Chapitre 14 - Prise de conscience

L'image est imprégnée sur ma rétine tandis que mon cœur n'a pas cessé une minute de battre à tout rompre. Je n'arrive pas à croire que mon père travaillait pour Stark Industries, pour une entreprise d'arme de destruction, lui qui était si doux dans les quelques souvenirs que j'ai de lui. Il semble qu'il gardait cela secret car même Clint n'était pas au courant. Je sers sa main un peu plus fort dans la mienne ce qui attire son regard. Il se penche, m'embrasse le front une nouvelle fois et me chuchote à l'oreille :

-On l'arrêtera, je te le promets.

-Jusqu'à quel point ? Jusqu'où irons-nous pour l'arrêter ? Il ne faut pas se voiler la face. On ne s'en sortira pas tous indemnes.

Je regarde mon aîné droit dans les yeux, nos visages fraternels n'exprimant plus que de l'abattement et de l'agacement. Même si je suis du côté du SHIELD, avec mes pouvoirs, Vladimir semble bien plus intelligent que nous tous réunis, c'est probablement la raison pour laquelle il a fait partie de l'entreprise de Stark.

-Nous ferons ce qu'il faut, déclare le directeur, coupant court à toutes pensées défaitistes. C'est le travail du SHIELD.

Le silence s'installe. Contrairement à ce que semble exprimer Fury, nous ne sommes pas tous du SHIELD. Aaron et Stark n'en font pas partie, mais Tony est directement lié au problème. En ce qui concerne mon fiancé, il n'est pas question qu'il soit mêlé à nos histoire, c'est après nous que Stefanski en a, pas après lui. Je m'en voudrais tellement s'il lui arrivait quelque chose, et je sais que Stefanski tentera de lui porter atteinte, pour me blesser moi, et Tony. Me voir blessée rendra Clint aussi atteint que moi, et la réaction en chaine sera chaotique. Mais je sais aussi qu'Aaron ne me laissera jamais l'enfermer dans un bunker pour le protéger, alors il faut que je trouve un moyen plus discret de le préserver sans m'attirer ses foudres.

-Coulson, l'interpelle Fury. Envoyez des échantillons du combustible au labo, je veux connaître les effets sur l'Homme.

L'agent hoche la tête et se met rapidement au travail, utilisant des sachets vide et des cotons tiges pour prélever les échantillons. Les pensées fusent dans ma tête tandis que j'ordonne d'une voix plus que convaincue :

-Non.

Tous les regards se posent sur moi, incrédules face à ma dissidence, celui de mon supérieur se fait plus imposant et autoritaire, mais je maintiens mes propos.

-Je vous conseille fortement de les envoyer à l'académie scientifique du SHIELD. Je connais quelqu'un qui pourra nous aider. Expliqué-je en soutenant le regard du Colonel, essayant de le convaincre que c'est la meilleure chose à faire. Cela permettra aussi à l'étudiant de faire ses preuves au SHIELD sur ses capacités en chimie-biochimie, et si elle nous apprend quelque chose d'intéressant, vous aurez une biochimiste remarquable dans vos rangs.

En réalité, ce ne sont pas une, mais deux personnes qui pourront m'aider. Je les ai rencontrés pendant le peu d'heures que j'ai passées dans les labos de l'académie, durant mon initiation. L'un est un ingénieur et celle qui va pouvoir nous aider est biochimiste, mais ils sont comme les deux doigts de la main, l'un ne peut travailler sans l'autre, alors qu'ils en ont largement les capacités. Nick Fury fait un signe de tête en marmonnant un simple « bien » avant de dire un peu plus fort :

-Maintenant, allez-vous reposer. Les prochains jours risqueront d'être longs et épuisants. Nous rentrons à New York demain matin, chacun d'entre nous. Continue-t-il en fixant Tony. Hailee, je crois qu'il va falloir avancer la date de votre test, que nous puissions vous donner un uniforme, une plaque et vous envoyer en mission. Natasha, essayez de trouver quel était le projet du trio de Stark Industrie et faites-moi un rapport détaillé. Comment ça leur est venu ? Est-ce un projet inachevé ? Je veux tout savoir.

Après sa tirade, le groupe se disperse. Coulson, après avoir récupéré ses échantillons, se dirige vers l'escalier, Natasha sur les talons. Fury et Stark sont côte à côte et parlent à voix basse. Clint m'informe qu'il a faim et lâche ma main pour rejoindre la cuisine, et Aaron s'approche de moi.

-On devrait faire ce qu'il dit, chérie.

Je n'ai aucunement envie de dormir, mais plutôt une envie incessante de vomir. L'air est étouffant dans l'atelier et je ne me sens plus capable de rester enfermé dans la villa plus longtemps. Malgré une courte nuit et une longue soirée, je ne ressens plus la fatigue, c'est presque à croire que trop de fatigue redonne de l'énergie.

-Vas-y toi. Je vais aller courir, je dois encore améliorer mon endurance pour le test.

Il reste quelques secondes à me fixer, je sais que c'est pour me forcer à changer d'avis car il considère cela comme une mauvaise idée, mais il lâche l'affaire et monte à son tour. Je jette un dernier regard à Stark et Fury, puis pars me changer en demandant à Jarvis s'il n'aurait pas des vêtements de sport pour femme dans la villa. Car même si Tony semble bien heureux avec Pepper, femme que je n'ai toujours pas rencontrée véritablement, il ne faut pas oublier que c'était un séducteur qui a ramené plus d'une femme dans son lit.

***

Mes pas résonnent sur le goudron à une vitesse constante. Mes poils sont hérissés sur mes bras nus, une petite brise fraiche balayant chacune des parties de mon corps non couvertes. Le bruit presque imperceptible et monotone des véhicules lointains me donne l'impression d'être seule. Je cours dans la nuit, sur une route abandonnée (allez comprendre pourquoi). Le ciel s'est découvert, j'arrive à voir les étoiles maintenant. La tête levée vers l'espace, je me demande s'il y a d'autres planètes dans le même cas que nous. Car oui, je pense que nous ne sommes pas les seuls êtres vivants dans ce vaste monde. Je me demande s'il y a d'autres civilisations plus évoluées que nous, ou moins. Je me demande s'il y en a qui sont en paix, à l'inverse de la Terre.

Voilà un moment que je cours sans relâche, le souffle court et les jambes à deux doigts de s'écrouler. Cela fait longtemps car l'horizon, caressant les vagues, passe du noir immaculé au violet rosé. Je cours toujours, les jambes flageolantes, la sueur inondant mon visage. Prise soudainement par l'adrénaline, j'accélère mes foulées et les fait plus grandes. Je sprinte maintenant et malgré la douleur que j'éprouve dans les jambes et ma difficulté à respirer, je cours de plus en plus vite. Non loin du bord de la falaise, je ne cesse de martyriser mon corps en gardant l'allure. Les choses prennent une tournure qui ne me plaît pas et à laquelle je ne m'attendais pas du tout. J'ai peur. Peur de ce que Stefanski pourrait faire de plus, peur de ce qu'il pourrait faire à Aaron. Il est ma seule raison de vivre et s'il arrive à me l'enlever, alors il aura gagné. Il aura réussi à me détruire de l'intérieur, et c'est une chose que je ne peux pas envisager. Il ne faut pas qu'il ait de raison de s'attaquer à Aaron, il faut que je disparaisse.

Les larmes ayant envahie mon visage, je vire vers le gouffre en déployant mes bras. Le vent me frappe en pleine face tandis que je chute à toute vitesse vers la mer. Je ferme les yeux un peu avant l'impact, mais au lieu de que l'eau ne me bise les os, le choc est métallique et bien moins douloureux que ce à quoi je m'attendais. J'ouvre les yeux et me rends compte que Tony s'est revêtu de son armure, ses bras métalliques me tenant fermement afin que je ne puisse même pas me débattre.

***

Je passe les portes automatiques de la demeure, Tony sur les talons, et silencieux comme il ne l'a jamais été. Je monte jusqu'à la chambre qui nous a été destiné, à Aaron et à moi, et commence à faire nos valises. Mon fiancé n'est pas là, lui qui était censé dormir.

-Tu vas surveiller chacun de mes gestes ? Demandé-je, agacée par sa présence alors qu'il vient de sauver ma carcasse. Tu veux peut-être m'aider à ranger mes sous-vêtements ?

-Sans façon. Répond-il en croisant les bras. Je veille simplement à ce que tu ne laisses pas des pensées suicidaires te dicter la vie.

-J'ai eu un moment de faiblesse, ça arrive Tony. Il n'y a pas de soucis à se faire.

C'est vrai après tout, j'ai simplement pensé qu'Aaron serait en sécurité sans moi, mais à y repenser, se serait donner satisfaction à Stefanski sur un plateau d'argent. Non, il ne faut pas qu'il obtienne ce qu'il veut. J'arriverai à l'envoyer au fond d'un trou, et j'arriverai à protéger mon fiancé.

-Tu as sauté soudainement, Hailee. Ça t'a pris d'un seul coup. Tu as réfléchi aux répercussions que ta mort aurait causé ? Tu as pensée à Aaron et à Clint ?

-Absolument ! Je ne fais que cela, penser à eux ! Penser à ce qui leur arriverait si on n'arrête pas Stefanski ! Mais comme je te l'ai dit, c'était un moment de faiblesse. Ça ne se reproduira plus.

Il fait quelques pas dans la chambre, lui qui était resté à l'entrée. La pièce est désormais baignée de la lumière du soleil levant. Tony attrape mes poignets pour m'arrêter dans mon occupation.

-Hailee. Je m'inquiète vraiment pour toi, je ne voudrais pas que tu fasses d'autres conneries dans le genre. On a besoin de toi, Aaron, Clint, le SHIELD. Moi aussi, j'ai besoin de toi.

Je lève la tête pour lui faire face. Sa barbe semble avoir poussé d'un coup, en une nuit, ses yeux sont injectés de sang due au manque de sommeil des six mois qui ont précédé cette soirée, a toujours veillé tard pour trouver un moyen d'en savoir plus. Jamais je n'aurais cru entendre Tony Stark demander de l'aide, et encore moins à moi.

-J'ai peut-être du mal à penser à autre chose qu'à moi, mais je sais que si tu nous aides, ce ne sera pas que le milliardaire égocentrique et narcissique que tu aideras, mais tout le pays et peut-être même la planète entière.

Sa manière de parler s'est faite plus douce que je ne lui connais et ses mains glissent dans les miennes.

-Tu es quelqu'un de bien Hailee. Ce serait dommage de priver un monde aussi cruel de quelqu'un d'aussi généreux et honnête.

Je ne sais pas si c'est la fatigue, ou le désespoir qui lui fait dire cela, mais j'avoue que tout ce qui sort de sa bouche depuis que nous sommes dans cette pièce est vraiment touchant. Je ne le pensais pas capable de penser rationnellement, ni même capable de faire des compliments à quelqu'un d'autre que lui, mais Tony Stark est plein de surprise.

-Tony, je crois que c'est la chose la plus gentille que tu n'aies jamais dit, le complimenté-je en lui faisant un sourire.

Il regarde ailleurs, gêné, et passe une main dans ses cheveux en témoignage.

-Ouais j'ai probablement abusé de la caféine. Je ne suis pas aussi charitable en mots d'ordinaire. Ajoute-il en me rendant mon sourire.

Prise d'un élan d'affection, j'en roule mes bras autour de son cou et l'enlace amicalement. Au début, il est un peu sceptique face à cette étreinte, puis il passe ses bras dans mon dos et me sert contre lui. Je ne peux qu'apprécier le Tony que j'ai face à moi, et je préfèrerai que cela soit ainsi à chaque fois que je le vois, mais j'ai l'impression que ce serait beaucoup lui demander.

-Merci. Cela me touche vraiment. D'ailleurs, comment tu as su que j'avais sauté ? Tu me suivais ?

-J'ai bien fait non ? Fury a demandé à tout le monde de garder un oeil sur toi. Il a bien vu que ça t'avait affecté, toutes ces révélations.

Je soupire en signe d'approbation, toujours dans ses bras. Je crois que mes angoisses sont de notoriété publique maintenant. Et peut-être que ce n'est pas plus mal, ils ne pourront que m'encourager et me rassurer au lieu de me mettre la pression plus que je ne l'ai déjà.

-N'en parle pas à Aaron, s'il te plaît. Je ne voudrais pas qu'il s'inquiète.

-D'accord, dit-il en s'écartant. Termine ta valise. Je vais le chercher pour qu'on décolle rapidement.

Il s'éloigne avant de se retourner

-Et mange quelque chose, me crie-t-il en sortant de la pièce.

Seule dans cette grande chambre spacieuse, je continue de ranger nos affaires, avec le sentiment que mon envie suicidaire était bénéfique.

***

Je me tiens sur le balcon où j'ai arrêté les missiles la veille. Le soleil continue sa montée dans le ciel tandis que je bois une gorgée de café. Je hais le café, et encore plus celui de Jarvis. Je regarde l'horizon et pense aux petits poissons qui nagent entre les armes, la biodiversité modifiée à présent.

-Quel était le but de votre saut de l'ange ? Me lance le directeur en apparaissant à mes côtés.

-Vous n'avez pas à me juger. Soupiré-je.

-Ce n'est pas ce que je fais. Nie-t-il. Dites-moi, savez-vous comment le SHIELD s'est formé ?

Le regard perdu sur les vagues, je fais non de la tête.

-Il fut créé par Howard Stark à la fin de la Seconde Guerre mondiale, commence-t-il en regardant l'horizon, plongé dans ses souvenirs.

Je tourne ma tête une nouvelle fois vers lui, un regard surpris sur le visage. Je pensais qu'Howard Stark était simplement un fabricant d'armes, fanatique d'argent. Il faut croire que je me suis trompée, et que c'est de là que vient le léger côté altruiste de Stark.

-C'était au départ une simple agence de contre-espionnage pour maintenir la paix, mais il abandonna le projet car le gouvernement n'était pas convaincu. Pourtant, un comité des Nations unies ressortit le projet du placard, discrètement. Dans un but un peu plus ambitieux. Explique-t-il avant de faire une courte pause. Hailee, vous êtes quelqu'un d'exceptionnel.

-Ma personne n'est pas exceptionnelle, seulement mes dons. Rectifié-je sans le regarder, cherchant à éviter tout sermon.

-Et c'est ce qui manque au SHIELD. Des personnes comme vous. Des personnes aux capacités hors normes.

-C'est pour cela que vous avez demandé à Stark de me suivre ? Vous avez peur que je vous lâche au moment où ça devient le plus dangereux ? Ce n'est pas parce que mes dons sont incroyables que je vais réussir à tenir le rythme. Les choses prennent des proportions auxquelles je ne m'attendais pas, et que je ne suis pas sûr de pouvoir gérer.

-Je ne me fais pas de soucis là-dessus. Vous n'abandonnerez jamais la population, et vous savez que vous lui serez bénéfique.

-Oh ne vous cachez pas derrière la population. Lui interdis-je. Vous savez Fury, en entrant au SHIELD je pensais que je sauverais des vies, pas que je ferai partie de celles sacrifiées.

-Ne vous fourvoyez pas, le SHIELD a des ennemis. Ce n'est pas le genre d'organisation qui passe entre les mailles du filet. C'est un métier dangereux, et vous le saviez en vous engageant.

Je hoche la tête. Je suis trop naïve, et je ne suis pas sûr d'avoir les qualités requises pour faire partie du SHIELD. Mais j'ai bien l'intention de m'intégrer, de me forger pour ne plus être prise au dépourvu. Car c'est de cette manière que j'arriverai à devenir ce que le Colonel croire voir en moi : une héroïne.

-Nous partons, déclare le Colonel en me tapotant l'épaule, me laissant face à une profonde réflexion sur ce que je veux réellement faire de ma vie.


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