Coupable
Onze heures, c'est le soir. J'ai l'esprit embrouillé et je ne crois plus en rien. J'ai pris une décision. Je défie quiconque de venir me raisonner : je suis en état de tuer.
Je m'approche du coupable, de l'ignoble personnage qui s'est permis l'impudence de naître en ce bas monde il y a de cela 17 ans. Ce petit être répugnant qui, non content de voler le temps de tous ceux qui l'aimèrent, avait décidé de devenir un adolescent aussi inutile qu'encombrant. Je le fixe avec dégoût, je me vois dans ses yeux, je fais la moue. Il me renvoie le même regard empli de mépris : "Comment ose-t-il éprouver des sentiments négatifs pour autre que lui ?". Je recule, effrayé, par lui, par moi. Je ne comprends pas ce qui se passe : "Deviendrais-je fou?". Surpris, je m'aperçois que l'autre a aussi reculé, il a l'air terrifié, ou peut-être qu'il m'imite. Je ne veux plus le voir, mes paupières se ferment. Des larmes coulent alors le long de mes joues : "Pourquoi cette souffrance ?". Je devrais être en train de mettre un terme à ses jours et, au lieu de cela, je pleure comme un enfant, en position foetale, dans un coin de ma chambre. Hors de question ! Je dois accomplir ma mission, le monde se porterait tellement mieux s'il n'en tachait pas sa surface. Porté par cette résolution, je me relève. Je ne le vois plus. Je me rapproche du point de conflit, il apparaît, il avance au même rythme que moi. Dès lors que je vois son visage, la rage s'empare de moi. Je découvre des restes de larmes sur cette face visiblement en souffrance. "Pauvre diable, misérable incapable !" Je me mets à trembler, j'attrape une paire de ciseaux et m'écrie : "Tu mérites toute la souffrance du monde, mais t'accorder cela serait te donner trop d'importance ! Tu n'es qu'un vulgaire microbe, un virus que je dois éradiquer !". Ma douleur se remet à se déverser hors de mon âme, par mes yeux d'abord, puis elle glisse le long de mon bras droit, effleure mon poignet, embrasse la paume de ma main et prend le contrôle de mes doigts tremblant, les rendant fermes et sûrs d'eux tenant l'arme de justice.
Je ne me vois pas frapper. Mais, face à moi, je vois son visage se crisper et se tordre. Les ciseaux sont profondément enfouis dans son cou, ses yeux sont révulsés par la douleur. Et du sang a éclaboussé le miroir. Je tombe, tout devient noir. Enfin.
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