Pourquoi existes-tu ?
Les nuits suivantes, au milieu du champ de fleurs nouvellement né et des étoiles filant dans le ciel comme des canons de lumière, nous marchons.
Au milieu de la pullulation, nous nous prenons à exister. Et à exister presque matériellement !
Si le silence est partout autour de nous et bah nous, nous le brisons en parlant et en se questionnant mutuellement.
Marcher à ses côtés me paraît parfois étrange et en même temps, presque naturel... C'est un peu comme si j'avais toujours marché à ses côtés mais qu'avant je ne m'en rendais pas compte.
-Cet endroit est beaucoup plus beau que quand nous sommes arrivés.
-Il était vide, c'est pour cela. Il n'existait pas, ou pas assez.
-Et maintenant nous le remplissons... Tu crois que c'est ça au fond, notre rôle ? Combler l'insuffisance ? je lui demande en hésitant.
Il secoue la tête.
-Non. Nous sommes là pour nourrir le monde et rendre chaque instant précieux.
-Combler le temps alors ?
-Non. Combler les gens !
L'émotion me prend à la gorge sans que je m'y attende vraiment et je suis soudain pris de fierté pour tout ce que je suis, ce que nous sommes.
-Peut-être, oui.
Il s'arrête de marcher, alors par mimétisme je m'arrête avec lui. Il regarde le champ de fleur s'étirer au devant de nous et me lance :
-Tu existe pour combler les gens tout simplement, tout difficilement.
-Et toi ? Pourquoi existes-tu ?
Il hésite longuement et se renferme sur lui-même, sous une carapace d'obscurité.
Il ne répond pas. Il ne le veut pas.
-Moi, je pense que tu existes pour rappeler aux gens que chaque instant est précieux... Pour maintenir les souvenirs de ce que nous sommes et de ce que chacun a été. Tu es la mémoire, tu es l'histoire.
-Pourquoi est-ce que tu dis ça ?
-Parce que depuis que je te vois toutes les nuits dans ce monde qui n'appartient à rien, je veux profiter de tous les instants ! Et aussi parce que tu m'as promis de protéger mes souvenirs de l'oubli !
Il se tourne vers moi et il soupire. Son regard se plante dans le miens.
Je m'attendais à rencontrer à nouveau la terrible tristesse qui ronge souvent ses yeux émeraudes mais à la place, j'y rencontre la détermination.
-Oulalaaaaa ! C'est quoi ce regard très peu habituel ? On dirait que tu vas dévorer un ogre !
Après une courte pause dans ma phrase, je ne peux pas m'empêcher d'ajouter :
-Ça te va bien.
Il cligne plusieurs fois des paupières, ne sachant pas comment interpréter ce que je viens de lui dire. Puis, il se ressaisit.
-Je vais te dire pourquoi j'existe. J'existe parce que toi, tu existes. Voilà la vérité.
Ce sont les plus beaux mots que l'on ne m'ait jamais dit.
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