18 - Tais-toi, Morgane !

Quand je me réveillais, le lendemain matin, Tyron était déjà debout. Assis à la table, il était penché sur plusieurs feuilles et gribouillait dessus. J'en vins à me demander s'il avait vraiment dormi cette nuit et, quand il leva la tête vers moi, j'eus ma réponse. Le bandit avait de grosses cernes, les cheveux en batailles, et une légère barbe naissait sur son menton. Pourtant, même ainsi, il ne perdait rien de son charme. M'ignorant royalement, il retourna à ses affaires et je lâchai un soupire. Le Tyron qui m'avait raconté l'histoire du petit prince était partis. Je restai un moment immobile, tout le corps endoloris. James semblait toujours dormir, et je finis par demander :

- Tyron ... ?

Aucune réponse. Pas même un geste pour me faire comprendre qu'il m'avait entendue.

- Tyron ? Est-ce que je peux prendre... une douche ?

Je fermai les yeux, redoutant la réponse. Dans ma situation, peu de choses me feraient autant plaisir qu'une bonne douche chaude, outre m'enfuir d'ici. J'entendis le long soupir du bandit jusque là et il leva des yeux ennuyés vers moi :

- Tu te crois à l'hôtel peut-être ?

- Ce n'est pas le cas ?

Il roula des yeux et je me recroquevillais sur moi-même tandis qu'il se levait. Pourtant, il passa devant moi sans s'arrêter et se rendis dans la salle de bain. J'arquai un sourcil. Il revint rapidement avec à la main un ensemble de rasoirs et ciseaux, qu'il rangea dans un tiroir fermé à clé. Puis il s'accroupit à côté de moi et libéra mes poignets entravés. Un soupire de soulagement s'empara de moi quand mes bras engourdis purent enfin se baisser, alors que Tyron me faisait me lever.

Sans un mot, il m'emmena dans la pièce adjacente, me poussa dedans et referma la porte, me laissant seule pour une durée déterminée, pour la première fois depuis trois jours. Mon premier réflexe fut de regarder autour de moi mais, mis à part une minuscule fenêtre ou je ne pouvais même pas passer un bras, il n'y avait aucune issue. Je me jetais alors sur les tiroirs et placards et fouillais le tout, mais Tyron avait fais son boulot minutieusement. A part une épingle à cheveux, il n'y avait rien qui pouvait ressembler de près ou de loin à une arme.

Je lâchai un soupire puis passais un coup aux toilettes, avant de me diriger vers la douche. C'est le miroir qui m'arrêta. Je restais un instant immobile, pétrifiée par ce que me montrait mon reflet. Non, cette fille ne pouvait pas être moi... et pourtant si. Mes cheveux roux étaient en pagaille, emmêlés, sales, pleins de sang séché, tandis que mes yeux verts avaient perdus de leur brillance et semblaient... éteints. De la poussière recouvrait ma peau pâle, mes lèvres étaient gercées, et j'avais encore l'impression que le pire n'était pas là.

Je me déshabillais lentement, le visage horrifié, dévoilant une à une mes blessures. Mon bras gauche était surplombé d'une croute de sang séché et d'une longue estafilade là où la balle m'avait touchée. J'avais des hématomes un peu partout, dont le plus important restait à ma hanche. Je sentais encore la poigne de fer de Tyron, et mon corps en avait gardé une marque verdâtre qui faisait peur à voir. Et puis il y avait mes poignets, où la peau était à vif, déchirée par les nombreux liens qui l'avait entravée.

Je restais un moment perdu dans ma contemplation avant de foncer à la douche, craignant que Tyron ne change d'avis. Ce fut la plus agréable douche de toute ma vie, si on exclue mon corps meurtrie souffrant à cause de l'eau. 

Quand je sortis de la cabine de douche après avoir passé un bon moment à essayer de discipliner mes cheveux, j'aperçus un tas de vêtement près de la porte. Je les attrapai, perplexe, et me rendis vite compte que c'était des vêtements de femme. Pour moi, sans doute. Sans rechigner, et trop heureuse de ne pas remettre des habits sales, j'enfilai le pantalon et le tee shirt noir qui avaient été glissés durant ma douche, touchée de l'attention. Puis j'attrapai une brosse et coiffai mes cheveux en une longue tresse qui, je l'espérais, tiendrais un peu. Je ne savais pas quand j'aurais à nouveau le luxe de me permettre ça.

Puis je me décidais à enfin sortir de la salle de bain avant que l'on ne vienne me chercher. Tyron et James étaient en grande discussion. James était assis sur son lit, enveloppé par les draps blancs tachés de sang, et Tyron toujours à la table, dos à moi.

- Non, lâcha Tyron en secouant la tête. Je ne sais plus. J'étais ici, et cette stupide vendeuse derrière le comptoir, là. Ensuite je suis passé le long de cette allée, j'ai récupéré Freeman, et je suis revenu. C'est là que la vendeuse a voulu alerter les flics.

Tandis qu'il parlait, il montrait du doigt un plan, posé sur la table. Tandis qu'il parlait, les images défilaient derrière mes yeux comme si j'y étais. Tandis qu'il parlait, je sentais à nouveau l'odeur de pain frais qui régnait dans le magasin, mélangée à une odeur de renfermé et, bientôt, à une odeur de l'hémoglobine fraiche.

- Et les caméras ?

- Tu sais bien que je n'étais pas préparé, souffla le plus jeune des frères. Je ne sais plus. Il devait y en avoir deux...

- Trois.

Je plaquai une main sur ma bouche en écarquillant les yeux tandis que les deux bandits se tournaient vers moi. Merde, réfléchis avant de parler Morgane ! Mais c'était trop tard. Tyron fronça les sourcils en me regardant :

- Comment ?

- Il... heu... Il y avait trois caméras.

J'approchais de la table de Tyron et inspectai rapidement leur plan avant de poser le doigts à trois endroits.

- Une ici. Une autre là, au-dessus de la caisse. Et une dernière... là, au fond du magasin.

Je reculai vivement en me frottant les bras, baissant les yeux pour ne pas croiser le regard des deux bandits. James se redressa :

- Qu'est-ce que...

- Freeman ? le coupa Tyron. Quels étaient les produits exposés sur la caisse ce jour-là ?

Tais toi, Morgane ! Ignorant ma conscience, je ne pu m'empêcher de répondre :

- Deux boîtes de chewings-gums de la marque Hollywood à la chlorophyle, cinq exemplaires des journaux quotidiens, des cigarettes Lucky Stryke, Onze tablettes de chocolat noir, des...

C'était plus fort que moi, je ne pouvais pas me taire, et ça m'horrifiait. Et dire que j'avais à peine fais attention au comptoir ce jour-là !

- Sur les journaux, quel était le premier titre ? me coupa à nouveau Tyron.

- « Blocage dans les lycées, près de 100 gardes à vue mardi ». Les lycéens font une deuxième journée de mobilisation contre la réforme de bac et parcousup.

- Quel jour nous étions ? Quelle heure ?

- Le 4 décembre 2018. Il était 9 heures 22 quand je suis entrée dans...

- Qu'est-ce que tu faisais ce même jour il y a exactement quatre ans ?

Il ne me fallut que quelques secondes pour m'en rappeler :

- Le 4 décembre 2014, le soleil s'est levé à 7h35. Je commençais exceptionnellement les cours à 9 heures alors à 8 heures je suis allé au café, en passant on a croisé un aveugle qui promenait des chiens, il avait une chemise rouge et...

Ma voix s'étrangle dans ma gorge quand Tyron bondis de sa chaise. Il me plaqua contre le mur derrière, appuyant une lame de couteau contre mon cou. Derrière lui, je pus apercevoir le regard impressionné de son frère, et je déglugis. Tyron me lança un regard brillant :

- Ok Freeman, pas mal du tout. Maintenant, tu vas me faire le plaisir de me dire ce qui ne tourne pas rond chez toi avant que je ne t'égorge ici-même.

Tindin 🎊🤩💓 Si là, Tyron ne se doute de rien quand même... 😆

Qu'en pensez vous ? Morgane a t'elle bien fais de répondre aux questions ? Pour sa défense, j'ai lu que chez certaine personne, il est presque impossible de ne pas répondre quand on leur pose la question pour un événement, ou ne pas rétablir la vérité quand quelqu'un se trompe sur un détail 🤗😊

J'ai bien aimé écrire ce petit jeu entre eux deux personnellement. Quand à Tyron, j'espère que vous vous attendiez pas à ce qu'il devienne un gentil nounours 😏

Qu'imaginez vous pour la suite ? Moi j'ai pleeeein d'idées mais je suis un peu dans le flou sur comment faire évoluer les relations entre les personnages. Mais bon, je vais me laisser guider par eux ( Et par vous, bien sûr 😊😘 ) Et voir où ça nous guide ^^

Et, comme d'habitude, je n'ai pas sû tenir jusque samedi pour poster 😅😄
Bon week end à vous 😍😘

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top