Chapitre 14

Merci pour vos retours sur les précédents chapitres, ravie que cette histoire vous fasse un peu voyager par les temps qui courent...
Je vous laisse embarquer pour la suite de leurs aventures et n'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé ! :)

*

Sur le pont du vieux gréement, le marin-sorcier à la barre hurle un nouvel ordre et agite sa baguette d'un geste ample. Les attaches autour des mâts claquent contre le bois, la grand-voile se déploie en premier, immense et majestueuse suivie de près par celle du second mât, à l'envergure plus étroite.

Le vent claque dans la toile tendue, les marins s'appliquent à fixer les morceaux de cordons qui maintiennent la grand-voile.

Un temps plus tard, un foc se déroule lentement sur le dernier mât à l'avant du navire. Le ballet des marins, précis et technique, est fascinant. Les mouvements du marin-sorcier en charge de la navigation marient grâce, agilité et fermeté. Bientôt ses gestes changent, l'air vibre autour de lui et le vent semble répondre à ses invocations. Avec adresse, le vent s'engouffre dans les voiles et le bateau accélère son allure.

Sur le pont, la danse des marins s'apaise, chacun regagne sa position, prend le temps d'enrouler les cordages et s'assure de laisser le pont dégagé.

Après ces manœuvres délicates, le second du capitaine revient vers nous, où il nous avait demandé de patienter, puis nous invite à le suivre dans la cale.

L'essentiel du pont est dédié aux caisses de marchandises, explique-t-il, le gros des cuves accueille de la matière première qui sera vendue en vrac sur des marchés orientaux. Il leur reste à peine quelques cabines qu'ils peuvent dédier au transport de voyageurs.

Le pont reste accessible pendant toute la traversée, précise-t-il, tant que les marins-sorciers qui se relaient pour maîtriser le vent ne sont pas importunés. Il fait un geste au bout du couloir étroit pour indiquer la salle de pause où se tiennent les repas pris en commun, avant de déverrouiller chaque porte et nous invite à nous installer. Le vieux sorcier et son piaf prennent la première, les jeunes sorciers se répartissent en deux cabines, puis Potter entre dans la dernière.

Je baisse la tête et prends garde à enjamber le haut rebord de la porte. Je retiens toute remarque devant le marin-sorcier, mais cette fois encore, on se retrouve à partager une cabine, elle est encore plus petite que la chambre de la pension. Juste deux couchettes étroites collées au mur, séparées par un large hublot qui donne sur la mer.

Potter a déjà choisi son lit et je ne veux pas me disputer pour des bêtises. Je cale ma valise et attache mon coffret sous la banquette, défais les lacets de mes bottes pour les laisser sur le pas de la porte et je m'installe sur le lit étroit en sortant mes maigres affaires.

La promiscuité de la cabine et son plafond bas pourraient être étouffants, mais le sentiment d'être dans un cocon, bercé par le roulis et le ronronnement des bruits du navire est presque agréable.

Potter lui, en revanche, ne semble pas apprécier la sensation.

Il reste assis un moment, les doigts crispés sur le rebord de la banquette en jetant un œil maussade à travers le hublot. Le vent magique a éloigné rapidement le bateau des terres et, même si ces dernières sont encore en vue, la houle s'accentue déjà.

Il essaie de se relever, le teint blanc, s'agrippe à la porte, fait quelques pas hésitants dans le couloir étroit, puis revient s'asseoir dans la cabine en marmonnant des jurons sur ce fichu rafiot et de la taille de ce placard.

Il finit par capituler et s'allonger sur le flanc en roulant sa cape en boule sous sa tête.

Au bout de quelques minutes à peine, il n'en peut plus. Il essaie de se redresser péniblement, mais je devine à sa mine qu'il va dégobiller à tout instant.

Je cherche du regard un récipient, n'importe quoi. J'avise le sac kraft qui a contenu nos encas et lui tends sous le nez. Il rend sa bile dans une grimace douloureuse et s'essuie la bouche d'un revers de manche. J'agite ma baguette pour nettoyer le sac et chasser l'odeur tenace, en maudissant le Héros National qui n'a visiblement pas le pied marin !

Alors que j'enfile mes bottes en cuir et les lace avec application, Potter pose sur moi un œil fiévreux et désapprobateur depuis sa banquette. 

— Je vais prendre l'air ! Où veux-tu que je m'enfuis ?

Je lui trouve une bassine de fortune avant de refermer la porte sur sa mauvaise humeur.

Sur le pont, l'air marin me vivifie et chasse les relents nauséabonds de la petite cabine.

Le soleil est haut dans un ciel bleu éclatant, et malgré la houle, être à l'air libre est bien plus agréable qu'être enfermé dans la petite cabine avec Potter.

Certains des autres passagers sont également à l'arrière du pont, accoudés à la rambarde, où ils ne gênent pas les allées et venues des marins. Un des jeunes sorciers, un fusain entre les doigts, croque dans un carnet la silhouette du marin-sorcier qui dompte les courants d'air entre les voiles.

Potter a tenu à ce que l'on soit discrets, alors j'ai troqué mes vêtements habituels contre un pantalon premier prix et une vulgaire chemise en lin, j'ai accepté de boire une lampée de Trompe l'Œil pour modifier légèrement mes traits et la couleur de mes cheveux que j'ai ramenés en chignon dans ma nuque.

Pouvoir profiter de l'horizon à perte de vue sans ses remarques incessantes vaut bien ce sacrifice. Il était hors de question de passer le voyage cachés dans la cabine, encore moins si ce crétin a le mal de mer !

Les embruns sur ma peau mêlés aux rayons doux du soleil ont le goût de la liberté et des possibilités infinies, une sensation qu'il est difficile de ressentir quand on est constamment coincé à Londres.

Si je maudis Potter et sa manie de se foutre des règles, je dois reconnaître que je n'aurais jamais pu voyager aussi loin sans lui.

Aussi insupportable soit-il, il est mon laisser passer à travers le continent et je compte bien en profiter.

Rien à foutre si son enquête piétine, j'ai des ressources insoupçonnées de patience, et je compte bien profiter de chaque minute hors d'Angleterre. Quelques mouettes accompagnent le vieux gréement qui longe encore les côtes de la Turquie. Bientôt, nous abandonnerons les terres pour traverser la mer Egée, puis la mer Méditerranée.

Les marins s'affairent à la tâche à l'aide de sorts et de gestes adroits de baguettes dans un ballet savamment orchestré par le second du capitaine, manteau claquant au vent, qui supervise le tout depuis le haut du pont. Soudain, je me demande ce que ça fait que de grandir, sorcier, en ayant la mer comme terrain de jeu. 

A mes côtés, un jeune marin vient récupérer le cordage utilisé lors des manœuvres. Il s'excuse, je me décale, mais le gêne dans sa tâche, je m'excuse alors à mon tour et il se met à rire de nos manières.

Tandis qu'il s'applique à enrouler la corde avec soin, il lève les yeux vers moi et articule dans un anglais approximatif.

— Voyage d'affaires ou escapade romantique ?

Je hausse les sourcils, il n'y a pourtant que des hommes parmi les passagers, et hors de question que Potter et moi passions pour un couple. Je lui réponds par un sourire et démens ses insinuations.

— Voyage d'affaires. Je suis un simple professeur de potions qui voyage avec son apprenti.

Je ricane intérieurement en imaginant la tête indignée de Potter s'il apprenait nos nouvelles identités choisies sur un élan d'inspiration. Tandis que les autres marins s'affairent sur le pont, le jeune marin a la conversation facile.

Je lui demande si les marins-sorciers qui maîtrisent le vent sont courants par ici. Est-ce qu'ils naissent avec ce pouvoir ? Est-ce que ça s'apprend ? Est-ce qu'il existe une école de sorciers-marins ?

Il se moque un peu de mon enthousiasme et de ma curiosité qui déborde, je prétexte alors écrire un roman sur des aventuriers-sorciers sur les mers et que chaque détail me passionne.

Son intérêt est alors piqué puisqu'il se dévoue pour répondre à mes questions les plus ridicules entre deux manœuvres. Il m'explique l'air de rien les nœuds qu'il est en train de faire, puis me montre les différents postes de travail sur le navire. Quand il me délaisse pour aller appliquer un ordre reçu, j'en profite pour arpenter le reste du pont dégagé.

Tout l'avant est encombré de grosses caisses scellées, identifiées par des runes cryptiques. Peut-être que certaines contiennent des reliques que Potter espère pister. Peut-être que la boîte à musique a pris cet exact itinéraire elle aussi quelques jours avant nous.

Je les examine discrètement, mais elles se ressemblent toutes, et le scarabée de Potter n'a pas donné plus d'informations quant à la destination finale du pistage. Je finis par me retirer comme les autres sorciers à l'arrière du navire pour profiter de la traversée sans gêner les sorciers-marins.

Les jeunes sorciers parlent fort en italien et s'esclaffent sans cesse. Je comprends qu'ils sont en année sabbatique et qu'ils débutent un tour du monde sorcier avant de commencer leurs études supérieures magiques. Pendant un temps, j'envie leur insouciance. L'autre sorcier, plus revêche, préfère rester à l'écart et se fait discret, drapé dans une cape qui le protège du soleil, sa corneille sur l'épaule. Je m'accoude à la rambarde pour profiter des embruns et des rayons du soleil sur ma peau. Au bout d'un moment, le jeune marin finit par revenir à mes côtés.

— Votre "apprenti" ne profite pas du voyage ?

Je lui explique qu'il est malade et cloué au lit. Tant pis pour lui, tant mieux pour moi.

Profiter de ma liberté sans ses remarques acerbes est plutôt appréciable.

— Vous venez d'où ? Londres ?

Je secoue la tête.

— Oxford.

Je n'ai pas la paranoïa de Potter, mais il est sans doute préférable de brouiller les pistes.

Le jeune type se met à égrener, un sourire aux lèvres, les capitales d'Europe qu'il rêverait de visiter un jour, puis quelques villages-sorciers dont il a entendu parler, le regard rêveur.

Je rétorque que cette zone du monde est encore plus belle que l'Angleterre, mais il hausse les épaules, peu convaincu.

Il ne lui faut pas longtemps pour qu'il se confie sur son quotidien, ses rêves, ses envies. Il est bavard et agréable, et je me rends compte que discuter en toute simplicité sans prise de tête ni de conflits à désamorcer m'avait manqué.

Le jeune marin me raconte des anecdotes de voyage, il prend plaisir à me décrire mille détails, puis parfois il fait une pause pour s'excuser de monopoliser la conversation. Il retient alors un sourire, qui forme un fossette dans le creux de sa joue et prend de trop longues secondes pour m'observer. Son regard mutin attise des braises dans mon ventre. Il a les yeux pétillants et sa sympathie est contagieuse. Il doit bien avoir quinze ans de moins que moi, la beauté de la jeunesse et un sourire charmeur qui invite au voyage et à la découverte des corps.

Je me racle la gorge et détourne la conversation vers des questions plus terre à terre.

Je devrais m'en fiche et profiter du voyage, mais je pose quelques questions anodines sur leur cargaison. 

— Aucune idée, reconnaît-il, pas vraiment mon problème. Le chef garde une trace de tout, par sécurité. On n'est pas à l'abri d'une avarice, ou d'une attaque de sorciers-pirates dans les eaux internationales, alors il tient un registre qu'il remet à la douane à chaque traversée, juste par acquis de conscience.

Il paraît déçu de n'avoir aucune anecdote plus intéressante à raconter à ce sujet.

Le jeune marin s'accoude à mes côtés pour profiter d'une accalmie et ferme les yeux sous les rayons du soleil. Il pourrait se mettre à ronronner que ça m'étonnerait à peine. Des tâches de rousseur s'éparpillent sur sa peau tannée par le soleil. Quand il rouvre les yeux et intercepte mon regard, je me détourne, pris sur le vif.

— Est-ce que tu écriras un personnage inspiré de moi dans ton roman ?

Il soutient mon regard de façon bien trop équivoque.

Se glisser dans la peau d'un autre est grisant. Pas de passé lourd à porter, pas de culpabilité, pas de regrets ni de remords.

— Possible, je lui mens.

Un sourire s'étire sur ses lèvres et nous restons silencieux à contempler la palette de bleus qui s'étale devant nous. 

C'est agréable d'être quelqu'un d'autre, loin de tout...

Quand un marin-sorcier plus âgé clame une nouvelle directive en arabe, le jeune marin se redresse, pose une main sur mon avant-bras où son pouce caresse ma peau.

— Je suis dans la dernière cabine au fond du couloir, si tu as envie de compagnie ce soir.

Tandis que je décline poliment l'invitation, il prend un air faussement accablé.

— Je vois, ton "apprenti", se moque-t-il en mimant de gros guillemets.

Il ne pourrait pas être plus à côté de la plaque, mais difficile de lui expliquer que je ne suis pas vraiment qui il croit et que je ne veux tromper personne, même si ses sourires et son intérêt manifeste sont décidément très flatteurs.

Avant de rejoindre son poste, il pose à nouveau sa main cagneuse sur mon épaule.

— Ton ami mal en point, s'il souffre de mal de mer, la racine de gingembre en décoction avec un peu de citron lui fera du bien.

— Vous en avez à bord ?

— Oui, certainement en cuisine.

Je le remercie du conseil et il s'éloigne en m'adressant un clin d'œil.

*

Dans la petite cuisine du navire, le commis s'affaire à préparer le repas du soir pour tout l'équipage. Les fourneaux sont enchantés magiquement pour être stabilisés malgré la houle, et les ustensiles s'agitent au-dessus de différentes casseroles.

Quand je lui demande si je peux utiliser sa racine de gingembre, il me présente tout un stock qu'il conserve par prévention. Il me dégage d'un coup de baguette une partie de son plan de travail pour que je puisse concocter une potion simple. 

De retour dans la petite cabine, le contraste avec la sympathie du cuisiner et des sourires légers du jeune marin est âcre.

Potter est roulé en boule sur sa banquette, les mains crispées sur son ventre, la bassine pleine à côté du lit.

Je récure ses rejets d'un geste de baguette, tout en essayant d'aérer la cabine avec un sort rafraîchissant.

— Bois ça, ça calmera les nausées.

Il se contente de jeter un regard méfiant à la fiole que je lui tends avant de la refuser.

— Si je voulais te tuer, je te balancerai par dessus bord, tu sais. Ou je t'étoufferai dans ton coussin. T'aurais même pas la force de lutter vu ton état...

— Y a bien pire qu'être tué... marmonne-t-il.

Je reste silencieux face à cet aveu cryptique, pas certain de vouloir savoir ce qu'il y a derrière ses craintes.

— Fais-moi un peu confiance, Tête-de-nœud !

Je bois une gorgée pour lui assurer qu'il n'y aucun risque, puis Potter daigne l'avaler péniblement avant de se recoucher.

— Tu devrais manger, c'est encore pire l'estomac vide.

Il lorgne d'un œil torve le bol de riz que le cuisinier m'a confié que je dépose à ses côtés. 

Je le redresse de force par les épaules pour l'asseoir sur la banquette, il a le teint gris et les cheveux collés par la sueur. Je lui fourre le bol entre les mains et il se contente de me lancer un regard noir en portant une cuillère de riz blanc à sa bouche.

Il mâche lentement, sans appétit, puis au bout de quelques efforts, il repose le bol sur le drap.

— Tu ne veux pas monter sur le pont ? Ça te ferait du bien de prendre l'air. Et puis, il parait que la nuit, la voûte céleste à perte de vue est incroyable au milieu de la mer...

Tandis que je tends la main pour l'aider à se lever, il se contente que de me repousser avant de se rallonger.

— Fiche moi la paix, Malefoy !

Je me pince les lèvres pour me retenir de l'insulter, j'estime qu'il souffre bien assez et je ne devrais pas m'acharner sur un homme à terre.

*

Le repas partagé dans la salle commune est bruyant et animé, entre les marins et les passagers. Chacun essaie de comprendre l'autre, à tâtons entre l'anglais, l'italien et l'arabe. Malgré les difficultés de communication, l'ambiance est bon enfant et la parenthèse agréable. Puis, chacun retrouve son poste ou sa cabine. 

Je remonte sur le pont, un bouquin sous le bras. La nuit a posé un voile bleuté sur l'horizon et une à une les étoiles commencent à scintiller dans le ciel. Le silence est seulement troublé par le vent qui claque dans la grand-voile, et les ordres sommaires et ponctuels des marins-sorciers de quart.

Les jeunes sorciers italiens ont déroulé leurs duvets sur le pont supérieur, posée une lampe-tempête à leurs côtés et observent la voie lactée, en essayant de repérer des constellations tout en s'extasiant devant la beauté du tableau nocturne.

Je mets rapidement mon bouquin de côté pour me caler contre une caisse, enroulé dans ma cape de voyage et profiter à mon tour du silence immense et du ciel qui nous entoure. La voie lactée est immense, et mon cœur se serre un instant à l'idée de vivre cet instant seul. Scorpius aurait adoré, c'est certain !

*

Le lendemain, Potter est toujours vivant dans notre petite cabine, mais d'humeur exécrable. Alors je fais une toilette sommaire avant de passer la dernière journée du voyage sur le pont.

Le jeune marin aux tâches de rousseur me salue, un sourire poli mais reste distant. Il me laisse vaquer à mes occupations, qui se limitent à profiter des embruns dans mes cheveux et du soleil doux sur ma peau tout en parcourant un vieux grimoire d'études botaniques.

Quand il passe près de moi, il me tend un chapeau aux larges bords en esquissant un sourire.

— Tu vas prendre des coups de soleil avec cette peau de lait...

Je l'accepte sans un mot, le visse sur mon crâne et essaie de chasser les regrets de ne pas être allé le retrouver cette nuit. Puis, je me rappelle que j'ai quasiment la quarantaine, lui sûrement à peine la vingtaine, que je suis sous un charme de camouflage, donc absolument pas moi-même, et surtout en mission, même si le statut de celle-ci n'a rien d'officiel.

En fin de journée, la terre est déjà visible à l'horizon.

Les vents magiques réduisent drastiquement les temps de traversée.

Je descends prévenir Potter et insiste cette fois pour qu'il sorte prendre l'air.

Je le redresse, l'aide à enfiler ses bottes, lui tends ses lunettes, puis sa cape, et le soutiens dans le couloir jusqu'à se hisser jusqu'au pont.

Son regard se pose sur mon chapeau de fortune, perplexe, mais il ne dit rien, trop concentré à respirer calmement, les doigts crispés sur la rambarde.

Quand le jeune marin passe près de nous, il me lance un sourire amusé et mime de gros guillemets avec ses doigts, alors je fais un pas de côté pour laisser Potter se débrouiller. Au débarquement, il a une mine affreuse et le teint grisâtre mais il tient à peu près debout.

Nous remercions le capitaine, le second, le cuisinier et les marins-sorciers avant de regagner la terre ferme.

Au bout de quelques pas, penché sur sa carte, Potter grimace quand il réalise que nous allons devoir prendre une autre embarcation pour rejoindre le Caire par le fleuve, puisque la ville n'est pas située sur la côte. Je le coupe dans ses ruminations, tout en vérifiant l'état de mon coffret de potionniste.

— On devrait s'arrêter au poste de douane. Possible qu'on trouve des choses intéressantes dans le registre des importations.

Il hausse un sourcil pour que je développe.

— Le contenu des cargaisons est consigné dans le registre des douanes par les capitaines des navires...

Potter semble surpris.

— Tu as poursuivi l'enquête pendant la traversée ?

Pas vraiment. Je chasse le sentiment de culpabilité d'avoir préféré passer mon temps aux côtés du jeune marin plutôt que d'avoir réellement investigué, mais ces informations, glanées au détour de la conversation peuvent nous être utiles pour confirmer certaines de ses intuitions infondées.

Potter se contente de hocher la tête en silence.

Au poste de douane, je me dévoue pour demander des renseignements inintéressants à l'officier pour l'éloigner de son comptoir tandis que Potter se penche sur le registre pour le dupliquer et en récupérer une copie. Les Aurors et le respect des lois, une vaste blague...

En marchant vers le port fluvial à proximité, Potter parcourt la liste des cargaisons récentes et semble satisfait de ce qu'il lit sur certaines lignes : la boîte à musique a bien traversé sur un navire de marchandises quelques jours plus tôt !

Obtenir de nouvelles informations concrètes sur son enquête semblent lui redonner des couleurs et un regain de vitalité.

Sur le Nil, large et sauvage, les allées et venues des chaloupes vers la capitale est un ballet constant et, sur l'embarcadère, des rabatteurs alpaguent bruyamment les potentiels passagers. Le trajet jusqu'à la ville ne devrait pas être long - une journée tout au plus - mais je tends tout de même une fiole à Potter.

— Tiens, le fond plat de cette embarcation ne devrait pas te rendre malade, mais bois ça, au cas où...

Potter fronce le nez, d'abord méfiant, mais finit par boire sa potion sans un mot.

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