Amdir

Le voyage touchait à son terme.

Depuis plusieurs jours déjà, les Monts de Brume étaient derrière eux.

- Nous sommes un peu trop au Nord je crois... Murmura Legolas.

Les deux frères s'étaient arrêtés pour prendre leurs repères et se situer sur une carte que l'ainé avait pris soin d'emporter. Seulement il s'avérait que leur route les menait dans la mauvaise direction.

- Nous devons marcher plein sud et passer à travers la Trouée des Trolls. Reprit-il avant de ranger la carte et de se remettre à marcher.

- Tu n'es jamais venu ? Demanda Amdir.

- Non, répondit Legolas en secouant la tête. Je ne connais Fondcombe que de part les légendes et histoires que racontent les rares voyageurs passant par Vertbois. Les elfes qui y vivent sont réputés érudits et généreux. Le Seigneur Elrond ne nous refusera pas.

Amdir acquiesça avant de porter à nouveau son regard en avant. Tout comme ceux de son frère, ses longs cheveux blonds tressés voletaient derrière lui, portés par la légère brise. Ses yeux d'un brun soutenu juraient avec ceux, bleus, de son ainé. Leurs pas souples les entraînaient rapidement vers leur destination, sans se soucier du poids des sacs sur leurs dos. Leurs oreilles attentives analysaient chaque piaillement d'oiseau, chaque bruit produit pas un rongeur qui détallait devant les deux elfes, chacun des frémissements des feuilles qui bruissaient autour d'eux...

Au soir, ils firent leur dernier campement. Le lendemain, avant le coucher du soleil, ils atteindraient la vallée d'Imladris et leur destination.

Après s'être installés, un feu crépitant doucement sur la terre débarrassée de tout élément combustible, Legolas s'absenta afin de chercher de quoi les nourrir. Amdir se laissa tomber au sol, yeux fermés pour mieux se concentrer sur les sons environnants. Un peu plus de trois semaines après leur départ, ils arrivaient enfin à destination. Amdir ignorait totalement ce qui l'attendait, et ça l'effrayait. Il avait changé en trois semaines de voyage, pour le meilleur ou pour le pire il ne le savait pas, mais il n'était déjà plus le même.

L'accident d'Adenil particulièrement l'avait marqué. Lui qui était si fort, si rapide, si expérimenté... Désormais il ne pouvait même plus tirer à l'arc. Décidément le destin voulait qu'Amdir finisse seul. Comme si il n'avait pas déjà assez souffert.

Mais rien ne servait de se lamenter. Dans la vie il faut savoir tourner la page, et tout faire pour que les malheurs passés ne se reproduisent pas. Voilà l'idéal qu'Amdir observait, et s'efforçait de suivre.

Petit à petit, les oiseaux cessaient leurs concerts de cri et de battement d'ailes pour laisser la place aux glissement silencieux des rapaces nocturnes et aux stridulations des criquets. Un vent frais venait rafraichir la pointe des oreilles de l'elfe qui restait à l'affut, presque en transe, mais parfaitement détendu. L'air s'alourdissait, la pluie ne tarderait pas, mais Amdir savait qu'elle ne nourrirait pas la terre ce soir là. Elle attendrait le matin.

Il respira profondément. L'air entrait dans ses poumons avec une fraîcheur vivifiante, et lui apportait un regain d'énergie appréciable. Ses membres étendus savouraient le repos après une dure journée de marche, et seul l'estomac de l'elfe montrait une pointe de mécontentement.

Un bruit discret capta soudain l'attention de l'elfe. Un bruit de pas, tout proche. Ils étaient lourds et maladroits, ce n'était pas Legolas. Amdir se releva avec prudence, sur ses gardes, et dégaina silencieusement son épée qui ne le quittait plus depuis l'attaque des orcs. Il se posta non loin du feu, près à bondir en cas de menace. Une forme indistincte fit remuer les fourrés, et les muscles d'Amdir se tendirent comme la corde d'un arc, prêts à se détendre pour propulser l'elfe à l'abri d'un assaillant.

Les buissons furent à nouveau agités, et quelqu'un déboucha sur le cercle de lumière crée par le feu...