Chapitre Vingt




petite nda en début de chapitre pour fêter la parution de ce vingtième chapitre 🎉🎉 !
merci beaucoup à vous de lire 'Menace' <33





Novembre
Pour la première fois depuis un certain temps, Yeonjun était nerveux.

Bien sûr, il lui arrivait d'être légèrement stressé. Lors de ventes aux enchères, de rencontre avec des personnalités importantes dans le domaine du design, où simplement durant le processus de création d'une toute nouvelle gamme.
Seulement rien ne ressemblait à cette nervosité qu'il ressentait à l'instant même. Tout allait bien pourtant ; ses cheveux étaient impeccablement coiffés, sa tenue choisie avec soin et fraîchement repassée – il ne partait jamais sans son kit de repassage, de beaux costumes nécessitaient de l'entretient. En bref, rien ne dépassait, rien n'était anormal, tout était parfait.

Alors pourquoi se tenait-il devant cette porte ? Et surtout, pourquoi n'était-il toujours pas parvenu à toquer ? Pourquoi était-il nerveux pour si peu ? Il s'était pourtant mentalement répété un nombre incalculable de fois les paroles qu'il avait l'intention de prononcer.

Bonjour Soobin, en vue de l'agréable après-midi que nous avons passé ensemble hier, je me demandais si vous aimeriez vous joindre à moi aujourd'hui pour une visite du quartier de Montmartre.


Clair, précis et efficace. Ce n'était qu'une simple phrase, quelques mots et une proposition. Il n'y avait rien de primordial en jeu, d'ailleurs, il se moquerait bien que Soobin refuse. Bien au contraire ! Passer sa journée seul comme il l'avait originellement prévu serait on ne peut plus simple. Plus simple oui, mais quelque chose au fond de lui en avait décidé autrement. Il ne parvenait pas à mettre le doigt dessus, mais cela devait avoir quelque chose avec les paroles du plus jeune prononcées la veille.

Rien qu'un beau sourire, monsieur.

Rien que d'y repenser, il sentait ses mains devenir moites et quelque chose bondir en lui. C'était idiot, futile, et cela se jouait de lui au point de le faire changer ses plans. Mais il n'avait su combattre cette étrange idée qui lui était passée par la tête de visiter Paris avec Soobin, et quitte à ne pas pouvoir s'en débarrasser, il avait décidé de se préparer. Et tout cela pour qui ? Pour qu'il termine immobile devant cette fichue chambre d'hôtel, à se répéter sans cesse les mêmes mots sans jamais pouvoir les prononcer, ni faire quoique ce soit.

Un gamin, Yeonjun. On dirait que tu es de retour au lycée, ressaisis-toi.

Quelque chose dans cette phrase lui fit l'effet d'une gifle mentale. Soudainement déterminé, il leva le poing dans le but de le faire atterrir sur le bois de la porte.

Seulement, avant même qu'il ne puisse s'en rendre compte, cette dernière s'ouvrit, et sa main manqua de justesse le visage de son assistant. Ses yeux s'écarquillèrent en même temps que Soobin sursautait et laissait échapper un cri de peur.

— Monsieur ?!

— Soobin ! Je suis sincèrement désolé, il n'était pas dans mon intention de..., il parcourru ses traits de visage effrayés de ses yeux, peu fier de sa maladresse. Je venais simplement toquer à votre porte, je ne vous avais pas entendu sortir...

Il se demanda si ses mots avaient été correctement choisis. Cela faisait longtemps qu'il ne s'était pas retrouvé dans une telle situation, et sa difficulté à avoir une discussion amicale spontanée lui avait ressurgi en plein visage. Une partie de lui se demandait pourquoi il s'était mis dans un tel pétrin, l'autre jubilait silencieusement de retrouver des sentiments et sensations d'antan. Cette facette de lui-même était discrète, à peine existante, mais belle et bien là.

— Oh, et pourquoi vouliez-vous me voir ? demanda le plus grand, l'air à peine plus rassuré.

Il se rendit compte que la question ne lui avait jamais traversé l'esprit, et il avait fallu qu'elle surgisse à un tel instant. Certes, le plus jeune lui faisait confiance – et de ça encore, il n'en n'était pas certain –, il lui avait proposé son aide durant leur voyage en avion et avait accepté de l'accompagner voir la tour Eiffel. S'il omettait cet étrange compliment qu'il lui avait fait sur son sourire, rien n'indiquait réellement qu'il appréciait sa compagnie en dehors du travail. Lui qui s'était persuadé plus tôt que la réponse du châtain lui serait bien indifférente, il se retrouvait à devoir remettre en question cette certitude. Une fois encore.

Il prit une grande inspiration, le plus discrètement possible.

— Et bien je me demandais si vous... Enfin, puisque..., il se faisait honte, tu es pitoyable Yeonjun. Il se trouve que j'ai apprécié l'après-midi que nous avons passé hier à la tour Eiffel, je me demandais donc si cela vous dirait de visiter le quartier de Montmartre.

Il avait parlé un tantinet trop rapidement, avait trop cherché ses mots et son ton avait baissé vers la fin de sa phrase. Ses professeurs de prépa se seraient pendus en l'entendant, lui-même ne comprenait pas pourquoi il avait tant de mal à parler correctement. Il était PDG d'une entreprise bon sang ! Où était passée sa locution exemplaire...?

Il avait complètement oublié qu'à l'instant, il n'était plus le patron d'une entreprise reconnue, et encore moins un élève d'élite d'une école prestigieuse. Non, en cet instant, il n'était plus que Choi Yeonjun, un humain comme un autre. C'était peut-être ça, qui lui donnait autant de mal à s'exprimer.

Alors que Soobin le regardait avec un air dubitatif, la bouche entrouverte, il se rendit compte qu'il avait oublié ce qui devait être la partie la plus important de sa proposition.

— Avec moi, je veux dire.

La bombe était larguée, il ne pouvait plus revenir en arrière. Mais la sensation que le plus gros était désormais derrière lui le soulagea.

— Oh...

Il tenta d'analyser les expressions faciales de Soobin – l'agrandissement de ses yeux, le léger rictus qu'abordaient ses lèvres, son regard en arrière pour sa chambre dont il n'apercevait qu'une infime partie –, en vain. Il devait se résoudre à l'évidence : il n'avait jamais été doué pour déchiffrer les messages subliminaux que pouvaient retranscrire le corps humain. Il avait longtemps essayé pourtant, mais le résultat demeurait décevant. Mais plutôt que de s'entraîner à observer comme il avait pu le faire à un plus jeune âge, il avait fini par faire en sorte de toujours obtenir la réponse qu'il voulait, faisant de lui un élève brillant et un patron exemplaire.
Or, il n'était pas question ici de négociation de contrats ou de prise de décisions culminante pour un projet important. En cet instant, il n'était plus supérieur, Soobin n'était plus son assistant. Ils étaient à égalité, de retour à un stade de relation neutre dont l'évolution ne dépendrait que de leurs qualités sociables respectives. Et Yeonjun savait les siennes médiocres.

Pourtant lorsque le châtain lui répondit, il se fit la réflexion que peut-être, elles n'étaient pas si désastreuses que cela.

— Ce sera avec plaisir monsieur !

:::

— Je crois que c'est ici.

Yeonjun se rendit compte d'à quel point le fossé entre la théorie et la pratique était conséquent une fois sorti du métro.

Collectionner les cartes de Paris, de son métropolitain et en noter tous les itinéraires potentiellement intéressants depuis des années était une chose. Réussir à ne pas se tromper de train pendant un changement, de direction ou même de rue une fois le nez dehors, c'en était une autre. Pour ce qui était du travail, cela allait encore : entre les locaux de Arthur et l'emplacement de la future salle de spectacle, les risques de se perdre étaient rapidement devenus minimes. Pour le tourisme en revanche... c'était une autre histoire. Le Louvre et la tour Eiffel n'avaient pas été bien compliqués à trouver, mais pour le reste, cela s'avérait un peu plus complexe.

Malgré tout, il tirait de ces trajets pointilleux une expérience agréable. Prendre le métro avait quelque chose de bon au fond – le fait qu'il s'agisse du métro parisien y étant pour quelque chose – et même s'il aurait largement préféré pouvoir admirer la ville en même temps qu'il la traversait, il avait dû se résoudre à faire une croix sur le taxi. Certes, Yeonjun aimait Paris, ce qu'il vivait en ce moment était un rêve d'enfant devenu réalité. Mais c'était plus fort que lui : son esprit économe refusait de payer aussi cher un service qu'il savait nettement plus accessible dans son pays.

Rapidement, Soobin et lui se retrouvèrent devant le point de départ du mini-train touristique qui faisait le tour de Montmartre. Tous deux payèrent leur place et montèrent dans le train une fois ce dernier arrivé. Yeonjun devait reconnaître que jamais il ne serait monté dans un véhicule aussi ridicule devant ses employés ou quiconque le connaissant pour son statut professionnel. Soobin était une exception, il commençait doucement à se faire à cette idée.
Le mini train portait bien son nom, et ils durent s'y prendre à deux fois pour trouver une position correcte qui ne laisserait pas leurs longues jambes dépasser du minuscule wagon.
Quelques instants plus tard, ils avaient des écouteurs branchés à un audio-guide leur racontant l'histoire de divers lieux où écrivains, peintres et scientifiques s'étaient auparavant réuni pour confectionner leurs réussites respectives.

Yeonjun était plongé dans l'écoute de ce que la voix un peu trop monocorde de la femme lui racontait dans un coréen légèrement douteux, mais se rendit rapidement compte que ce n'était pas vraiment le cas du jeune homme qui l'accompagnait. Il sentait Soobin gesticuler à ses côtés, et se tourna donc pour avoir une réponse aux questions qui fusaient dans son esprit.
Il l'obtint rapidement.

Sans savoir si le châtain portait ne serait-ce qu'une infime attention au discours prononcé dans ses oreilles, il observa ce dernier esquisser des gestes de main chaque fois qu'un ou une française croisait leur chemin. Ce qui arrivait régulièrement, à vrai dire. Il ne comprenait pas l'objectif de la démarche, le plus jeune cherchait-il à imiter la reine d'Angleterre à saluer la population française ainsi ?
Il ne sut s'il devait rire ou se sentir gêné d'une telle attitude. Puis, en observant le sourire franc de Soobin, ses yeux brillant de ce qui semblait être de la joie, ses grandes mains à moitié couverte par les longues manches de son pull en laine rouge, il se fit la réflexion qu'il n'avait plus grand-chose d'embarrassant, finalement. Non, il était beau Soobin, lorsqu'il souriait pour de vrai et qu'il s'amusait sans se cacher. Et étrangement, cela ne lui fit pas peur de le penser.

Soobin se retourna vers lui, ayant visiblement pris conscience de l'insistance avec laquelle il l'observait. Ils se regardèrent simplement, sans rien dire, pendant un certain temps.

— Il y a quelque chose sur mon visage ? demanda Soobin en se caressant la joue.

Ce fut au tour de Yeonjun d'esquisser un rictus.

— Rien, hormis un très beau sourire, Soobin.

:::

Quelques minutes plus tard, le train s'était arrêté en haut de la bute pour laisser le temps aux touristes de faire un tour dans le vieux village qui regorgeait de boutiques en tous genres.

Sans vraiment qu'ils n'aient à se concerter, les deux hommes prirent deux chemins différents, un léger rictus de fierté dessiné sur les lèvres de Yeonjun.
C'était puéril, mais il se sentait fier d'avoir retourné les paroles de sons assistant contre lui. Ce n'était pas qu'il n'avait pas pensé ses mots, bien au contraire, il les avait pensés avec suffisamment d'appui pour pouvoir les lui dire. Mais il y avait eu dans la façon dont les joues du plus jeune s'étaient doucement teintées de rose, dont son sourire s'était visiblement agrandit sans son accord et dont ses doigts avaient agrippé les manches de son pull, un sentiment de justice. Comme pour prouver que, lui aussi, il pouvait se la jouer avenant lorsqu'il avait la confiance nécessaire. Et même s'il n'était pas encore sûr de comprendre ce qui avait bien pu justifier cet élan de confiance et cette drôle de déclaration, il se sentait satisfait.

Il fit rapidement le tour des magasins du village. Rien ne l'avait vraiment intéressé ; entre les goodies qui s'avéraient trop souvent plus chers que leur réelle valeur, et les reproductions plus ou moins jolies d'œuvres d'art en tous genre, rien ne l'avait vraiment attiré. Il fallait dire que la qualité de ce qui était présenté là tranchait nettement avec ce qu'il avait pu croiser au Louvre et à la Tour Eiffel. Toutefois, il restait une dernière boutique qu'il n'avait pas visité, et puisqu'il lui restait au moins dix minutes avant que le train ne reparte, il décida d'y entrer.

L'ambiance générale était similaire à celles des échoppes qu'il avait visité plus tôt, seulement, un présentoir tournant à carte postale attira son attention. Enfin il avait devant lui des designs et dessins intéressants à un prix correct. Curieux, il tenta de faire tourner l'étalage, mais fut déçu en se rendant compte qu'il était immobile. Il marmonna dans sa barbe inexistante quelque chose sur l'idiotie d'acheter un présentoir tournant s'il ne tournait pas, avant de percuter quelqu'un. Il releva la tête.

Soobin. Encore et toujours Soobin. Visiblement, ils ne pouvaient pas rester éloignés l'un de l'autre trop longtemps.

— Décidément, fit le plus grand avec un petit sourire.

Yeonjun lui rendit discrètement ce dernier, ne sachant pas vraiment quoi ajouter. À la place, il se contenta d'observer les nouvelles cartes postales à sa disposition. Une notamment, retint son attention. Il s'agissait d'une aquarelle du sacré cœur sui se trouvait non loin de là où ils étaient. Il s'en saisit, et découvrit qu'il s'agissait d'un dépliant à l'intérieur duquel se trouvaient d'autre aquarelles représentant des monuments de Paris. Voilà des années qu'il n'avait plus envoyé aucune lettre ou carte postale, et en détaillant ces bouts de cartons finement décorés, il se fit la réflexion qu'écrire lui manquait.

— Vous avez trouvé votre bonheur ? demanda Soobin en regardant sa trouvaille.

— Je crois bien oui, fit-il d'un air satisfait. Vous aussi visiblement, continua-t-il avec un mouvement de tête en direction du paquet de cartes que tenait le châtain.

— Oh, fit ce dernier avec un petit sourire. Oui, je les trouvais belles et puis, je me suis dit que j'en prendrais une pour tous les membres de l'équipe qui n'ont pas pu faire le déplacement avec nous. Je sais que Hyunjin a toujours voulu aller en France...

Pour toute réponse, il hocha silencieusement la tête avant que le plus grand ne se dirige vers la caisse. Et la seconde d'après, son esprit était en ébullition.

Les autres, ceux qui n'avaient pas pu venir. Pas une seule seconde il ne lui était venue l'idée de leur rapporter quelque chose de leur voyage. Après tout, il ne leur devait rien d'autre que leur salaire, ce n'étaient pas qu'ils n'avaient pas pu venir ; c'était que de toutes façons, leur présence n'aurait pas été utile ici. Ce qui n'était pas vraiment le cas de Soobin, il essayait encore de s'en convaincre. Pourtant, son assistant voyait les choses autrement, et il ne savait pas encore si cela l'ennuyait ou si au contraire, il en était presque fasciné. Jamais non plus il ne s'était demandé quel genre de voyages ou sorties ses employés aimeraient faire. Non après tout, il ne les avait à ses côtés que pour travailler et rien d'autre, il s'en était toujours allègrement contenté.
Alors pourquoi les mots de Soobin le touchaient tant ? Pourquoi avait-il soudainement la sensation d'avoir raté quelque chose, faillit à son devoir ?

Yeonjun n'aimait pas cela : qu'une simple phrase de la bouche de son assistant provoque en lui une telle remise en question. Parce que cela ne signifiait qu'une chose, et d'en prendre conscience était aussi douloureux qu'agréable.

Il commençait peut-être à l'apprécier un peu trop, ce Soobin.











⌨️SUISEI...

heyy

vous allez bien ? :3

j'espère que les retrouvailles avec nos deux loulous vous ont plu ~ ça me fait plaisir de vous partager la suite de leur petite histoire hehe
merci pour votre accueil de la dernière fois ! >< ça m'a fait du bien de vous retrouver ~ j'espère que la suite de la fiction vous plaira !

la bise <3

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