SMS SOS (II)
Mes souvenirs se confondent, je suis toute confuse. Mon cœur palpite, au loin. Et je veux sortir. Mon instinct et mon âme me le demandent. Alors, je sors. Je pars, parce qu'il m'est avis que c'est ce qui est à faire ; comme si une destination m'attendait au moment opportun. Mes pensées se chevauchent. Comme si elles n'étaient pas toutes miennes. Et j'avance droit derrière une ombre matinale qui me tend les bras. Un signe. Une goutte. L'espoir. C'est le grand temps du printemps ; l'heure des réclamations, le paroxysme de mon infinie tristesse sortie du lyrique néant ; et je regarde l'écran de la malfaisante technologie – je te hais – et son contenu doux comme du miel et amical comme mon amie. Disparue. Chassée des foules. Son dernier message...
Il est bien dommage que la photo, chère amie, ne t'est pas parvenue. Laisse-moi donc te représenter à ma manière la bruyante scène à laquelle je dus assister la veille, et qui mérite toutefois notre attention, car s'il s'y a bruit, il y a conflit ; et en chaque conflit une histoire. Alors que je quittais selon ma traditionnelle habitude la Grand-Place, non-loin de la seule avenue de la ville, du bruit. Des visages tirés, les traits sévères, les gueules béantes, ouvertes etbruyantes. On eut dit mille âmes en peine déchaînées ; elles battaient le goudron, et les cris, incompréhensible dans les premières minutes de mon arrivée, se firent concis, clairs. Des paroles, des revendications ; et l'on regarde devant soi, et l'on regarde de côté, à la recherche du coupable, à la recherche d'assistance, mais rien ne peut venir grossir la masse ; et l'on crie au ciel contre la sphère qui ne nous comprend sans qu'on ne la comprenne. Ces gens, vois-tu, réclamaient. Quoi ? Eh bien, leurs réclamations, inscrites sur les tracts, les gilets, les pancartes, les banderoles, ces inscriptions je ne les aie pas lues. Je ne les ai ni entendu, fascinée par le spectacle d'une animation grouillante et rampante, trop patiente pour quitter les rues, impatiente d'obtenir satisfaction. Et je fus si ébahie que je n'eus pas même le temps de voir les minutes se perdre, et les secondes me poignarder de passivité. Il faut voir pour y croire ; vivre pour crier, non crier pour vivre : tristesse d'une condition humaine mise à mal ; pauvres femmes, pauvres hommes. Pauvre requête... Il n'y a rien de si triste que la vue d'une masse qui hurle ; car la violence la plus extrême est peut-être la violence suggérée par une revendication sonore et affreuse dans la représentation de ces diverses âmes aux traits graves. J'eus de la compassion, et une envie de me joindre à elle, en proie aux fantômes du passé, ces grandes figures qui tapèrent du poing sur la table contre la dominance ; et mon cher Zola, et mon cher Hugo, et mes chers Goncourt, et mon cher La Martine. Mais mon seul réconfort fut de trouver sur mon visage une larme et autour de moi la solitude. Heureuse d'être triste, triste d'être heureuse. Telle une ombre... Je...
Je n'ai jamais eu le courage d'aller jusqu'au bout, soit parce que j'en connaissais le dénouement, soit parce que je souhaitais seulement me rassurer. L'âme qui m'a envoyé ce message était perdue ; les gens l'intéressaient, mais ne s'intéressaient guère à elle et son « archaïsme ». On ne revient pas dans le passé ; le monstre y a pourtant demeuré. Je... je lis la suite. Attends. Ne t'impatiente pas. Merci.
Dussé-je y laisser pan d'existence, puissé-je reposer en mon antre en ta présence... juste une fois.
A la lisière des mondes
La silhouette moribonde
S'aventure et fonde
Sur de fertiles pensées
Un semblant de liberté
Grâce au cœur échangé
Sinistre abandon
Que cette cruelle maison
Sans âme, sans parents
La première ombre errant
Finit d'ouvrir au bleu regard
La vérité à bien des égards
Eurêka. J'ai trouvé. C'est la traduction littérale du grec. Si tu ne comprends pas... ce n'est pas grave. Je te pardonne. Mon instinct a deviné. Je sais où chercher. Je sais quoi chercher. Mais j'ai peur d'y aller. Mon cœur bouillonne. Le temps m'est compté.
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