𝐕𝐈𝐈 - 𝐂𝐚𝐥𝐞𝐧𝐝𝐮𝐥𝐚 𝐎𝐟𝐟𝐢𝐜𝐢𝐧𝐚𝐥𝐢𝐬

- 3013 mots -

┌─────────────┐

Sharing all your secrets with each
other since you were kids

└─────────────┘

- 21 septembre -


La nuit est tombée depuis un long moment déjà, et pourtant, je suis bien incapable de trouver le sommeil. Des pensées plus futiles les unes que les autres tournaient dans ma tête, et je ne parvenais pas à les faire taire. J'crois qu'on peut appeler ça une insomnie. Je ne sais pas. J'en fais pas souvent.

Pourtant, je n'avais rien de spécial me concernant qui me tracassais. C'était même plutôt l'inverse, à dire vrai, puisque ce qui aurait pu mal tourner s'est finalement déroulé encore mieux que prévu. Le week-end passé, l'interlycée préfectoral de Kyoto a eu lieu, et non seulement notre club s'est classé premier parce qu'on a super bien joué, mais en plus, plusieurs agences de recrutement pour des grosses équipes du Japon m'ont ouvertement fait comprendre que mon profil les intéressait, et j'ai été invité à plusieurs interviews.

Mon rêve se concrétise peu à peu, et rien que d'y songer, ça me rend sacrément heureux. Mais de là à m'empêcher de dormir...non, c'est autre chose.

Et puis, il y avait aussi la lumière qui émanait du réverbère juste en dessous de la fenêtre qui me dérangeait un peu, mais je n'osai cependant pas me lever pour tirer correctement le rideau, par peur que le moindre de mes mouvements ne réveille la jolie brune paisiblement blottie dans mes bras.

Ce soir, elle était particulièrement de bonne humeur. J'crois qu'elle n'a pas trop bien vécu les semaines précédant l'interlycée. Elle ne me l'a pas dit explicitement, mais je l'ai facilement deviné : ses actions parlaient d'elle-même. Le fait que je doive rester systématiquement plus longtemps aux entraînements l'avait beaucoup peiné. Mais pour une raison qui m'échappe, Ayame n'a pas essayé de me confronter à ce sujet. Je me suis dit que c'est peut-être parce qu'on ne s'est justement pas beaucoup vus, mais à nouveau, connaissant Ayame, cette solution me paraît peu probable. Et puis, elle était réellement heureuse pour nous quand on a gagné les préfectorales...

Mais bon, peu importe. Maintenant que c'est fini et que je suis tranquille pour les prochains mois à venir, ma copine a juste envie d'en profiter au maximum. Je la comprends, parce qu'après tout, moi aussi elle m'avait manqué.

Pour la énième fois de la soirée, mon regard se balada avec parcimonie dans la chambre d'Ayame, observant les dernières nouveautés qu'elle y a apportées comme s'il s'agissait de la première fois que je les voyais. Mon regard se pose d'abord sur les nouvelles fleurs de son herbier, collées sur des étiquettes beiges et suspendues en dessous d'une étagère. Dans les trois grandes passions d'Ayame Matsuo, l'art étant la première, c'est sans doute son amour pour les plantes et le langage des fleurs qui venait en second. Sans grande surprise, elle tenait cela de sa mère, fleuriste, et si Ayame ne se destinait pas à faire sa carrière d'artiste, c'est sans contester vers ce métier-là qu'elle se tournerait.

D'ailleurs, en parlant d'art, mon regard venait d'inconsciemment se diriger vers le mur recouvert de ses croquis éphémères. Immédiatement, j'y observai la peinture qu'elle avait faite lors de notre date à la plage, il y a maintenant quelques semaines, mais ce n'est pas cela qui retenait réellement mon attention à chaque fois que mes yeux se posaient sur le tableau d'affichage.

Les croquis de moi étaient toujours affichés au même endroit alors qu'elle ne gardait jamais ces esquisses plus de trois mois, et il me semble bien que le coquillage qui est exposé non loin de là et celui qu'elle avait elle-même déclaré « le plus laid de tous ». Un petit sourire se glissa sur mes lèvres en songeant au fait qu'elle avait, en soi, gardé tout ce qui me concernait, et rien qu'à cette pensée, je sentis une douce chaleur envahir mon cœur.

Au même moment, Ayame remua doucement dans mes bras, et ce n'est que lorsque son regard un peu fatigué croisa le mien que je réalisai qu'elle n'arrivait pas à dormir non plus.

T'es réveillé ? son gloussement résonna un instant dans la pièce. Eh bien, ça ne t'arrive pas souvent ça.

Toi aussi, tu ne dors plus, fis-je remarquer tout en embrassant son épaule nue.

Je ne me suis jamais endormie, révéla Ayame, les mains croisées sur mon torse et le menton reposant dessus. Dis-moi, qu'est-ce qui t'empêche de dormir comme ça, mon cœur ? Demanda-t-elle doucement, le regard brillant à mon encontre. Dis-moi à quoi tu penses.

Non, toi dis-moi d'abord ce qui te met de si bonne humeur aujourd'hui, répliquai-je malicieusement.

Hein mais je suis toujours de bonne humeur, rétorqua ma petite amie en fronçant les sourcils.

Alors dis-moi pourquoi tu l'es plus que d'habitude, corrigeai-je machinalement tout en pouffant de rire.

Je...enfin, Ayame se racla discrètement la gorge, et à cause de la pénombre, il me sembla discerner quelques rougeurs se faufilant sur ses joues. Je pensais à nous deux, révéla-t-elle finalement d'un ton joyeux. Tu sais, genre... plus tard.

Ah oui ?

Je me comportai de manière détachée, seulement pour cacher à quel point ses paroles me touchaient.

Ayame n'avait jamais été une personne très démonstrative lorsqu'il s'agissait de ses sentiments. Très dans la réserve, ça a toujours été assez difficile pour elle de se mettre ainsi à découvert, et même après sept mois de relation, il y a certaines choses qu'elle n'avait encore jamais osé me dire explicitement. Ce n'était certes pas indispensable pour que je sache qu'elle tenait à moi, mais de l'entendre me dire à demi-mots me comble de joie.

Tout le contraire de moi, en somme, qui n'ait jamais eu de problèmes à lui que je l'aime, ou encore d'ouvertement clamer que je nous vois toujours ensemble dans le futur. Je lui disais ces choses-là de manière naturelle et parce que je les pensais tout simplement sur le coup, et je n'attendais jamais vraiment d'elle une réponse égale en retour.

À aucun moment je ne voulais qu'elle se sente obligée de le faire juste pour me faire plaisir.

L'entendre donc m'avouer si spontanément que ce qui la rendait si euphorique ce soir, c'est de s'imaginer un potentiel futur avec moi, c'est une chose qui m'était si précieuse que je n'ai même pas pensé à l'embêter un instant à ce sujet. À dire vrai, ça ne m'avait même pas traversé l'esprit tout court. Alors que Dieu sait combien de trucs j'aurais pu lui sortir. L'imagination pour trouver des piques bien senties, ce n'est de loin pas quelque chose qui me manque.

J'ai certes tendance à beaucoup charrier les gens, mais au grand jamais je ne m'attaquerai à ce qu'ils redoutent le plus en utilisant l'humour pour m'excuser de les avoir blessés.

Avec délicatesse, je glissai ma main dans les cheveux ébène d'Ayame et commençai à jouer doucement avec quelques-unes de ses mèches. Elle soupira doucement, un petit sourire sur les lèvres, appréciant grandement les caresses contre sa tête.

Et ça donne quoi, alors ? l'encourageai-je gentiment à parler.

Ça me rend vraiment heureuse, répondit-elle en prenant une grande inspiration. Je suis heureuse de t'avoir, Yugo, ajouta-t-elle ensuite en plaçant un petit baiser dans mon cou, puis un autre, et encore un autre jusqu'à ce qu'elle atteindre la commissure de mes lèvres. J'ai hâte qu'on emménage ensemble pour nos études, à Tokyo, me confia-t-elle après un court silence. Tu sais, j'y pense très souvent, continua la jeune femme, souriante, avant de s'installer un peu mieux sur moi. Je me vois déjà étudier à Geidai tous les jours, et rentrer super tard le soir chez nous, pile a l'heure du diner parce que les transports en commun ont encore eu du retard. Et je serais complètement crevée, mais contente parce que je sais que je vais bientôt te retrouver.

—Et ensuite ? demandai-je, impatient de connaitre la fin du scénario.

—Et ensuite, je te vois déjà m'accueillir comme si tu m'as pas vue depuis des mois, rétorqua-t-elle sarcastiquement et un léger rire me secoua un peu. Tu m'aurais embrassée comme tu le fais toujours.

Intéressant, commentai-je avec malice. Et après ?

Après tu me demanderas comment c'est passé ma journée, répondit-elle avec un brin d'amusement dans la voix.

Mmmh okay, rigolai-je en plantant un rapide baiser sur ses lèvres. Et après ? interrogeai-je avec curiosité, pris au jeu.

Ayame gloussa à son tour, mais elle ne se laissa pas perturber bien longtemps.

Après tu dirais que tu as préparé un de mes plats végétariens préférés avec amour, et que tu attendais ma venue pour qu'on se mette à table.

Mais tu m'autoriseras à manger de la viande quand même, hein ? M'enquis-je d'un ton léger, ce qui la fit soupirer dramatiquement.

Si tu arrives toujours à vivre la conscience tranquille en sachant que tu manges un être vivant qui a été conçu juste pour être dévoré, ouais, répondit-elle en plissant les yeux, une mine mi-dégoutée mi-boudeuse.

Mais qui te dit que tes légumes ne souffrent pas eux, huh ? plaisantai-je en ébouriffant ses cheveux.

Le rire cristallin de ma petite amie résonna dans la chambre alors qu'elle se débattait pour me faire arrêter, chose que je fis lorsqu'elle parvint à s'extraire hors de ma portée. Ayame attendit quelques instants, emmitouflée dans la couverture qu'elle avait tirée avec elle dans sa fuite, et lorsqu'elle fut certaine que je ne retenterai rien, elle vint se reloger contre moi, la tête posée sur mon épaule cette fois-ci. L'un de mes bras s'enroula automatiquement autour d'elle pour la serrer un peu plus étroitement tandis que, de mon autre main, je replaçai correctement la couverture avant de venir enlacer mes doigts aux siens.

Quelques minutes passèrent ainsi, dans un silence des plus agréables. Je sentais qu'Ayame avait encore une tonne de choses à me communiquer, et j'attendais silencieusement qu'elle le fasse, prêt à boire les moindres de ses paroles comme s'il s'agissait là d'un précieux élixir.

Dis, murmura-t-elle brièvement. Tu voudrais des enfants ?

J'haussai les sourcils, légèrement surpris de sa question. Je m'attendais à pas mal de choses, mais pas trop à ça. Enfin, dans un tout autre contexte, cela ne m'aurait pas perturbé pour un sou. Depuis le temps qu'on se connaît, on avait déjà abordé le sujet plus d'une fois, et ce même avant que l'on sorte ensemble. Ayant tous les deux vécu dans un contexte familial un peu compliqué, il était plus que naturel pour nous d'en discuter. Seulement, à cet instant précis...

T'essaies de me dire un truc, là ? demandai-je un peu nerveusement en repensant à mon idiote de sœur.

—Hein ? Ayame se redressa pour planter son regard au mien, et ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'elle comprit le fond de ma pensée. Mais non, crétin, j'suis pas enceinte ! s'exclama-t-elle en donnant le petit coup. Je demandais juste ça comme ça.

Oui en fin de carrière, répondis-je simplement. Et...et toi ? ajoutai-je après un peu d'hésitation, sachant à quel point ce sujet était sensible chez elle.

Je crois...je crois que oui.

Tu as changé d'avis ? m'étonnai-je, moi qui m'attendais à ce qu'elle décline comme à chaque fois.

Disons plutôt que j'aimerais tourner la page une bonne fois pour toutes.

La déclaration d'Ayame me prit de cours, et je resta muet un instant. Venait-elle vraiment de prononcer ces mots-là? je ne me faisais pas d'allusions cette fois-ci, elle parlait bien de ça, n'est-ce pas ?

J'aurais voulu lui demander de vive voix pour m'en assurer, mais pour la première fois depuis très longtemps, je n'osai tout simplement pas. Je n'osais pas prendre la parole. Je craignais d'avoir mal compris, et de lui rappeler inutilement en cette période difficile ce qu'elle s'efforçait d'oublier. Et pourtant, j'avais la conviction qu'à l'instant, c'est exactement ce qu'elle venait de faire. Elle venait de le faire d'elle-même et avec un détachement des plus déconcertants.

Quand je l'entendis renifler discrètement, et qu'une de ses mains vint à l'encontre de son visage baissé, je sus. Je sus que j'avais compris exactement ce qu'il fallait.

Cinq ans, souffla Ayame avant que ça voit ne se brise. Ça va bientôt faire cinq ans qu'il est mort, je pense qu'il est temps que je fasse mon deuil.

Ton père était quelqu'un de très important pour toi, mon ange, murmurai-je à voix basse alors que je devinais qu'elle essuyait ses yeux pleins de larmes. Personne ne te demande de te dépêcher.

Ses épaules furent parcourues d'un frison qu'elle peinait à contenir, et une vague de tristesse m'emplit peu à peu. Je me sentais un peu coupable d'avoir osé croire qu'Ayame pouvait être plus joyeuse que d'habitude alors que l'anniversaire de mort de la personne qu'elle chérissait le plus approchait à grands pas.

Son père, c'était la personne qu'elle aimait le plus. Il était son modèle absolu, celui pour lequel elle nourrissait une fierté sans égal, mais plus important, c'est également celui qui lui a transmis toute sa passion pour l'art. Ayame parlait sans cesse de lui avec des étoiles dans les yeux, clamant déjà haut et fort qu'elle irait, elle aussi, étudier à l'université des arts et de la musique de Tokyo.

Il est mort dans un banal accident de la route. Les secours n'ont rien pu faire. Il était déjà décédé quand ils sont intervenus.

Ayame ne s'en était jamais vraiment remise. Elle est devenue assez très craintive et possessive vis-à-vis de ses relations, et sa peur de l'abandon du jour au lendemain se reflète dans sa manière d'agir. Je n'aimerais pas m'avancer à sa place sur des choses qui ne me concernent pas vraiment, mais je pense sincèrement que c'est depuis la perte de son père qu'Ayame a rendu l'accès à son cœur si difficile.

Elle craint de s'attacher à nouveau à un bonheur qui pourrait disparaître en un claquement de doigts.

Ce n'est pas tout. Sa relation avec sa mère s'est pas mal détériorée, elle aussi. De son vivant, son père faisait un peu office de tampon entre elles, et tout se passait plus au moins bien. Mais depuis qu'il n'est plus, ça les a bien évidemment fortement impactées toutes les deux. Dans le mauvais sens du terme, malheureusement.

Alors que je fixais le vide au gré de mes pensées, mes yeux se rivèrent inconsciemment sur l'un des objets qui ornait la chambre d'Ayame. Celui qui aujourd'hui, dans un sens, était responsable de m'avoir tenu éveillé.

Durant un instant, j'hésitai à en parler à ma copine. Et puis, ces paroles précédentes balayèrent toutes traces d'hésitation, et je me lançai à l'eau.

Tout à l'heure, tu m'as demandé à quoi je pensais, rappelai-je d'un ton calme. Et je ne t'ai pas répondu.

Ayame ne répliqua rien, mais je savais qu'elle m'écoutait avec attention. Je poursuivis donc.

Pour être honnête avec toi, j'étais en train de me demander si tu jouerais à nouveau du violon un jour, avouai-je le regard rivé sur l'instrument de son père, exposé dans sa chambre. Tu étais vraiment douée, il...il te le disait toujours.

Et il serait probablement déçu de savoir que j'ai arrêté les cours de solfège et que je n'ose plus y toucher depuis mes 12 ans, c'est ça ? compléta tristement la jolie brune.

Non, corrigeai-je en caressant doucement le dos de sa main de mon pouce. Je pense plutôt qu'il serait triste de savoir que tu as arrêté d'en jouer alors que c'était ce que tu aimais le plus au monde.

Je ne m'en sens ni capable ni légitime, Yugo. Et j'crois que je le serais jamais.

Ses mots me brisaient le cœur, mais qu'est-ce que je pouvais y faire ? Avant d'être artiste, son père était avant tout un musicien de très grande renommée. Il a transmis cet héritage à sa fille unique si bien que la musique, c'était ce qu'Ayame voulait étudier plus que tout à Geidai.

Mais les choses ont changé.

Je détestai la voir au plus mal, et d'être dans l'incapacité d'atténuer sa peine me rendais encore plus malade.

Hey, regarde-moi, l'implorai-je calmement, ce qu'elle fit les yeux brillants de tristesse. Comme je te l'ai dit, personne ne te force à quoi que ce soit dans tes décisions. Mes mains se glissèrent sur ses joues encore humides. Fais toujours ce que tu penses être le mieux pour toi, parce qu'il n'y a que toi qui puisses savoir ce dont tu as réellement besoin. Ses lèvres tremblaient, elle se retenait d'éclater en sanglots. Ton père t'a offert son tout premier violon, parce qu'il voulait que tu puisses en jouer.

—Je n'y arriverai jamais, chuchota-t-elle péniblement, la douleur et le chagrin perçant dans sa voix tremblante d'émotion.

—Ayame. Du bout du pouce, j'essuyai une larme solitaire qui lui avait échappé. Je sais que tu arriveras à surmonter ton blocage, affirmai-je sans la moindre d'hésitation avant d'embrasser avec tendresse chacune de ses pommettes. Je n'en doute pas un instant. Ses mains se posèrent par-dessus les miennes, secouées de petits spasmes. Si jouer du violon te rendait herseuse, rien ni personne ne t'en voudra. Un sanglot lui échappa, et elle se mordit furieusement la lèvre. Seulement, je ne l'entendais pas de cette façon. Mon ange, murmurai-je avec toute la douceur dont j'étais capable. Tu as le droit de pleurer, tu sais ? ses yeux se brouillèrent à nouveau de larmes, mais je me forçai à rester fort pour elle. Laisse sortir ce poison qui te ronge une bonne fois pour toutes.

Cette nuit-là, et pour la première fois de sa vie, Ayame a pleuré toutes les larmes de son corps, logée dans mes bras, et je ne pensais pas que cela me ferait autant mal.

Je m'étais promis de la protéger pour que jamais plus son cœur ne soit ainsi déchiré, sans savoir que j'allais moi-même un jour être la cause de son plus gros chagrin.


─── ⋅∙ ───

𝙲𝚊𝚕𝚎𝚗𝚍𝚞𝚕𝚊 𝙾𝚏𝚏𝚒𝚌𝚒𝚗𝚊𝚕𝚒𝚜 – 𝙲𝚊𝚕𝚎𝚗𝚍𝚞𝚕𝚊

↬ 𝚃𝚛𝚒𝚜𝚝𝚎𝚜𝚜𝚎, 𝚍𝚘𝚞𝚕𝚎𝚞𝚛 𝚎𝚝 𝚌𝚑𝚊𝚐𝚛𝚒𝚗

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top