en TD d'anatomie, j'ai dû sortir dans le couloir pour décrocher ! Arrête de m'appeler !

— OK, je vais chez toi voir Minho directement, tu ne me sers à rien.

— Attends, j-

Yoongi avait raccroché en grimaçant. Ce gamin le ralentissait et il n'avait vraiment pas de temps à perdre. D'ailleurs, bientôt il n'aurait plus de temps du tout. Il gardait son sang-froid depuis le début, uniquement parce qu'il avait le sentiment de vivre un film catastrophe et que tout cela n'était pas réel. Il sentit son cœur s'emballer soudainement comme c'était le cas depuis deux jours à certains moments de la journée lorsqu'il laissait place à l'angoisse.

Il l'éloigna rapidement, préférant se concentrer sur le concret que de flipper inutilement, et enfila un sweat et ses chaussures puis se dirigea dans la cuisine. Il avala un grand verre d'eau et essuya ses lèvres d'un revers de manche.

— Oh mon chéri ! Tu pourras passer à l'épicerie en rentrant ? J'ai besoin d'un sac de riz !

— Euh, ouais, je vais essayer d'y penser.

— Yoongi ! râla sa mère en soupirant. Tu n'es pas allé en cours aujourd'hui je le sais, alors essaye au moins de te montrer serviable !

— Serviable ? grogna-t-il. Est-ce que réellement c'est important d'aller chercher du riz ?! Il y a peut-être des tas de choses plus urgentes ! aboya-t-il en posant les mains contre le bord du meuble et en serrant si fort que ses jointures blanchirent.

Sa mère lui parlait de courses. Mais quelles courses lorsqu'il n'y aurait plus de cuisine, d'épicerie, de repas ou même de ville ?! Quand plus rien n'aurait survécu et que la surface de la Terre ressemblerait à un désert sombre et glacial ?!

Elle le regarda avec étonnement. Son fils s'énervait peu, il fallait en général pas mal le malmener pour parvenir à le faire sortir de ses gonds.

— Est-ce que tu t'es disputé avec Jimin ?

— Non... il va bien, soupira-t-il en fermant la fermeture éclair de sa veste.

— Bon, alors à ce soir mon chéri... et si tu n'as pas le temps, j'irais demain.

La main sur la poignée de la porte, il se ravisa et se mordit la lèvre. Sa mère n'avait rien fait et bientôt, ils seraient séparés.

— Non c'est bon... je m'en occupe, assura-t-il.

Il quitta l'appartement et emprunta le métro pour rejoindre l'appartement de Félix. Une petite demi-heure plus tard, il sonna à l'interphone du bâtiment et attendit que la voix de Minho décroche.

— Allo ?

— Bonjour, je suis un ami de Félix...

— Je suis désolé, mais il est en cours.

— Je sais... c'est vous que je viens voir.

Un silence s'ensuivit avant que la porte du hall ne s'ouvre suite à un bip assez désagréable. Heureusement que Minho avait accepté. La dernière fois, il avait eu la chance de tomber sur un locataire qui sortait de l'immeuble pour se faufiler dans le hall.

Il entra dans l'ascenseur et attendit nerveusement de gagner l'étage désiré. En sortant, il frappa à la porte et Minho ouvrit le battant en le toisant de haut en bas.

— Qui es-tu ? demanda-t-il.

— Je m'appelle Min Yoongi. Je peux entrer ?

— Qu'est-ce que tu me veux ?

— Discuter.

— Je n'ai pas le temps ! cracha-t-il en refermant la porte.

Yoongi glissa son pied pour l'empêcher de lui claquer la porte au nez et le regard de Minho tomba dans le sien.

— Qu'est-ce que tu veux ?!

— Je vous l'ai dit... discuter !

— Et je n'ai rien à te dire !

— Au contraire, je crois que si. Je sais tout...

Le visage de Minho devint blanc et son regard ne lâcha pas les petits yeux noirs face à lui. Au bout d'une poignée de seconde, il ouvrit la porte et se décala en s'éloignant vers la cuisine. Yoongi entra et se déchaussa puis attendit patiemment alors que des bruits de vaisselle se faisait entendre.

— Café ? demanda une voix au loin.

— S'il vous plait !

— Assieds-toi...

Il rejoignit le salon et prit place sur un fauteuil près de la fenêtre. Son regard observa le ciel un instant. Il le regardait plus souvent dernièrement, comme s'il s'attendait à y trouver une boule de feu qui pourfendrait les cieux à une vitesse phénoménale. Il se racla la gorge et tendit les mains pour recevoir la tasse brûlante que Minho lui tendait.

— Bon... Qu'est-ce que tu sais, au juste ?

— Métrarth, Félix, Irène, Taehyung, Jungkook... météorite.

— OK, je vois... soupira Minho en se passant une main fatiguée sur le visage. Comment tu sais ça ?

— J'ai accompagné Jungkook à la navette... j'ai vu Taehyung monter et mon meilleur ami le rejoindre. Ça fait plus de deux jours que je n'ai aucune nouvelle de lui... j'aimerais savoir s'il va bien.

— J'ai... entendu dire en effet qu'ils avaient récupéré un jeune garçon Terrien en plus de Taehyung... mais je ne sais rien de plus, Yoongi...

— Alors, appelez-les !!!

— Tu crois que c'est si facile ?! Les moyens de communication avec Métrarth sont compliqués !

— J'm'en contre fou de vos difficultés ! aboya-t-il. Je veux des nouvelles de mon meilleur ami ! Et je veux savoir ce que vous comptez faire avec ce truc qui arrive droit sur nous !

Minho le regarda, désemparé. Une pointe de tristesse l'anima durant quelques secondes et il poussa un long soupir.

— Yoongi... on ne compte rien faire du tout... pour cette météorite...

— Comment ça ?! s'offusqua-t-il. Vous nous pillez et vous repartez en nous laissant crever ?!

— C'est à peu près ça. Notre Roi n'a pas choisi de vous venir en aide... et crois-moi j'en suis désolé, mais je ne fais pas les règles... et je ne peux rien faire contre sa volonté.

Le visage de Yoongi était encore plus blanc que d'ordinaire. Des cernes étaient creusés sous ses yeux, car depuis deux jours, il dormait vraiment mal et encore plus avec les angoisses de Jimin qu'il devait gérer. Pourtant, il avait bon espoir que ces gens venus d'ailleurs leur apportent une solution. Mais il était atterré de constater que rien n'avait été prévu pour les Terriens. Pas même l'ébauche d'une idée pour les secourir.

Les mains tremblantes et le cœur au bord des lèvres, il souffla :

— Alors... on va tous mourir ?

— J'en ai bien peur...

**

Taehyung avait été isolé dans une pièce vide. Après avoir assuré au Roi qu'il détestait sa façon de faire et exigé qu'on lui ramène Jungkook, le souverain de Métrarth avait fait intervenir les gardes afin qu'il se calme à l'écart.

Le garçon aux yeux gris s'était férocement débattu, trouvant injuste tout ce qui se déroulait dans cette base depuis son retour. Toute sa vie n'était qu'un tissu de mensonges.

Il était assis dans l'angle de la pièce, ses genoux ramenés sous son menton et ses bras les entourant, tout en regardant dans le vague. Jungkook avait délibérément choisi de monter dans cette navette. Il ne savait pas où il allait, ni s'il survivrait au voyage, mais il avait tout de même eu le courage de le rejoindre. C'est qu'il devait soit l'aimer très fort, soit lui en vouloir assez pour désirer le confronter et lui passer un savon. Taehyung espérait que c'était la première option qui l'avait poussé à embarquer.

Alors qu'il se demandait où Jungkook avait pu être enfermé, la porte fut déverrouillée et Hyunjin entra et vint s'installer face à lui sur une chaise qu'il tenait à bout de bras.

— Bon. Mon père n'a pas la patience pour s'occuper de ton cas alors je m'en charge. Je vais essayer de répondre à toutes tes questions et de t'expliquer ce qui va se passer pour toi à la suite de ton retour...

— Je vais être châtié ? Banni ? Je vais rester enfermé ici jusqu'à la fin de mes jours ?

Hyunjin laissa éclater un rire clair.

— Non !

— Alors quoi ? Qu'est-ce que j'ai pu faire qui mérite un tel traitement ?

— Tu es bien trop curieux, Kim !

— Pourquoi vous cachez tout ça... à la colonie ? questionna-t-il en balayant la pièce du regard.

— Parce qu'ils n'ont pas besoin de savoir.

— Mais c'est mentir ! Vous avez tout ici... l'électricité, les ordinateurs, la technologie... la même qu'il y a sur Terre, peut-être même encore mieux ! argua-t-il en avançant le menton avec insolence.

— Tu es effronté, Kim... ça te dessert... mais tu es intelligent aussi, je ne peux pas le nier.

Taehyung lui envoya un regard torve et Hyunjin passa sa langue sur ses lèvres avant de soupirer.

— Je vais te raconter l'histoire de Métrarth... tu en sais déjà trop et il va de soi que nous ne pouvons plus revenir en arrière te concernant...

Taehyung écouta avec attention le discours que s'apprêtait à lui livrer le Prince.

— Métrarth... est le miroir de la Terre... il y a des millions d'années, nous vivions exactement comme sur Terre... avec... des voitures, des immeubles, des universités, des magasins, et même des cinémas ! Mais... il est arrivé quelque chose...

— Quoi donc ?

— Notre planète a rencontré une météorite d'une taille gigantesque... et nous n'avons rien pu faire pour empêcher la collision.

— Quoi ?! Mais attends, c'-

— Ne me coupe pas !! gronda le Prince. Où j'te laisse là sans rien te raconter !

— Pardon... se ravisa Taehyung. J't'écoute... qu'est-il arrivé à Métrarth après ça ?

— Elle a rencontré... ce gros... cet énorme caillou venu de l'espace...

Il s'arrêta, cherchant comment expliquer correctement la suite à Taehyung face à lui.

— Tout... a été détruit, Kim... parce que les Métrarthiens n'avaient pas assez de recul pour se préparer. Certains ont fui dans des bunkers... mais quatre-vingt-dix-huit pour cent de la population a péri.

Taehyung ne clignait plus des yeux et sa bouche était entrouverte. Il écoutait avec attention, buvant les paroles de Hyunjin.

— Métrarth... est sorti de son axe gravitationnel. Nous étions autrefois une planète avec un soleil... des jours et des nuits. Mais la collision avec ce corps astral nous a fait dévier de notre axe et nous sommes tombés dans un trou noir.

— Mais... nous avons pourtant toujours le soleil ! fit-il remarquer.

Hyunjin lui livra un sourire sincère.

— Il n'est pas réel, Kim... les hommes qui ont survécus ont mis des centaines d'années à reconstruire le peu que nous avons... d'abord vivant en souterrain, ils ont survécu en rationnant la nourriture, en construisant des serres pour faire pousser des légumes et des fruits... et peu à peu... nous avons créé un soleil artificiel pour faire renaitre la vie à la surface de Métrarth...

— Oh...

— C'est pour ça qu'il n'y a jamais de nuit... et qu'une partie de notre planète est plongée dans l'ombre. Le soleil que nous avons créé n'éclaire qu'une partie de la surface de Métrarth puisque celle-ci n'a plus de rotation...

— Et... il va se passer la même chose pour la Terre ?

— En quelque sorte... avoua le Prince. Sauf qu'on ignore si la Cleansing comet va détruire plus férocement la Terre... si elle ne va pas exploser ou se briser en morceaux... nous étudions cet énorme rocher depuis des années... e-

— Alors, pourquoi ne pas avoir pris les devants ?! Pourquoi ne pas avoir prévu de sauver les Terriens ?! Si vous le saviez depuis si longtemps, nous aurions pu organiser un rapatriement. Ils pourraient venir ici, agrandir la colonie, on pourrait tous vivre ensemble ! Et profiter de leurs vivres en les sauvant de la mort ! s'excita Taehyung, sidéré que rien ne se fasse dans ce sens-là.

— J'te reconnais bien là, Kim... sourit Hyunjin.

— Pourquoi ?!

— Tu es... incroyablement Terrien.

Son regard pluvieux se perdit dans les yeux bleu clair du Prince.

— Je l'ai toujours remarqué... avant même que tu ne partes pour la Terre. Tu es comme eux... arrogant, suffisant, persuadé que tu peux sauver le monde d'un claquement de doigts ! souffla-t-il cyniquement.

— Mais c'est le cas ! On peut sauver les Terriens, Hyunjin ! hurla-t-il en se levant pour exprimer ses idées. Si nous le voulons, nous pouvons réunir nos deux peuples et vivre en communauté tous ens-

— Non ! le coupa-t-il violemment. Mon père refuse de les laisser à nouveau tout massacrer !!!

— Quoi ? Mais pourquoi ? Et pourquoi nous avoir laissé vivre dans ces conditions ?! Nous avions toute la technologie à portée de main !!!

— Justement ! s'agaça le Prince. Les Terriens sont persuadés que leur manière de vivre est la bonne, mais ils se trompent ! Ils détruisent tout ! La nature, les plantations, les forêts, les animaux ! Ils surconsomment, ils se gavent et ne prennent soin de rien ! Ils polluent et maltraitent les océans, la faune et la flore ! Ils ne se rendent pas compte de la valeur des choses ! Mon père refuse de les laisser à nouveau massacrer tout ce que nous avons construit !

— Alors c'est pour ça... ? souffla Taehyung dans un murmure. C'est pour ça qu'on vit... de cette manière ? Sans ordinateurs, sans voiture, sans télévision ou téléphone portable ?

— Oui. Mon père veut un peuple qui soit conscient de la beauté du monde et de la chance de pouvoir être en osmose avec la nature. Nous n'avons ni pluie, ni orage, ni tempête. Mais nous n'avons pas non plus de pollution, de goudron sale et puant, d'ondes qui te donnent mal au crâne ou qui provoquent des maladies... c'est avec le temps et le soin qu'on met dans notre façon de vivre que nous pouvons maintenant dépasser les cent dix ans aisément... les Terriens n'y parviendront jamais. Leur mode de vie est trop néfaste.

— Alors... nous sommes... nous aussi des Terriens, d'une certaine manière ?

— Oui. Mais nous avons des caractéristiques quelque peu différentes. Nous ne ressentons pas les émotions à moins d'y être soumis et de les développer... nous avons une intelligence différente et supérieure aux Terriens... et nous avons la capacité de ressentir leurs émotions par rayonance.

Une larme roula sur la joue de Taehyung. Tout ce temps, toutes ces années de mensonges, de duperie et de faux-semblants. Qui était-il vraiment, finalement ? Il se laissa glisser le long du mur, dépité, et enfoui son visage entre ses jambes.

— Je sais que ça fait beaucoup d'un coup... en vous envoyant sur Terre, nous espérions multiplier les navettes de vivres. Lorsque la Terre aura disparu, nous n'aurons plus accès à toute la nourriture qu'ils possèdent, à leur carburant pour nos voitures, à leurs tissus, à leurs médicaments... alors il faudra redoubler d'efforts pour subvenir à nos besoins nous-même...

Hyunjin lui lança un regard de pitié. Taehyung semblait être atterré de la nouvelle. Il savait que tout ça le toucherait, mais il ne pensait pas autant.

— La colonie grandit, Taehyung... nous devons être capables de nous assumer.

— Nous le pourrions si vous laissiez les Terriens nous venir en aide !!! cria-t-il le visage ravagé par les larmes.

— Mon père ne l'acceptera jamais.

— Alors on va les laisser mourir et continuer de récolter les pommes de terre et d'organiser des cérémonies d'or ?! Tout ça n'a aucun sens !

— Si ! Cette organisation nous permet de vivre en harmonie ! D'ailleurs, tu es uni à Mina je te rappelle ! Tu as des devoirs envers elle ! Tu dois lui donner des enfants !

Taehyung eu la nausée rien que de penser à ça. Il ne voulait pas de cette jeune fille qu'il ne connaissait pas ! Il refusait de faire l'amour avec elle après ce qu'il avait vécu avec Jungkook, c'était inconcevable.

— Je refuse de me ranger et de vivre cette vie... souffla-t-il avec aplomb. Je veux qu'on me rende Jungkook et qu'il puisse vivre ici avec nous. Je refuse de le voir mourir sans rien faire pour le sauver.

— Jamais le Roi n'acceptera de le garder ici.

— Où est-il ? Et que va-t-il faire de lui ?

Hyunjin haussa les épaules.

— La seule raison pour laquelle il ne s'est pas encore débarrassé de lui, c'est qu'il n'en a jamais eu un sous la main durant toutes ces années. Alors j'imagine qu'il va l'étudier un moment... il est le sujet parfait pour nos laboratoires... alo-

— Non !!! cracha Taehyung en se levant et en se jetant sur le Prince. Laissez-le !!!! Laissez-le partir, tu m'entends !!!

Hyunjin tomba de sa chaise en tentant d'échapper à Taehyung qui empoignait son col en lui hurlant dessus de colère. Les cris alertèrent les gardes qui entrèrent dans la pièce et qui se saisirent de lui. Hyunjin se releva, la mine colérique, et réajusta le col de sa chemise en lin en lui jetant un regard menaçant. Taehyung était hors de lui, il se débattait en criant sa désapprobation, ses prunelles orageuses insultant silencieusement Hyunjin, le Roi et la totalité de Métrarth. Alors que le jeune Prince s'approchait de lui, il s'immobilisa et afficha une mine sévère.

— Tu es jeune, Taehyung... jeune, crédule et innocent... jamais ta relation avec Jungkook ne sera tolérée ici... sois tu reprends ta place au sein de la colonie avec ta femme et tu obéis aux ordres... soit nous serons contraints de nous débarrasser de toi et de ton arrogance.

— Je te hais ! Toi, ton père, et tous les Métrarthiens réunis ! Ce n'est qu'une putain de blague tout ça, tout ce que vous nous imposez ! Ramène-moi Jungkook, ramène-le-moi !!!

Sur ces paroles, il cracha au visage du Prince. Avant d'avoir la chance de profiter du spectacle, un des gardes lui assena un coup de crosse de fusil derrière la tête et il tomba inanimé.

**

— Yoongi !!!! cria Jimin en levant le bras au-dessus de la foule.

Les petits yeux noirs se posèrent sur lui et il glissa ses mains dans ses poches en regardant son cadet trottiner vers lui. Jimin esquissa un léger sourire en le rejoignant et ils s'extirpèrent de la foule.

— Ça a été les cours aujourd'hui ?

— Hmm... oui, répondit Jimin en haussant les épaules.

— Quoi, ça ne te plait plus ?

— Si...

— Alors quoi ?

— Rien.

Yoongi savait que s'il entamait la conversation, cette conversation, il allait s'embarquer dans une nouvelle crise d'angoisse. Une de celles qui refaisaient surface depuis quelques jours. Depuis qu'il avait embarqué Park Jimin chez Félix et Irène et qu'ils avaient eu cette discussion qui avait tout remis en question.

— On va aller manger un truc et se poser.

— Ah oui ?

— Oui, te poser et souffler te fera du bien... assura-t-il.

Jimin ne chercha pas à tergiverser ou à discuter. Il laissa Yoongi le conduire à une sorte de café très aesthetic à quelques rues de la fac. La devanture était crème avec le nom du café dans une jolie typographie type imprimerie blanche : EUPHORIA.

Yoongi poussa la porte en verre et pénétra dans une grande pièce aux effluves de vanille et de noisette grillée. Il se dirigea vers une petite table de deux près de la grande baie vitrée inondée par la lumière du soleil. Les sièges étaient de gros fauteuils en rotin sur lesquels étaient installés de gros coussins ivoire très épais. Jimin s'assit sur l'un d'eux et posa le coude sur la petite table en pin vernie, son menton se logeant dans le creux de sa main. Yoongi resta debout et attrapa la carte en plexiglas posée entre eux sur laquelle tous types de boissons étaient inscrites au feutre blanc effaçable. Sans consulter Jimin, il s'éloigna vers le comptoir et commanda pour deux avant de revenir s'asseoir.

— Alors... tu veux discuter de ta journée ? demanda-t-il.

Jimin haussa les épaules, sa jolie bouche se tordant vers le bas. Jimin ne souriait plus, et ça depuis plusieurs jours. Des cernes s'étaient creusés sous ses jolis yeux noisette, comme s'ils avaient élu domicile ici, se noircissant à mesure que le temps s'égrenait.

— Jimin... soupira Yoongi.

— Y'a rien à dire... les cours... le droit, tout ça...

— Tu veux rester à la maison ce soir ?

Ses grands yeux se relevèrent dans les siens.

— Tu crois que ça ne dérangerait pas tes parents ? Ça fait plusieurs jours... je ne veux pas les incommoder par ma présence.

Ta présence... bientôt on sera tous des petits tas de poussière. Alors elle n'incommode personne, et encore moins moi, pensa le plus vieux.

— Non, t'en fais pas pour ça... assura Yoongi.

— Alors j'veux bien.

— Mais tes parents, ils ne s'inquiètent pas ?

— J'en sais rien... ma mère m'a laissé un message pour savoir si je pouvais manger dans ma chambre ce soir, elle a invité des copines pour une sorte de... réunion. Elle ne veut pas que je les dérange. Encore un truc avec ses sex toys de merde ! lança-t-il.

— Et ton père ?

Jimin grimaça.

— Il doit être à Bali en train de sauter sa secrétaire...

Yoongi approcha sa main de celle de son ami et la posa sur la sienne.

— Jimin... tu ne parles jamais de tout ça... de ta vie, de tes parents... j'veux dire, on se connait depuis des années et jamais t'en a parlé...

— Parce que je pensais que je pourrais passer au-delà... que quand je déménagerais je n'aurais plus à me soucier de tout ça... de leur vie qui ne me convient pas...

— Mais ?

— Mais... y'a plus d'espoir, hyung... tout ça... pourquoi personne n'est au courant ? Pourquoi on ne nous dit rien ? Pourquoi les gens continuent de vivre comme si tout allait bien ?! Et puis... j'angoisse de ne pas savoir dans combien de temps ça va se produire exactement. Peut-être qu'il nous reste seulement quelques mois... ou quelques semaines.

Yoongi arqua les sourcils vers le bas et passa sa langue sur ses lèvres.

— Arrête de t'en faire, on va trouver une solution... j'vais trouver quelque chose.

— Ah oui ? Et quoi ?! Qu'est-ce que tu vas trouver de si génial ?! Il n'y a pas de solution ! On va tous crever !! hurla-t-il subitement les yeux rouges.

Les quelques clients présents se retournèrent vers leur table et à cet instant la commande des deux garçons se mit à sonner. Yoongi se leva pour récupérer le tout et retourna à table, un petit sac de papier kraft au bout du bras.

— J'ai pris à emporter... on rentre. Tu n'es pas en état de rester ici, viens.

Jimin se leva et le suivit à l'extérieur. Il resta muet jusqu'à l'appartement de Yoongi, qui fit un crochet par la supérette pour récupérer un gros sac de riz qu'il déposa dans la cuisine en entrant. Après s'être déchaussés, ils s'enfermèrent dans la chambre et Jimin tira les stores pour obstruer la vue.

Yoongi déposa la boisson de Jimin sur la table de nuit et glissa le gâteau à la crème posé sur un socle de carton juste à côté.

— Tu m'a acheté un gâteau ? s'étonna-t-il.

— O-oui... je... j'pensais que t'avais besoin d'un peu de douceur.

— C'est gentil... sourit-il tristement.

Yoongi s'éloigna à la cuisine et rapporta une assiette pour le gâteau et une petite cuillère. Jimin avait allumé la petite lampe de la table de chevet qui plongeait la pièce dans une ambiance tamisée. Alors qu'il déposait la cuillère près du gâteau, Jimin enroula ses bras autour de sa taille et posa son front entre ses omoplates. Le plus vieux s'immobilisa, peu habitué à ce genre de familiarités avec lui.

Doucement, il se retourna pour lui faire face, leurs visages tout près l'un de l'autre. Les yeux de Jimin tombèrent dans les abysses noirs de Yoongi. Un moment, il observa le visage de son aîné, laissant son regard courir sur sa peau et en relever chaque détail. Yoongi ne bougeait pas, attendant de savoir ce que cherchait Jimin, son souffle retenu entre ses lèvres et les battements de son cœur devenant bien trop lourd.

— Je t'ai... jamais donné ton cadeau d'anniversaire, hyung... souffla-t-il.

Yoongi ne répondit pas, ses prunelles perdues dans celles de Jimin. Il l'avait ignoré pendant trois longs mois. Il ne lui avait donné aucune nouvelle, accordé aucun regard durant tout ce temps. Jimin déglutit lentement et posa sa main sur sa joue pâle, ses yeux tombant sur ses petites lèvres charnues. Il rapprocha son visage plus près encore, leurs lèvres se frôlant, tandis que Yoongi fermait les yeux en laissant échapper un souffle chaud et tremblant. Son estomac lui envoya un spasme alors qu'il posait les mains sur la taille de Jimin.

Celui-ci laissa son regard contempler encore quelques secondes le visage de son vis-à-vis, puis il posa ses lèvres sur les siennes avec tendresse. Ils restèrent un moment sans bouger, juste en savourant le plaisir de leurs lèvres réunies, jusqu'à ce que Jimin se mette à mouvoir doucement sa lèvre inférieure contre celle de Yoongi, cherchant l'accès à sa bouche. Le plus vieux répondit à sa demande et entrouvrit les lèvres dans un souffle fébrile tout en resserrant sa prise sur sa taille.

Le baiser était doux, presque chaste. Jimin ne chercha pas à l'approfondir ou à glisser sa langue dans sa bouche, préférant quelque chose tout en retenue afin de ne pas brusquer son ami. Il l'avait repoussé, il ne pouvait pas se permettre maintenant de lui sauter dessus avidement. Pourtant, il avait cette envie d'être choyé, rassuré. Il avait besoin plus que jamais de la présence de Yoongi. Celle même qu'il avait rejetée il y a de ça quelques mois.

Il ne voulait pas que Yoongi imagine qu'il profite de la fin du monde pour lui mettre le grappin dessus. Ce baiser, il l'avait imaginé depuis des semaines et il s'était dit que l'embrasser pour cette occasion pourrait leur servir à renouer des liens. Et puis Jimin voulait prendre son temps, ne pas précipiter les choses et être certain de ne pas se tromper, de ne pas gâcher leur amitié.

Il est vrai que depuis quelques jours, il se demandait ce qui pourrait bien être gâché avec le peu de temps qu'il leur restait. Autant vivre cette vie à fond.

C'est Yoongi qui mit fin à leur baiser, un peu trop rapidement au goût de Jimin. Il se recula et prit le temps de faire trembler ses orbes noirs dans ses yeux.

— Pourquoi... ? souffla-t-il.

Jimin se mordit la lèvre en reculant, la prise de Yoongi libérant sa taille.

— Pardon, hyung... j'aurais pas dû, enfin, j'aurais dû me douter qu'après tout ce que tu as fait pour sortir avec moi, tu ne voudrais pas revenir en arrière... souffla-t-il en se dirigeant vers la grande fenêtre.

— Attends, attends ! le retint Yoongi en accrochant son poignet. Tu plaisantes là ?!

— Non... quand tu m'as mis en face de tes sentiments, j'ai pris peur. Bien sûr que je voyais tout ce que tu tentais depuis des années... mais je préférais notre amitié, à un plan cul incertain.

Yoongi fronça les sourcils.

— Comment ça, incertain ?!

Jimin soupira en se passant une main sur son visage fatigué. Le soleil déclinait derrière les buildings et déjà la lune prenait possession du ciel.

— J'avais peur... que ça ne fonctionne pas et qu'on gâche tout. J'avais peur de me tromper, d'hésiter, de te mettre dans une situation délicate si je doutais. Alors j'ai préféré ignorer tout ça... mais... ça m'a beaucoup fait réfléchir, j'avais besoin de temps pour me rendre compte que ce qui me faisait peur, c'était uniquement de vivre la même vie que mes parents.

— Attends, j'comprends rien, Park ! s'agaça Yoongi, toujours en retenant son poignet entre ses doigts.

Le visage de Jimin gonflait sous l'émotion. Ses lèvres devenaient plus rosées et ses yeux larmoyants s'entouraient de rouge.

— Je prends leur chemin, hyung... quand tu m'as tout avoué, j'voulais pas être mêlé à ça et j'ai continué de vivre dans le mensonge, en sortant avec des filles qui ne me plaisaient pas, à jouer au mec sûr de lui, alors qu'au fond je me posais tellement de questions sur nous... j'veux pas être comme eux, me réveiller un matin et me rendre compte que j'ai fait les mauvais choix, raté ma vie, et que je suis marié à une connasse qui traine un caniche en se vernissant ses putains d'ongles ! hurla-t-il.

— Ça va, ça va, t'énerve pas bébé... chuchota Yoongi en l'attirant à lui.

Jimin entoura sa taille de ses bras et nicha son visage dans son cou en laissant s'échapper quelques larmes.

— Mais ma vie... elle est déjà finie, hyung... je l'ai à peine commencé et ça va déjà prendre fin... j'ai rien vécu, alors qu'est-ce qu'on va faire, hein ?!

Yoongi attrapa son visage en coupe entre ses mains et effaça ses larmes de ses pouces, puis caressa ses joues avec douceur.

— Rien. On va rien faire, mon cœur... parce qu'il n'y a rien à faire de plus... la seule chose que je peux faire pour t'apaiser, c'est de te promettre que je t'aimerais jusqu'à la fin.

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Coucou mes kiwis ! 🥝

Bon, de nombreuses choses ont été révélées dans ces deux chapitres... je vais me contenter d'emprunter la sortie pour fuir votre courroux...

Vous pouvez poser vos avis (toujours respectueux merci) ici 💘

Je vous dis à bientôt pour la suite, cœur sur vous 🤸🏻‍♀️😁

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