Partie 3 - Chapitre 5
Tapis derrière toute une rangée de buissons fruitiers, nous attendions que Herbert nous donne des indications et des ordres. Il observa sa tablette et se tourna vers nous.
— Le tour de garde va être pris dans quelques secondes, nous informa Herbert. Effectivement, les deux soldats en haut de leur tour disparurent à peine dix secondes plus tard. Herbert demanda à Noah de le suivre et à nous de rester silencieux. Ils avancèrent furtivement jusqu'au portail puis Noah leva la paume de sa main contre un lecteur incrusté dans l'un des murs en pierre qui entourait le portail en fer forgé, haut de plusieurs mètres. Herbert entra un code sur un petit clavier sous cet écran et Noah approcha son visage d'un petit objectif qui scanna sa rétine.
Nous retenions notre souffle, les sentinelles n'étaient toujours pas revenues, c'était maintenant ou jamais pour entrer. Je regardais furtivement ma montre, j'avais l'impression que les trois minutes s'écoulaient beaucoup trop vite. La porte ne s'ouvrait pas. Herbert donna un coup dans l'écran avant de siffler. La trentaine d'hommes qui nous accompagnaient se ruèrent vers la porte, le drôle de canon en première position. Herbert empoigna le bras de Noah et il rejoint notre groupe derrière les buissons.
— Protégez vos oreilles et baissez-vous, nous ordonna-t-il.
A peine sa phrase achevée, un vrombissement de plus en plus aigu se fit. J'eus tout juste le temp d'aplatir mes paumes de mains sur mes oreilles. Une déflagration souffla le portail qui vola dans la base. La force de ce je ne sais quoi qui était sorti du canon fit trembler la terre et les arbres qui, à la lisière du bois, perdirent leurs feuilles. Herbert poussa un cri de joie et lui et ses sbires coururent dans la base tels des barbares envahissant un village. Leurs bras chargés d'armes, criant de victoire et d'euphorie.
Notre petite troupe se faufila dans la base en rasant les grillages intérieurs, le combat au centre de la piste d'atterrissage et de décollage faisant rage entre soldats de la bulle et sbires de Herbert. Des conteneurs et des caisses nous permettaient de nous cacher, nous progressions bien plus rapidement que Herbert, ce qui nous donnait espoir quant à la réussite de notre premier plan, celui qui visait à nous échapper sans les malades.
— Place 1175, nous assura Noah en tête. Ares était juste derrière, Kaya sur son dos. Athéna, Sol et moi fermions la marche. Une explosion retentit et il ne fallut pas une seconde pour qu'elle souffle les caisses en bois entre les deux avions de transport entre lesquels nous étions. Les dizaines de caisses marquées de bandage rouge et noir indiquant les destinations - à savoir la Nouvelle Calédonie et Hawaii - explosèrent en copeaux et atterrirent à nos pieds, nous blessant plus ou moins grièvement. Nous n'avions tous que des coupures excepté Ambroise qui s'écroula, un bout de bois s'étant planté dans son estomac. Tel un pieux, le bout sortait de son estomac. Athéna et Sol attrapèrent ses bras, moi, ses jambes.
Nous le soulevâmes de terre et au pas de course, rejoignant au plus vite l'avion qui allait nous permettre de décamper d'ici.
L'emplacement 1175 était de l'autre côté de la piste. Nous nous arrêtâmes derrière le réacteur d'un vieil avion de ligne dont les parois avaient rouillé et dont les ailes étaient en bien piteux état. Tapis dans l'ombre de la carcasse qui avait, il y a bien longtemps, transporté des milliers de passagers aux quatre coins du globe, nous scrutions la bataille au centre de la piste en bitume.
Herbert et ses sbires, lourdement armés, avaient pris par surprise les soldats, c'était cela de gagné pour eux, néanmoins, ceux-ci étaient bien mieux entraîné et ils possédaient des armes perfectionnées et novatrices ainsi que des boucliers. Des boucliers semblables à la bulle : transparents et faisant rebondir les balles. Chaque soldat tenait fermement un tube, comme la poignet d'un parapluie, surmonté d'une base ronde en métal. Il suffisait d'appuyer sur l'autre extrémité du tube, sur un petit bouton, pour qu'un bouclier semblable à la bulle ne se déploie de la tête aux pieds du détenteur du tube.
Ainsi, les soldats étaient par deux et combattaient dos à dos, le bouclier dans une main, un pistolet lançant des décharges dans l'autre. Tout était bien plus brouillon du côté de Herbert. Les hommes se protégeaient comme ils le pouvaient derrière les conteneurs et caisses plus ou moins gros. Sept de ses hommes gisaient au milieu de la piste. Aucune perte n'était à déplorer du côté de la bulle. Une trentaine d'hommes contre une soixantaine du côté militaire. Un combat presque perdu.
— Nous ne pourrons pas traverser la piste sans être vus..., soupira Adonis.
Ambroise poussa un gémissement. Mes bras se tétanisaient. Il était lourd, même pour trois personnes.
— Il va falloir, affirmai-je en scrutant la plaie dégoulinante de sang, au coeur de l'estomac du brave Ambroise.
Noah fouilla les poches intérieures de son blouson. Il avait toujours sa combinaison de soldat. Il en sortit un tube semblable à ceux tenus par les soldats.
— Je savais bien que je l'avais encore. J'ai réussi à le subtiliser avant de rentrer dans le train, nous dit-il tout sourire.
— Qu'est-ce qu'on attend alors ? s'empressa d'ajouter Sol grimaçant sous le poids d'Ambroise.
Nous décidâmes d'un ordre de passage. Un par un, nous ferions un aller avec Noah, excepté Athéna, Ambroise, Sol et moi.
Il a fait un premier voyage avec Adonis sans même que les militaires ne les voient. Il en fut de même avec Charly, puis avec Ares et Kaya sur son dos. En revanche, lorsque nous, c'est à dire le blessé et ses infirmiers, passâmes avec lui, un soldat nous aperçus et pointa son arme vers nous. Il y eu un moment de flottement, sans doute fut-il troublé par le bouclier que tenait Noah.
Il tira sans réfléchir dès qu'il aperçut Ambroise, prévenant ainsi ses coéquipiers qui pointèrent leur arme vers nous. Nous pressâmes le pas, Noah armé d'un simple pistolet à balles, tira dans leur direction tout en avançant. Cela les obligea à rester à une certaine distance, l'onde des balles sur les boucliers étant violente. Nous arrivâmes au niveau de l'avion de transport de marchandises.
Le reste du groupe était prêt à entrer. Nous déposâmes les invalides dans un coin de l'avion, cachés par des caisses de marchandises et seulement armés de maigres armes blanches, de nos poings et de notre courage, nous avançâmes jusqu'au cockpit. La porte était ouverte, deux pilotes était assis sur de larges sièges en cuir noir.
— MS-1, devons-nous allumer les moteurs ? demanda l'un des pilotes dans un talkie-walkie, visiblement stressé.
— Attendez un peu P-7, nous n'avons pas maitrisé tous les intrus. Certains pourraient être à bord..., Ares ne lui laissa pas le temps de finir. Il fit irruption dans le cockpit, attrapa le talkie, le balança à ses pieds et sauta dessus. Il donna un premier coup de coude dans le visage du pilote de droite, puis tordit le bras de celui de gauche. On aurait dit un robot tant ses gestes étaient parfaits et presque automatiques.
Il pressa la clavicule de l'un d'eux puis la gorge d'un autre. Le premier hurla de douleur quant à l'autre, il tomba dans les vapes. Il attrapa le col du premier, le sortit de sa cabine et passa son bras gauche autour de son cou. Il serra, poussa la tête du pilote avec la main droite et celui-ci sombra.
Le corps de l'homme s'écroula aux pieds d'Athéna qui resta bouche bée.
— J'ai suivi quelques entraînements avec mon grand frère dans le passé, nous informa Ares en haussant les épaules. Il regarda nos visages effarés, choqués et soupira : ne vous en faites pas, reprit-il, ils sont juste endormis... Normalement ! conclut-il avec un sourcil en l'air.
Nous volâmes les armes et les combinaisons que portaient les deux pilotes. Nous les débarquâmes de l'avion, les allongeant derrière un conteneur.
Noah et Adonis s'empressèrent de mettre les casques de communication. Noah décrocha le second talkie-walkie, devant lui :
— MS-1, ici P-7 pouvons-nous décoller ? demanda-t-il en baissant le ton de sa voix pour qu'elle soit plus grave et semblable à celle du pilote.
— Pourquoi avons-nous été coupés P-7 ? s'enquit le soldat.
— Mon collègue a fait tomber le talkie, s'empressa de répondre Noah.
— Ne décollez pas, nous n'avons pas embarqué, nous sommes devant, nous attendons d'avoir la confirmation qu'il n'y a pas d'intrus à bord. Une patrouille..., sa voix laissa place à des grésillements.
— Personne de notre côté, affirma Noah. Il le répéta trois fois avant d'avoir un signe de vie à l'autre bout.
— Enfermez-v..., la voix de l'autre se brisa laissant un long grésillement.
Noah nous regarda perplexe. Une explosion fit un cratère juste devant nous. L'appareil trembla, faisant se balancer un porte-clé religieux, accroché devant le co-pilote. Une épaisse fumée s'éleva sur la piste. Sur le bitume, les corps de soldats mais aussi des hommes malades. Nous chargeâmes nos armes. Adonis, Sol et Charly en avaient une désormais, l'un des pilotes possédant deux pistolets.
Ares avait enfilé les habits de l'un d'entre eux, ainsi que Charly. Eux seuls étaient assez grands pour que la combinaison ne baille pas.
Je devait rejoindre Athéna qui s'occupait de la blessure d'Ambroise, à l'arrière de l'avion. Charly me céda son arme et Ares, son gilet pare-balle. Il fallait que quelqu'un les avertissent qu'une patrouille était à bord. Au milieu des marchandises empaquetées et emballées, des voix d'hommes s'élevèrent. Ils parlaient doucement, entre eux, ils chuchotaient. J'étais dans un labyrinthe, cerné par l'ennemi.
Je respirais lentement, faisant bien attention avant de m'engager dans une allée. Je regardais par trois fois avant de tourner et je rasais les caisses de bois ou de métal des marchandises. Les voix étaient plus ou moins fortes selon les allées. J'espérais simplement trouver Athéna et les deux autres avant eux.
J'entendais toujours les coups de feu à l'extérieur. Les combats faisaient rage. Aucun des camps n'était prêt à capituler. Je tournais en rond. Impossible d'avancer correctement, on aurait dit que les soldats présents, me suivaient.
Un tir me déchira les tympans. Derrière moi, une balle s'écrasa juste à côté de ma face, dans un baril d'eau visiblement. Le liquide se déversa à mes pieds et inonda progressivement trois allées de marchandises. Les soldats étaient divisés en deux groupes, planqués derrière une caisse de chaque côté de l'allée.
Je détalai. L'eau faisait couiner les semelles de mes chaussures et elle giclait partout à chacun de mes pas. Je tournais aléatoirement à gauche, à gauche encore puis à droite, regardant constamment par dessus mon épaule. Ils me suivaient et courraient vite.
Trop absorbé par ma course, je ne vis pas un individu que je percutais. Nous tombâmes tous deux.
Athéna ! Elle me regarda apeurée. Les soldats arrivaient. Nous nous relevâmes. Elle saisit ma main et nous progressâmes dans le dédale de provisions et d'armes que contenait l'appareil.
— Où sont Kaya et Ambroise ? demandai-je inquiet alors que nous étions accroupis entre deux palettes de conserves.
— Cachés. Je n'ai pas eu le temps de les rejoindre. J'ai entendu les patrouilles, je voulais vous prévenir, seulement, quand j'ai essayé de rejoindre le cockpit, des militaires faisaient des rondes et il m'était impossible de vous rejoindre. Je tourne depuis tout à l'heure.
Les pas s'approchaient. Nous nous levâmes et traversâmes plusieurs allées.
Nous entendions plus nettement les tirs, nous approchions de l'arrière de l'avion et donc de la sortie. Nous étions bloqués et les fichus patrouilles approchaient. Des rafales de balles furent tirées derrière nous. Nous avions beau courir, cela ne servait à rien, ils était proches et les caisses ne nous protégeraient pas longtemps. Nous avions vue sur l'extérieur. Dehors, des ombres approchaient à toute vitesse. Des militaires ? Les troupes d'Herbert ? Impossible de dire. S'il se trouvait que c'étaient les premiers, nous étions cuits. Je ne pouvais rien faire contre une armée avec un simple pistolet. Je pris Athéna dans mes bras, elle me rendit mon étreinte alors que les impacts de balles étaient de plus en plus dangereux autour de nous, les caisses céderaient d'ici peu. Je fermais les yeux, attendant la balle qui me tuerai.
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Le chapitre est normalement deux fois plus long mais je me suis dit que cela ajouterait un peu de suspens en le coupant ici !
Au lieu des treize chapitres initialement prévus, il y en aura 14 ! Bonne lecture !
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