51 - Je te retrouverais

Je roulai dans la forêt, slalomant entre les arbres, mes doigts tapotant anxieusement le volant. Il fallait que je retrouve mon frère le plus vite possible. Et si le train avait de l'avance ? Si je le loupais ? S'il n'était pas content de me voir ?

Tant de questions m'assaillaient. Depuis que j'avais rencontré Morgane, plus rien n'était comme avant. Ce qui me semblait évident était en réalité loin de l'être, et je voyais maintenant le monde comme une énigme impossible à résoudre. Pourtant, je n'aurais laissé ça pour rien au monde. Je ne l'aurais laissée, elle, pour rien au monde. De toutes les énigmes, elle était sans doute la plus complexe.

Mon cur battait encore à tout rompre dans ma poitrine. Je sentais encore sa chaleur contre moi. Son petit corps frêle contre le mien. Ses cheveux décoiffés, ses habits larges... elle était naturelle. Elle transpirait l'humanité. De toutes les personnes que j'avais pu rencontrer, je n'avais jamais vu quelqu'un d'aussi humain. Et c'était magnifique. La personne qu'elle était me fascinait.

La personne qu'elle avait réussi à être malgré toutes les épreuves qu'elle avait traversée me fascinait. Elle restait forte. Belle. Elle avait des valeurs humaines, de la bonté, et une force mentale épatante. Je m'en voulais tellement, dès que je la voyais ! Je lui avais fait subir tant de choses. Je l'avais frappée, à l'époque où je la considérais encore comme une ennemie.

Je frissonnai à l'idée même de lever à nouveau la main sur elle. Le pire étant que je savais que, dans des accès de colère, je ne savais pas me contrôler. J'avais grandi dans un contexte qui m'avais fais croire que la violence résolvait chaque problème, et je devais maintenant apprendre qu'elle ne faisait qu'aggraver ces mêmes problèmes.

Je secouai la tête. Mon frère. Je devais me concentrer sur mon frère. Je devais aller le chercher, et vite rentrer voir Morgane. Je savais à quel point ce bunker pouvait paraitre morbide quand on y était seul. Pourtant, alors que je roulais, je me rendis compte que c'était une idée stupide que de laisser Morgane seule. Elle était si maladroite parfois !

Et si elle mettait le feu ? Si elle essayait d'utiliser une de mes armes et se blessais ? Si elle utilisait l'ordinateur et se faisait repérer ? La police serait là immédiatement, et je n'en saurais rien. Si elle avait le moindre ennui, elle n'avait personne pour l'aider.

Je pilais au milieu de la route, soudain apeuré pour elle. J'avais le temps. Je pouvais y retourner, embarquer rapidement Morgane et repartir chercher mon frère avant que le train ne parte. Ce serait plus sûr. Je m'étais laissé embarqué sans même y penser par mes émotions. Maintenant, j'avais peur que Morgane n'ait un problème.

En soupirant, je fis un demi-tour tout à fait illégal au milieu de la route déserte et repartis rapidement à travers les bois. Oui, je m'inquiétais peut-être pour rien. Mais ne disait-on pas qu'il valait mieux prévenir que guérir ? S'il lui arrivait n'importe quoi d'autre par ma faute, je ne me le pardonnerais jamais.

Je me garais dans un coup de volant devant le bunker et descendis. Soudain, je me figeai. La porte était grande ouverte. Alors que j'avançais, un terrible sentiment me prit. Pourquoi diable la porte était-elle ouverte ? J'étais certain de l'avoir fermée. Et vu le froid extérieur, Morgane ne l'aurait jamais réouverte. Je passai à l'intérieur et descendis l'échelle, mes doigts tremblants sur le métal froid. Je sautais les derniers échelons et atterris sur mes jambes flageolantes.

- Morgane ? C'est moi, je suis revenu te chercher.

Bizarrement, j'avais le sentiment que personne n'allait me répondre, et c'est bien ce qui arriva. J'eus du mal à respirer en comprenant peu à peu ce qu'il se passait. Je me précipitai dans le couloir et déboulai dans la pièce principale. Déserte.

- Morgane ? répétais-je.

Je vérifiais sous les lits. Dans notre espace salle de bain. J'ouvrai même les placards. Peut-être voulait-elle juste blaguer ? Mais elle n'était pas là. Elle n'était pas là, merde ! Pourquoi n'était-elle pas là ? Elle avait juré. Elle avait promis de m'attendre, de rester là, de ne pas bouger. Elle n'était pas là !

- Tu avais juré, geignis-je dans le vide. Tu avais juré...

Je me précipitais à nouveau dehors et hurlais son nom avec la force du désespoir, sans plus me soucier de qui pouvait m'entendre. Je fouillai les alentours proches. Personne. Elle n'était pas là. Pire que ça... elle étais partie. Elle m'avait laissé...

Je m'assis par terre dans l'herbe glacée, la tête entre les mains. Tout ce qu'elle avait dit... ce n'étaient que des mensonges ? Elle attendait juste de pouvoir se tirer de là ? Que je m'en aille, pour pouvoir disparaître de ma vie ? Moi qui croyais que... ce lien que je ressentais, je croyais qu'elle aussi le sentais. Pourtant elle m'avait abandonné. Elle n'avait rien dit. Je... je l'aurais laissé partir, si c'était ce qu'elle voulait...

Je retournai à l'intérieur, mué par un désespoir incompréhensible. Elle ne pouvait pas être partie comme ça. Ce n'était pas son genre. Pas sans un mot, une explication. Je savais qu'elle n'était pas comme ça. Ce ne fut qu'en revenant dans la pièce que je vis le détail qui m'avais manqué. Juste devant mon ordinateur reposait le collier que Morgane avait volé à la bijouterie. Celui duquel j'avais enlevé la puce GPS au parking, ce jour-là.

Qu'est-ce qu'il faisait là ? Était-ce ça son message d'adieu ? Un simple collier ? Soudain, je vis ce qui aurait dût me sauter aux yeux. Une lumière clignotait en rouge, sous un des plus gros diamants. Elle ne clignotait pas avant, j'en étais sûr. Fébrile, je glissai mes doigts entre le diamant et le support, et appuyai. Le diamant sauta aussitôt, alors qu'il aurait du être parfaitement accroché.

Mon souffle s'arrêta. Non non non... comment avais-je pu merder à ce point ? Une deuxième puce. Caché dans le diamant. Avec ce qui ressemblait à un micro. Mon cerveau ne mis pas longtemps à faire le rapprochement. Ou bien, pendant tout ce temps, Morgane était une sorte d'agent double qui nous enregistrait. Ou bien...

La réponse à ma question me vint rapidement. L'écran de l'ordinateur juste devant moi s'alluma, et un message y apparut sous une forme de petite bulle.

« II faudra attendre pour le baiser. Échec et mat.

R- »

Je serais les mains sur la table à m'en blanchir les jointures. Un bourdonnement sourd résonnait dans mes oreilles, et j'étais prêt à m'arracher les cheveux. Ma peine première se transforma en désespoir, puis en une haine intense. J'étais seul. Définitivement seul. Et ce salopard de Ryder avait emmené Morgane, j'en étais sûr. Toute cette mascarade m'était destinée. Ryder avait emmené Morgane, et il voulait maintenant savourer sa victoire en beauté. Quel idiot j'avais été !

Je pouvais maintenant l'avouer, je n'étais pas au niveau de Ryder. Quoi que je fasse, il avait toujours un coup d'avance. J'ignorais depuis combien de temps il nous écoutait. Il avait dû activer le GPS quand j'étais parti retrouver mon frère. Quand il savait que la voie vers Morgane était libre. J'avais enlevé sa première puce du collier et il en avait mis une autre...

Je m'étais fait avoir. Plus que de récupérer Morgane, ce salopard voulait m'atteindre. Et il a réussi à tout m'enlever. Mon frère devait déjà être dans son train à cette heure-ci. Partis loin de moi. Il m'avait pris Morgane. Et dieu seul sait ce qu'il serait capable de lui faire subir.

Je séchais les larmes qui avaient inconsciemment commencées à couler le long de mes joues d'un air rageur. Il fallait que je la retrouve. Il serait capable de la torturer, peut-être même de la tuer. Ce sociopathe ne s'arrêterait pas. Je ne pouvais pas le laisser faire ça. Je ne pouvais pas la laisser entrer ses pattes.

Soudain, l'ordinateur se manifesta à nouveau et je sautai dessus. Mon sang se glaça à la vue du message, intercepté sur le serveur de la police. En quelques lignes, il annonçait qu'un appel anonyme avait annoncé que le criminel tant recherché se cachait au milieu de la forêt, suivis des coordonnées exactes. Je du me rendre à l'évidence. Dans moins de dis minutes, l'endroit allait grouiller de flics.

Ni une, ni deux, j'entrepris de récupérer toutes les affaires importantes. L'ordinateur. Quelques armes et munitions. Des vêtements. J'attrapai le livre que lisais Morgane. De quoi manger. Puis je me précipitai sur le gaz, et l'ouvris au maximum sans faire sortir les flammes. L'odeur caractérise embauma aussitôt la pièce et j'attrapai mon sac, le collier et un briquet, avant de retourner jusque l'échelle.

Je grimpai rapidement, avant de sortir à l'air libre. Les lieux étaient encore déserts et silencieux, mais j'avais intérêt à me dépêcher. Je m'accroupis devant l'échelle, allumai mon briquet et le laissai tomber à l'intérieur. Je regardais une dernière fois la flamme briller à l'intérieur, avant de fermer soigneusement la porte et de courir jusque-là voiture. Je grimpai au volant et démarrai aussitôt. J'étais déjà partis quand le bunker explosa, effaçant toute trace de notre passage.

Après quelques minutes à tripoter le diamant avec le micro, je finis par ouvrir la fenêtre, et approchai le diamant de mes lèvres :

- Écoute bien connard. Je te jure que si tu touche à un seul de ses cheveux, je te tue. Je vais te retrouver, et tu vas le regretter. La partie est loin d'être finie. Tu vas payer pour avoir osé la toucher.

Sans hésiter, je jetais le diamant par la fenêtre avant de refermer celle-ci. Je roulai un moment en silence ; avant de craquer et de me garer sur le bas-côté.

- Merde ! hurlais-je.

Je m'effondrais sur le volant, secoué par des larmes que je n'arrivais pas à contrôler. Morgane avait disparue. J'avais encore tout foiré ! Il fallait que je la retrouve. Sinon, Morgane disparue, mon frère partis, plus rien ne m'empêcherait de me dénoncer à la police. Pour James, pour Morgane, j'aurais accepté toutes les cavales du monde. Mais à quoi cela servait-il que de fuir seul, pour sa propre vie ? Après tout, pourrir en tôle était tout ce que je méritais.

Les doigts tremblants, je sortis de ma poche le petit couteau qui me suivait partout. Ancien réflexe que j'avais réussi à oublier, la douleur qui me serrait le cur était désormais trop forte pour qu'elle passe naturellement. J'avais juré de ne plus le faire. Mais j'en avais besoin. J'avais besoin de me ressaisir pour aller sauver Morgane. Lentement, je remontais ma manche et tournai mon avant-bras, en tremblant légèrement. De légères boursoufflures blanches parcouraient déjà ma peau à intervalles régulières, bien cicatrisées depuis le temps.

J'appuyai la lame entre deux cicatrices et penchai la tête en arrière, avant de couper d'un geste vif. Je poussai un râle de douleur en fermant les yeux quand la lame s'enfonça dans ma chair. Je serais les poings tandis que le sang coulait le long de mon bras, partagé entre la douleur et un plaisir malin. Je ne fis rien pour arrêter le sang de couler et reprit lentement ma respiration. Quand je rouvris les yeux, plus aucune larme n'en coulait. La douleur physique effaçait celle qui occupait mon esprit. Pour le moment, et jusque-là prochaine coupure. J'essuyais le couteau sur mon jean, avant de reprendre le volant, le bras noyé de sang.

- Je te retrouverais Morgane, je te le jure, promis-je à voix-basse.

Le sang qui coulait me rappelait qui j'étais. Ce monstre. Ce meurtrier. Et je comptais bien le rappeler également à Ryder. Je le retrouverais. Et je le tuerais. Lentement, et le plus douloureusement possible.



Whooo je suis toute excitée, premier point de vue de Tyron ! 😊😋 Qu'en avez-vous pensé ? J'ai bien aimé l'écrire ahah.

Alors vos avis sur ce chapitre ? Oui je sais, pas très joyeux. 😅

L'une d'entre vous avez bien deviné que Tyron allait au début croire à l'abandon. Mais Ryder est bien trop joueur pour ça.😏

Tyron qui met (encore) le feu ?

Tyron qui se mutile ?
( Les enfants, l'automutilation c'est mal. Ne suivez-pas l'exemple de Tyron, compris ? Ça fais très mal, et c'est très dangereux. Si vous faîtes ça, je vous prive de lecture. Compris ? 🤔)

Comment envisagez-vous la suite ? Je vous donne juste un indice, mon âme de sadique va se régaler. 😏😏

Deux chapitres dans la même journée, vous êtes vraiment gâtés. Si ça, c'est pas la preuve que je vous aimes. Je vous jure, je suis vraiment accro à vos commentaires. Merci encore de suivre ma modeste histoire, je ne le dirais jamais assez. 😍😘

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