Chant de la liberté

Il entonna une mélodie qu'il n'avait jamais chanté auparavant, cet air dont je me souviendrai toute ma vie. Cette musique qui n'avait pas besoin de paroles pour qu'on puisse la comprendre, ce chant qui annonçait à chacun, ce qu'il avait besoin d'entendre. Je sus alors, que Dieu n'avait pas négligé nos prières, qu'il nous apportait de l'aide.

Le coq ne fut pas le seul, pas le seul à me sortir du lit, ce matin-là.

Quand j'ouvrais les yeux, je vis au-dessus de moi mon grand-frère, Henri. Il me secouait de toute sa force, et hurlait de me réveiller. Je m'appuyais alors doucement sur les coudes, lui demandant silencieusement ce qui lui prenait. Il me répondit dans des paroles presque incompréhensibles, mélangées au rire, aux larmes de joie, à ses yeux reflétant le soulagement, le bonheur pur, à ce sourire si grand sur son visage que j'en avais mal pour lui.

Dans ce tas d'émotions que je ne pensais pas revoir un jour, je discernai une phrase, celle qui a changé ma vie : « Nous sommes libres, sœurette. ».

Ma joie s'écoula alors doucement de mes yeux, et je me jetai dans ses bras. Il m'ordonna de vite me préparer, pour sortir de cet endroit maudit. Il ne fallut pas me le dire deux fois, et à peine passait-il le pas de la porte que je changeais ma chemise de nuit pour une robe blanche que j'avais gardée désespérément pour ce jour.

En sortant de chez moi, ce jour-là, ce fut comme si je redécouvrais ce village. Ce patelin où j'avais grandi, cet endroit que je considérais comme un enfer, mais qui fut transformé, en l'espace d'une nuit, en paradis. Mon frère revint vers moi dès que je fus dehors, et me prit la main, pour que l'on puisse, enfin, sentir ce tout nouveau sentiment.

Comment vous expliquer ce que l'on ressentait ? C'était si bon, cette émotion est si difficile à décrire, tous les mots pourraient me servir pour vous raconter ce qui nous arrivait, mais aucun n'exprimerait vraiment cette sensation, ce fut comme si...

Comme si le sommeil n'était plus le seul échappatoire, comme si le soleil brillait autant que le noir.
Comme si les nuages reflétaient nos pensées, comme si nager repoussait le passé.
Comme si courir nous empêchait de souffrir, comme si le courage nous permettait de souffler.
Comme si chanter évacuait nos blessures, comme si charmer effaçait nos fêlures.
Comme si rire n'était plus un rêve, comme si le martyr déclarait une trêve.
Comme si une bouffée d'air rentrait dans vos poumons, comme si bafoué, l'avenir ne tournait pas rond.
Comme si on pouvait briser un mur du poing, comme si en parler nous faisait du bien.
Comme si ces bruits cessaient de retentir, comme si certains cherchaient à se repentir.
Comme si lire amenait la paix, comme si la liberté avait ressuscité.

Le coq ne fut pas le seul, pas le seul à me sortir du lit, ce matin-là.
Ce matin-là, il fut accompagné de la liberté.


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