Ta peau contre la mienne, ton âme embrasant la mienne, ta voix sur la mienne ; ne te sépare de moi que mon souffle sur tes lèvres. Et c'est déjà trop. Je me décide, enfin. Tu m'as laissé le temps, toi, contrairement aux autres. Tu m'as respectée et adorée comme un cadeau céleste. Je n'en suis pas un, mais t'en remercie. Tu mérites mon corps autant que je mérite ton amour. Ou n'importe quel amour. Celui de n'importe qui... Mais je réfléchis trop. Alors, je me décide, enfin. Je franchis la ligne rouge séparant nos bouches, la ligne rouge que j'avais soigneusement tracée, soigneusement tendue entre nos deux corps, cette ligne rouge qui remplaçait un voile pur trop souvent ignoré, bafoué, usé. Je me décide. Mes lèvres frappent cette barrière abstraite, et pourtant si réelle il y a peu, devenue mince, faible, transparente. Elles frappent et terrassent ce qui me séparait de toi, plongent en ton âme et, débordant de désir, s'abreuvent de cet amour mythique, presque magique, que seul toi a le pouvoir de leur offrir. Seul toi... Ton amour est si fort, il transperce ma pudeur et la brise, temporairement, oui, le temps d'un soir. Ton cœur à nu, ton corps en offrande à celle que tu crois ange, tu mérites ma franchise.
C'est donc de ton amour que je m'abreuve : il est véritablement exquis. L'élixir est infini, car le puits est sans fond. La métaphore est sinistre, car l'amour est mortel.