Chapitre Trente-six
TW : vous pouvez vous rendre à la fin du chapitre pour connaitre les détails du tw lié aux sujets listés dans l'avant propos.
si vous ne voulez pas vous faire spoil le contenu du chapitre, vous êtes invités à simplement continuer votre lecture !
Février
— Je suis désolé.
Surpris, Yeonjun releva la tête de son téléphone en sursautant.
Soobin venait tout juste de sortir de sa douche et pendant ce temps, il n'avait rien trouvé de mieux à faire que de regarder ses mails. Les vieilles habitudes ne mourraient pas facilement ; une fois Soobin calmé et enfermé dans la salle de bain, il s'était mis en pyjama et s'était naturellement raccroché à quelque chose de rassurant.
Il reposa son téléphone sur sa table de chevet et se tourna entièrement dans sa direction, encore assis sur le rebord de son lit.
— De quoi ? demanda-t-il, encore un peu plongé dans le travail.
Devant lui, Soobin avait la bouche légèrement tordue et triturait les pans de la chemise du pyjama qu'il lui avait prêté. Les manches de cette dernière étaient un peu courtes pour lui ; il fallait dire que Yeonjun n'avait jamais eu à prévoir de pyjama pour plus grand que lui.
— Pour... pour tout à l'heure. Et pour la douche, le pyj' enfin...
— Soobin, l'arrêta-t-il tout de suite. Ne t'excuse pas. Des pyjamas, j'en ai des tas, et je n'ai vraiment pas à m'inquiéter de la dépense en eau que me coûtera ta douche, fit-il en lui souriant.
Il crut voir ses épaules se détendre légèrement et cela le rassura.
— Et pour tout à l'heure..., il lui adressa un sourire incertain mais plein de volonté. C'est rien, vraiment.
Une poigné de seconde s'écoula et il sembla à Yeonjun qu'elle dura une heure entière. Soobin était toujours scotché à la porte de la salle de bain de sa chambre et il détestait avoir à refaire face à cette facette de lui qu'il n'était pas mécontent d'avoir oublié. Ce jeune homme tendu, au regard fuyant et aux doigts écorchés ne lui avait pas manqué ; après des mois à côtoyer Soobin, le vrai, le revoir ainsi le dérangea profondément. Et il se rendit compte qu'il avait longtemps été aveugle pour ne pas voir ce qui n'allait pas chez lui depuis tout ce temps. Il se maudit pour l'avoir mal jugé et l'avoir vu comme ce qu'il n'était définitivement pas ; un garçon cynique, fier et hautain.
— Si tu veux en parler..., proposa-t-il au bout d'un temps.
— Oh je..., il se remit à sourire, bien que ce rictus-là avait l'air plus nerveux qu'autre chose. Je sais pas trop, j'ai déjà assez ruiné la soirée comme ça, continua-t-il en baissant les yeux et en tirant sur ses manches trop courtes.
Yeonjun ouvrit la bouche puis la referma. Il voulut lui dire tout un tas de chose, mais ne put formuler ne serait-ce qu'une pensée cohérente digne d'être prononcée à haute voix. L'espace d'une seconde, il se trouva stupide.
— Tu ne me déranges pas, Soobin.
Il était prêt à tout pour qu'il croit ces cinq petits mots et à en juger le regard qu'il lui lança, ce fut le cas.
:::
Dix minutes plus tard, ils s'étaient de nouveau retrouvés dans le lit de Yeonjun.
Cette fois tous deux habillés et sous la couette, ils avaient passé un petit temps à trouver une position agréable. Après quelques minutes de mouvements maladroits, de pieds froids qui se frôlent et de mains qui ne savent pas où se poser, ils avaient fini par trouver leur bonheur. Une fois les notions de « petite et grande cuillères » intégrées dans l'esprit du plus âgé, Soobin avait réussi à convaincre ce dernier de faire la petite cuillère. Je sais pas, j'ai jamais vraiment eu l'occasion de le faire, mais là tout de suite, j'en ai envie, avait été sa seule explication.
Il n'avait lu aucune ombre de résistance sur les traits de Yeonjun, et cela l'avait grandement rassuré.
Le nez désormais enfouit dans sa nuque, Soobin prit une grande inspiration.
— J'ai toujours détesté la sensation d'être un boulet, une gêne, quelque chose- enfin quelqu'un, qu'on est constamment obligé de ramasser à la petite cuillère. C'est vraiment... le premier truc qui me fait me sentir comme une merde. C'est stupide pourtant, parce que y'a aucun mal à se faire aider, surtout quand on en a besoin. Mais bon, je t'apprends sûrement pas grand-chose de nouveau, là, fit-il avec un rire amer. Je ne sais pas trop d'où ça vient, mes parents m'ont jamais vraiment donné l'impression que j'étais de trop, on croulait pas sous l'or mais bon, j'ai grandi dans milieu plus que correct. J'avais des nouveaux vêtements dès que les anciens se déchiraient ou devenaient trop petits, tout ce que je voulais à noël ou pour mon anniversaire, la base quoi. Donc ouais, j'pense pas que ça vienne de là, ça m'étonnerait. Mais...
Il prit une pause, comme pour réfléchir à ce qu'il pouvait bien dire. Finalement, il continua sur sa lancée sans trop se poser de question.
— Un jour, on regardait les jeux olympiques à la télé, je devais avoir quoi, dix ans ? Et je sais pas vraiment ce qui m'a pris, mais en voyant la compétition de natation, j'suis devenu raide dingue. Complètement émerveillé quoi, ça m'a fasciné de voir des gens aussi bien se déplacer dans un milieu qui n'est euh... à l'origine pas fait pour eux, j'imagine ? Enfin, un truc du genre. Je sais pas si on peut vraiment expliquer les passions qu'on peut développer quand on est gamin, un rien peut nous fasciner. Enfin bref, tout ça pour dire que je me suis retrouvé à supplier mes parents de m'inscrire à des cours de natation. Au début, ils pensaient à un caprice, enfin un truc qui passerait. Sauf que j'ai fait de la piscine avec mon école, et quand ils ont vu sur mon bulletin que j'avais dépoté et que j'adorais vraiment ça, ils ont dit oui. Du coup, à ma rentrée au collège, je faisais de la natation tous les week-ends. C'était vraiment sympa, j'avais quelques amis avec qui j'allais en cours, que j'invitais pour mes anniv' ou pour passer du temps à la maison. Enfin voilà, rien d'extra, c'était normal. Puis la deuxième année, j'ai pu rejoindre le club de la ville. En vrai, c'était pas grand-chose, mais qu'est-ce que j'étais heureux de faire partie de ce club. C'était quand même super validant : j'adorais nager et on reconnaissait mon talent dans le domaine de mes rêves... Dis-toi qu'à l'époque, je me voyais pas faire autre chose dans la vie. Alors bon j'y ai passé un mois, deux mois, puis trois. J'y allais plusieurs fois par semaines... Et là, notre prof' a eu des graves soucis de santé, alors il s'est fait remplacer.
Il déglutit. Il avait peur des mots qui lui échappaient sans qu'il ne puisse réellement les arrêter. Il avait peur de ce qu'il était sur le point de faire et de la facilité déconcertante avec laquelle il était en train de raconter tout cela à Yeonjun.
— C'est un type très souriant qui l'a remplacé, mais en fait... il souriait que devant les parents. Pendant les cours, il était..., il soupira. Je sais pas trop comment dire... Sévère ? Dur ? Ça a toujours été un peu plus que ça, mais euh... on s'en rendait pas forcément compte, je crois. Pour nous, c'est ce qu'il était ouais : sévère, strict, « méchant », ajouta-t-il avec un nouveau rire nerveux. C'est ça ouais, méchant. Il nous foutait une pression monstre sur le dos, du jamais vu. Bien sûr, on s'était toujours entrainé pour améliorer nos records, travailler nos faiblesses et nos points forts pour les compétitions. Mais avec ce gars-là, c'était tout sauf du plaisir. J'ai commencé à penser qu'à ça, tout le temps. J'avais beau aller au collège, faire autre chose comme partir en vacances, je pensais qu'au fait que ma poussée était pas assez longue, mon dos crawlé par assez régulier, mon papillon trop faible. Mon apnée n'était pas assez bonne, mes mouvements de jambes trop saccadés. En fait, c'était jamais assez. Et... hm... Quelque chose était en train de changer. Ma relation à ma passion, était en train de changer. À cause d'un sale type. Et le pire c'est que je m'en rendais pas compte. J'me rendais compte de rien, en fait. C'est ça le problème. Il pouvait nous frapper à coup de frite dès qu'une longueur n'était pas à son goût, on se rendait pas compte du réel problème que c'était. Il pouvait nous lancer nos palmes dans les jambes, nous appuyer sur la tête pour nous garder sous l'eau et « améliorer notre apnée » qu'on se rendait compte de rien.
« C'était violent, illégal, mais en fin de compte, quand on rentrait chez nos parents, c'était juste « notre prof est vraiment méchant, c'est trop relou, j'suis grave fatigué. Au fait on mange quoi ce soir ? », tu vois ? Ça m'avait pas traversé l'esprit que ce qu'il faisait pouvait être bien pire que de simple punitions de prof, enfin des sanctions quand tu fais mal quelque chose quoi, c'était quasiment normal. Et puis la plupart du temps, j'étais trop épuisé pour raconter en détail mes journées à mes parents, alors ouais pour eux, j'avais juste un prof plus sévère que l'ancien. Mais il était plus souriant et un peu plus jeune aussi, alors bon, tout allait bien pour eux. De leur point de vue, j'suis même persuadé qu'il était bien mieux que l'ancien, « sévère mais dévoué », tu vois le genre.
Il déglutit difficilement.
Il sentit Yeonjun se tendre entre ses bras.
— Le truc, c'est quand ses punitions ont commencé à être plus que physiques. Enfin, « plus ». C'est pas vraiment le bon terme. Ça restait physique, mais ça devenait euh... déplacé... ? J'avoue que j'ai jamais trop su si c'était que moi ou si les autres aussi avaient eu droit à ce genre de truc. Faut dire que la période est un peu floue dans mon esprit, même en voulant y repenser. Et puis c'est pas vraiment plus mal en un sens, je crois.
Un nouveau rire nerveux lui échappa.
— Mais euh... ouais. Je sais même pas pourquoi je te dis ça, murmura-t-il la tête enfouie dans les mèches bleues. Enfin, si, je sais, mais...
Il soupira. Il savait ; il y avait quelque chose dans la chaleur corporelle de Yeonjun, le fait de le savoir tout près de lui, un étrange sentiment qui le poussait à se confier. Il savait au fond qu'il était en train de dire ce qui devait être dit.
— J'étais perdu, à l'époque. Je comprenais pas bien ce que ça voulait dire, de poser ses mains là où il le faisait. Ça faisait partie intégrante de sa façon d'enseigner, partie des punitions, en quelque sorte. J'en sais rien, je... Ça me dépassait autant que ça me tétanisait, je crois bien. C'était pas grand-chose au début pourtant, juste placer les frites un peu trop bas lorsqu'on nageait pas bien ou nous sortir de l'eau en tirant sur nos maillots. Et puis, un jour, va savoir comment ou pourquoi, j'ai été le dernier à me changer. En fait, si, je me souviens, se corrigea-t-il. Il s'était particulièrement acharné sur moi ce jour-là, quelque chose à propos de mon corps qui grandissait trop vite et rendait mes mouvements trop brouillons pour lui... bref, une connerie dans le genre. Et il m'a dit : Tu sortiras pas de cette piscine tant que tu n'auras pas amélioré ton temps. Les journées me semblaient déjà interminables à l'époque, pour te dire à quel point j'avais juste envie de rentrer chez moi pour chialer sous ma couette...
« Mais bon, au bout d'une trentaine de minutes, j'ai enfin réussi à améliorer mon temps... maintenant que j'y pense, je me demande s'il n'avait pas juste fait exprès de me garder aussi longtemps. Parce que du coup, il restait plus personne dans les vestiaires. Et je leur en ai pas voulu aux autres, ils pouvaient pas savoir, et puis moi aussi je me serais vite barré si j'avais été à leur place. J'aurais jamais imaginé qu'il puisse arriver un truc pareil à un de mes camarades. Donc euh, oui enfin, le connard dans l'histoire, c'est juste lui. Lui qui...
Il sentit les larmes lui monter aux yeux, mais ne parvint pas à détacher ses bras de Yeonjun pour les empêcher de couler.
— Qui a fait son... son putain de truc de... de merde, putain.
Il fondit en larme.
Enfin.
— J'ai-j'ai rien pu faire, j'étais tétanisé 'Jun je... J'étais juste là, en train de me changer, e-et il est rentré et je te jure que je... j'avais l'impression de plus être là, comme si, comme si j'étais devenu un fantôme, un truc inanimé obligé de, de regarder, c'était tellement... étrange et... incompréhensible. J'ai rien compris à ce qui était en train de m'arriver, mais je savais, au fond de moi, que ça allait pas. Que ça allait au-delà de la simple punition et de cours de piscine, ça avait plus rien à voir avec tout ça. C'était juste... mauvais, renifla-t-il. De toutes les façons possibles et imaginables, ça avait quelque chose de... de viscéralement et profondément répugnant, comme si un énorme truc m'avait écrasé au sein de mon propre corps. E-et quand il a fini son truc, il m'a dit, enfin je sais plus trop, quelque chose comme : Tu diras rien si tu veux continuer à nager. J'me souviens surtout de l'idée, la seule pensée qui m'a traversé l'esprit. C'était que mon rêve lui appartenait. Il avait le pouvoir, la main mise sur mon avenir, sur la seule chose qui me donnait la force de continuer la natation. Et, sur le coup, ça m'a paru censé. C'est sûrement ça le pire, au fond. C'est que je me suis dit : ah oui, c'est vrai. C'est l'adulte, le professeur, le directeur du club. C'est lui qui décide.
Il reprit une pause qui dura un certain temps. Il était gêné d'avoir pleuré dans la nuque de Yeonjun, mouillant par la même occasion son pyjama et ses cheveux. Mais c'était toujours mieux que d'avoir à le regarder. Tout ce dont il avait besoin était de sa présence, de pouvoir le sentir près de lui sans avoir à faire face à son regard.
— Désolé, se sentit-il obligé de dire après un certain temps.
— Pour ? entendit-il Yeonjun murmurer.
— Pour... tout ça...
Il essuya difficilement ses larmes avec la manche du pyjama que lui avait prêté Yeonjun et s'en voulut immédiatement de le salir de la sorte.
Il sentit Yeonjun remuer entre ses bras et le laissa se retourner à contre-cœur. Ce dernier voulut lui faire face mais il baissa instantanément les yeux, impossible de rencontrer son regard après la scène qu'il avait faite et sa longue prise de parole dont il n'était pas certain de pouvoir se remettre de sitôt.
— Hey, fit Yeonjun. Ne... ne t'excuse pas. Je te l'ai dit, tu ne me déranges pas, ok ? Tu n'es pas un boulet, et tu n'es pas en train de foirer cette soirée. Je...
L'entendre hésiter lui donna le courage de plonger ses yeux dans les siens.
Il ne put échapper à l'évidence que Yeonjun semblait particulièrement éveillé et sérieux, pas le moins du monde fatigué ou ennuyé par sa présence. Un étrange sentiment lui serra le cœur et il se rendit compte qu'il avait beaucoup de chance.
— Je sais pas vraiment quoi dire..., admit-il finalement. Toi tu, tu n'as rien à ajouter ?
Il s'amusa mentalement du comportement du plus vieux. Qui d'autre que Choi Yeonjun pouvait demeurer aussi professionnel à minuit passé, avec une loque pour petit ami et une discussion aussi dérangeante qu'impromptue ? Très peu de gens, certainement. Et Soobin se mit à penser que, peut-être, il ne s'agissait pas de professionnalisme. Peut être bien que ce qui apparaissait parfois comme de la rigidité, du sérieux trop prononcé, était simplement inhérent à Yeonjun, à sa façon d'être. Ce qui lui avait auparavant semblé trop ennuyant ou inconvénient lui apparut soudainement comme une tout autre chose. Il eut l'impression de tomber amoureux de cet esprit droit sans pouvoir s'en empêcher.
— J'ai l'impression d'en avoir trop dit, lui confia-t-il. Mais... je ne sais pas, continua-t-il malgré tout. Tu aimerais en savoir plus ? demanda-t-il sans réelle conviction.
Il sentit Yeonjun prendre une grande inspiration avant de la laisser s'échapper en un long soupir.
— Je ne te demanderais aucune réponse que tu ne veux pas me donner, commença-t-il, mais... oui, je pense que j'ai quelques choses à dire.
Soobin se rendit compte qu'en réalité, Yeonjun n'était pas plus enclin que lui à soutenir le contact visuel. Il fronçait les sourcils en retraçant les plis du drap entre eux. Il trouva cela attachant et d'une certaine façon, cela l'aida à se ressaisir et le rassura.
— Déjà, comment tu... Enfin, est-ce que tu as...
Un nouveau long soupir.
— Je sais pas par où commencer, avoua Yeonjun.
Commence par te détendre, voulut-il lui susurrer, mais il n'était pas certain de pouvoir lui dire ces mots au vu de la situation dans laquelle il l'avait mis. À la place, il se contenta de doucement passer ses doigts sur son front plié, redessinant les traits de son visage.
Il sentit la peau se détendre sous la pulpe de ses doigts.
— La première chose qui me vient à l'esprit c'est... c'est que c'est grave, affirma-t-il avec un ton qui l'était tout autant. Mais je, enfin je pense que tu le sais déjà. C'est même extrêmement grave. Je ne te demanderais jamais de détails sur ce qu'il s'est passé, fit-il comme pour se le noter mentalement. Est-ce que... est-ce que Beomgyu est au courant ?
La question le prit de court. Etrangement, il ne s'était pas attendu à ce que cela soit son premier questionnement.
— Oui, admit-il après un certain temps. Je lui ai dis environ... un an après, je crois. Je sais, admit-il face au regard étonné de Yeonjun, c'est le temps que ça m'a pris pour que... je réalise, je suppose. Honnêtement, je crois que j'étais un peu devenu l'ombre de moi-même, et je voyais bien que ça le travaillait aussi. C'est le lui avouer qui m'a aidé à comprendre, je pense. Comprendre la gravité de la chose.
— Et tes parents ?
— Quelques mois après Beomgyu, avoua-t-il plus facilement. Au début, je voulais pas. J'avais trop peur. J'avais déjà quitté le club depuis un moment, en leur disant que ça me prenait trop de temps et que c'est pour ça que mes résultats chutaient. Ma mère semblait un peu surprise à l'époque, mais elle avait pas posé plus de questions. Mais leur dire pour ça, c'était autre chose. J'avais peur qu'ils ne me croient pas, surtout. Ou qu'ils se rangent de son côté. C'est idiot, je sais, mais j'étais... jeune, j'imagine. J'avais peur qu'en leur disant, ils confirment ce que j'avais pas arrêté de me répéter pendant un an. Que c'était normal, que ça faisait partie de son taf, que c'était son droit de professeur de faire ça. Mais au bout d'un moment, 'Gyu m'a convaincu. Alors j'ai fini par leur dire.
— Et ? osa demander le plus âgé.
Soobin fixa le vide, pensif.
Il se rendit compte qu'il n'avait jamais réellement repensé à cette période de sa vie. Pour sûr, il savait que les conséquences de ce qui lui était arrivé le suivaient encore – et le suivraient certainement toujours – mais il ne s'était jamais réellement replongé dans les souvenirs de ce qui avait suivit l'accident. Ni des détails concernant celui qu'il était à ce moment-là, de comment il s'était sentit. En grandissant, il avait simplement eu envie de tout oublier, de tout enfermer dans une boîte fermée à double-tour et jetée à la mer.
— Je sais plus trop, avoua-t-il un peu honteux. Je crois qu'au début, ils ont cru à une très mauvaise blague. Mais ils se sont assez vite rendu compte que j'étais pas du genre à dire des trucs comme ça à la légère. Et puis euh... fin j'ai sûrement fondu en larme donc... ils ont dû me croire assez vite, en fait. Je crois qu'ils m'ont un peu couvé et gâté après ça, aussi. J'ai souvenir d'avoir été à un super parc d'attraction que j'adorais, le genre de truc qu'on faisait que pour les grandes occasions.
— Est-ce qu'ils ont porté plainte, Soobin ?
Le ton grave et concerné de Yeonjun le froissa légèrement.
— Je sais plus...
— Comment ça, tu sais plus ?
— Je sais juste plus ! s'empressa-t-il de répondre sous la pression que lui infligeait le ton insistant de Yeonjun. Mes souvenirs sont putain de flous Yeonjun, je sais plus ce qu'il s'est passé dans les détails, c'était y'a une dizaine d'années et je, c'est pas comme si j'y avais beaucoup repensé, tu sais ? Au contraire, j'ai fait beaucoup d'efforts pour essayer d'oublier ça, c'est pas... c'est pas facile, murmura-t-il finalement.
Il se sentit soudainement extenué, comme si le poids de toute la soirée s'échouait soudainement sur sa poitrine. Beaucoup de chose se bousculaient en lui, il avait l'impression que cette journée avait durée une éternité en commençant très bien pour mal finir. Comment en étaient-ils arrivés là ? Il le savait pertinemment, mais il ne voulait plus réfléchir au fait qu'il était la raison pour laquelle cette soirée en amoureux avait mal tourné – quoi qu'en dise Yeonjun, il était le seul responsable de l'horrible ambiance dans laquelle ils pataugeaient désormais. Il ne voulait plus réfléchir ni à ça, ni à ce qu'il avait avoué à Yeonjun ou aux réponses qu'il était pourtant déterminé à lui donner quelques minutes plus tôt. Il n'était plus certain d'en être capable, pas ce soir.
— Pardon, s'excusa doucement Yeonjun. Je... c'est juste que la simple pensée qu'ils n'aient pas porté plainte me révolte.
— Hm..., répond-il mollement. J'imagine. Mais je ne sais plus, ça veut pas forcément dire qu'ils ne l'ont pas fait ? Et puis... c'est pas si évident que ça, je pense.
— Hm, fit Yeonjun à son tour, l'air sceptique.
— Je suis fatigué, murmura Soobin en se blottissant contre lui.
Il se trouva lâche mais n'eut pas la force de s'en vouloir plus longtemps. La chaleur qui émanait du corps de Yeonjun l'enveloppa quand ce dernier le prit contre lui et vint instinctivement passer une main dans ses cheveux. Il n'avait jamais pensé à lui confier cela un jour, mais maintenant que c'était chose faite, un mélange d'appréhension et de légèreté nouvelle s'empara de lui. Qu'est-ce que Yeonjun pensait de lui, désormais ? Est-ce que cela changerait quelque chose à leur relation ? L'avait-il dégoûté ou découragé de poursuivre ce qu'ils avaient doucement commencé à construire ? Voudrait-il en savoir plus ? Et si oui, quand ?
Il n'eut pas le temps de plus angoisser que déjà, les battements du cœur de Yeonjun lui ouvraient les portes du sommeil.
contenu du tw : dans ce chapitre, Soobin évoque des souvenirs du collège où un professeur de son club de natation a eu des gestes violents et déplacés envers lui et ses autres camarades. il évoque un souvenir particulièrement traumatisant dans lequel son professeur l'a isolé et obligé à le regarder commettre un acte sexuel.
⌨️SUISEI...
COMMENT CA VA VOUS ? :D
perso je suis très heureuse d'avoir enfin publié ce chapitre. j'ai certes mit beaucoup de temps à l'écrire mais je ne voulais pas le bâcler, c'est l'une des scènes les plus importantes de la fiction - une des premières que j'avais en tête - et je suis satisfaite du résultat !
j'espère qu'il vous aura plu également, malgré les thèmes abordés. vous savez enfin le lourd secret que porte Binnie depuis le début :,) on peut tous lui faire un gros câlin maintenant ('▽'ʃ♡ƪ)
sur ce !! je vous dis à la prochaine, en vous faisant plein de bisous (づ ̄ 3 ̄)づ
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top