Chapitre 25
La salle du Feu était une grande pièce sombre, souvent calme et peu remplie, où les elfes venaient s'isoler pour réfléchir ou composer. Il n'y avait aucune table, mais un grand feu qui brulait allègrement dans le grand âtre, entre les piliers sculptés qui se dressaient de part et d'autres. Il n'était pas rare d'y entendre des contes de toute sorte, ou des chants et des poèmes.
Lorsque les convives se furent posés, une voix d'elfe s'éleva et résonna entre les piliers. Balgor s'était assis à côté de Glînndaw. Il le dominait largement par sa taille et ses longs et raides cheveux châtains clairs encadraient son visage sérieux et ses traits durs. Assis à l'écart des autres elfes, il écoutait de l'extérieur tout en observant ce qu'il se passait avec ses yeux sévères. Sa posture droite renforçait l'effet impressionnant, et on eut dit alors de lui qu'il fut un sombre seigneur elfe venant de contrées reculées.
Pourtant, Balgor eut la surprise de se rendre compte que l'elfe ne l'impressionnait plus. Après tout ce qu'il avait vécu, aborder un elfe aux airs terribles ne lui faisait plus ni chaud ni froid.
- Pourquoi vous ne vous mêlez pas aux autres elfes ? Demanda Balgor.
Glînndaw regarda l'homme sans répondre, puis reporta à nouveau son regard de glace sur le feu lointain, comme un désir inaccessible.
- Vous vous nommez Glînndaw c'est cela ? Retenta Balgor. Je suis Balgor, fils de Belron...
L'elfe ne réagit pas. Il ne cligna même pas de l'oeil.
- Dîtes, s'énerva Balgor, parlez vous seulement le langage commun ?
Cette fois-ci, Glînndaw regarda Balgor dans les yeux, et l'homme pu apercevoir au fond de la pupille de l'autre un éclat étrange et sombre, comme un morceau de nuit.
- Oui je parle le langage commun, répliqua calmement Glînnedaw, et si je ne vous avais pas répondu, Balgor fils de Belron, c'est que j'eus espéré vous voir repartir pour pouvoir apprécier la sonorité de ce chant qui m'est cher. Que voulez vous ?
Balgor fut déboussolé par la franchise de l'elfe. Cependant, en oubliant sa fierté blessée, il appréciait cette facette de Glînndaw.
- Je souhaitais simplement mieux vous connaître, répondit Balgor. Vous m'intriguez, cela est vrai, aussi j'aurai voulu en apprendre plus sur vous, et de votre bouche.
- Et bien puisque vous êtes là,dit l'elfe, discutons !
Et la conversation s'engagea. Discuter avec Glînndaw s'avéra très intéressant du point de vue de Balgor, malgré les travers abrupts de l'elfe. Pourtant, bien des heures après la discussion, Balgor réalisa qu'il n'avait rien appris de son interlocuteur, ce qui était à l'origine le but de la conversation. Au contraire, l'homme avait surtout parlé de lui et de son passé, à la demande de l'autre. Le ton était agréable et compréhensif, et Glînndaw avait donné à Balgor son point de vue sur la violence.
- La violence n'est pas une mauvaise chose en soit, avait-il dit. C'est l'action d'en abuser qui la rend abjecte et répugnante. Lors d'un combat à mort, qui n'est pas rare dans la nature où règne la loi du plus fort, l'acte de violence est une réaction naturelle de défense. Si ton choix est de limiter cette violence dans tes actes, saches néanmoins que tu ne pourras pas l'effacer totalement de ta vie à moins de sacrifier celle-ci à tes ennemis. Et il y aura toujours un adversaire pour se dresser contre un homme qui ne se pli pas aux principes ancestraux. Ne l'oublie jamais, et ne te soumets pas à ceux qui font acte de violence pour éteindre ta flamme.
Puis la conversation était retournée à des détails futiles avant de s'achever.
Depuis lors, Balgor avait une vision différente de l'elfe aux airs de brume. Il ne le voyait plus comme un terrifiant seigneur, mais plutôt comme sage érudit qui se plait à écouter les mœurs et chants plutôt qu'à parler sans raison.
Finalement au fil des jours, Balgor ne se trouva à l'aise qu'avec Glînndaw et Givelorn, trouvant les autres elfes un peu trop accrochés au passé et aux chants qui le chante. Glînndaw y était attaché aussi, mais il n'avait pas leur vanité ce qui plaisait à l'homme. On les trouvaient souvent ensemble, à discuter au cours de ballades le long des allées pavés de Fondcombe.
Balgor apprit ainsi quelques mots de Sindarin comme les formules usuelles "mae govannen", "cuio vae", "estannen...", "gen hannon" ou "glassen".
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top