Partie 3 - Chapitre 7


 Nous poussâmes la voiture sur plusieurs mètres pour recharger les batteries. Athéna conduisait, c'était la seule dont les parents avaient autrefois, possédé une voiture. Elle n'avait pas son permis, elle ne l'avait jamais passé mais c'était la plus informée. Nous décidâmes, avant de prendre la route, de laisser Athéna s'entraîner. Nous ne souhaitions pas mourir dans un accident.

Nous rejoignîmes lentement un parking, devant un vieil entrepôt, sûrement un ancien supermarché. Décidément, rien à Las Vegas ne ressemblait à notre cité. Pas de coeur financier, pas de bidonville, pas d'usine et surtout, pas de remparts, seulement des grillages surmontés de barbelés, rien d'autre.

Sur la banquette arrière, Sol avait pris place au milieu et se penchait en avant, accoudé à nos sièges. Athéna commença doucement, nous faillîmes nous prendre de nombreuses bordures et murs ce qui "enchanta" Sol qui criait sur elle, à chaque fois que nous nous approchions trop près d'un obstacle.

— Arrête de me hurler dessus ! s'exclama Athéna, alors que Sol venait de critiquer son freinage qu'il jugeait trop brutal.

— Mais applique-toi ! Nous ne ferons pas dix kilomètres sinon !

— Ce n'est pas si simple ! s'égosilla-t-elle. Je n'ai pris que quelques leçons, et c'était il y a bien longtemps !

Athéna s'efforça de comprendre et d'assimiler les pédales. Elle s'appliqua et persévéra. Vers minuit, elle conduisait plutôt bien, ce n'était pas parfait, il lui arrivait de caler, mais elle roulait assez bien pour trouver de l'eau qui désormais, nous manquait cruellement.

Le lendemain matin, nous rassemblâmes nos affaires dans la benne, Ares, Charly et Noah s'y installèrent.

J'étais toujours assis à l'avant sur le siège passager. J'étais celui qui donnais les indications de la carte.

Nous roulions dans les canyons, entre les rochers aux couleurs virant du rouge, au sable, à l'orange, en passant par le gris. Les roues soulevaient un nuage de poussière épaisse. Ceux installés à l'arrière de la voiture, dans la benne, se protégeaient le visage avec des masques de ski et des foulards qu'ils avaient enroulés autour de leurs gorges, visages et cheveux.

Kaya dormait, le remède qu'elle avait pris dans le hangar avant de partir semblait avoir fait un superbe travail de ralentissement de l'avancée du virus. Comme s'il l'avait momentanément bloqué, tel un barrage.

Nous remontâmes un cours d'eau, aujourd'hui desséché. Nous trouvâmes par chance, un lac d'eau visiblement fraîche et propre à la consommation. Nous avons mis pied à terre.

— Je vais la goûter et si je ne suffoque pas dans les prochaines minutes, considérez cette eau comme potable, dis-je en m'avançant.

— Pourquoi toi ? demanda Sol.

— Parce que je suis déjà malade, que je cours plus vite que toi et que je suis meilleur au pierre, feuille, ciseau !

Il fulminait. Ni une, ni deux, nous nous élançâmes vers l'étang. Il but une gorgée d'eau le premier et leva bien haut les sourcils pour me narguer.

— Au moins, maintenant, c'est réglé pour de bon, je suis meilleur que toi à la course, Le Formidable ! assura-t-il fièrement.

— Nous verrons !

L'eau n'avait pas tué Sol, de toute manière, nous ne tenions plus. Nous avions trop soif, soit nous mourions déshydratés, soit malades. Dans le premier cas, comme dans le deuxième, cela allait être douloureux. Autant se soulager d'un problème.

Nous prîmes une douche incroyablement revigorante ! Même sans savon, le simple fait de pouvoir tremper son corps dans l'eau était un soulagement. J'avais l'impression que ma dernière douche remontait à des années. Une seconde peau formée de crasse venait de m'être arrachée ! C'était incroyablement bon.

Les trois jours suivants, nous restâmes près du lac, dans une grange où nous avions installé des hamacs. Le vent faisait craquer le bois qui nous protégeait ce qui nous plongeait dans une atmosphère très angoissante et peu propice à la vie de longue durée.

Nous repartîmes vers l'ouest, mais vers San Francisco, Los Angeles nous semblant ridicule. Nous ne savions même pas si cela avait bien été le nom que portait notre ancienne cité avant la guerre. C'était l'une des seules villes n'ayant pas repris son nom d'origine après la guerre de 50.

Athéna nous assurait que d'après les cours qu'elle avait suivis, la situation géographique correspondait à celle de Los Angeles, mais nous ne pouvions pas y aller, sachant que Le Clan y était installé.

Nous roulions dans les canyons à la recherche d'une source d'eau fraîche où remplir nos gourdes, celle dans laquelle nous avions pris de l'eau ayant été ravagée par une tempête de sable, la nuit précédente.

— Adam, essaie de te reposer, me dit Athéna en me dévisageant.

— Je n'y arrive pas, dis-je en observant mon reflet dans le rétroviseur.

Quelle tête ! J'étais d'un pâle à faire peur et mes yeux étaient injectés de sang, comme ceux de Kaya. J'avais des cernes bien lourds et pourtant, je n'avais pas sommeil.

Un bruit de pétard nous inquiéta. Noah donna un grand coup de poing sur le toit de la voiture. Athéna ne ralentit pas, elle accéléra même. Je jetais un coup d'oeil dans le rétroviseur. Une voiture nous suivait, elle fonçait à vive allure sur nous. Athéna donna un grand coup sur l'accélérateur faisant rugir le moteur. Nous n'avions donc aucun répit ! Il fallait toujours que quelque chose vienne perturber les petits moments agréables que nous pouvions obtenir.

Le pickup accéléra considérablement, le nuage de poussière que soulevait les roues nous empêchait presque de voir la voiture qui nous suivait et qui gagnait du terrain. C'était un gros 4x4 avec à l'avant, accroché par des chaines au pare-choc, le crâne d'une bête à cornes. Alignés, sur tout le large du capot, des crânes, des crânes humains ! Un frisson me parcourut des orteils aux oreilles ! Les roues étaient aussi grandes et grosses que celles d'un tracteur et la carrosserie couleur sable était recouverte de poussière. Il nous était impossible de voir l'intérieur, le pare-brise et les fenêtre étaient teintés.

— Plus vite, plus vite, marmonna Sol serrant les mâchoires et observant constamment l'arrière de la voiture.

— Et si c'était des robots ! Ou Le Clan ! s'exclama Adonis.

— Dans les deux cas, ils nous tueront, ajouta faiblement Kaya.

— Enfin, juste Adam et toi, rectifia Sol, nous, nous sommes valides, ajouta Sol en haussant les épaules, mais vous... Je lui donnai un faible coup de poing dans le bras.

Athéna était plus concentrée que je ne l'avais jamais vue. La voiture arrivait à notre niveau, nos poursuivants allaient bien trop vite. Elle donna un coup à l'arrière de notre véhicule, nous faisant valser en avant et faisant pousser un cri de surprise ou un grognement.

— Ath ! hurla Noah dans la benne. Elle soupira de rage et appuya sur l'accélérateur faisant dangereusement monter les compteurs.

La voiture nous redonna un coup ce qui fit enrager Athéna, qui appuya de nouveau sur la pédale d'accélération.

Nous entendîmes des coups de feu, Ares, Charly, Hélios et Noah tiraient tous les quatre sur le pare-brise de la voiture qui nous poursuivait mais à part quelques fissures, rien ne bougeait.

— Ath ! beugla une nouvelle fois Noah.

Elle donna un grand coup de volant sur la gauche et sur le frein. Nos poursuivants continuèrent leur course et s'arrêtèrent violemment de la même façon qu'Athéna.

Elle poussa un petit cri, surprise par ce qu'elle venait de faire et elle appuya de nouveau sur l'accélérateur, passant perpendiculairement derrière nos poursuivants, nous engageant dans les canyons. Le 4x4 fit vite demi-tour et nous poursuivit. Il gagnait de nouveau du terrain, il n'y avait presque aucune issue.

— Sème-les ! hurla Hélios à l'arrière de la voiture.

— Dites-lui de se taire, marmonna Athéna en accélérant et en zigzagant entre les rochers plus ou moins gros. Nous nous enfoncions de plus en plus dans les canyons qui semblaient se refermer sur nous, nous piéger. Ils étaient de plus en plus hauts, de plus en plus menaçants.

L'autre véhicule gagnait toujours du terrain, roulant encore plus vite et avec plus d'agressivité qu'auparavant. Le moteur rugissait à en faire peur. C'était comme s'il allait exploser à tout moment. Le nôtre faisait un bruit terrible, j'avais l'impression qu'il allait lâcher, que c'était une gazelle poursuivie par un jaguar, que c'était la course de sa vie. Une autre secousse ! Ils nous avaient rattrapés pour de bon et ils nous faisaient payer notre affront en nous donnant des coups qui faisait trembler notre pickup. Une sortie de route nous menaçait à chaque instant. Athéna était agrippée au volant comme à sa vie, elle essayait tant bien que mal de maintenir le cap.

Je me sentais de moins en moins bien, mon coeur se serra soudain et je me pliais en deux. Courbé ainsi, je ne parvenais pas à respirer correctement mais il m'était impossible de me redresser, mon coeur étant trop douloureux.

— Adam ! s'égosille Athéna. Je lui fis signe de se concentrer sur la route.

— A droite, lui dit Sol en observant l'écran du GPS. Maintenant ! lui dit-il. Elle donna un grand coup à droite. Faisant pester les garçons à l'arrière qui se cognaient sur les parois de la benne.

Le virage me donna la nausée. Je plaquai une main gelée, aux veines de plus en plus visibles, sur mon front bouillant.

Une autre secousse nous fit bondir, elle était bien plus forte encore que celles l'ayant précédées. L'écran grésilla et s'éteignit. Nous n'avions plus de carte.

— Le pneu ! hurla Noah en se rattrapant de justesse à Charly alors qu'il était sur le point de passer par-dessus bord. La voiture ralentit légèrement, elle tremblait complètement. Sol m'obligea à me redresser, me tapota l'épaule et sortit de son sac à dos une petite seringue de vaccin.

— Non, lui dit-je faiblement en poussant la fiole. Une secousse la fit tomber de ses mains.

— Adam ! s'agaça Sol. Il faut que tu en prennes ! me réprimanda-t-il.

— Je ne veux pas ! Elle en a plus besoin..., une violente secousse me propulsa vers l'avant, la ceinture me rattrapa mais me lacera le torse, me faisant hurler de douleur. Sol fut projeté en avant aussi et se cogna sur le tableau de bord. Il se releva, un filet de sang coulait le long de son front et inondait son oeil gauche. Il l'essuya avec sa manche.

Athéna tourna à gauche et à droite, la voiture derrière ralentit. Nous nous demandions pourquoi quand Athéna hurla, un cri strident qui me déchira les tympans. Elle freina encore plus brusquement que la première fois et tourna le volant d'un coup sec à gauche. La voiture grinça, les trois pneus restant crissèrent sur le sol rocailleux, ils soulevèrent un épais nuage de fumée. La voiture s'arrêta au bout de quelques mètres. C'est quand elle heurta doucement la paroi du canyon qu'elle se stoppa pour de bon. Athéna nous regarda tous avec de grands yeux ronds.

— Tout le monde va bien, demanda-t-elle à l'intention des garçons à l'arrière.

Nous étions arrêtés dans une impasse. Autour de nous, de hautes parois rougeâtres formaient un demi-cercle. La voiture qui nous poursuivait s'arrêta au milieu, comme si elle était l'artiste au milieu d'une piste de cirque.

J'avais eu une passion pour le cirque, petit. Il n'en existait plus, mais j'avais vu beaucoup de films et documentaires, cela avait dû être grandiose.

Une silhouette, je n'aurais su dire si c'était une femme ou un homme, sortit du coté passager avant et pointa un pistolet vers nous. La silhouette se cachait presque entièrement derrière sa portière, seuls son bras et le haut de son crâne étaient visible. Athéna serra une petite arme de poing dans sa main, mais que pouvait-elle faire ? Noah pointa une arme plus imposante, trouvée dans l'avion de marchandises, vers le véhicule et il tira. L'individu ne bougea même pas et tira à son tour. La détonation était comme un coup de canon dans les vieux films de pirates que j'avais eu l'occasion de visionner.

Nous nous sommes tous baissés. Nous nous demandions ce qui avait été tiré. Puis, un bruit de tic-tac métallique nous intrigua. Dans le creux du levier de vitesse, une petite grenade. Avant que nous ayons pu réagir, une fumée semblable à celle dans la bâtisse de la ville robot s'en échappa. Un gaz oranger inodore.

— Ath ! dis-je en toussant. Elle essaya de décrocher ma ceinture qui semblait bloquée. Je tirais dessus de toutes mes forces, qui étaient bien faibles ces derniers jours. Sauve-toi ! lui ordonnais-je. Noah et les autres étaient hors de la voiture.

Athéna ouvrit sa portière et sortit avec difficulté. Elle tomba sur la terre en toussant comme la première fois que nous avions rencontré ce gaz. Sept ou huit individus sortirent de la voiture et pointèrent leurs armes sur notre groupe qui se frottait les yeux et toussait légèrement. Athéna elle, dormait déjà, allongée paisiblement sur le sable.

J'étais bloqué, je luttais, mes yeux se fermaient et comme la première fois, impossible de résister bien longtemps.

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