Une journée comme les autres
Aujourd'hui, c'est vendredi.
Motoko aime beaucoup le vendredi. Certes, à première vue, c'est une journée comme les autres, une journée où elle se chahute avec son frère dans la cour de l'école maternelle, une journée où elle fait des coloriages et des puzzles, une journée où elle lit les étiquettes sur les boîtes de jouets quand elle s'ennuie, une journée où elle joue avec son Doudou plutôt qu'avec des poupées.
Aujourd'hui, c'est encore maman Tamoga qui vient chercher Motoko et son frère d'un an de plus qu'elle, Batou, à l'école. Parce que maman Angèle finit trop tard pour venir chercher ses enfants à l'école, alors c'est maman Tamoga qui s'en occupe, comme elle s'est aussi occupée de remplir le lave-vaisselle, d'étendre le linge et de préparer le goûter.
Maman Tamoga, ça a d'abord été le papa de Motoko. Mais depuis plusieurs mois, papa a annoncé à Motoko qu'en fait, il était sa deuxième maman. Alors, depuis, la petite fille et ses autres frères et sœurs, très nombreux, mais dont certains sont déjà grands, appellent maman Tamoga ainsi, plutôt que de l'appeler papa.
Maman Tamoga est d'ailleurs arrivée, et a emmené Motoko et Batou au parc avant que tout le monde ne rentre à la maison. Georges et Elmah, leur grand-frère de 10 ans et leur grande-sœur de 6, sont venus les rejoindre en sortant de l'école primaire. Le plus grand, Georges, a joué avec le reste de sa fratrie pour fêter l'arrivée du week-end. Pendant ce temps-là, maman Tamoga s'est assise sur un banc à côté de la poussette de Paz, le petit-dernier, âgé de quelques mois à peine, dormant à poings fermés. Elle a lu un magazine auquel elle est abonnée depuis de nombreuses années, et elle a souvent regardé d'un œil tendre, avec un sourire, ses enfants qui se couraient après dans le parc, en disparaissant puis en revenant dans son champ de vision, comme ça, régulièrement. De toute façon, les plus petits sont avec Georges, et Georges, du haut de ses 10 ans, est un garçon responsable, et très mature. Plus tard, il sera peut-être aussi papa poule que ses deux génitrices.
Motoko, d'ailleurs, vient de lever ses bras vers le ciel, en tenant dans ses petites mains son Doudou. Elle propose de jouer à "Doudou". Il s'agit d'un jeu où il faut se lancer Doudou les uns aux autres, comme un ballon, tout doucement, et le rattraper. Elle commence par envoyer Doudou à Georges en riant. Georges envoie ensuite Doudou à Batou. Batou envoie Doudou à Elmah. Puis Elmah renvoie Doudou à Motoko. Et Motoko recommence, elle lance Doudou à Georges...
Au bout d'une ou deux minutes de jeu, lorsque c'est au tour de Batou de jeter Doudou à Elmah, le petit garçon fait une grimace, et au lieu de se contenter de l'envoyer vers sa sœur, il envoie le requin en peluche à l'autre bout du parc. Doudou tombe par terre, un nuage de poussière orange s'élève autour de lui. Motoko fonce comme une flèche en direction de l'endroit où son bébé requin tout doux est tombé, en criant d'horreur, et Georges se met à gronder Batou, qui ne manque pas de lui tirer la langue et d'aller se réfugier sur le banc, auprès de maman Tamoga.
Motoko vient de ramasser Doudou, elle lui a passé sa main dessus pour le nettoyer, et maintenant, elle le garde et le serre très fort dans ses bras, sans jamais cesser de lui faire des bisous pour le rassurer. Georges demande à sa petite-sœur si elle voudrait recommencer à jouer à "Doudou". Mais Motoko lui tourne le dos et va s'asseoir sur le banc avec maman Tamoga, en gémissant, et en gardant Doudou serré très fort dans ses bras. Très vite, maman Tamoga comprend d'ailleurs que ses enfants n'ont plus envie de jouer ensemble dehors, alors elle propose à tout le monde de rentrer. Elle prend donc la poussette de Paz, et les quatre autres enfants lui emboîtent le pas.
Une fois à la maison, un bon goûter attend tout le monde sur la table de la cuisine, même maman Tamoga, qui après sa dure journée, a bien le droit de s'autoriser à croquer dans un biscuit. Et d'ailleurs, Batou, comme pour se faire pardonner indirectement par Motoko, donne sous ses yeux le reste de son gâteau à maman Tamoga. Puis, tout content d'avoir eu un gros bisou, il disparaît dans sa chambre en courant.
Motoko, toujours son doudou scotché dans les bras, ne tarde pas à aller le rejoindre. Tous deux se réconcilient très vite, et se remettent à s'échanger Doudou en attendant que maman Angèle rentre. Après tout, ici, il n'y a pas de poussière et si Doudou tombe, ce n'est pas trop grave.
Deux heures ont passé. Maman Angèle est rentrée depuis un bon quart d'heure, et si les autres jeunes enfants sont encore avec elle, Motoko est cependant retournée dans sa chambre. Elle a décidé de lire un petit roman à voix haute à sa peluche.
Mais soudain, alors qu'elle a posé Doudou à côté d'elle, elle aperçoit son étiquette, accrochée près de sa queue. Curieuse, elle pose le livre dont elle s'était saisie un moment, et elle prend Doudou pour observer son étiquette. En regardant son ventre, elle peut voir l'autre côté de ce drôle de petit morceau de tissu, sur lequel des mots sont écrits.
Les deux premières lignes sont écrites dans une langue qu'elle connaît mais qu'elle parle pas encore très bien, l'anglais. Les deux lignes suivantes, en revanche, sont écrites en français.
"Fabriqué en Indonésie, tous matériaux neufs"
Elle ne comprend pas la deuxième ligne, alors elle se concentre sur la première :
"Fabriqué en Indonésie".
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