Les Mots (I)
Une larme. Une plume. Une violette. Des Mots. Une larme. Une plume. Une Violette. Des Mots. Une larme. Plus de plume. Plus de violette. Aucun mot. Une larme. Une pensée filante pour l'astre perdu ; dans l'obscurité éclatée, les claquements de l'horloge. Assise sur une chaise, ombre attendait patiemment... quoi ? Rien. Silence déterminé, assise, immobile, à tête reposée, le regard allant au-delà des murs, la respiration secrète et le sourire à peine dissimulé. Ombre regardait, et sentait le matin qui s'éveillait ; le frottement des pins contre les vitres, le baiser du vent sur la nuque..
– Encore éveillée, petit monstre ?
– Toujours. Je dois veiller, dit l'ombre.
Ce matin, il pleuvait. Ce matin, je n'avais pas envie de me lever. Je n'avais pas non plus envie de voir. Ni d'entendre. Et encore moins de marcher, quand je posais enfin les pieds sur ce sol froid et rugueux. Un frisson me parcourt l'échine. La fraîcheur et le facteur. Les voilà arrivés. Je pose les pieds devant le seuil. Le facteur. Il ouvre. Il s'introduit dans la maison, comme à son habitude ; il avance, comme à son habitude. Il me regarde, comme à son habitude, avec le même air imbécile que les fois précédentes. Mais cette fois-ci, une lettre m'était destinée. Je tremblais. Le papier, au-dedans, je le devinais, n'était semblable à aucune autre. Je devinais un parfum qui m'était cher. Un véritable petit diamant, mais je la rangeai dans un manteau, comme si la peur de me la voir volée me hantait.
– Puis-je vous aider ? Vous semblez...
– Silence. Partez maintenant.
Et dès lors que je lui proférais ces paroles, je ne pus me retenir de penser à l'ombre, à présent disparue. Tu vois ? L'ombre, elle est là. Et elle est spéciale. Elle s'absente, elle le demeure. Et elle se meurt. N'est-il pas légitime de repousser les ténèbres au nom d'une liberté défendue sans évoquer la condition humaine qui n'est elle-même qu'une petite sous le joug de grandes gueules ? Mais je m'égare. Le facteur part. Mon cœur palpite, je le sens. Mes heures sont comptées. Et je suis triste. Triste sans être heureuse.
L'enveloppe, je la reconnais à ces mots inscrits à son dos : « Triste d'être heureux, heureux d'être triste, le propre d'une âme souriante, clairvoyante, au dos des âges.. »
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