Partie 1 - Chapitre 11
Lundi. Il était impératif que je trouve le moyen d'entrer dans le sous-sol.
Sol s'est réveillé tard et a raté son premier rendez-vous de la journée. C'était mieux ainsi. Réveiller brusquement Sol le matin était comme déclarer la guerre à un pays puissant qui vous pulvériserait avec sa puissance nucléaire. Adonis a eu le malheur une fois de le réveiller pour qu'ils se rendent au laboratoire, il est ressorti de la chambre sans Sol mais avec une main douloureuse. Sol la lui aurait attrapée et tordue pour le faire sortir. Le pauvre robot réveil a lui, fini à la casse après s'être un peu trop approché de l'oreille de monsieur grincheux le matin. Vraiment pas facile de vivre avec les contraintes de tout le monde.
Entre Nadir qui bricolé de petits outils toutes les nuits avec parfois quelques petites explosions, Adonis qui lisait jusqu'à pas d'heure, Ares qui se ventait de toutes ses qualités à longueur et de journée et Hélios qui apportait des précisions sur n'importe quoi, même sur le nombre de vitres du hall ou le nom de chacun des directeurs du centre ou l'importance de manger à telle ou telle vitesse. Pas simple tout le temps.
La meilleure nouvelle qui soit, est arrivée à midi quand Sol est venu me chercher dans la cantine. Il m'a agrippé par le col de mon pull et m'a presque fait tomber de ma chaise.
— Quoi ? lui ai-je dit dans le couloir en le suivant d'un pas précipité. Nous sommes entrés dans la chambre et il a refermé la porte derrière nous.
— Je viens de recevoir un mot de la part d'un robot qu'a trafiqué Nadir. Adonis et lui nous attendent dans l'un des bureaux de l'étage des admissions. Ils ont débloqué l'une des portes et ils sont en train de se connecter au réseau du laboratoire. Nadir télécharge les plans du bâtiment.
— Alors pourquoi m'as-tu emmené ici ? Allons-y ! Je me suis précipité vers la porte mais il m'a bloqué le passage.
— Nous devons attendre Adonis. Il nous dira où aller. Nous éviterons d'éveiller les soupçons de certains..., a-t-il dit avec un rictus au coin de la bouche.
Les minutes d'attente furent longues, je faisais les cents pas entre la chambre et la salle de bain ce qui me valait le regard noir et énervé de Sol, tranquillement assis sur son lit, les mains jointes. J'espérais plus que tout que Nadir ait trouvé comment rejoindre le sous-sol. Adonis est soudainement apparu dans la chambre essoufflé.
— Prenez les escaliers, pas l'ascenseur, a dit Adonis en reprenant son souffle.
— Pourquoi ? C'est au premier étage ! s'est exclamé Sol en sautant au pied de son lit.
— Parce que Sol, dans les escaliers contrairement à l'ascenseur, il n'y a pas de caméras, lui a répondu Adonis presque remis entièrement de sa course. Nadir vous attend dans la salle A1, elle est juste à côté de la porte de secours, il y a sept ordinateurs dans cette salle, il y a une caméra dans le coin le plus éloigné de la porte d'entrée. Sol, installe-toi où tu veux, Adam, tu t'assiéras sous l'ordinateur juste en dessous. La caméra ne filme pas cet angle.
— Très bien, merci, lui ai-je dit en ouvrant la porte.
Descendre tous les escaliers fut le plus long, mon entrain des dix premiers étages se dissipa, mes cuisses devenant douloureuses à force de sauter comme un enfant dans une flaque d'eau. La salle était la plus proche de la cage d'escalier.
C'était une salle rectangulaire avec une dizaine de tables alignées parallèlement. Toutes avec deux ordinateurs holographiques dessus. Alignées contre les murs, d'autres tables avec des ordinateurs mais des modèles plus anciens, des vitres écrans étaient plaquées contre les murs. Aucune baie vitrée ou fenêtre ici. Nadir était assis en plein milieu de la salle, devant l'écran le plus parfaitement au croisement des diagonales de cette salle spacieuse. Il était dos à la caméra et son ordinateur affichait une vidéo humoristique. Sol s'est assis devant le premier ordinateur allumé et je me suis installé sous la caméra comme Adonis me l'avait dit.
— J'ai réussi à éteindre les micros mais je ne garantis rien pour la caméra, elle n'est probablement pas coupée, alors ne me regardez pas, faites comme si je n'étais pas là. Sol, connecte-toi, fais comme si de rien n'était. Adam, tu as les plans sur ton écran.
— Oui, comment allons-nous nous rendre dans le sous-sol ? Si je comprends bien, le seul moyen d'y entrer est par l'ascenseur.
Effectivement, c'était le seul moyen d'y aller. Pas d'escaliers, pas de portes, rien.
— Ascenseur que j'ai essayé de pirater mais impossible sans me faire pister. Je ne peux pas non plus le pirater de l'intérieur à cause de la caméra. Caméra que je ne trouve pas sur les circuits, elle est impossible à pirater, aucune trace d'elle sur les données.
— D'accord, alors comment ?
— Prenez l'ascenseur jusqu'au dixième étage. Ensuite, allez au bout du couloir, entrez dans la salle 105, s'ils vous surveillent, ils vous perdront. A cet instant, vous sortirez du champ des caméras de surveillance. Dans cette salle, un bureau, il y a une bouche d'aération. Vous l'ouvrirez. J'ai fait comme une carte aux trésors sur papier, NAD-EXP-2070 l'a déjà dans son boîtier, il attend dans la chambre à cette heure-ci. Ce sera comme un labyrinthe de petite taille. Vous serez réduit à des rats de laboratoire. Vous aurez des traceurs. Avec Adonis, nous piraterons les caméras du sous-sol, une fois que vous serez au-dessus de la trappe à ouvrir pour sortir. Nous les éteindrons temporairement, juste le temps que vous fassiez un tour, vous aurez huit minutes environ, après, ils se rendront compte de la coupure et ils nous chercheront. Nous leur rendrons la main et ils récupéreront les caméras. C'est incroyable le nombre de caméras de surveillance qu'ils ont installées en bas !
— Pourquoi y aller ? Tu peux pirater les caméras et nous dire ce qui s'y passe.
— Ah, merci Sol pour cette brillante idée ! J'ai déjà essayé idiot ! C'est impossible, les images sont trop lourdes pour la tablette que j'ai volée, je peux simplement les éteindre.
« Il vous faudra une dizaines de minutes pour rejoindre les aérations du sous-sol. Il n'y a pas de plan du sous-sol en lui même, juste de ses canalisations et réseaux électriques, alors j'ai fait mon possible et selon mes suppositions, vous arriverez dans un couloir. »
— Merci Nadir, ai-je dit.
— Ne partez pas tout de suite, je rallume le son maintenant. J'ai entendu les doigts de Nadir pianoter sur la tablette qu'il cachait sous ses cuisses. Il a regardé la fin de sa vidéo, en a mis une autre, a délicatement glissé la tablette sous son haut, s'est levé et a quitté la pièce en nous souriant, comme si rien ne s'était passé. J'ai examiné les plans, un à un. J'ai essayé d'imprimer le plus de renseignements possibles dans mon esprit, sans grand succès. Sol a quitté la pièce après une dizaine de minutes. Et moi, une vingtaine de minutes encore après, je suis remonté.
Au dîner, j'ai fait la brève connaissance de Zoë et Ambroise. Des jumeaux, je les pensaient simples amis tant ils étaient différents physiquement et mentalement l'un de l'autre. Leur seul point commun était cette fossette au coin droit de leur fine bouche pâle. Nadir m'a expliqué que c'était grâce à Zoë qu'il s'était présenté pour l'expérience et qu'il avait réussi à entrer au laboratoire. Devant la tour de verre, il était seul le jour du recrutement, il se rendait en cours. Il l'a bousculée, elle est tombée, il s'est excusé et l'a invité à prendre un verre mais elle lui a dit qu'elle ne pouvait pas. Qu'elle rejoignait son frère au laboratoire. Elle lui a tendu l'article et il a postulé. J'ai trouvé cela incroyable à quel point les coïncidences étaient formidables !
Adonis, Nadir, Sol et moi, nous nous sommes couchés aux alentours de deux heure du matin après avoir révisé le plan du lendemain, des centaines et des centaines de fois. Le dixième étage, les conduits, le sous-sol, huit minutes, chemin en sens-inverse, rendez-vous dans la chambre. Adonis et Nadir y resteraient pour la partie logistique.
Il faisait très froid dans le laboratoire le mardi matin. J'ai pris mon petit déjeuner le plus vite possible et j'ai rejoint mon seul rendez-vous de la journée. Athéna et Eloir au laboratoire d'analyses. Une fois arrivé, je me suis débarrassé de mes obligations le plus vite possible, ce qui a surpris Athéna. Je lui ai promis de lui expliquer plus tard ce qui se passait. A dix heures et demie, j'ai réussi à m'éclipser du bureau.
Il avait été convenu que nous nous retrouvions tous dans la chambre à onze heure précises. J'étais seul.
A onze heure dix, toujours personne ! Le temps pressait, j'ai regardé l'emploi du temps de mes compagnons et les ai rejoints.
Nadir et Adonis étaient attablés derrière un ordinateur, écoutaient les paroles saccadées d'un robot. J'ai attendu plusieurs minutes devant leur salle, Nadir tapait frénétiquement du pied et Adonis poussait de grands soupirs.
— Allez-y sans nous. Nous couperons les caméras d'ici, a articulé Adonis, comprenant qu'ils n'étaient pas près de sortir de leur cours.
J'ai foncé jusqu'au trentième étage, là où Sol avait cours de mathématiques. Il était dans le couloir, un robot lui tenait le bras.
— Je t'assure que je vais bien ! Sale robot ! Lâche-moi, allez ! a pesté Sol. Le robot lui a ordonné de le suivre, Sol s'est exécuté. Quand il m'a vu, il a accéléré le pas. A ma hauteur, il a murmuré la même chose qu'Adonis et il a suivi le robot, qui le tirait désormais de force.
Alors je devais aller au sous-sol tout seul...
Je suis remonté et j'ai enfoncé la carte des bouches d'aération et un tourne-vis dans la grande poche de ma veste. Je me suis aussi muni d'une petite lampe. J'ai évidemment pris le petit traceur que Nadir avait relié à son GPS. Désormais, il me suivait. Je suis retourné les voir pour être certain que le traceur fonctionnait.
Nadir regardait une petite tablette sous son bureau, il a soudainement levé la tête vers moi et a levé un pouce. J'étais prêt.
J'ai rejoint comme prévu le dixième étage, je suis entré dans la salle 105 et le plus difficile a commencé.
J'ai déboulonné la trappe, le tourne-vis me servirait plus tard. J'ai calé la lampe entre mes dents, je me suis mis à quatre pattes et je suis entré dans la bouche d'aération exigüe. Il faisait sombre, même avec la petite lampe. Le plan sur papier n'était pas simple à lire. Droite, gauche, gauche, gauche... J'avais peur que l'un des conduits ne s'affaisse ou que je fasse trop de bruit. C'était trop tard de toute manière, j'étais pris au piège entre quatre planches de métal. Soit il y faisait un froid polaire, soit une chaleur étouffante, si bien que je ne savais plus si les gouttes qui perlaient sur mon front étaient dues à l'effort ou à la température.
J'étais un contorsionniste. Les conduits étaient minuscules et tournaient, montaient ou descendaient brusquement. Le plus périlleux était de dévisser les grilles qui m'indiquaient un changement d'étage. Mes mains moites avaient le plus grand mal à tourner correctement et vite l'outil pour dévisser.
J'y était presque, dégoulinant de sueur, collant, poisseux. Plus que quelques mètres. 11:43, huit minutes à partir de maintenant.
Les grilles d'aération étaient beaucoup plus fréquentes au sous-sol, le conduit était encastré dans le mur et les bouches d'aération donnaient sur de long couloirs éclairés de néons blancs, bleus et puis soudainement, l'ambiance a changé et les néons étaient de lumière noire.
Aux murs, des flèches et inscriptions oranges, vertes et toutes autres couleurs fluorescentes. Captivé par l'ambiance étrange, je n'ai pas vu que le conduit tournait et je m'y suis cogné le front. Je me suis figé tant le bruit que cela a produit était fort. J'espérais au plus profond de mon âme que personne n'avait entendu. J'était dans un conduit sûrement en plein milieu du couloir car désormais, je n'avais plus vue sur le mur d'en face mais à chaque grille, je voyais le sol bétonné du couloir infini.
Une croix rouge sur mon plan me désignait la grille à soulevée pour sortir. C'est avec peine que je l'ai dévissée et poussée plus loin dans le conduit. J'étais à deux mètres cinquante du sol à peu près. J'ai passé la tête par le trou béant. Personne. J'espérais que Nadir avait désactivé la caméra car je la voyais bien face à moi et il y en avait à intervalles réguliers tout le long du couloir.
Un placard à balais bien surveillé ! J'avais la confirmation que ce n'était pas qu'un entrepôt pour robots.
Tout juste face à moi, une large porte vitrée qui donnait sur une grande salle circulaire. Mais pour entrer dans cette salle, il y avait une sorte de hall avec des combinaisons anti-infections à enfiler avant de s'y aventurer.
Quelqu'un, un scientifique en blouse blanche est arrivé, il poussait un brancard , plutôt semblable à un cercueil recouvert d'un drap bleu. J'ai vite relevé ma tête et retenu ma respiration.
« Ne lève pas les yeux, ne lève pas les yeux... » je me répétais. J'avais beau être caché, le fait qu'il manque une grille allait alerter ce jeune homme fraîchement diplômé, grand et maigre. Sa blouse était trop courte et trop large pour lui et son badge électronique se balançait de gauche à droite sur sa poitrine.
Le brancard s'est arrêté juste sous la trappe. Mon coeur s'est arrêté. J'étais repéré. Je n'ai pas bougé d'un petit centimètre.
J'ai entendu les portes vitrée coulisser alors je me suis risqué à passer le haut de ma tête par la trappe. Le scientifique était entré dans la salle et enfilait une combinaison, dos à moi. 11:46, plus que cinq minutes. Maintenant ou jamais. Je suis doucement descendu dans le couloir et j'ai délicatement, grâce à la maigre force de mes bras, atterri sur le sol. J'ai soulevé le drap. Ce n'était pas un cercueil mais une boite en verre vide, sans couvercle.Le scientifique s'est affairé à je ne sais quoi dans cette salle, j'ai compris qu'il avait bientôt fini quand il a signé une feuille d'enregistrement près de la porte.
Deux solutions, courir jusqu'au bout du long couloir et essayer de me sauver ou me mettre dans la boîte en verre sur le brancard. Trop tard pour courir. Je me suis allongé dans la boite et j'ai remis le drap comme je le pouvais.
J'ai entendu la porte vitrée se réouvrir et se refermer. Le brancard s'est ébranlé, j'ai regardé ma montre le plus doucement possible 11:48.
Il sifflait, ce scientifique sifflait ! C'était une promenade, j'ai eu envie de rire tellement la situation était étrange.
Le brancard s'est de nouveau arrêté et j'ai entendu d'autres portes s'ouvrir. Les sifflements se sont éloignés.
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Un peu de suspens ! Merci à ceux qui suivent l'histoire, à ceux qui votent et à ceux qui laissent des commentaires ! La suite mardi !
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