I comme Infini

Soudain, elle craqua. Quelque chose au fond d'elle se brisa. Cette chose qui jusque là avait jeté un voile noir de désespoir devant ses yeux et avait fait remonter dans son esprit des pensées négatives. Cette chose qui lui avait susurré des idées sombres à l'oreille. Des idées qu'elle avait interprété comme de la facilité. Comme une libération. Comme elle s'était trompée!

Elle éclata en sanglot, se recroquevilla sur elle même et ses larmes dévalèrent le long de son beau visage, plus nombreuses que jamais.

Ils restèrent ainsi un long moment. Lui debout, impuissant, son paquet de mouchoir toujours à la main. Elle accroupie à ses pieds, la tête entre les jambes, le corps secoué de sanglot. Il la regardait.

Il arriva un moment où elle ne put plus pleurer. Elle avait déjà épuisée toute sa réserve de larmes. Elle tendit timidement la main et le jeune garçon, qui semblait avoir son âge, lui remit son paquet de mouchoir. Elle se moucha, encore et encore, face à lui qui l'observait sans rien dire.

Elle osa enfin relever la tête vers lui. Il n'avait pas bougé d'un millimètre. Elle devait avoir les yeux rouges et gonflés. Elle avait froid. Elle avait besoin de soutien.

Elle se jeta dans ses bras.

Elle le sentit se raidir lorsque qu'elle se colla contre lui. Elle enfoui son visage dans son épaule. Peu importe que ce soit un inconnu. Elle avait besoin de réconfort. Elle ne voulait plus être seule. Elle voulait se sentir aimée. Protégée.

Et, une fois de plus, il la sauva.
Il entoura ses bras autour de sa taille et la serra contra lui. Il ne la laissa pas tomber. Il parla.

- Écoute je...
Sa voix tremblait.
- Je ne sais pas ce qui t'as poussé à vouloir faire ça. A vouloir.. sauter. A vouloir mettre fin à ta vie. Je ne veux pas le savoir. Ça ne me regarde pas. Mais tu dois savoir... tu dois savoir que c'était débile. C'était égoïste. C'était ridicule. C'était stupide. Et pourtant tu ne dois pas t'en vouloir.

Elle écoutait ce qu'il disait et ça lui faisait mal. Mal au fond de la poitrine. Mal parce qu'elle savait qu'il avait raison. Elle s'abandonna contre lui tandis qu'il se remit à parler.

- Je ne sais pas ce qui as fait que j'ai été là au bon moment. Je crois que c'est parce que tu ne devais pas mourir. Tout simplement. Alors maintenant, rentre chez toi. Va voir tes parents, tes amis, un psy, n'importe qui et fait toi aider. Dis leur tes problèmes, parles-en. Et vis. Vis parce qu'il te reste encore une infinité de moments de bonheur à vivre. Vis parce que, même si tu as eu mal aujourd'hui, ça ira mieux demain. Vis parce que ta vie vient de commencer. Vis.

Elle n'avait toujours pas prononcé un mot. Mais ce qu'il venait de lui dire la laissa muette. Incapable même de sortir le moindre son de sa gorge. Elle se détacha de lui et ils se regardèrent encore. Son visage était fermé. Grave. Sérieux.

Il ne semblait pas fier de lui. Pas heureux. Alors qu'il venait de sauver une vie. Non. Il était bouleversé. Choqué. Blessé.

Elle se rendit soudain compte qu'elle allait mieux. Que ce qui lui dévorait le cœur et l'avait amené jusqu'au bord de cette falaise avait disparu. Elle compris que la douleur ne venait pas tant de ce qui l'avait poussé à vouloir se suicider, mais de sa décision de vouloir passer à l'acte. Elle avait eu peur d'elle même. Peur de ce qu'elle avait voulu faire. Elle avait perdu toute confiance en elle. Et cela n'avait fait qu'augmenter sa souffrance.

Elle ne sût pas quoi dire. Elle ouvrit la bouche pour parler mais rien ne sorti. Elle inspira, expira, et décida de ne prononcer qu'un mot. Le plus important.

- Merci.

FIN