Suspendue dans le temps et dans le vide

        J'ai toujours adoré les paysages de montagnes. Ces géantes au sommet recouvert de neige et aux flancs parcourus de verdure, c'était si beau ! C'est pourquoi je fus contente de passer mes vacances d'été, celles de l'année dernière, dans un centre en haut de l'une d'elles, en compagnie d'autres jeunes engagés comme moi. Un bon bol d'air frais alors que ma famille subissait les quarante degrés de ma ville natale, quel bonheur !
        Ce jour-là était prévue une randonnée de six heures. Quand j'avais vu le programme, j'avais halluciné : moi, tenir aussi longtemps à marcher ? Mais je relativisai rapidement. Ça allait me faire un bien fou, j'allais voir des choses magnifiques, passer du temps avec mes nouveaux amis et il y aurait forcément une pause, surtout pour manger notre pique-nique sous le soleil déclinant du soir arrosant les monts d'or. Quoi de mieux pourrais-je espérer ?
        Alors, avec toute ma bonne volonté et ma curiosité, je me mis en marche sur le sentier que je connaissais bien, maintenant, après six jours sur place. Celui qui allait vers le haut de la montée herbeuse. Lorsque nous fûmes là-bas, j'étais essoufflée. Je dus avoir une de ces têtes, car l'une des encadrantes me demanda, inquiète, si tout allait bien. Oui, tout allait bien. Enfin, pour l'instant.
        Plusieurs instants plus tard, alors que le randonneur qui nous guidait- très sympathique au passage - nous avait fait passé par tous les chemins possibles et imaginables et que nos chaussures étaient maculées de boue, je marchais sur un sentier étroit au côté de l'une de mes amies, celle avec qui j'avais le plus d'affinité ici. Soudain, une motte d'herbe humide fit glisser mon pied sur le côté et m'entraîna dans le fossé.
        Tout se passa si vite. Dans une tentative désespérée, ma main parvint à agripper une touffe herbeuse, peut-être la même qui m'avait mise dans cette galère. Mon cœur battait la chamade. Comme celle-ci céda tout de suite sous mon poid, je dut enfoncer mes ongles dans la terre, mais je glissait quand-même. Mes pieds, eux, gigotaient vainement dans le vide, tentant de s'agripper tant bien que mal à la paroi. Je me crut tout à coup dans un dessin animé, comme Le Roi Lion. Oui, j'étais Mufasa, qui suppliait quelqu'un qu'on vienne m'aider. Ma vie ne tenait plus qu'à un fil, ou plutôt à dix ongles dont certains se cassaient.
        Oui, tout se passa vite, mais cela me parut une éternité. À un moment bref, je crus que c'était la fin. Je voyais déjà ma vie défiler devant moi, puis la tête effondrée de ma famille lorsqu'elle apprendrait ma disparition. Mais je n'avais pas le temps de réfléchir ni même de penser. Tout s'enchaîna à une telle vitesse que je ne put le faire. C'était trop rapide et trop long à la fois, dans un étrange mélange. J'étais, en plus d'être suspendue dans le vide, comme suspendue dans le temps, qui s'écoulait différemment. Je n'en eu aucune notion à ce moment-là. Mais je me rendis vite compte qu'il ne s'agissait finalement que de quelques secondes. Car, au contraire de Mufasa, on vint à mon aide.
        Mon amie, effrayée et sans réfléchir, empoigna mon t-shirt de sport et tira dessus de toutes ses forces. J'en profitai pour lui tendre l'une de mes mains, qu'elle attrapa et tira encore plus fort. Avec un peu d'efforts et d'aide de la part de mes jambes tremblantes, elle parvint à me ramener sur la terre ferme. J'eus l'impression de prendre ma première respiration depuis un mois. J'éclatai de rire pour évacuer le stress. M'étant laissée tomber au sol, je me relevais sans tout de suite réaliser. Puis, je compris : elle m'avait sauvé la vie.
        Après lui avoir dit et l'avoir mille fois remercié entre deux éclats de rire nerveux, je constata le pitoyable état de mes ongles, noircies et pour quelques uns arrachés. Ç'aurait pu être ma vie... me dis-je, réalisant enfin. Je repris mon chemin, bouleversée. Le reste de la marche, ma pote ne cessait de dire à tout le monde, ados comme adultes, qu'elle m'avait sauvé la vie, chose que je confirmai. Grâce à elle, je pus profiter d'un magnifique instant à dévorer des sandwichs et rigoler entre amis sous la lumière dorée du couchant, devant une splendide vue. Je pus redescendre avec tout le groupe et chanter des chansons en chœur. Je pus rire, et juste respirer même. Je n'oublierai jamais cette aventure pleine d'émotions, ni cette jeune fille qui m'avait, ce jour-là, sauvé la vie. C'est grâce à elle que je suis ici à vous parler.

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Gagou_gagathe ne te méprend pas, cette mésaventure m'est vraiment arrivée, je n'invente strictement rien, et j'ai vraiment été traumatisée ! 😂

Je suis vraiment désolée pour le retard, je n'ai pas eu une heure de libre depuis le début de la semaine (j'ai fini tous les jours à 18 h + j'avais mon bac blanc 😭), mais je comprendrais si ce n'est pas valable :)