Chapitre 3 - Liés à jamais

-Hailee Barton, enchantée. Et voici mon compagnon, Aaron. Dis-je en souriant.

Je serre la main qu'elle me tend. Quant à Aaron, il fait un bref signe de tête. Il la regarde un peu de travers, comme si elle était une personne étrange, comme si elle allait lui sauter dessus. La facilité qu'elle a eu à nous aborder, surtout après nous avoir observés tirer au stand, pourrait être ambiguë, mais Aaron a toujours la manie de voir le mal partout et cette fois je décide de ne pas faire attention à son attitude réservée.

-Vous faites du tir ? Demandé-je poliment, cherchant un éventuel sujet commun qui pourrait nous mener à une amitié.

Aaron et moi n'avons jamais eu de véritables amis avec qui faire des barbecues ou des soirées entre copains. C'est pourquoi je veux faire le premier pas, sortir de notre routine où nous ne sommes que deux.

-Occasionnellement, oui. Répond-elle en souriant amicalement.

Ayant du mal avec la jeune femme, Aaron me prévient qu'il va aux toilettes afin d'échapper au regard scrutateur de la rousse. Si je ne savais pas à quel point il est mal à l'aise avec des inconnus, je pourrais croire qu'il est associable, mais au point de partir, c'est que quelque chose le dérange vraiment. Après m'être tournée vers lui et avoir hoché la tête, je le regarde brièvement s'éloigner puis me repositionne face à Natasha.

Je fronce les sourcils en regardant un peu partout autour de moi. Elle a disparu. Elle s'est littéralement évaporée. Je fais plusieurs tours sur moi-même, maladroitement, afin de la chercher plus en détails, mais mes yeux ne se posent que sur les visages des passants qui me regardent comme si j'étais perdue. Déçue que mon amitié rêvée ne se soit envolée, je hausse les épaules puis pars à la recherche d'Aaron. Après plusieurs attractions fortes qui ont retourné le pauvre estomac d'Aaron, nous décidons de rentrer.

***

Après avoir pris un médicament pour se remettre des mouvements brusques des montagnes russes, mon amoureux décide de m'emmener fêter dignement ma sortie d'une vie de scolarité dans un restaurant à New York. Malgré mon insistance pour qu'il reste se reposer, sa détermination l'amène à dire qu'il va mieux et que manger lui fera le plus grand bien. Il me demande alors de mettre des vêtements aussi classes que ceux que j'avais pour ma remise de diplôme, afin de ne pas paraître tâche dans un restaurant un peu chic, avec mon jogging et mes baskets. Nous prenons chacun une bonne douche afin de se laver de la sueur de l'après-midi, puis nous nous habillons. De mon côté, je mets une simple robe rose pâle évasée et sans manche, col en U avec de simples escarpins noirs. Quant au magnifique homme que j'ai pour petit ami, il décide de s'habiller du smoking noir qu'il a l'habitude de porter pour des événements spéciaux, chose qui arrive assez rarement.

-Eh bien ! M'exclamé-je en l'observant de haut en bas avec un regard qui se veut enjôleur. Tu mets ton smoking spéciale « grandes occasions » ! Ce n'est pas un peu trop ?

-Être diplômé est une grande occasion ! Et puis, tout ce qui est en rapport avec toi est important. M'annonce-t-il en m'enlaçant.

J'accepte ce geste affectif avec un sourire tandis qu'il m'embrasse le front avec douceur. Une fois prêts, nous nous dirigeons pour la énième fois de la journée vers la petite voiture d'Aaron puis partons pour Manhattan.

***

Le trajet est un peu long pour New York, mais d'après Aaron, le jeu en vaut la chandelle, ce qui ne fait qu'augmenter ma curiosité. Il a refusé de me dire dans quel restaurant il m'emmenait ce qui me force à me retenir de l'inonder de questions. C'est tellement inhabituel chez Aaron de me faire des cachotteries que cela devient presque insolite, mais elles sont toujours d'une qualité hors normes et surtout très bien réfléchies. Nous nous arrêtons devant le Wolfgang's Steakhouse sur la 54ème rue, un restaurant très réputé pour la qualité de sa viande, mais aussi pour son prix.

-Aaron ! M'écrié-je estomaquée et horrifiée à la fois. On n'a pas les moyens de se payer ce genre de petit plaisir !

-C'est Stark qui nous offre le repas ce soir ! Sourit le jeune homme. Il sait que c'est une soirée importante pour toi, et c'est aussi un gage de bonne foi pour l'employé et l'ami fidèle que je suis.

Je reste hébétée devant le bâtiment comme si j'étais tombée sur un trésor précieux, mais Aaron me fait entrer, me faisant savoir que nous obstruions le trottoir. La salle est vraiment très spacieuse. Le parquet est magnifique, d'un bois foncé. Les murs sont, en quelque sorte, séparées en deux, la partie supérieure en béton colorée d'une peinture crème, et la partie inférieure en lambris un peu moins foncé que le sol. La lumière est omniprésente. Pas un seul recoin de la salle ne manque de clarté. Les lustres sont gigantesques et le plafond fait penser aux fresques dans les églises, sans le côté religieux de la chose.

Un serveur, lui aussi très classe, nous indique notre table près de la fenêtre.

-Je vais commander l'apéritif, toujours du cidre ? Me questionne Aaron.

Je hoche la tête et mon homme s'éloigne. Je reste seule quelques minutes à observer ceux qui dînent déjà. Plusieurs murmures se baladent entre les tables, ce qui me gêne un peu. Je n'aime pas vraiment entendre les conversations des autres quand je n'y suis pas invitée. Je décide de penser à autre chose et regarde à l'extérieur du restaurant. Le ciel est magnifique, il a un beau dégradé de couleurs, allant du bleu clair au rose orangé. Aaron revient avec un grand sourire tandis que j'ai le sentiment qu'une merveilleuse soirée nous attend.

***

Nous passons environ une heure sur le plat avant que le dessert ne soit servi. La salle est emplie d'une joie contagieuse et Aaron et moi ne cessons de rire au point que nos ventres soient pris de crampes et que nos mâchoires nous fassent mal. À la fin du repas, des coupes de champagne nous sont servies et un long sourire s'étire sur mon visage. J'adore le champagne. Je porte le verre à mes lèvres et, voyant quelque chose au fond de celui-ci, le repose immédiatement. Je regarde Aaron avec des grands yeux, et je ne saurais dire si je suis inquiète d'avoir eu une illusion ou bien ébahie qu'il y ait réellement quelque chose, mais le regard de mon amoureux se fait plus intense et, lui, possède un sourire éclatant. Je vide le verre d'un trait, me pressant afin que je puisse vérifier si je ne deviens pas folle. Je fais glisser le petit objet qui se trouve au fond de la coupe sur une serviette et je ne peux retenir un hoquet plaisir.

C'est une bague.

Mon émotion est si grande que les larmes me montent aux yeux. Aaron se positionne un genou au sol, légèrement intimidé, et prend la bague du bout des doigts :

-Hailee...

Ma chaleur corporelle augmente extrêmement vite et je commence à étouffer. Mes doigts tremblent tandis que mon cœur semble au bord de l'explosion.

-Mon cœur... Continue-t-il avec un sourire soudainement timide. Le jour où nous nous sommes rencontrés, je suis rentré par erreur dans les toilettes de filles alors que je venais d'emménager. Tu t'étais mise à rire. Un rire des plus séduisants auquel je n'ai pas pu résister. Ta voix résonnait comme une douce musique, apaisant mon malaise aussi rapidement qu'il était arrivé. Je te regardais rigoler à gorge déployée ce qui me fit rire à mon tour. Et lorsque j'ai croisé ton regard... Je ne pouvais plus m'en détacher. Je savais déjà que tu serais la part active de ma vie, celle qui rendrait mon existence captivante. Du moins, c'est ce que j'espérais. Grâce à toi, j'ai pu renaître. Tu es devenu le premier jour de ma vie. Tu lui as donné une quête, à cette vie que j'avais avant ta rencontre, t'aimer de tout mon cœur, de toute mon âme.

Mon cœur rate un battement, et probablement plusieurs. Tout le stresse accumulé ses vingt dernières secondes s'évapore. Je souris et laisse s'échapper un petit piaillement aigu, signe de mon impatience.

-Hailee Daphné Barton, accepteriez-vous de devenir ma femme ? Me déclare-t-il avec le même sourire timide qu'il arbore depuis qu'il a commencé son discours.

-Aaron Matthew Morris, commencé-je d'un air théâtral, j'accepte de partager une vie commune plus sérieuse qu'elle ne l'est déjà avec vous, à une seule condition.

Surpris par ma réponse, Aaron me regarde avec appréhension, puis éclate de rire, inopinément nerveux.

-On remplace la télévision. Lui imposé-je gentiment.

Son rire repart de plus belle, un peu moins incertain et avec plus de volonté.

-Si c'est la seule chose qui me permet de ne pas dormir sur le canapé pendant les trois prochains mois, alors je m'y contrains, dit-il en levant les mains, vaincu.

***

C'est dans la bonne humeur que se termine le repas, avec des légères traces de pudeur entre nous. Nous sommes fiancés. C'est un nouveau statut pour nous. Cela fait maintenant onze ans que nous sommes ensemble, et je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il me demande en mariage. Je ne m'étais jamais imaginée mariée, mais maintenant, je dois avouer que l'idée me plaît bien.

Nous prenons la voiture pour rentrer et pendant ce temps, j'observe la bague à mon doigt. L'anneau est fin, sculpté. On dirait une corde, scellant nos deux destins, en argent. Elle est surmontée d'un petit diamant, taillé en carré. La pierre est magnifique et éblouissante. J'ai de soudains papillons dans le ventre et je dois prendre mon mal en patience jusqu'à ce que nous arrivions à la maison, l'endroit où j'ai le plus envie d'être en ce moment, surtout notre chambre. Quand nous sommes enfin devant la maison, Aaron se gare dans l'allée. Une fois devant la porte, nous nous arrêtons sur le perron, comme à notre premier rendez-vous. La faible lumière des lampadaires de la rue nous éclaire et Aaron se tourne vers moi tout en me prenant les mains.

-Je suis heureux que tu aies accepté, me déclare-t-il avec des étoiles dans les yeux, j'ai vraiment hâte que tu deviennes madame Morris.

-Barton-Morris, le corrigé-je avec un sourire, j'ai bien l'intention de garder mon nom de jeune fille !

Une étincelle apparaît dans ses yeux tandis que son sourire s'élargit puis il m'embrasse fougueusement. Mes bras s'enroulent autour de son cou tandis que ses mains glissent sur mes hanches, me provoquant un frisson de désir. Puis ses bras s'installent sous mes genoux et il me relève. Je suis à présent dans ses bras, comme une mariée dans les bras de son amant de toujours. Ses lèvres rencontrent de nouveau les miennes et Aaron m'entraîne dans notre chambre où une nuit que nous ne sommes pas prêts d'oublier nous attend.

***

Deux semaines se sont écoulées depuis la demande en mariage d'Aaron et je travaille maintenant comme médecin à l'Elmhurst Hospital Center, dans le Queens. À présent, nous pouvons voir les infos autrement que dans le journal car la télévision a enfin été changée.

Pendant que je prépare mon petit déjeuner, un bruit de fond de l'appareil électronique me parvient. J'entends que plusieurs villes américaines ont été attaquées. Des missiles ont atterri à Los Angeles, Atlanta, Seattle, Kansas City... Les autorités pensent que Washington est visé pour un prochain assaut, mais ils ne savent pas encore d'où provient l'attaque, ni de quelle entreprise provient l'armement. Le gouvernement pense que ces violences sont dues à des conflits militaires. Reste juste à savoir entre qui et pourquoi.

Mise de mauvaise humeur par ses nouvelles totalement abasourdissantes, je décide de ne plus manger, les informations m'ayant fait perdre l'appétit. Je ne comprends pas qu'il puisse y avoir ce genre de conflits, mettant en danger la sécurité des citoyens. C'est immoral et totalement absurde.

Je suis sortie de mes pensées par le bruit assonant de l'horloge qui indique huit heures trente. Je prends ma voiture et pars pour le travail. J'arrive environ une heure après car New York n'est pas la porte à côté. Je me gare dans le parking souterrain de l'hôpital et sors prendre une bouffée d'air new-yorkais. Le ciel est très gris, proche du noir et il pleut des cordes. Pour un mois de juillet, il fait un temps de chien. Des gouttelettes glissent le long de mes cheveux et de mes joues pendant que je cours vers l'entrée du bâtiment.

Je suis subitement stoppée par un bruit fracassant qui éclate sur ma droite. Quand je lève les yeux vers l'endroit d'où provient l'effroyable son, j'aperçois de la fumée et du feu sortir d'un immeuble. La rue est en panique. Un peu après, une seconde explosion, plus violente cette fois, fait trembler le sol. Mes jambes flageolent et je suis obligée de me tenir au mur de l'hôpital pour rester en place. Je tente de voir plus en détail ce qui se passe. Un point noir dans le ciel, presque confondu avec l'obscurité des nuages, grossit à vue d'œil. Je me rends compte que c'est un objet métallique volant qui arrive à vive allure dans la direction de l'hôpital, puisque je perçois les particules de métal qui le constitue. Je mets mes mains face à l'objet qui s'approche à grande vitesse et sens une force se dégager de mes doigts, faisant ralentir cette chose volante. C'est un missile. Et j'ai tout juste le temps d'apercevoir le logo de Stark Industries inscrit sur la bombe avant qu'elle n'explose à quelques mètres de moi, en plein milieu de la rue.

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