Partie 2 - Chapitre 10


 Nos appartements étaient effectivement superbes. D'une richesse incroyable. Tableaux de maîtres dignes de musées, vieux mobilier complètement rénové, fresques murales, moulures dorées, lits aux draps de soie... Je n'avais jamais rien vu de si riche et beau de toute ma vie.

Allongé sur le grand lit au linge soyeux, je ne pouvais pas m'empêcher de réfléchir. Tout s'était passé si vite et pourtant, tout me paraissait déjà si loin !

« Le virus a été lancé par Charles », cette petite phrase de Sol me tournait pas mal dans la tête. Pourquoi avais-je tant l'impression qu'elle sonnait vraie ? La coïncidence était frappante et troublante et les intentions de Charles avaient toujours étaient un peu étranges, mais pourquoi lancer un virus ?

Et cette fichue mémoire qui refusait de revenir. Pourquoi me manquait-elle ? Cela ne faisait absolument pas partie des risques de la capsule.

Et plus je pensais à cette capsule qui ne ressemblait pas à celle dans laquelle nous nous étions éveillés, plus je trouvais que rien n'allait. La porte de celle dans laquelle nous avions été endormis était dans mes vagues souvenirs, comme celle d'un placard, pas coulissante comme celle de la montagne...

Et cette fiche qui avait disparu de la doublure de mon pantalon ? J'étais certain que ces fragments de rêves s'étaient produits mais quand ?

La personne qui frappa à la porte me tira de mes songeries. Le dîner allait être servi dans le restaurant de l'immeuble et nous y étions tous conviés.

— Pourquoi êtes-vous venus nous chercher ? demandai-je en croquant à pleines dents dans une cuisse de poulet, à Noah, assis à ma gauche.

— Nous ne savions pas que c'était « Vous ». Notre communauté vient en aide aux gens errants dans tout le pays. Nos drones et satellites les repèrent. Vous, c'est différent. Vous étiez retenus dans ce que nous appelons une zone de danger permanent. Nous faisons beaucoup de sauvetages dans ces zones et plus précisément dans la ville où vous étiez. Elle est tenue par des robots.

— Pardon, s'étouffa Sol en recrachant presque son verre d'eau. Elle est « tenue » par des robots ?

— Le virus ne les a pas détruits eux. Etant plus nombreux que les humains mais incapables de se gérer seuls, ils ont capturé les humains ayant survécus, inversant les rôles, nous faisant devenir leurs esclaves. Nous les avions traités ainsi durant des décennies, ils prenaient leur revanche. Certains humains ont collaboré, d'autres ont essayé de se révolter, ils ont été tués. Tous ! Les robots se sont regroupés dans plusieurs états, notamment dans l'ouest, et ils ont garanti sécurité et prospérité aux humains qui les aideraient à fonctionner. Ils ne gardent que ceux qui peuvent leur être utiles.

— Les enfants ? a demandé Athéna.

— Ils les envoient au Clan quand ils atteignent l'âge de cinq ans, en l'échange de câbles et de boulons, murmura Noah.

— Le Clan ? demanda Sol. Noah lui fit signe de parler moins fort.

— C'est un mot interdit ici, commença-t-il. Le Clan est un groupe de survivants qui vit grâce à l'annexion d'autres camps. Ils attaquent, pillent et prennent, pour grandir et former une grande nation. Leur chef est respecté et intouchable, la légende dit que c'est un centenaire, il vit dans l'ancienne cité industrielle.

— Olympie aussi appelée Los Angles ? m'empressai-je de demander. Noah approuva.

— Et si c'était Charles ? aboya Sol. Il s'est peut-être construit une petite capsule et y fait des siestes de temps à autre ! A le sal... Noah le fit taire en plaquant une main devant sa bouche.

— On ne jure pas ici ! Personne ne sait qui est le chef du Clan. Mais il est intelligent et étend son empire comme personne. Il a déjà englouti vingt Zones de survivants sur les 68 existantes au départ et ce, durant les dix dernières années. Je ne sais pas ce qu'il cherche ou ce qu'il veut, mais il est déterminé...

Je me rappelais que Pippa et le gros monsieur dans la ville aux robots avaient mentionné Le Clan.

En sortant du petit restaurant avec mon estomac bien rempli, je fus pris à part par celui que l'on nommait Maire McGwen.

— Adam, comment connaissait-il mon prénom. je ne lui avais jamais dit. Quant au vaccin, il faut que tu fasses des tests. Sans cela, nous ne pourrons pas déterminer pourquoi vous n'êtes pas infectés. Vous avez quelques chose de spécial en vous, qu'ils vous ont injecté avant de partir. Quelque chose de différent de nos vaccins. Plus puissant, plus résistant, c'est tout ce que mentionne vos feuilles sanitaires. Rien d'autre.

— Les feuilles sanitaires ? demandai-je.

— Les copies de vos dossiers, retrouvées dans une malle en pleine montagne dans une voiture accidentée. Il y a un peu moins de deux cent ans. Juste après que le virus ai été lancé.

— Cette voiture, où était-elle et qui la conduisait ?

— Route US395, un seul passager, mort. Une femme, Mary Marguling. Scientifique selon sa carte d'identité.

Tout se brouilla dans mon cerveau. Il y avait tant d'informations. C'était beaucoup à encaisser. Mary était morte après le lancement du virus mais comment était-ce possible, elle aurait dû, à l'époque, être morte. Son âge lors de l'épidémie devait approximativement être de cent quarante ans, ce qui sans les capsules était impossible. Les scientifiques les avaient utilisées aussi, mais à quoi bon prendre des cobayes alors ?

Et si elle n'était pas la seule à en avoir empruntée ? Si d'autres Hommes, pas que des scientifiques en avaient utilisés. Ma famille peut-être ? Oh ! Je ne comprenais plus rien à rien !

McGwen m'invita à le rejoindre le lendemain matin, ce à quoi je répondis simplement par un froncement de sourcils. Je verrai selon mon humeur !

Je remontais dans ma chambre et y regroupai tout le monde pour leur expliquer ce que je venais d'apprendre.

— Je vous l'ai déjà dit, rien n'est clair dans cette expérience. Ni son déroulement, ni son but, ni son aboutissement. Rien ! s'indigna Sol en tournant sur lui-même avec l'une des chaises hautes du bar de l'appartement qui m'avait été attribué.

— Devons-nous partir ? hésita Athéna. Elle posa sur chacun d'entre nous un regard perçant. J'y voyais un soupçon de reproches que je ne savais interpréter.

— Evidemment ! s'exclama Sol en levant les bras.

— Non, objecta Charly. Tous les regards se posèrent sur lui. Ici, nous sommes nourris, logés...

— Et Nadir ? Zoë ? Aïna ? le coupa Ambroise. Ma soeur est quelque part, dehors, je refuse de rester ici les bras croisés...

— Elle est très probablement morte ! l'interrompît Charly. Tu n'as donc rien compris ? L'air, la terre, l'eau, tout ici est toxique ! Contaminé, tout l'est ! Si la maladie l'a épargnée comme elle nous a épargnés, les robots se seront chargés d'elle ou même Le Clan ! Et si jamais, je dis bien si jamais, elle est en vie : comment veux-tu que nous la retrouvions ? Pareil pour Nadir et Aïna, aucun moyen de les trouver !

Quand il se tut enfin, Ambroise se leva et lui donna un coup de poing. Une bagarre éclata entre les deux garçons.

Sol, en bon spectateur frappa vivement dans ses mains de même que Ares. Athéna resta impassible alors qu'Hélios les traitait d'idiots sans cervelles et levait les yeux au ciel. Je regardais la scène, exaspéré.

— Elle ne va pas bien, clama soudain Adonis. Je me retournai rapidement. Athéna s'était déjà précipitée vers Adonis qui tenait désespérément Kaya dans ses bras. Ils l'allongèrent sur le tapis du salon.

— Ares, une couverture ! ordonna Athéna.

Je m'approchai de Kaya dont le visage était crispé. Elle frissonnait et tenait son crâne entre ses mains.

— Ma tête, Athéna, elle va exploser, gémit Kaya. Adam, abrège mes souffrances, ma tête ! Adonis me regardait impuissant. J'étais horrifié et je ne ne savais pas quoi faire. Elle avait l'air de souffrir atrocement.

— Il faut appeler un médecin, trancha Adonis.

— Hors de question ! mugirent Athéna et Sol en même temps.

— Ils vont l'exclure, la mettre dehors, argua Athéna. Elle est malade. Les symptômes sont les mêmes que ceux décrits par McGwen...

— Il faut trouver un traitement, proposa Ares en finissant son verre de bière, détendu. Il était d'un serein déconcertant.

— Non ? Tu cois ? ironisa Sol. Ce n'est pas comme si, des générations en avaient cherché un ! Comme si des scientifiques avaient travaillé dessus depuis deux siècles !

— Le vaccin et ses compléments sont en prévention, ils limitent les chances d'être infecté par voix orale et respiratoire. En ce qui concerne les blessures, rien n'empêche l'infection..., dis-je.

— Je croyais que nous étions vaccinés, que nous avions quelque chose de spécial, nous dit Adonis. Pourquoi est-elle malade ?

— Ce n'est peut-être pas le virus, dis-je pour calmer tout le monde. C'est sûrement autre chose, comme le tétanos ou une maladie autre, je ne sais pas...

— Alors emmenons-là voir un docteur, beugla Adonis. Athéna posa fermement sa main sur l'épaule de Kaya en signe de protestation alors qu'Adonis avait commencé à la porter.

— Hors de question, elle reste ici, s'opposa Athéna.

— Ça me fait mal de l'admettre mais Athéna a raison. Elle doit rester, approuva Sol en haussant les sourcils.

Kaya gémissait toujours et je voyais bien sa détresse ainsi que celle d'Adonis qui cherchait un soutien. Seulement, si Athéna et Sol avaient raison, et que Kaya était infectée par le virus, alors elle serait mise dehors.

— Attendons jusqu'à demain, dis-je pour satisfaire tout le monde.

Discrètement, nous avons emmené Kaya dans la chambre d'Adonis pour que quelqu'un veille sur elle le reste de la nuit. Avec Athéna, nous l'avons bordée car elle tremblait désormais de froid et nous sommes sortis.

Dans le couloir éclairé de lumières chaudes, le silence était impressionnant. Athéna saisit ma main et me regarda dans les yeux en souriant mystérieusement. Elle m'embrassa une première fois, un simple bisous. J'attrapai le creux de ses hanches et l'embrassai en retour. Elle entoura ma nuque de ses bars et poussa la porte de son appartement avec son pied alors que j'en tournais la poignet.

A quel jeu jouait-elle ? Je ne le savais pas, j'étais légèrement troublé, pourquoi agissait-elle ainsi alors qu'elle était depuis vingt-quatre heures pendue aux lèvres de Noah ? J'oubliai ces question au moment ou j'embrassai son cou qui sentait divinement bon la rose fraiche.

Arrivés avec difficultés jusqu'à sa chambre, mon haut en moins, nous nous écroulâmes sur son lit parfaitement fait, aux draps en soie rouges. Nous nous embrassions et enlacions tendrement quand on frappa à la porte d'entrée. Nous n'y prêtâmes pas attention dans un premier temps.

On tambourinait maintenant. Nous ne fîmes toujours pas attention, continuant de nous embrasser. Quand se fut insupportable, nous soupirâmes, Athéna se détourna, je me levai et passai mon tee-shirt alors qu'elle ajustait le sien en allant vers la porte.

— Je suis légèrement occupée, soupira Athéna avant de savoir qui était derrière la porte. Quand elle aperçut Kaya en pleures, elle sembla désolée. Pourquoi n'es-tu pas couchée... Tu te sens mieux ? demanda Athéna, soudain inquiète. Je m'approchais à mon tour de la porte alors que Kaya fixait Athéna avec un drôle de regard. Fixe, haineux, furieux.

— Kaya ? dis-je calmement devant son expression inquiétante. Elle avait les yeux injectés de sang et son teint doré habituellement rayonnant était terne et blafard.

— Eloigne-toi d'elle, m'ordonna d'un ton impérieux Kaya en fixant toujours Athéna.

— Qu'est-ce que tu racontes, s'emporta Athéna. Elle posa sa main sur l'épaule de Kaya qui la repoussa.

— Tout est de ta faute. Tu nous a tous trahis.

— De quoi parle-t-elle ? demandai-je sans rien comprendre. Elles engagèrent une espèce de combat de regard. Athéna ne répondit rien. Elle regardait Kaya avec méfiance et c'est comme si mentalement elle lui demandait de se taire. Elle avait ce regard qui demandait de ne plus rien dire.

— Dis-lui, avoue-lui, susurra Kaya désormais plus proche de l'oreille d'Athéna que moi lorsque je l'embrassais. Elle déglutit et me regarda terrorisée.

— De quoi parle-t-elle ? m'énervai-je soudain.

— Dis-le ! s'égosilla Kaya avant de s'écrouler dans le couloir. Elle fut prise de convulsions, Athéna resta impuissante, debout, les yeux exorbités, fixant le vide. Je me précipitais sur ma jeune amie secouée en tous sens. Sa poitrine se soulevait avec vigueur et violence alors que sa bouche avait peine à s'ouvrir pour expirer.

Athéna enjamba Kaya et s'accroupit calmement près d'elle.

— Appelons un médecin, dis-je.

Ares arrivait au bout du couloir, les mains dans les poches. Il eut un mouvement de recul devant la jeune fille allongée au sol et une fois le choc passé, il accourut.

— Amenons-la chez Noah. Son père est médecin, je ne sais pas s'il est fiable mais peut-être qu'il nous aidera discrètement. C'est notre seule chance, conclut Athéna en contemplant, désemparée, le corps mouvementé de son amie.

Ares passa ses bras aux creux de la nuque et des genoux de Kaya dont les convulsions avaient soudainement cessé, remplacées par des tremblements légers.

Noah... Noah le sauveur !

— Eh ! Qu'est-ce que vous faites ? nous interpella Sol, nous rejoignant en petites foulées depuis sa chambre du bout du couloir.

— Adonis devait veiller sur elle, balbutia-t-il en scrutant le visage crispé de Kaya. Je n'eus qu'à pousser légèrement la porte de la chambre de notre ami pour constater que Kaya avait eu une crise juste avant de rejoindre notre chambre. La pièce à vivre était un vrai taudis et du verre cassé jonchait le parquet. Adonis, allongé en plein milieu du salon, avait une plaie derrière la tête. Une bouteille en verre était en morceaux à côté de lui.

— Sol ! Viens m'aider, dis-je en me pressant aux côtés du pauvre Adonis. Sol écarquilla les yeux devant ce spectacle et se pencha au-dessus de notre compagnon.

Il lui donna quelques petites tapes sur les joues, Adonis ouvrit faiblement les yeux. Nous le hissâmes sur ses pieds et le portâmes tous deux.


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1200 ???????? Merci beaucoup !!!!!!! 

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