Chapitre 31

Le temps est long sans toi.

Shinso fut sorti de son coma artificiel le mardi vingt-deux – soit deux jours plus tard que prévu – au grand soulagement de tous. Il était malgré tout très affaibli et avait perdu en masse musculaire. Il ne semblait pas avoir gardé de séquelles supplémentaires dûes à sa période de coma, chose qui ravit aussi bien les médecins que ses amis. Sa convalescence commencerait réellement en fin de semaine avec des séances de kiné et de marche, puis des petits entraînements afin de reprendre en musculature. On lui avait retiré son drain et le poison avait enfin quitté son organisme. Néanmoins, il garderait de multiples cicatrices sur le torse et le dos, dues à l’agression de la femme-lézard. 

Shoto était passé le saluer le mercredi après être allé voir Katsuki. Il en avait profité pour lui expliquer l’énorme erreur qu’il avait commise avec les deux jeunes. En effet, tous deux faisaient les rondes de nuit avec lui depuis lundi et tous deux étaient volontaires et compétents. Mais ce qui n’était stipulé nulle part dans les deux dossiers, c’était la haine que se vouaient les deux apprentis héros. Ils n’avaient aucune coordination, n’arrivaient qu’à se gêner l’un l’autre et à rejeter la faute sur l’autre. Les seules paroles qu’ils s’adressaient étaient majoritairement des insultes. Le héros numéro deux désespérait quelque peu, ce qui fit rire Hitoshi. Le héros mental lui promit de revenir au plus vite afin de le soutenir dans cette ‘épreuve’. 

Remarquant l’heure, Todoroki quitta son ami et se rendit à l’agence où les deux jeunes l’attendaient. Il vit tout d’abord la fille, Sakibara, dans son costume héroïque, parlant avec d’autres héros en souriant. Elle le salua d’un grand sourire et s’avança vers son professeur, ses longues boucles mauves mouvant dans son dos. 

« Bonsoir Shoto ! On fait la même inspection qu’hier ? 

- Bonsoir Sakibara. Oui, mais avec deux quartiers de plus, on rentrera donc un peu plus tard. Où est Keith ? 

Keith, c’était le deuxième apprenti héros, un garçon sûr de lui avec de bonnes capacités mais légèrement trop arrogant. 

- On peut l’oublier, c’est pas gênant. Fit la jeune femme avec un sourire angélique. 

- Oublier qui ? La seule oubliable c’est toi, sale timbrée. Répliqua une voix cassante dans son dos. Sakibara perdit immédiatement son sourire, jetant un regard noir au garçon brun et à la peau halée la dépassant d’une tête. Lui la toisait de la tête aux pieds. 

- Personne ne t’as parlé, connard. 

- Ça suffit, vous deux ! Shoto venait de s’interposer, pinçant l’arrête de son nez d’un air désespéré, attirant l’attention des deux apprentis héros. Vous avez besoin de ce stage et de savoir coopérer avec n’importe qui en tant que pros. Si quelqu’un était en danger face à vous deux, vous échoueriez parce que vous êtes incapables de séparer boulot et vie privée. Ce n’est pas pour rien qu’on ne fait jamais équipe avec la personne qu’on aime dans ce métier : on sépare travail et affect. Or, vous faites ce stage en même temps parce que vous avez accumulés du retard. Donc, si vous ne faites pas d’efforts tous les deux pour vous entendre sur le terrain, vous échouerez à votre stage et ne serez pas diplômés. Ça veut également dire que vous passerez une nouvelle année ensemble, dans la même classe. C’est ce que vous voulez ? 

Les deux jeunes se jetèrent un regard de dégoût avant de secouer vivement la tête, regardant Shoto. 

- On va faire des efforts. Ils avaient prononcé la même phrase au même moment, ce qui fit sourire le héros. 

- Vous voyez que vous pouvez être sur la même longueur d’onde par moments. Maintenant, au boulot. »

Suivant le héros, ils sortirent tous les trois faire régner l’ordre dans les rues sombres de cette fin de janvier. Et c’est ainsi que les journées s’enchainèrent. À la moindre occasion, Shoto venait à l’hôpital, muni d’un bouquet de fleurs, restant des heures avec Bakugou. Celui-ci avait maigri mais se rétablissait peu à peu. Les médecins lui assuraient régulièrement que les avancées étaient positives. C’en était de même pour la rééducation de Shinso. Dès la fin de la première semaine de son réveil, il avait pu se lever et marcher (toujours en compagnie de quelqu’un évidemment) et, maintenant que trois semaines s’étaient écoulées, le héros était rentré chez lui depuis un petit moment et commençait à remuscler ses bras sans mettre son corps à rude épreuve. D’après les médecins, Hitoshi pourrait reprendre son travail début mars, mais avec précautions. 

Bakugou avait eu des visites régulières de ses amis, famille et collègues – de même que Shinso durant son hospitalisation – et aujourd’hui ne dérogeait pas à la règle. Shoto était assis aux cotés du cendré, l’observant dans son état léthargique. Il mourait d’envie de le voir ouvrir les yeux, bouger, sourire. Il savait que ce n’était qu’une question de temps, mais cette attente le rongeait. Todoroki ne s’était jamais vu si impatient pour quelque chose. Bakugou lui manquait atrocement. Sa présence, ses messages, le simple fait de partager un repas avec lui, sa voix, tout lui manquait. 

Shoto regarda Bakugou, murmurant ses mots que son cœur lui criait : ‘Le temps est long sans toi, Katsu’. Puis il soupira, caressant la main de Katsuki dans la sienne. Cette dernière n’avait plus de bandage depuis quelques jours, lui permettant de sentir la peau douce du garçon sous ses doigts. Bakugou était pâle et il ne l’avait jamais vu aussi frêle. À cause de son inactivité prolongée, le cendré avait perdu la quasi totalité de sa masse musculaire, ainsi que quelques kilos dû à l’alimentation par perfusion. Sous le masque transparent qui couvrait son visage, ses lèvres étaient craquelées et sèches. Mais sa respiration restait calme, son cœur battant régulièrement et sans faiblesse. Son corps s’en remettait et la douleur de ses blessures ne l’affectait pas. Savoir cela soulageait Shoto. 

Todoroki entendit la porte s’ouvrir mais n’esquissa pas le moindre mouvement, continuant de détailler les traits de Katsuki. Il ne sursauta pas lorsqu’il sentit une fine main se poser sur son épaule et, sans même se retourner, ce geste lui suffit pour deviner qui était cette personne. 

« Bonjour Mitsuki, comment allez-vous ? 

La blonde tira une chaise à coté de celle du bicolore et prit place. 

- Je vais bien Shoto, mais toi tu as l’air fatigué. Dit-elle, observant le visage du héros. Ce dernier avait des cernes visibles, sa fatigue était autant physique que mentale. Il soupira, sentant l’inquiétude dans la voix de la blonde. 

- Je vais bien, je suis juste… débordé. Mais ça ira mieux dès que Katsuki sera réveillé. 

- Tu sais que tu n’es pas obligé de venir le voir tous les jours ? Ni même de passer toute l’après-midi ici à chaque fois ? La voix de Mitsuki était douce, elle était préoccupée par l’état du garçon. À chaque fois qu’elle était venue rendre visite à son fils, Shoto était présent. La seule fois où elle ne l’avait pas vu, Eijirou était dans la chambre avec sa petite amie et lui avait dit qu’il était parti quelques minutes après leur arrivée. Pour la troisième fois en un court laps de temps, le bicolore soupira. 

- Je le sais. Mais je n’aime pas le laisser seul. Il se pinça les lèvres, sourcils légèrement froncés, avant de reprendre d’une voix plus faible. Dès que je quitte cette pièce, j’ai l’impression de l’abandonner. Et je n’arrive pas à trouver le repos. Savoir qu’il est ici, seul, à lutter à chaque instant… Ça me tue. Je me sens totalement impuissant et ça m’empêche de dormir correctement. Les seuls moments où je me sens bien et apaisé, c’est lorsque je suis ici, avec lui. Je sais que je ne peux rien faire, mais je suis là, je le soutiens. Il n’est pas seul pour se battre. Donc ne vous en faites pas, ce n’est absolument pas une contrainte de rester avec lui. 

Ses paroles réchauffèrent le cœur de Mitsuki, un sourire peiné étirant ses lèvres. 

- Tu en fais trop quand même. Tu as ton travail, tu surveilles mon petit démon et tu viens de me dire que tu dormais mal. Les infirmières en charge de cet étage te voient tellement régulièrement qu’elles s’inquiètent les rares fois où tu ne peux pas venir. Tu es un adulte responsable, Shoto, et tu n’es pas mon fils donc je n’ai rien à redire. Mais, en tant que mère, je m’inquiète. Tu dois te reposer avant d’être surmené. 

Todoroki l’observa quelques instants, surpris, avant de lui adresser un fin sourire. Mais, avant qu’il ne réponde, il vit le médecin en charge du dossier de Bakugou entrer. Shoto voulut se redresser, laissant l’homme parler avec Mitsuki mais cette dernière l’en empêcha, le retenant par le poignet. Le médecin, pas plus perturbé que ça, commença à parler tout en jetant quelques regards à la mère de son patient. 

- Nous avions prévu de réveiller votre fils le dimanche dix-sept février, soit demain. Mais, bien que son état ne soit plus préoccupant d’un point de vue vital, il serait plus recommandable de prolonger son état quelques jours de plus, le temps que les blessures de son dos finissent de guérir complètement. Nous pouvons le réveiller dès demain si c’est ce que vous souhaitez, néanmoins ce sera douloureux pour lui. 

- Qu’est-ce que vous recommandez, docteur ? 

- Maintenir son état de coma jusqu’à vendredi prochain me semble être la meilleure solution. Nous le réveillerions donc le vingt-deux et il pourrait ainsi entamer une rééducation ici même avec le personnel soignant. 

- Quand est-ce que mon fils pourra sortir d’ici ? 

- Je pense qu’il pourra sortir aux alentours de la mi-mars, dépendamment de sa rééducation bien entendu. La blonde hocha la tête, lèvres pincées. Shoto posa sa main sur celle de Mitsuki, dans un geste réconfortant. 

- Si c’est le mieux pour lui, prolongeons ça jusqu’à vendredi alors. Finit-elle par concéder. 

Le médecin s’avança, lui tendant un papier ainsi qu’un stylo et la blonde déposa sa signature sur la feuille blanche. L’homme en blouse quitta ensuite la chambre et le calme retomba sur la pièce. Jusqu’à ce que la blonde ne le brise. 

- Une semaine de plus… Sa mine attristée fut un coup pour Shoto. 

- C’est pour son bien, Mitsuki. On le verra dans quelques jours. Et puis, le temps avait été prolongé pour Shinso aussi. Vous n’avez pas à vous inquiéter.

Elle resta silencieuse quelques instants, le regard fixé sur son fils allongé paisiblement. 

- Moi non plus je n’aime pas le laisser ici, Shoto. Il a toujours détesté les hôpitaux. Il est comme moi, empli de fierté et d’orgueil. Pourtant, lorsqu’il a eu cette opération de l’appendicite au collège, il a dû rester en observation pour la nuit. C’est la seule fois où il m’a demandé de rester parce qu’il avait ‘besoin de moi’. Je sais à quel point mon fils est fort. Mais je sais également à quel point il peut être faible par moment. Et si je ne suis pas là dans les rares moments où il a besoin de moi, est-ce que je suis une bonne mère ? 

- Si vous vous inquiétez autant, vous n’avez même pas besoin de vous poser ce genre de question. C’est que vous êtes une bonne mère. Puis, je vous l’ai promis, je serai là pour le protéger. »

D’un simple regard, ils confirmèrent une nouvelle fois leur accord. Remarquant que Mitsuki avait prévu de rester un moment, Shoto prit ses affaires et quitta la chambre, la laissant seule avec son fils. Il était l’heure pour lui de se rendre à son agence, et de retrouver ses deux apprentis. Cependant, lorsqu’il entra dans le bâtiment, il vit Fumikage qui maintenait Sakibara dans un coin, éloigné des autres. Cette dernière avait l’air hors d’elle. De l’autre coté de la salle, entouré de deux autres héros, Keith avait la lèvre fendue et saignant encore un peu, une compresse tâchée de liquide rouge dans sa main droite et un regard mauvais envers la jeune fille. Todoroki lâcha un soupir désespéré avant d’écouter l’histoire que Fumikage se fit un plaisir d’expliquer tout en confiant la jeune femme au bicolore. Une fois fait, ce dernier fit venir Keith proche, les gardant tous deux à l’œil. 

« Je pensais que vous alliez faire des efforts, mais rien n’a changé. Absolument rien. Maintenant les paroles ne vous suffisent plus, vous avez besoin de frapper ? 

- Mais il… Tenta la jeune fille avant de se faire interrompre par la voix autoritaire du bicolore. 

- Je ne veux pas le savoir ! Vous n’êtes plus des gamins. Vous devriez savoir vous contrôler un minimum. Pour la peine, vous resterez ici ce soir, à faire de la paperasse. Il vous reste un peu plus d’une semaine de stage mais, si vous n’êtes pas capable de travailler comme une équipe, vous la passerez dans ces locaux. »

Le regard intransigeant du héros leur coupa l’envie de contester. Mais leurs yeux se lançaient toujours des éclairs, ne supportant clairement pas la vue de l’autre. Néanmoins, ils acceptèrent leur punition sans rechigner, passant une longue nuit ennuyeuse à classer divers documents tandis que Shoto faisait sa garde, seul, ce soir-là. Lorsqu’il fut de retour à l’agence, les deux têtes brûlées s’étaient endormis, la tête contre le bureau où ils travaillaient. Une fois changé, il se décida à les réveiller, gardant son visage neutre. Il savait qu’il avait été dur mais ces deux-là ne pouvaient pas continuer comme ça. Seul un moyen drastique pourrait les aider à surpasser leurs différents, quels qu’ils soient. Shoto rentra chez lui et se coucha, cherchant désespérément le sommeil. Il parvint à le trouver seulement grâce à la pensée que, bientôt, il reverrait Katsuki. 

◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇◇

Hey ! Me revoici !

Encore un chapitre qui vous laisse attendre, je sais ! Mais je vous promets que Katsuki sera bientôt de retour !

Mes prochaines publications risquent d'être un peu chaotiques à cause de mes partiels qui approchent, mais je ferai de mon mieux pour vous poster la suite dans les temps !

J'espère que ce chapitre vous a plu et je vous dis à la semaine prochaine pour la suite !

Baiser monochrome,

-DianaV🌺

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top