Chapitre 13.
Si l'on occulte le fait que des créatures s'en prennent aux sirènes et que Poséidon, roi des mers, en a après moi, je pourrai presque m'ennuyer. Un lourd silence pèse au dessus de moi et j'en viens presque à regretter que Seth se soit absenté quelques minutes voir quelques heures pour faire un rapport à son chef par téléphone, me laissant seule avec un dieu silencieux et absorbé par autre chose que notre principale problème. Soudain, le voilà qui rompt le silence.
« Où donc se trouve ton humain Lorelei ?
- Le plus loin possible de vos poissons de compagnie.
- Ce sont tes sœurs, tu le sais ça ?
Je hausse des épaules. Oui nous sommes sœurs. Oui nous faisons parties de la même famille, celle de l'océan. Mais ça ne m'empêchera pas d'être désagréable. Je m'allonge dans un divan et observe mes longues jambes. Je fronce des sourcils en apercevant une écaille du côté de ma cheville. Parfois, elles ne disparaissent pas toutes. Je passe ma main dessus et quand je la retire, l'écaille a disparu.
- Ce n'est pas une raison. Il n'y a qu'à vous regardez vous et votre fratrie divine. Avant l'enfermement de vos frères et sœurs, vous étiez constamment en conflit pour des raisons stupides. Que se soit pour les guerres des hommes, des histoires d'amour ou de jalousie... Et il me semble que vous et Athéna avez longtemps été en désaccord... à quel propos rappelez moi ?
- Ulysse.
- Ah oui, le beau marin...
Je pousse un long soupire en plissant des yeux et je m'enfonce encore plus dans le divan. Il me semble que le dieu s'est raidit à l'entente de mes mots mais rien n'est jamais sûr avec lui. J'interroge :
- Que vous avait-il fait ?
- Il a rendu aveugle mon fils.
Cette fois ci je lève les yeux au ciel.
- Vous êtes un dieu, vous avez eut bon nombre de conquête et vos enfants sont si nombreux que je ne sais pas exactement combien ils sont, surtout que certains d'entre eux n'ont même rien de divin. Il me semble même que vous aviez été marié...
- C'est une ancienne vie tout ceci Lorelei. L'ère des dieux et de leurs frasques s'est terminée avant notre emprisonnement.
- Et... Que sont donc devenues toutes vos... conquêtes ?
- Il s'en est passée des choses, petite sirène. Je me suis retrouvé seul, sans compagne, bien avant ta naissance.
- Je ne vous plaindrai pas Poséidon.
Je repense à tout, les légendes mythologiques qui ont bercé ma vie, recherche des détails qui pourraient nous aider. Un d'entre eux, concernant Poséidon, me revient alors en mémoire et je tourne la tête vers le maître des océans qui m'observe de ses yeux marins d'un bleu si profond que même ceux d'une sirène ne pourraient rivaliser.
- Je croyais que le dieu des mers avait un trident ?
- J'en ai un.
Je me redresse, piquée par l'intérêt que suscite sa réponse, et pose mes pieds bien à plat sur le sol. D'un ton narquois, j'enjoins le dieu à poursuivre :
- Ah oui ? Jusque ici je ne l'ai pas vu pourtant.
- Crois tu donc que je me ballade avec une arme aussi puissante que cela sur moi, partout où je vais ? Je peux déclencher des tremblements de terre, des tempêtes, des ras de marée avec lui. Ce ne serait vraiment pas sécurisé de transporter mon trident avec moi, ni même intelligent.
- Vous en seriez capable...
- Encore une fois Lorelei, ton idée sur moi est beaucoup trop fixée. Mais viens voir, si tu veux. Tu verras qu'il n'existe aucun risque pour que je l'ai en ma possession en sortant dans le monde.
Il me saisit alors le poignet autoritairement et un frisson me parcourt, remontant le long de mon échine. Je tente de me dégager mais il n'en a que faire et sa poigne trop forte m'empêche de le forcer à me lâcher. Il m'oblige à me lever et m'entraîne derrière lui jusqu'à une autre salle. Nous nous engouffrons dans un escalier sombre qui descend profondément sous terre et lorsqu'il s'arrête nous nous tenons devant une immense porte circulaire sertit d'étrange symbole en fer et en or. En son centre un trident est gravé, portant à chacune de ses dents un Ruby et serti au bout de son manche d'un saphir.
Il me semble qu'il chante. Ce n'est pas une vulgaire blague ou une folie mais ce portail chante, comme une sirène, un chant qu'il me semble être la seule à l'entendre, appelant à lui quelque chose, ou quelqu'un...
Je m'approche, sous le regard intrigué de Poséidon, et, comme hypnotisée, pose une mains sur le portail, à l'endroit même où le trident est gravé. Aussitôt il est pris d'étranges vibrations. Des craquement se font alors entendre, terribles et sonores, tandis que le métal vibre sous mes doigts, secoué par des spasmes, comme si la Terre tremblait. Le chant semble se faire de plus en plus audible, les mots résonnent dans mon esprit. Je ne me recule pas, fascinée par ce qui se déroule, mes yeux ne quittant pas ma main qui vibre au même rythme que la paroi sur laquelle elle est posée.
Quand soudain, le portail explose.
Instinctivement, je recule et me recroqueville pour ne pas me prendre un morceaux de métal dans la figure. Mais le corps du dieu fait déjà rempart, m'empêchant d'être blessée. Il saisit en plein vol un bout qui menaçait de me toucher de trop près. Je le regarde les yeux ronds, étonnée de son intervention et de son attitude mais il passe outre et murmure, l'air réellement surpris :
- Vraiment, tu m'étonnes de plus en plus chaque jour Lorelei...
Mon attention le délaisse pour se porter alors sur ce qui se situe derrière la porte. Une sorte de bassin d'eau qui semble ne pas connaître de limite ni en profondeur, ni en hauteur ni en largeur. Et à une centaine de mètres de l'entrée flotte un trident en argent, véritable pièce d'art dégageant une étrange luminescence bleu. Un objet hypnotisant. Il semble m'appeler, enivrant de puissance. Mais le dieu me devance, et plonge sa main au travers du mur d'eau. La lumière du trident augmente alors et celui ci se met à vibrer de toutes ses forces. Je recule de quelque pas quand soudain l'objet divin fuse en direction de la paume de Poséidon. Ce dernier l'attrape en plein vol et le tire brusquement de l'eau. Alors qu'il brandit son arme en l'air son expression s'illumine. Il semble avoir retrouver une partie de lui et son aura décolle soudain, envahissant tout l'espace, laissant échappé une puissance marine incroyable. Une puissance... Terriblement attirante...
Pour ma part, je reste complètement ébahie.
- Qu'est ce que... qu'est ce que votre trident faisait ici ?
- Il était mis sous clé, scellé, confisqué Lorelei. Et tu viens de me le rendre.
Je fronce des sourcils et croise des bras. Les déductions que je peux tirer de ses dires sont un peu folles et je ressens le besoins de l'interroger. Cependant, j'essaye de conserver le plus de calme possible, bien qu'il soit certain qu'une pointe d'ironie se fasse entendre. Je sens battre mon cœur à cent à l'heure dans ma poitrine sans trop comprendre pourquoi.
- Vous allez me dire que cela fait des années que cette foutue arme est ici et que vous n'avez pas été capable de la récupérer ?
- C'est exact.
- Et que personne avant ne l'avait été ?
- C'est ça.
- Et pourquoi ?
- C'est à toi de le découvrir, Lorelei.
J'essaye de retenir mon ricanements moqueur mais c'est trop. J'explose de rire tandis que le dieu m'observe posément. Je n'arrive pas à me stopper, c'est incontrôlable. Et mauvais. Mon rire est mauvais, il transpire d'amertume et de sentiments néfastes. Reprenant un peu de mon calme, une chaleur délirante embrasant mon esprit, je réplique avec véhémence :
- Vous vous fichez de moi n'est ce pas ? Vous savez quoi, Poséidon, gardez votre petit jouet et foutez moi la paix avec vos secrets à deux balles.
- Tu as changé Lorelei. Tu es moins... innocente. Non, c'est stupide, tu ne l'as jamais été. Mais tu es devenue plus sûre, plus entêtée, plus séduisante... Très séduisante même. Et beaucoup plus dangereuse. J'aime ce danger en toi qui a toujours existé et qui est plus présent que jamais. Il est attirant, excitant...
Je croise les bras. Visiblement, il n'en démord pas avec cette idée que nous nous sommes déjà rencontré par le passé et plus le temps passe, plus cela me semble véridique.
- Vos mots n'ont aucun sens.
- C'est pourtant simple.
- Non, ça ne l'est pas. Si vous ne daignez pas m'expliquer, comment voulez vous que je comprenne ?
Il ne me répond pas comme à son habitude, et je sens monter en moi la frustration. Je pousse un soupire et tourne les talons, gagnée par la lassitude.
- Où vas-tu ?
La voix du dieu s'élève derrière moi. Je lève une main dans les airs dans un signe agacé, mimant le geste d'expédier une chose sans intérêt, et crache :
- Le plus loin possible de vous. »
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