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˚*•̩̩͙✩•̩̩͙*˚　PDV : Izuku Midoriya d'Ébène　˚*•̩̩͙✩•̩̩͙*˚

Quand je comprends enfin les enjeux de la situation, le temps et mon cœur s'arrêtent. Ma vision se trouble, et je ne parviens plus qu'à me concentrer sur le regard haineux que lance Enji Todoroki à son fils.

Leurs traits sont similaires et, pourtant, j'y décèle de nombreuses différences – pas seulement dues à leur écart d'âge. La rancœur et le dégoût qu'éprouve en permanence le père ont creusé son visage de rides légères autour de ses yeux fourbes et de sa bouche étirée en un sourire ignoble. Là où Shoto exhale une aura paisible et une tendre loyauté, son géniteur n'a rien de plus à montrer que cet amas de brutalité...

Je ne pensais pas pouvoir le détester davantage mais, de toute évidence, les voies de Lilith sont impénétrables.

J'entends à peine les hurlements de Kacchan, suppliant Toshinori de lui dire qu'Ochaco va bien. Je le connais suffisamment pour savoir qu'il est conscient de la gravité de son état et que, vu le contentement qui émane du rictus du chef d'Endeavor, elle n'en a certainement plus pour longtemps.

Je suis paralysé.

Quand Mezo me secoue et Momo me crie de fuir, je demeure immobile, sagement planté au centre de l'emplacement réservé à ma magie violette. Nous vivons une telle catastrophe que mon métabolisme semble s'être mis en veille, de peur d'imploser.

Tout s'effondre autour de nous, et je suis juste capable de tenir sur mes deux jambes.

« Dépêchez-vous, nous devons partir! » entends-je alors mon mentor rugir.

Au-dehors, des bruits de pas précipités résonnent jusque dans le chœur de l'édifice. Est-ce la Légion Blanche qui vient nous tuer? Allons-nous définitivement perdre cette ultime bataille?

À cette idée, je tourne la tête vers le centre de l'autel, où le troisième fragment continue tranquillement de briller. Je m'en empare dans un état second, poussé par une force mentale que je reconnais au travers des pensées de sa propriétaire : Momo!

Je la scrute et remarque la sueur qui commence à perler sur son front – elle est en train de s'épuiser. Lutter contre un sorcier disposant d'une magie identique à la sienne représente un défi à la limite de l'impossible, tant il requiert de concentration et de puissance. Même si elle est dorénavant apte à rivaliser avec moi, elle n'en reste pas moins une novice d'Albâtre...

Je ne peux pas laisser faire ça.

« Kacchan! » interpelé-je mon meilleur ami aux joues mouillées de larmes.

« D-Deku? » répond-il, comme surpris de me voir.

« Déchaîne-toi! Crame tout! »

Ses iris carmin me fixent sans comprendre. Il est tellement sonné depuis l'arrivée de notre Grand Prêtre qu'il en a rangé sa rage au placard... Je me déteste de devoir la réveiller au détriment de son inquiétude pour Ochaco, mais je n'ai pas le choix si je veux nous offrir une chance de nous en sortir.

« Venge Eijiro, Kacchan! » vociféré-je en bougeant enfin.

J'ai à peine le temps de sauter sur Shoto qu'une déflagration monumentale déferle. L'autel sur lequel reposait notre trésor il y a quelques secondes est réduit en cendres en un crépitement. Le désespoir de mon frère est si grand qu'il ne cherche pas à le contenir, libérant sa colère et sa rancune sans veiller à ce qui l'entoure.

Tandis que nous tombons sur le carrelage aux pieds d'Enji, je ne peux qu'apercevoir Momo et Mezo se précipiter sur Toshinori, l'emportant dans le portail astral qui se referme aussitôt derrière eux. La détresse du trio m'est transmise avec une telle violence que je suis contraint de secouer la tête plusieurs fois pour reprendre mes esprits.

Je suis soulagée qu'ils soient partis. Ils n'auraient rien pu faire contre les armes de la Légion, pas avec des magies inoffensives comme les leurs. Je suis certes dans le même cas, mais je sais désormais que mon rôle est loin d'être terminé. Je vais devoir compter sur Shoto et Kacchan pour me protéger.

« Izuku! » rugit justement mon alter ego en me serrant fort contre lui.

« Garde le visage baissé! » lui ordonné-je.

Mes pensées tournent à une vitesse affolante, au point que les minuscules instants qui s'écoulent me paraissent des heures. Ce n'est que lorsque j'entends notre ennemi brailler que je reviens dans le présent.

Le feu de Kacchan ne faiblit pas et poursuit son travail. J'ose jeter un œil vers le Todoroki, et ne peux m'empêcher de grimacer : la scène est si affreuse que je suis saisi de remontées acides écœurantes.

Son visage bourru est littéralement dévoré par la chaleur. Les muscles se détachent du reste de son ossature, maintenant que la peau n'est plus qu'un liquide indéfinissable. Bientôt, il n'a plus assez de souffle pour formuler son agonie – il s'écroule sur nous.

Quand il le remarque, Kacchan interrompt son flot létal et s'empresse de nous rejoindre. Ses traits n'expriment aucun regret, au contraire : ils brillent d'une délectation morbide.

Quant à Shoto...

« I-il est mort? » chuchote-t-il en repoussant le corps carbonisé.

« Nan, regarde. » le détrompe le blond. « Il respire encore. »

« P-papa? »

Je pose une paume tremblante sur son dos, craignant que le choc de voir son géniteur dans cet état ne soit insupportable.

Le tortionnaire n'est plus capable d'émettre le moindre son. Inutile de déployer ma magie argentée pour comprendre qu'il est à deux doigts de passer de l'autre côté... Mon bicolore en est conscient également, puisqu'il poursuit sans attendre :

« J'aurais dû te tuer moi-même. J'aurais dû... »

Il reprend son souffle, pile quand le mien se coince dans ma gorge.

« Maman méritait un meilleur mari. Et, je... Je méritais un meilleur père. »

Les renforts ennemis sont sur le perron. Nous devons nous cacher afin que je puisse invoquer un portail stable vers le monde astral...

« J'aurais pu t'aimer, papa... Mais ça n'arrivera jamais. »

Les battements du cœur d'Enji Todoroki s'arrêtent.

C'est le moment de partir!

« Grouillez-vous de vous barrer! J'vais les ralentir! » gronde Kacchan en nous forçant à nous relever.

Il nous pousse vers les confessionnaux qui bordent la nef, mais je refuse catégoriquement de...

« Kacchan! Suis-nous! »

« Tu vas te faire tuer, Bakugo! » renchérit Shoto, paniqué.

« Peu importe, dégagez de là! »

Il ne nous prête déjà plus attention et déploie son feu sur l'intégralité de son corps. Les larmes m'aveuglent quand, juste avant de s'élancer vers la sortie, il déclare avec un sourire dévasté :

« Je vous aime, les connards. »

Je hurle à m'en déchirer les cordes vocales, traîné par mon alter ego vers l'une des cachettes repérées plus tôt. Comment fait-il pour s'éloigner, alors que notre ami va sûrement se faire tuer par les soldats de la Légion?

La porte de la cabine sacrée se referme derrière nous. Je me jette sur elle : si je me dépêche, peut-être que je pourrai le contraindre à nous rejoindre!

« Izuku! Je t'en supplie! »

La poigne ferme de Shoto me malmène et m'oblige à le regarder. Ses iris vairons brillent de sanglots retenus.

« C-c'est fini, pas vrai? » bafouillé-je.

« Tu peux te servir de tes pouvoirs? »

« Je ne sais pas... Mes magies ne répondent plus... »

« Il faut que tu génères un portail! »

« J-je ne veux plus vivre dans ce monde! Je préfère encore crever, tu m'entends? » gémis-je en tentant de m'éloigner.

« Tu n'as pas le droit! »

« Ochaco est sûrement morte, Kacchan le sera sous peu... Et nous allons livrer le troisième fragment aux sbires d'Enji! On n'a plus rien à espérer, tu le vois bien! »

« Mais moi, moi je veux vivre! Je veux être avec toi et vivre pour ceux qui n'ont pas eu le temps de le faire! »

J'en perds mes mots.

« Tu te souviens de notre premier baiser, hein? » poursuit-il en pleurant à son tour. « De ce que je t'ai dit? »

« Tu m'as attendu toute ta vie... »

« Exact. Comment je pourrais exister dans un monde où tu n'es plus? J'ai... J'ai besoin de toi! »

Ses larmes? Elles sont...

« Shoto... »

« Je t'aime, Izuku. Je t'aime à en crever et, si tu décides d'abandonner, alors... Je te suivrai. »

Je ne rêve pas : il pleure du sang!

Dès lors, la chaleur insupportable générée par Kacchan, les cris de douleur des soldats, le bruit des armes automatiques, passent au second plan. Rien ne compte plus que ces gouttes écarlates qui dévalent ses joues.

Himiko m'en a parlé à plusieurs reprises : chez les sorciers rouges, elles seraient symboles d'une passion si intense qu'elle en ferait déborder leur hémoglobine au creux de larmes d'une pureté incomparable.

Ton sang est ta force. Tu en auras besoin pour renverser l'ordre établi et créer la paix à laquelle ce monde aspire. Izuku sera ton allié le plus précieux...

Moi qui pensais que les paroles de la Déesse faisaient référence au rôle de meurtrier parricide censé être endossé par Shoto... C'est d'une telle évidence, à présent!

« J-je n'abandonnerai pas. » asséné-je.

Je m'empare de son col d'une main, utilisant l'autre pour saisir la pierre miraculeuse jusque-là rangée dans ma poche.

« Je n'abandonnerai pas! » répété-je d'une voix plus assurée. « Je t'aimerai jusqu'à ce que ce foutu monde tombe en ruines. Je t'aimerai si fort que la mort elle-même n'osera pas nous séparer. »

Et je plaque mes lèvres sur les siennes, dans un baiser si désespérément sincère qu'un portail aux mille couleurs vient nous cueillir.

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« Vous voilà! »

Toujours dans les bras l'un de l'autre, Shoto et moi observons bêtement la femme sublime qui nous rejoint en sautillant presque, soutenue par une de ces surfaces intangibles auxquelles je suis habitué. D'une pâleur parfaitement accordée au ciel bleu décoré de nuages qui nous entoure, Elle est encore plus rayonnante que ce que j'imaginais.

Ève.

Ses longs cheveux blonds nous effleurent quand Elle se penche pour me tendre la main, quémandant visiblement quelque chose. Je comprends de suite qu'Elle souhaite récupérer le fragment manquant et, sans attendre, le lui confie.

« Je te remercie, Mon gentil Izuku. »

Ses yeux en amande, d'un violet clair qui n'est pas sans rappeler celui de ma magie, brillent doucement.

« Vous avez été si forts! » reprend-Elle en s'accroupissant à nos côtés, déployant la traîne de son interminable robe vaporeuse. « Je suis fière de vous. La guerre est finie. »

Je fonds à nouveau en larmes, épuisé et... soulagé. Je suis si content d'entendre ces mots, de plus prononcés par Elle!

« Malheureusement... Je ne pourrai pas ramener vos camarades. Ma sœur et Moi sommes capables de beaucoup, mais sommes aussi impuissantes que vous face à la mort. J'en suis sincèrement désolée. »

Je sens Shoto trembler, terrifié à l'idée de ne peut-être plus revoir Ochaco et Katsuki... Ce que je ne comprends que trop bien.

« Nous savions dans quoi nous nous engagions. » murmure-t-il.

« Vous avez agi pour la préservation du plus grand nombre... Peu de mortels en auraient été capables. La peur est souvent plus forte que les meilleures intentions, et vous avez réussi à la surpasser au profit de votre amour. »

Elle Se redresse et nous couve d'un regard empli d'affection.

« Il faudra laisser le temps faire son œuvre, mais Je vous promets que tout ira mieux. Vous pourrez accueillir votre avenir sans crainte... ensemble. »

Puis, Elle sort de Sa manche un joyau à la limite du transparent, et l'approche du nôtre.

« Peu importent les cérémonies, les offrandes et les textes sacrés. » souffle-t-Elle en les contemplant. « Seul un attachement sincère est capable de préserver la foi. »

Shoto et moi sursautons lorsqu'une sphère sombre se forme juste à côté de nous, s'ouvrant en une spirale nébuleuse emplie d'étoiles.

Évidemment...

« Lilith. » chuchotons-nous.

« Mes enfants. » dit-Elle en émergeant, un immense sourire étirant Ses lèvres pleines.

Plus grande que Son aînée, Elle est dotée de ces cheveux noirs infinis que j'ai étudiés de si nombreuses fois grâce aux bustes exposés dans nos souterrains.

« Merci pour tout. »

Dans Ses yeux d'un bleu profond, nous apercevons la société qui nous attend. Elle est dure, instable, souvent cruelle...

Mais elle peut aussi devenir si belle!

« Vous serez heureux et écoutés. »

Ève vient enlacer délicatement Sa cadette.

« Soyez bénis! Vos sangs gouverneront ce Nouveau Monde. » conclut-elle.

Et nous rentrons chez nous, sans nous lâcher une seule seconde.

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