1 - Mardi 25 Juin - 12h30

Étendue dans son lit, Angélina commençait à se réveiller, ouvrant un œil après l'autre puis quelques petits étirements. Une douce lumière réchauffait son visage. Elle remit ses longs cheveux châtains en place. Des voix d'enfants résonnaient dans le couloir de l'immeuble.


- Mais quelle heure peut-il être ?


En regardant son réveil, elle vit le cadrant clignoter et ce fut dans une violente prise de conscience que la panique remplaça la sérénité dans laquelle elle s'était réveillée.


-Le réveil n'a pas sonné... Oh non ! Encore une coupure de courant !! Vite mon portable... Allez ouvre-toi !! Cette fois, je suis vraiment en retard et tout le monde doit m'attendre ! Allô Marie ! Oui... Oui, je sais, je suis vraiment en retard ! Dis à John que je suis là dans 15 minutes ! À tout de suite.


Angélina courra à la douche puis sauta dans les premiers vêtements qu'elle trouva, un jean et un tee-shirt blanc qui étaient posés sur une chaise. Tout en descendant les escaliers de son immeuble, elle tira ses cheveux en arrière et les mit en queue-de-cheval. Elle enfila son casque et monta sur sa moto. Encore une fois, heureuse de cet investissement qui allait lui permettre de se faufiler dans les rues de New York à une heure de grande circulation.


Après quelques minutes, Angélina arriva enfin à son travail où bien entendu, tout le monde l'attendait impatiemment. À peine eut-elle mis un pied sur le plateau que ce fut l'effervescence. Tout le monde se jeta autour d'elle : la maquilleuse, la coiffeuse et le reste de staff n'avaient plus que 5 minutes pour préparer Angélina avant l'antenne.


- Le temps d'attraper ma veste noire dans le bureau et je suis prête !


- Allez tout le monde ! Plus que deux minutes !! annonça l'assistant.


Angélina pendant ce temps relut ses notes afin d'être sûre de ne rien oublier, même si c'était elle qui les avait rédigé. C'était le moment, tout le monde quitta du plateau et se plaça derrière les caméras.


- Attention tout le monde ! Silence... Antenne dans 5...4...3...2...1... Antenne !! signala l'assistant.


- Bonjour New York... À la une aujourd'hui, l'affaire Magda. Dans une valise portée par la jeune femme prénommée Magda, les enquêteurs ont découvert vingt kilos de cocaïne, compactés sous la forme de neuf pains de poudre blanche. Au cours des perquisitions aux domiciles des trafiquants à Manhattan, Queens et dans le Bronx, les forces de l'Ordre ont également saisi 20 500 Dollars en argent liquide. Ils ont été placés en garde à vue et sont en ce moment même interrogés par les enquêteurs. Tous les trois sont originaires de la République Dominicaine, deux hommes âgés de 25 et 46 ans et une femme de 32 ans... Ce matin une femme de 33 ans a été retrouvée morte dans le quartier de Manhattan. Elle gisait sur son lit avec à ses côtés son bébé de sept mois, déshydraté et en état d'hypothermie. L'autopsie du corps de la jeune femme pratiquée aujourd'hui a écarté la thèse criminelle, mais n'a pas permis de déterminer si elle est morte d'une intoxication médicamenteuse dû à des antidépresseurs ou d'un malaise cardiaque. La thèse du suicide est donc toujours envisagée par les enquêteurs.


Cela faisait déjà 50 minutes qu'Angélina avait pris l'antenne et l'audimat ne cessait de monter. Elle avait le don de captiver ses auditeurs, et de chercher sans cesse les nouveaux scoops. Journaliste de formation, elle animait aussi une émission consacrée aux portés disparus où elle participait aux enquêtes. Toutes les semaines, elle parvenait à aider la police à retrouver des personnes victimes d'enlèvements ou sur des disparitions, ce qui lui donnait ainsi accès à des informations confidentielles partagées par la police en remerciement de son aide.


- Et... On rend l'antenne ! Merci à tous, bravo ! annonça John.


- John ! Pour ce soir, nous avons de nouveaux éléments, il faudrait que je t'en parle si tu as le temps !


- OK Angie, rejoins-moi au bureau dans 20 min.


- D'accord, ça me laisse le temps de passer quelques coups de fils... Ce soir, l'émission doit porter sur les recherches d'une enfant, Jenny âgée de 10 ans, disparue de son camp de vacances il y a 15 jours.


Angélina ne relâchera pas ses investigations, tant que toutes les questions qu'elle avait en tête ne cesseraient de la travailler... Pourquoi, qui, comment... etc.


- Allô... Bonjour, je souhaiterais parler à l'inspectrice Stana Miller... Oui, je patiente, merci... Stana ! Salut, comment vas-tu ?


- Ça va et toi ? Ton enquête avance ?


- Oui, je progresse doucement, mais j'ai encore pas mal de zones d'ombres et je t'appelle pour voir si tu pouvais encore m'aider sur ce coup...


- Tu sais bien que je ne peux rien te refuser ! Attends, je prends de quoi noter...
Vas-y, dis-moi tout !


- OK, voilà... Le jour de la disparition de la petite, trois voitures sont venus au camp et personne ne sait qui étaient ces individus. Apparemment, ce n'était ni l'équipe d'encadrement ni des parents... Cependant, deux enfants ont eu le réflexe de noter les plaques d'immatriculation...


- Hmm, inutile de continuer... Donne-moi ça, je vais regarder.


- Super ! T'es la meilleure ! répondit Angélina avant de lui transmettre les numéros de plaques.


- Ouais, je sais ! Bon, je tiens au courant dès que j'ai des noms.


- Ça marche ma belle, à plus tard !


Stana et Angélina étaient amies depuis l'enfance. Toutes les deux avaient grandi dans le même quartier et suivi les mêmes études. Leurs choix de carrière étaient similaires, mais le côté procédural d'un policier avait freiné Angie qui s'était orientée tout naturellement, sur le journalisme d'investigation. Aujourd'hui, elles s'aidaient mutuellement dans leur métier respectif. Chacune ayant des réseaux de renseignements différents, qui leur permettaient de combler certains blancs dans leurs enquêtes.


- Cette petite ne s'est pas volatilisée... Mais où peut-elle être ?


- Angie ! C'est bon, je suis dispos si tu veux qu'on se voie.


- Ok John, je viens.


Angélina rejoignit John et entra alors dans son bureau.

- Alors dis-moi tout ! C'est au sujet de l'affaire Jenny, c'est ça ? Tu en es où ?


- Ça avance pas mal, mais ce soir, je voudrais refaire un appel à témoin concernant de nouveaux éléments. Des enfants du camp se rappellent avoir aperçu trois voitures ce jour-là, mais aucune n'était des voitures de parents ou d'une personne de l'encadrement du camp. Je voudrais donc savoir si d'autres personnes se rappellent les avoir vu ou s'ils ont remarqué d'autres détails concernant les conducteurs. Par expérience, je sais qu'avec de nouveaux éléments certaines personnes se souviennent de choses qu'ils pensaient sans importance.


- Tu as raison, je suis d'accord ! Je te laisse carte blanche, comme d'hab ! Au fait, quelqu'un a déposé un colis dans ta loge ce matin, pense à le prendre avant de partir. Tu sais que si tu tardes trop, nos petits curieux habituels vont se faire un plaisir de te l'ouvrir.


- Oui, oui, t'inquiètes ! Je vais aller voir ça. Bon, je te dis à ce soir pour l'émission... Et promis j'essaye même d'arriver en avance... Ria Angélina.


John se mit à rire aussi, il avait l'habitude, des arrivée à la dernière minute d'Angie, mais ne pouvait s'empêcher de stresser à chaque fois.


- Tu vas finir par me faire avoir une attaque un jour !


- Oh John ! Ce n'est pas toi qui m'as dit un jour que tu adorais le suspense et les rebondissements de dernière minute ?


- Toi !!!!! Allez, files !


Angélina sortit du bureau, contente de sa dernière remarque. Tout en se dirigeant vers sa loge, elle croisa Marie, son assistante. Toujours prête à lui rendre service, toujours disponible et d'humeur égale. Angie l'avait recruté lors d'une enquête où le petit frère de Marie avait disparu. Grace à Angélina et l'aide de Marie, le petit frère avait été retrouvé sain et sauf. Cela avait donné envie à la petite Marie, âgée à l'époque de 16 ans, de se lancer dans une carrière similaire à celle d'Angélina. Quand elle eut l'âge légal de travailler, c'est tout naturellement qu'Angélina l'avait prises à ses côtés pour qu'elle puisse poursuivre ses ambitions de carrière et elle savait qu'elle pouvait avoir toute confiance en son assistante. Leur complicité ne cessait de grimper au fur et à mesure des années. Cela faisait maintenant cinq ans que Marie travaillait pour Angie et elle venait toujours avec autant de joie qu'au premier jour.


- Angie ! Tu as rendez-vous avec le Directeur du Centre de Loisirs à 17 h pour ton enquête sur la petite Jenny. Tes Parents ont appelé, ils ont confirmé pour ce week-end et te rappellent pour te donner leur heure d'arrivée. Je suis passée au pressing pour ton ensemble pour l'émission de ce soir.


- OK, super ! Heureusement que tu es là ! Je ne sais pas ce que je ferais sans toi !


- Oh la même chose, mais pas forcément à la bonne heure ! lança Marie en éclatant de rire.


- Bon, j'avoue, je l'ai bien mérité ! ria Angélina.


- Ah oui, j'oubliais ! Quelqu'un t'a déposé un colis dans ta loge.


- Oui, merci, John m'en a parlé. Je vais aller voir ça. On mange ensemble avant l'émission ?


- Petit plateau surprise comme d'habitude ça te va ?


- Tu parles si ça me va ! Tu sais comme j'adore ces petits moments avant le grand chahut de l'émission. On dit pour 19h15 si tu es d'accord !


Angélina lui fit un clin d'œil et se dirigea vers sa loge. En entrant, elle vit le colis déposé sur son bureau. Avant de l'ouvrir, elle en fit le tour afin d'y voir le nom de l'expéditeur, mais rien n'y était mentionné. En l'ouvrant, elle trouva un CD-Rom, un plan de la ville, une clé ainsi qu'une lettre.


- Qu'est-ce que tout ça signifie... Et qui m'envoie ça ?


Sous ses yeux défilait un diaporama de photos d'un bébé, puis progressivement, des photos du même enfant, plus âgé... Une petite fille d'à peine plus de 3 ans. Sur certaines, on y voit des personnes... Une famille peut-être ? Mais c'est en voyant les deux dernières photos qu'Angélina s'inquiéta. Il n'y avait pas de doute possible, il s'agissait de la maison de ses parents... La palissade, et même le cerisier au milieu du jardin.


- Mais qui est cette petite fille et pourquoi y a t'il la maison de mes parents sur ces photos ?


Angélina se saisit alors de son téléphone portable, il lui fallait des réponses à toutes ces questions qui n'arrêtaient pas d'arriver dans sa tête. Elle composa le numéro de ses parents.


- Allô, maman ? Dis-moi, est ce que je peux passer vous voir papa et toi ?


- Cara mia, oui bien sûr, tu veux passer quand ?


- Bah tout de suite en fait... Si vous ne bougez pas pour le moment !


- Non, on ne bouge pas pour l'instant, ton père répare sa voiture.


- OK super ! Je pars de suite, je serai à la maison dans dix minutes...


Angélina remit tous les objets dans le carton et partit directement, juste le temps de faire signe à Marie pour lui faire comprendre qu'elle a une urgence, mais qu'elle revient vite. Marie avait l'habitude des départs précipités d'Angélina. Chaque fois qu'elle se trouvait sur une enquête, il suffisait d'un appel, une idée... Et elle disparaissait.


Elle ne mit que huit minutes pour arriver, Angélina se gara devant la clôture de la maison. Comme précisée par sa mère au téléphone, elle trouva son père devant le garage en train de réparer sa voiture.


- Bonjour papa, comment vas-tu ?


- Buongiorno il mio angelo ! sono bene e tu ? Bonjour mon ange ! Je vais bien et toi ?


- Ça va bien. Maman est dans le jardin ?


- Sì, sì occupa dei suoi fiori. Oui, oui, elle s'occupe de ses fleurs.


- OK merci, tu nous rejoins après ?


- Sì, lasciami ancora 10 minuti. Oui, laisse-moi encore 10 minutes.


- D'accord à toute à l'heure alors.


Son père avait toujours eu pour habitude de parler sa langue d'origine, lorsqu'il était chez lui, et Angélina avait appris à faire de même depuis sa plus petite enfance. Elle embrassa son père sur la joue et se dirigea vers la petite allée qui conduit derrière la maison. En arrivant au jardin, elle trouva sa mère à genoux en train de planter des fleurs. C'était son loisir préféré, elle pouvait y passer des heures. Angélina adorait la regarder faire son jardin, déjà enfant, elle s'asseyait à côté d'elle pour la regarder jardiner.


- Coucou maman !


- Ma chérie ! Tu es déjà là ? Tu es encore venu avec ta moto. Tu sais que je ne suis pas tranquille quand je te sais sur cet engin !


- Ne t'inquiète pas, je suis prudente.


- Toi oui, mais c'est des autres que je me méfie, ma fille. Viens, rentrons boire un truc frais. Tu as vu ton père ?


- Oui, il nous rejoint dans 10 minutes.


Une fois son père rentré, Angélina leur montra le colis et l'ouvrit devant eux. Elle leur expliqua de quelle façon dont elle l'avait obtenu. Il y avait quelque chose qu'ils devaient voir. Se dirigeant vers l'ordinateur, elle sortit le CD-ROM et l'inséra dans le lecteur. Elle lança le diaporama et attendit leurs réactions. Au bout de 5 minutes, sa mère se mit à pleurer, son père lui, avait le visage figé, il recula et alla s'asseoir dans son fauteuil.


- Angie ma chérie, mais où as-tu eu ça ?


- Comme je viens de vous le dire, quelqu'un a déposé ce colis à mon bureau et il y avait ce Cd-rom accompagné d'une lettre me disant que cette fille a disparu, je vous avoue que tout ceci n'a aucun sens pour moi pour le moment. Et je viens vous voir parce que sur certaines photos, la petite fille se trouve devant la maison...


- Vous connaissez cette petite fille ? Qui est ce ? demanda Angélina en se tournant vers son père.


Son père tourna la tête vers sa femme et avec un air grave qu'Angélina n'avait encore jamais vu, lui dit :

- Occorreva bene che cìo arriva un giorno ! il fallait bien que ça arrive un jour !


- Maman ? Que veut dire papa ? Qu'est-ce qu'il se passe ? Vous m'inquiétez vraiment.


- Ma Chérie, assis toi ! Il faut que l'on te parle... J'aurais souhaité ne jamais avoir cette discussion avec toi, mais le destin en a voulu autrement.


Angélina s'assit sans un mot et laissa sa mère parler. Tout en regardant ses parents, elle s'enfonçait dans le fauteuil au fur à mesure que sa mère parlait.


- Ma Chérie, il n'y a pas de bonne façon d'annoncer ce genre de chose. Je vais te raconter ce qui s'est passé, il y a maintenant 27 ans. Un soir où ton père et moi devions sortir, nous t'avions laissée à une baby-sitter. Ton père avait un dîner avec un nouveau fournisseur qui n'est d'ailleurs jamais venu au rendez-vous. Lorsque nous sommes rentrés, la porte d'entrée était ouverte et toutes les lumières étaient allumées. Nous avions retrouvé la baby-sitter inconsciente dans le couloir à l'étage et tu avais disparu. Des gens étaient venus et t'avaient enlevé. La police, le F.B.I, tout le monde t'ont cherché, mais en vain.


- Mais qui étaient ces gens ? Que voulaient-ils ?


- À ce jour, nous ne savons toujours pas. Pas d'appel, pas de demande de rançon, ni aucune revendication. Tu sais, on n'a jamais été bien riche, il n'y avait aucune piste. Tu as disparu pendant 1 mois et nous n'avons jamais su ce qu'ils avaient pu nous vouloir et te faire durant cette période horrible, ni pourquoi.


- Et comment avez-vous fait pour me retrouver ?


- C'est là tout le mystère ma chérie ! Nous ne t'avons pas retrouvé. Un matin, nous avons entendu un bruit criant de voiture devant la maison, et quand nous sommes sortis pour voir, tu étais là. Ils t'avaient ramené à la maison. Saine et sauve.


- C'est une histoire de fou que tu me racontes ! Pourquoi ne m'en avez-vous jamais parlé auparavant ?


- Tu étais si jeune et n'avais aucun traumatisme. Nous avons préféré avec ton père ne plus jamais reparler de cette histoire. Et sans ce colis que tu as reçu aujourd'hui, nous n'en aurions pas dit mot.


- Quand est-ce arrivé exactement ?


- C'était le 2 avril de l'année 1992, je ne pourrais jamais l'oublier.


- Mais alors qui m'a envoyé ce colis et pourquoi ? Pourquoi ce message disant que cette petite fille a disparu ? Et qui sont ces gens sur les photos avec la petite ?


- Nous n'en avons aucune idée ma chérie. Peut-être des anciens propriétaires et leur fille !


En finissant sa phrase, la mère d'Angélina jeta un regard à son père qui répondit par un hochement de tête, ce qui n'avait pas échappé à Angélina.


- Bon, maman, papa, il faut que je retourne au studio pour mon émission de ce soir, mais il faudra que nous en reparlions.


- D'accord, ma chérie, sois prudente et ne roule pas trop vite s'il te plaît. Tu sais que je ne suis pas tranquille quand je te sais sur cet engin.


- Oui, ne t'inquiète pas maman, je fais attention.


Angélina remit tous les objets dans le colis, embrassa ses parents et repartit en direction des studios. Elle ne pouvait pas s'empêcher sur le chemin de repenser à cette phrase et ce regard que sa mère avait lancé à son père. Ce n'était pas possible, on lui cachait quelque chose.


- Cette affaire n'est pas claire ! Voilà qu'il va falloir que j'enquête sur mon propre enlèvement et avec le nombre d'années, ça va être dur de rassembler ce puzzle.

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