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Je n'étais pas du genre à m'emporter mais en ce samedi, deux jours après avoir eu la discussion avec Milo, je voulais mettre les points sur les i avec oncle Harold. Neven montrait au fur et à mesure, un caractère explosif et il semblait être quelqu'un d'honnête lorsqu'il conversait avec moi mais maintenant, je voulais obtenir des réponses sincères.
Je m'habillai d'une robe légère d'un rouge sombre à manches longues puis en sentant la chaleur de l'air contre ma peau, je munis mes cheveux d'un bandeau marron clair pour contraster avec mes cheveux foncés et gardai ma sacoche habituelle. Dans le miroir incrusté à ma porte, objet auquel je ne portais pas d'intérêt particulier, je remarquais que mes joues avaient pris des couleurs.
Les coups de soleil avaient le don de m'irriter à cause de la brûlure. Souvent, je n'y prêtais pas attention alors que c'était la source de mes petits sauts d'humeurs en été. Je marchai doucement dans l'escalier puis tournai vers la cuisine ouverte sur le salon. J'entendis des ronflements et n'eus même pas besoin de tourner la tête pour savoir qu'Harold était l'auteur de cette cacophonie.
Je me saisis du matériel dont j'avais besoin sur une grande étagère. Son trait bordélique semblait donner un charme unique à sa maison.
Une fois assise sur la table, en plein milieu de la pièce, je commençai à écrire. Jamais je n'avais ressenti le besoin de me confier mais user de la magie pour manipuler quelqu'un, c'était un acte ignoble à mes yeux. Et même si ce ne serait pas le cas, supposons-le, qu'on complote dans mon dos ne pouvait qu'attirer mon mépris.
"Tu as demandé l'aide à un pauvre humain pour mon bien, afin que la reprise ne me soit pas trop difficile. Et même si c'est un acte de bienveillance, il n'en reste pas moins que tu me traites comme une gamine.
Garde à l'esprit que j'ai 17 ans, oncle Harold ! Je ne suis plus la gamine d'autrefois qui faut dorloter parce qu'elle est malheureuse d'avoir perdu ses parents.
Alors réponds-moi à mes quelques interrogations.
As-tu charmé Milo ? Je ne veux pas abuser des gens. Tu sais très bien que c'est pour ce genre de don que nous sommes rejetés. Sais-tu ce qu'il a fait...mentit à ses camarades comme quoi j'étais muette. En clair, je n'ai vraiment pas apprécié.
Et Neven aussi ? Un garçon inconnu qui vient me parler comme par miracle et qui en plus, a discuté avec moi comme si je n'avais pas d'handicap.
Je veux savoir la vérité et maintenant"
Je me déplaçai dans la pièce pour me retrouver debout près de lui. Je décretai qu'il avait suffisamment dormi et me mis à bouger délicatement son bras. Il gratta sa barbe en baillant et ouvrit les yeux, perturbée de me voir lui tendre une lettre.
Oncle Harold la saisit en croyant probablement que j'étais parti chercher le courrier, comme à ma coutume. Il prit et s'étonna de ne voir qu'un bout de papier avec une écriture et me demanda d'une voix faible :
— Mais pourquoi tu me réveilles pour le courrier, rien n'est urgent dans la vie.
Je lui volai le papier pour l'ouvrir et le lui mettre en face de son visage. Un peu trop près car il ne pouvait plus voir alors il me regarda l'air inquiet et le prit en commençant sa lecture quand il vit la détermination dont je faisais preuve.
Il mit deux bonnes minutes pour lire le peu qu'il y avait. Une ride s'étira à son front tandis qu'il malaxa son crâne garni de cheveux noirs en amenant son regard plusieurs fois à moi. Oncle Harold toussa et me dit en toute franchise :
— Alors oui, j'ai demandé l'aide du gamin cependant, je te promets ne pas l'avoir influencé. C'était son choix. Et pour l'autre, je suis ravi d'apprendre que tu t'es fais un ami aussi facilement mais je ne le connais pas. Oh désolé Esméralda, j'ai pensé bien faire puis on se voit pas très souvent, tu es toujours ma petite-nièce d'autrefois.
Je sortis mon crayon et déposai le bout de papier sur une partie du canapé en griffonnant quelques mots pour le lui redonner. "Mets-toi dans la tête que je ne suis pas un enfant ! et promets-moi de ne plus jamais me refaire de sale coup tordu"
Il s'esclaffa rieur en chiffonnant le papier :
— Mais tu n'as pas forcément de réaction très mature envers les autres. Et ne soit pas si impoli envers moi, je ne vais plus rien faire si tel est ta volonté, ma petite enfant capricieuse.
Son air hautain m'exaspérait alors je lui repris le carré en lambeau et après avoir mis celui-ci à la poubelle, je partis vers la porte principale d'un pas rageur qui provoqua une réaction d'Harold tandis que je fis mes lacets :
— Où vas-tu à une heure aussi matinale ?
En me redressant j'ouvris la porte et me résignai à lui montrer l'horizon, bordé par la forêt. Je l'entendis me souhaiter une bonne balade, en insinuant que ça ne pouvait me faire que du bien pour calmer mes nerfs.
Outrée par son comportement provocateur qui m'étonnait de sa part, je descendis la petite pente du jardin. Jamais il ne m'avait aussi mal parler. Son sourire chaleureux me donnait envie de vomir, y avait-il quelqu'un pour comprendre à quel point ce complot était douloureux pour moi ? J'étais maintenant mitigée par mon arrivée ici mais penser à cette étendue de verdure encore non exploré me ranima d'une certaine euphorie plaisante.
Avant, je faisais souvent des balades en pleine nature avec mes parents. On s'amusait tellement bien, j'apprenais les bases de la magie avec eux et tous nos moments ensemble étaient désormais gravés dans mon esprit. Bien que l'un des pires soit inscrit sur ma peau, cette marque indélébile me rappellera sans cesse le grand drame de mon existence.
La chute d'un papillon enflammé qui commençait à s'élever dans les airs. Mais qui est parti en fumée comme le bonheur ressenti dans le passé.
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