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˚*•̩̩͙✩•̩̩͙*˚　PDV : Shoto Todoroki d'Albâtre　˚*•̩̩͙✩•̩̩͙*˚

Quand la lourde porte métallique coulisse, mon palpitant se fige. Est-ce ce qu'Izuku a ressenti en prenant sa première bouffée d'air nocturne?

Momo quitte le panneau de contrôle au creux duquel se situe l'écran d'identification oculaire. Elle m'adresse un simple hochement de tête, me signifiant ainsi que tous les voyants sont au vert – message que je transmets à mon tour aux mages de lumière. Ceux-ci passent devant nous sans un bruit, guidés par Mezo, qui a consciencieusement noté les rondes et remplacements de patrouille.

Nous ne pouvons que les regarder s'éloigner et, surtout, prier pour leur réussite. S'ils ne s'accordent pas aussi bien qu'à l'entraînement, notre plan tombera à l'eau en moins de temps qu'il n'en faut à une balle pour exploser un crâne.

« Ils arrivent à proximité du noyau. » annonce Momo au bout de quelques minutes. « Ils ont en visu les gardes qui surveillent les contours. »

Ses efforts portent leurs fruits : elle est désormais apte à rester en contact direct avec le grand Assistant. Selon ses propres dires, c'est comme si elle voyait à travers ses yeux – ce que je peine à imaginer. Mon cerveau n'est sans doute pas fait pour gérer un tel amas d'informations.

« Dès que le signal sera lancé, vous vous déploierez autour de ce noyau. » ordonne Mitsuki en arrière-plan. « Jouez le jeu à fond : nos ennemis doivent croire que nous sommes des leurs. »

« Quant aux corps inconscients, ils seront déjà dissimulés par un enchantement. » poursuit Masaru. « Veillez à ne pas le dissiper et à rester stoïques. Le moindre faux pas peut ruiner votre acharnement des dernières semaines. »

« C'est bon! » s'écrie ma meilleure amie en saisissant mon avant-bras, pupilles vides.

« Tu me fais flipper. » lui avoué-je.

« Avance! » me secoue Katsuki en me frappant dans le dos.

Je grimace mais ne rétorque pas : s'il y a bien une personne qui ne doit pas perdre de vue son objectif, c'est moi.

Nous nous élançons et suivons le chemin emprunté par nos camarades. J'entends mon rival marmonner quelque chose à ses parents, mais je préfère ne pas m'y attarder – j'ai ma propre famille dysfonctionnelle à gérer.

Les couloirs nus et froids des locaux défilent tandis que nous pressons le pas. C'est étrange, mais j'ai le sentiment que tout m'est inconnu... À croire que les couleurs chaleureuses et les charmes omniprésents des souterrains d'Ébène m'ont définitivement détaché de cet univers.

Enfin, nous émergeons du bâtiment et reconnaissons une large place aménagée en plein air, bordée de balcons permettant aux tortionnaires du Clergé de surveiller leurs apprentis depuis leurs bureaux. Nous avançons plus doucement, soucieux de ne pas nous faire repérer par un individu ayant échappé à l'intervention de nos collègues.

« Rien à signaler. » déclare Izuku, essoufflé. « Plus aucune présence spirituelle rivale à proximité. »

Je lui adresse un sourire que j'espère rassurant et, sans plus de cérémonie, sors sous la clarté incertaine des étoiles. La nouvelle lune a beau leur avoir laissé sa place, elles ne parviennent pas à éclairer suffisamment le chemin menant à l'Église... Mais ce n'est pas un problème.

Katsuki me devance.

« Personne n'a repéré les sorts de Mezo et des autres, hein? » s'enquiert-il une ultime fois.

« Non. Il n'y a plus aucun ennemi conscient dans le périmètre qui nous intéresse. » répète mon vert.

« Peu de d'Albâtre osent rester ici à cette période du cycle. » lui rappelé-je. « C'est une superstition qui nous arrange, tu te souviens? »

« Ferme-la et laisse-moi me concentrer. »

Étonnamment, c'est moi qu'il fixe en activant ses flammes : elles se déploient en petites sphères autour de ses poignets, lui permettant de les aligner en un chemin menant droit au perron. Sans attendre, nous le suivons et confions à son créateur le soin de l'éteindre au fur et à mesure.

J'ai beau ne pas voir le sommet de cette maudite bâtisse, mes souvenirs me suffisent : je sais que son clocher nous domine de sa hauteur, construit en pierres laiteuses brillantes. Entouré de pavillons conduisant aux diverses parties, il est pourvu de statues en marbre retraçant la fausse légende que l'on nous a rabâchée dès l'enfance, ainsi que de fines décorations en argent forgé qui soulignent sa pâleur.

Même en étant membre de la brigade Endeavor, je n'ai toujours aperçu cet endroit que de loin. Je ne connais que très peu l'ensemble du quartier général, au final : Momo et moi étant le plus souvent à l'extérieur en infiltration, nous ne disposions d'aucune des informations relevées par Ochaco.

Ce qui n'empêche pas le gamin en moi de frémir en franchissant les battants en bois clair, ornés d'Écritures saintes tracées à l'encre blanche.

« L'absolution n'existe pas, Shoto. »

Putain, c'est plus difficile que ce que je pensais.

La nef plongée dans l'obscurité a des allures de purgatoire. Je peine à poser mon regard sur cet ensemble de bancs lustrés, sur lesquels j'imagine une assemblée de fidèles richissimes, priant avec ferveur une Déesse qu'ils connaissent pourtant si mal.

« Je vais l'appeler. » souffle alors Momo en m'effleurant. « Rejoignez le chœur et préparez-vous, d'accord? »

J'acquiesce et, sans un mot, m'exécute. Je tremble de tout mon corps, maintenant. Rien qu'à l'idée de le revoir, d'entendre sa voix et de le toucher...

La douce main d'Izuku se glisse dans la mienne. Il la serre fort et, dans le noir, tandis que nous avançons à tâtons, j'imagine son sourire et ses jolies taches de rousseur. Je me concentre sur cette image, espérant qu'elle m'empêchera d'exploser au pire moment.

Je suis un sang-mêlé, création d'Ève et de Lilith. Je n'ai peur de rien.

« Ils s'emmerdent pas! » s'exclame Katsuki dès que nos bougies rituelles sont allumées. « Vous avez vu la taille du machin? »

« Ils ont de quoi faire. » lui fais-je remarquer en vérifiant que mon poignard est bien accroché à ma ceinture. « Tu vas halluciner quand tu verras le pognon claqué par le Clergé dans la décoration. »

J'entends les pas de Momo derrière nous, accompagnés de ceux de Mezo. Je suis soulagé de les savoir ensemble – leur bonne dynamique ne pourra que nous être bénéfique en cas de souci.

« Il vient de quitter votre appartement, Shoto. Il sera là dans une vingtaine de minutes. »

Izuku pose la grande besace qu'il a embarquée sur un des sièges alentour et s'empare sans hésiter des craies qui vont lui servir à tracer les six cercles nécessaires à l'incantation de Toshinori. Je le laisse travailler et aide Katsuki à illuminer suffisamment l'espace afin que nous puissions nous déplacer sans risquer de dégringoler du piédestal.

« Tu ne devrais pas le sortir, maintenant? » s'interroge Mezo.

« Ça dépend si Shoto est prêt à... »

« Vas-y. » le coupé-je sans cesser de m'activer.

« T'es sûr, mec? T'as pas hyper bien réagi la dernière fois. » s'immisce le blond en tapant mon épaule. « Nous claque pas entre les pattes, OK? »

« Ça ira. Vas-y, Izuku. »

Ma gorge se serre dès que je perçois le frottement de sa peau sur le velours élimé de la pochette. À l'intérieur se trouve la preuve que, peut-être, les mots de mon père n'étaient pas entièrement faux.

Le silence se fait quand mon alter ego l'extirpe de sa protection. Je ressens presque à travers lui les contours de la pierre miraculeuse, que j'ai fini par corrompre de mon ascendance douteuse.

« Regarde-la. Je t'en prie... »

Je m'obstine à ignorer sa demande.

À la place, je profite de la luminosité répandue par les cierges pour découvrir l'agencement des lieux – qui, évidemment, n'ont rien à voir avec la chapelle que j'ai fréquentée dernièrement. Leur grandiloquence ne suscite en moi aucun émerveillement ; leurs dorures, aucun intérêt.

« Bon... Je vais préparer le portail astral pour Toshinori. » lance Izuku sans forcer davantage.

Je l'écoute à peine. Mon sang résonne dans mes tempes avec la force démesurée d'un tambour, au point de m'étourdir. Seuls les avertissements répétés de Himiko, Tenko et Kai parviennent à se faire comprendre de mon cerveau malmené par la terreur.

« Dans un cas comme le tien, l'apprentissage de sortilèges complexes n'apporterait rien. Tu vas devoir laisser parler tes émotions et les raccorder à tes veines. »

Je me suis entraîné, j'ai saigné et j'ai refermé chaque blessure sans grimacer une seule fois.

« Quand tu les trancheras, tu devras être capable de sortir les lames de tes organes. Ils renferment les essais ratés de Lilith, qui n'étaient pas censés être confiés aux humains. »

J'en suis capable.

« Cette magie est plus une malédiction qu'un don. Si tu la manipules trop, tu peux y laisser la vie en te faisant déchiqueter de l'intérieur par ta propre hémoglobine. »

Ça n'arrivera pas.

« Quand tu retrouveras ta mère, elle t'expliquera le reste. Il y a d'autres utilisations que tu pourras découvrir par la suite mais, pour l'instant... Il n'y a que celle-ci qui compte. »

J'inspire et expire. Je suis un soldat, entraîné et expérimenté.

Ce don n'est qu'une nouvelle arme de plus ajoutée à mon arsenal.

« Shoto! Il arrive! » crie Momo en me secouant.

« C'est pas le moment d'être perdu dans tes pensées, ducon! » braille Katsuki à son tour.

Les cercles sont tracés. Le fragment, posé au centre de l'autel...

En apparence, il n'est qu'une pierre précieuse de la taille d'un poing. Mais, quand on s'y attarde, on remarque à quel point il est différent d'un banal minéral.

Ses contours, anguleux et tranchants, sont d'une clarté proche du quartz. On y discerne à intervalle régulier un battement semblable à celui d'un cœur – signifié par une lueur émeraude qui, sans mon intervention, serait d'une beauté inqualifiable.

À présent, il est dévoré par un rouge meurtrier qui, telle une masse de ronces, s'enroule autour dans un motif veineux répugnant. Un ornement aussi laid ne peut être un symbole d'espoir pour l'avenir, je refuse d'y croire. À mes yeux, il n'est rien de moins qu'une preuve supplémentaire du sang qui a été versé depuis que j'ai intégré Endeavor.

« Chacun à sa place, dépêchez-vous! » intervient Mezo en me poussant légèrement vers la mienne.

Je me secoue et rejoins le cercle censé représenter ma magie. Les autres m'imitent et, bientôt, seul celui occupé par un certain sorcier vert reste vide...

J'ai si souvent rêvé de le tuer. Et c'est pour ce soir.

Les portes s'ouvrent, laissant entrer un homme à la respiration haletante. Il court vers la lumière et écarquille les yeux en m'apercevant, ainsi entouré d'inconnus.

« Shoto? Momo m'a expliqué... Vous avez récupéré le fragment! »

« Ce n'est plus ton problème. » grondé-je. « Contente-toi de te taire et de nous prêter tes pouvoirs de guérison. »

Il est pris d'un hoquet de stupeur quand Izuku et Momo s'allient contre lui. Il semble lutter de toutes ses forces, mais ce ne sera pas suffisant : il ne maîtrise aucun enchantement, en bon d'Albâtre qu'il est.

Il est amené contre sa volonté dans le cercle qui le représente, puis bâillonné mentalement. Ses iris saphir ne me lâchent pas, à la recherche d'une explication qu'il n'obtiendra jamais.

Brusquement, un claquement retentit, précédé d'un flash mauve – enfin! Grâce à son apprenti, Toshinori a pu se servir de sa magie affaiblie par les années pour nous rejoindre et, surtout, mener la cérémonie prévue.

Nous y sommes presque!

« Les enfants... Je suis désolé. »

Est-ce un sourire que j'aperçois sur le visage d'Enji?

« Ochaco a été repérée lors de ses voyages... » annonce le Grand Prêtre.

... Mais qu'est-ce que c'est que ce bordel?

« Il a... ruiné son organisme. »

« Qu'est-ce que t'as encore magouillé, ordure? » demandé-je en grinçant des dents, envahi d'une rage désespérée.

« Il sait se servir de sa magie verte. » répond notre aîné à sa place. « Je ne sais comment, mais il est parvenu à la détourner de son but premier pour... générer de la souffrance. »

Non, non, non!

« Personne n'a réussi à inverser le sort... »

« Ochaco! » hurle Katsuki en quittant son cercle.

« N-nous n'avons rien pu faire... »

« L-les Protecteurs! Ils ont été repérés! Des renforts ennemis arrivent! » nous alerte Momo en écho.

Mon père profite de la panique pour se libérer de son mutisme forcé. Il me scrute sans ciller une seule seconde, ignorant délibérément les autres.

« Désolé, fils. Votre pathétique mutinerie s'arrête ici. »

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( 𝐀𝐣𝐨𝐮𝐭 𝐝𝐮 𝟐𝟖.𝟎𝟔.𝟐𝟑 )

J'ai enfin eu le temps de dessiner le troisième fragment!

C'est un projet qui me tenait particulièrement à cœur
et que je suis ravie de pouvoir te présenter ici. 💜