5 | J'ACCEPTE DE FAIRE ÉQUIPE AVEC TOI
🎵 LOIC NOTTET — MILLION EYES
— Je ne t'ai pas menti, je...
— Quelque chose a été volé ? me demanda-t-il.
— Non.
— Donc, ce n'était pas des cambrioleurs puisqu'il n'y avait personne. Cette discussion est close, termina-t-il.
Pourquoi... ?
Mon père monta à l'étage, pendant que j'encaissai ses paroles sans broncher. Je savais bien qu'il avait une bonne raison de ne pas croire ce que je disais, alors que je m'évertuais à lui faire par de mes craintes. Je restais ancrée sur mes positions, j'avais bien vu une personne dans la chambre de Lenny.
Pourquoi ne me croit-il pas ?
En jetant un coup d'œil autour de moi, je ne parvenais plus à me sentir en sécurité, j'avais l'impression que n'importe qui pouvait entrer dans la maison avec une facilité déconcertante. D'autant plus que le ou les individus n'avaient laissé aucune trace, ce qui voulait signifier qu'ils avaient l'habitude de faire irruption dans les demeures, tels des professionnels dans ce domaine.
Et s'ils recommençaient ?
Rien qu'à cette pensée, un frisson me parcourut le long de la colonne vertébrale. Je m'empressai de vérifier les fenêtres et les serrures de chaque porte, juste pour le peu de tranquillité d'esprit qu'il me restait. Tout étant fermé, je m'exécutai face à la demande de mon père, à savoir préparer à manger et j'avais ma petite idée de ce que j'allais faire : des Maryland Crab Cakes avec de la salade que je disposerais autour des galettes, excepté les miennes.
Tournant ma tête vers la gauche, je vis Lenny descendre les marches. Sur son visage, la faim se lisait. Son ventre, qui gargouilla, suffit à me le confirmer.
— Je suis désolée mon ange, c'est bientôt prêt, m'excusai-je.
— Prends ton temps, grande sœur.
Il me sourit et s'en alla prendre les couverts pour mettre la table pour nous deux, sans que je ne le lui ai demandé. À chaque fois, il venait m'aider de façon spontanée, c'en était devenu une habitude dès lors qu'il était en âge d'apprendre à le faire. Notre père lui, mangeait presque, pour ne pas dire jamais avec nous. Ce qui bien sûr peinait Lenny, lui qui rêvait que nous dînions tous ensemble, comme nous le faisions par le passé.
Tant qu'à moi, je ne savais pas si certaines choses me manquaient. Tout avait changé, y compris la relation que j'avais avec mon père. Pas dans le sens que je souhaitais, cependant. Nous n'arrivions plus trop à communiquer réellement, cela remontait à très loin.
Tant qu'à ma mère...
Je repris mes esprits lorsque je me retrouvais face à la porte en bois de mon père. Ma main, elle, restait suspendue plusieurs secondes. Mon corps entier se figea, je dus fermer les paupières en prenant une grande inspiration de manière à me donner du courage.
— Le repas est prêt, annonçai-je.
Plantée là, debout à attendre, il ne me répondit pas. Ce qui ne m'étonnait guère. Ça aussi, j'y étais habituée. Scrutant le plateau, la vue de ce dernier réveilla la faim de plus en plus présente, mon estomac menaçant à tout moment de crier. Lançant un dernier regard vers le bureau de mon père, je décidai de ne pas m'y attarder plus longtemps et m'empressai de déposer le contenant du plat sur la petite table derrière moi, à côté de la bibliothèque.
Je m'éclipsai sans faire le moindre bruit - du moins j'essayai - jusqu'à la cuisine où Lenny attendait tranquillement que je me rejoigne à lui.
— Lulu ?
— Oui ? dis-je en me tournant vers lui, la fourchette près de ma bouche.
— Est-ce que je peux dormir avec toi, ce soir ?
Il avait murmuré d'une toute petite voix craintive en me faisant les yeux doux de ses pupilles brillantes, auxquelles je ne pouvais résister la plupart du temps.
Enfin, pour ne pas dire à chaque fois...
Concernant ma réponse, elle ne vint pas de suite, ne sachant pas si je devais accepter sa demande, ou non. J'étais en proie à réflexion. Non pas que je ne voulais pas, au contraire. Notre père s'était déjà prononcé là-dessus autrefois, rejetant l'idée qu'il dorme avec moi, peu importe les raisons évoquées. Il estimait que Lenny avait grandi, qu'il devait affronter ses propres peurs seul.
— Tu sais bien que...
Propos que je n'acceptais pas du tout, estimant que Lenny était encore un enfant de six ans uniquement et qu'il avait largement le temps de gérer ses propres peurs plus tard ; qu'un peu de soutien dans ses craintes ne lui feraient pas de mal en le montrant qu'il était en sécurité.
— Très bien, repris-je. Mais ne fais pas trop de bruit, d'accord ?
Il hocha la tête frénétiquement, et m'adressa un sourire rayonnant.
Une fois douchée et vêtue de mon pyjama, ou plutôt d'un débardeur gris accompagné d'un short de la même couleur, je rejoignis mon petit frère sur le lit, déjà positionné sur le dos. Il contemplait les étoiles au plafond que sa veilleuse diffusait dans ma chambre. Celle-ci réussissait à le calmer, surtout les moments où un cauchemar l'empêchait de dormir. Dès qu'il se réveillait, le fait d'apercevoir les nombreuses étoiles et non l'obscurité suffisait à le calmer un tant soit peu.
Tandis que j'ajustai les couvertures afin qu'elles nous recouvrent, il finit par me faire un câlin en se blottissant tendrement contre moi. Je profitai de son étreinte chaleureuse et apaisante, autant pour lui que pour moi. Caressant sa petite tête et ses doux cheveux, il se mit à bâiller. Ses paupières ne tardaient pas à se fermer progressivement, grâce à mes éternelles papouilles qui l'envoyèrent dans les bras de Morphée.
Il ne me fallut pas attendre longtemps qu'il s'endormît paisiblement, au vu de sa respiration lente et de son petit visage apaisé. Je ne décrochai pas mon regard de sa petite silhouette si petite et fragile.
— Bonne nuit, mon ange.
La soirée s'annonçait longue, puisqu'il m'était - presque - impossible à dormir suite à ces derniers événements, entre l'université et l'intrusion dans la maison. Je ne voulais pas fermer l'oeil, de crainte qu'une personne surgisse dans la pièce où nous nous trouvions. Ou bien ne serait-ce que découvrir une silhouette dans un coin de ma chambre. Pire encore, qu'elle fasse du mal à ce petit être, cher à mon cœur. Mes sens en alertes, j'examinai la pièce, plus précisément ma porte et ma fenêtre, en reportant mon attention de temps à autre sur Lenny.
À l'entente d'une sonnerie, ou plutôt des vibrations, j'ouvris brusquement les paupières en sursautant, ce qui me fit me redresser brusquement. En moins de deux, je me sentis chuter, mon coude heurtant au passage ma table de chevet dans un geste brusque. Je retins un gémissement de douleur.
Qu'est-ce que c'est ?
En me massant le coude, je tentai de rassembler mes esprits, réalisant peu après que mon téléphone se trouvait au sol, à mes côtés, émanant des vibrations interminables dues aux alarmes prévues pour le réveil que je m'empressai d'arrêter.
Dire que j'avais bien dormi...
En me redressant vers Lenny, je fus surprise de constater qu'avec tout ce boucan ne suffisait pas à le réveiller, il dormait à poings fermés. Je l'aurais bien laissé dormir, mais nous devions nous préparer, vu l'heure et le peu de temps qu'il nous restait. Passant ma main dans sa chevelure blonde, j'effectuai une caresse avant de lui déposer un bisou sur sa joue gauche. Il battit des paupières en baillant pour finir par sourire en m'imitant dans son geste.
— Tu as bien dormi, mon ange ?
— Oui, surtout quand je suis avec toi !
Je lui souris lorsqu'il se renfrogna.
— Qu'est-ce qu'il y a ?
— Tu as l'air fatiguée. Ça va ? commença-t-il à s'inquiéter.
— Ça va, ne t'en fais pas. Viens, allons prendre le petit-déjeuner.
Il hocha vigoureusement sa tête, nous descendîmes ensemble les marches jusqu'à la cuisine complètement vide. J'en arrivais donc à la conclusion que notre père était déjà parti travailler, sans même dire au revoir à Lenny. Contrairement aux autres fois, il ne s'en plaignait plus, acceptant que le travail qu'il avait passait avant nous.
*
* *
À bout de souffle, je replaçai correctement mon sac à dos en cuir noir, mon débardeur de couleur vieux rose et la ceinture de mon short en jean bleu. Je m'en voulais d'avoir raté le premier bus, cela faisait un long moment que je marchai sous une chaleur infernale. Plus j'avançais, plus j'avais l'impression de griller au soleil, littéralement. Mon estomac se manifesta avec un gargouillement peu gracieux, en désaccord lui aussi du fait qu'il n'avait pas pu assouvir sa faim.
Le soulagement me traversa en découvrant enfin l'université, j'étais arrivée. À en juger l'heure sur mon portable, j'avais plus de quinze minutes de retard, le premier cours de la matinée s'avérait être... Sport.
Génial.
Le seul point positif était qu'aujourd'hui, Vendredi, serait le dernier jour de cours de la semaine.
Sans perdre une seconde de plus, j'entrai dans l'établissement en recherche des vestiaires pour me changer et enfiler l'uniforme se constituant d'un débardeur rouge avec par-dessus un cardinal rouge et noir, l'emblème de Louisville University ainsi que d'un short noir. Je laissai mes converses, n'ayant aucune paire de rechange. Lorsque je risquai un coup d'œil dans un des miroirs, la rougeur de mon visage m'interpella, puisque c'était ce qu'on remarquait en premier.
En poussant les portes de l'immense salle, je découvris le gymnase entièrement gris au sol rouge sur lequel était écrit Louisville Cardinals et beige au milieu où l'emblème de l'université était présent. Néanmoins, ce que je craignais au plus profond de moi se produisit : tous avaient les yeux rivés sur moi, me dévisageant sans faire preuve de la moindre distraction. N'osant plus émettre le moindre mouvement, je restai paralysée, profondément mal à l'aise.
Et si je faisais demi-tour ?
Ça me paraissait être une bonne idée, surtout que les étudiants se trouvaient tous là, avec des groupes de deux ou quatre déjà créés, ayant leurs affinités sûrement depuis des années ; et voilà que je venais de faire irruption. Il était évident que je ne souhaitais pas m'immiscer, sachant pertinemment qu'au final, je me retrouverais toute seule.
Soudain, je sortis de mes pensées en sentant deux petites tapes sur mon épaule.
— Est-ce que ça te dirait de faire équipe avec moi pour le volley ?
En me retournant, je tombai sur une longue chevelure châtain nouée en deux tresses collées, qui venait d'apparaître dans mon champ de vision. Mon regard intercepta des iris ambre et Amélia m'adressa un sourire. Confuse, j'ouvris la bouche, mais ne sachant pas quoi dire, je la refermai. Sur le point de refuser, je passai brièvement ma main dans ma longue chevelure.
— Je...
Pesant le pour et le contre, je me demandais si c'était une bonne idée d'accepter, surtout avec tout ce que j'avais traversé par le passé durant les nombreux déménagements.
Après tout, pourquoi cette fois, ce serait différent... ?
— Est-ce que ça va ? Tu es toute rouge, dis-moi si tu veux aller à l'infirmerie, je t'accompagnerai.
Je demeurais stupéfaite. C'était la première fois qu'une personne me choisissait pour faire équipe avec elle, qui plus est Amélia, à qui j'avais presque snobée malgré moi la dernière fois. Mais ce qui me sidérait était le fait que quelqu'un en dehors de ma famille se souciait de comment je me sentais, et elle était bien la première à me demander cela.
Comment peut-elle encore revenir vers moi ?
Je ne parvenais pas à la comprendre, son choix également. Suite à ce silence rempli de questions et d'incertitudes, cinq silhouettes décidèrent de faire leurs apparitions derrière la brune. Amélia aussi se retourna, tous avaient arrêté leurs discussions où ce qu'ils faisaient pour les fixer. Le groupe de motards nous lança un coup d'œil. Ils ne se mélangeaient pas aux élèves - voilà qu'ils le montraient une nouvelle fois en ne portant pas l'uniforme exigé - préférant rester dans leur coin, près de là où nous nous trouvions.
Je ne possédais pas la réponse à ma question, en revanche en constatant que la proposition et l'inquiétude d'Amélia me semblait sincère, j'espérais ne pas me tromper en prenant cette décision hâtive.
Que peut-être, je pourrais fournir un énième effort pour m'ouvrir davantage et réussir à m'intégrer, chose qui se révélait être plus que compliqué pour moi.
— Je suis nulle en Volley... murmurai-je, gênée.
— Je ne suis pas forte non plus, ne t'en fait pas.
J'acquiesçai, toujours aussi perplexe de son choix.
— D'accord.
Confuse, Amélia fronça ses sourcils, je repris :
— J'accepte de faire équipe avec toi, répliquai-je en croisant ensuite une paire d'iris émeraude appartenant au motard blond, qui me toisait avec insistance depuis quelques minutes.
Dès que j'eus fini ma phrase un coup de sifflet retentit, me faisant presque grimacer sous le son qui heureusement ne s'éternisa pas. Celui-ci fut vite remplacé par des exclamations essayant de capter notre attention à toutes les deux et je me retournai en voyant le ballon se diriger à toute allure sur moi.
Par réflexe ou par maladresse, je le renvoyai aussitôt derrière moi, d'une force que je ne me soupçonnais même pas. Je soufflai de soulagement, plutôt fière de ne pas m'être prise l'objet dans la figure pour une fois, néanmoins un bruit qui ressemblait à une plainte attira mon attention.
— Arrgh...
Un garçon aux cheveux auburn ébouriffés se frottait l'arrière de la nuque en soufflant visiblement d'agacement. Lentement, il se retourna et fixa de ses iris hazel chacune des personnes présentes dans la salle, comme s'il... cherchait quelqu'un.
Qu'est-ce qu'il a ?
— Qui m'a jeté ça délibérément en pleine tête ?
Je fronçai les sourcils avant de descendre les yeux plus bas où le ballon de volley se trouvait à ses pieds et réalisai instantanément que j'étais la fautive. Adroite comme je l'étais, je n'avais pas visé un autre garçon, il avait fallu que ça tombe sur l'un deux.
J'effectuai alors machinalement un pas en arrière, qui alerta le motard à la chevelure auburn qui plongea son regard hazel fournis de cils longs et épais dans le mien. Ses amis regardaient attentivement la scène eux aussi, et celui à qui j'avais envoyé la balle se rapprochait dans ma direction. Et vite, en plus.
Je... Je n'ai pas...
Une sensation de chaleur m'envahit tout entière. Plus il avançait, plus je transpirai et constatai que mes mains se mirent soudainement à trembler, surtout face à ce visage complètement fermé. Mes jambes, elles, menaçèrent de se dérober d'une seconde à l'autre. Pire encore, je ne parvenais plus à reprendre une respiration normale et commençai à paniquer.
Non, je n'ai pas fait exprès...
— Tout va bien ? me demanda Amélia d'une voix me paressant lointaine.
La main sur le cœur, je luttai pour faire entrer l'air dans mes poumons et m'affolai en me rendant compte que je n'y arrivais toujours pas et que l'inconnu se rapprochait dangereusement, avalant le peu d'espace qui me restait. Instinctivement je me mis à courir vers la deuxième porte de sortie, car malheureusement ce fameux groupe se trouvait devant l'autre, pour fuir toutes ces œillades persistantes et pesantes auxquelles je ne pouvais pas affronter.
Les larmes aux yeux, je ne pus aller bien loin suite au manque d'oxygène que je ressentais de plus en plus. Je m'engouffrai à l'intérieur des toilettes les plus proches, ouvris la porte d'une des cabines en la refermant derrière moi et me laissai glisser contre celle-ci. Difficilement, je tentai de reprendre mon souffle et mes esprits par la même occasion, quand j'entendis quelqu'un entrer.
— Lucy ?
Heyy, comment allez-vous ? ~
➣ Et voilà, un chapitre un peu plus long que d'habitude pour changer ! Qu'est-ce que vous en avez pensé, en général ?
➣ De la scène, au gymnase ? De la fin ?
Prenez soin de vous, kiss,
𓄿 𓄿 𓄿 𓄿 𓄿
𓄿 𓄿 𓄿 𓄿 𓄿
➣ 𝐏𝐎𝐔𝐑 𝐂𝐎𝐍𝐍𝐀Î𝐓𝐑𝐄 𝐋'𝐀𝐕𝐀𝐍𝐂𝐄𝐄 𝐃𝐄 𝐋'𝐇𝐈𝐒𝐓𝐎𝐈𝐑𝐄 (𝐎𝐔 𝐃𝐈𝐒𝐂𝐔𝐓𝐄𝐑 𝐄𝐓𝐂...♥),
𝐑𝐄𝐉𝐎𝐈𝐍𝐒-𝐌𝐎𝐈 𝐒𝐔𝐑
⤵
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