chapitre 9 ; maiko ou la fille malheureuse

𝐌𝐄𝐋𝐏𝐎𝐌𝐄𝐍𝐄
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chapitre neuf —— maiko ou la fille malheureuse
« But I love you, so (please let me go). »

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Kanon ne comprenait pas. Que voulait dire sa sœur ? À travers le son de sa voix et de son attitude, Kanon pouvait ressentir toute la tristesse et la haine enfouie en Maiko. Seulement, elle ne parvenait pas à savoir ce qui l'avait mis dans cet état.

Car elle le savait : sa sœur n'était pas une grande bavarde et ne soulageait jamais sa conscience de ses problèmes et de ses sentiments néfastes. Depuis quelques temps, Kanon le sentait, que Maiko n'allait pas bien. Et elle avait tant essayé de la faire parler à ce sujet, sans succès.

— Maiko, je t'en prie, calme-toi, respire un bon coup, lui intima Kanon avec douceur. Il faut que tu me dises ce qu'il ne va pas.

— Tu veux que je te le dise ? Vraiment ? s'énerva-t-elle en se tenant face à sa sœur. Je te hais, voilà !

— Quoi... ?

Le cœur de Kanon se serra de douleur. Les mots de sa sœur étaient comme des coups de poignard. Mais qu'avait-elle fait ? Peut-être ne pensait-elle pas ce qu'elle disait, sous la colère ?

— Pourquoi ? Dis-moi ce que j'ai fait de mal ! la supplia Kanon, les larmes qui commençaient à monter.

— Je te hais alors que ce n'est pas de ta faute, tu n'as rien fait.

— Mais alors, pourquoi ?

— Je te l'ai dit, je suis la pire personne et la pire sœur que tu aurais pu avoir ! "Tu as gâché ma vie par ta simple présence", voilà ce que je pense ! Alors que tu n'as rien fait...

Maiko fondit de nouveau en larmes.

— Je suis désolée, tellement désolée... bredouilla-t-elle entre deux sanglots. J'aimerais t'aimer... mais je n'y arrive pas ! Je suis trop horrible...

Kanon la prit dans ses bras, elle aussi en pleurs. Sentir le corps de sa sœur contre elle, sa chaleur réconfortante, un sentiment d'apaisement prenait le dessus en Kanon. Cela faisait des années qu'elle n'avait pas pris sa sœur dans ses bras. Des années qu'elle n'avait pas eu un contact affectif avec elle. Ça lui avait manqué.

Elle aimait Maiko du plus profond de son cœur. La voir souffrir ainsi, depuis peut-être plusieurs années, dans le silence, la blessait profondément. Elle aurait voulu être une meilleure sœur.

— Tu es une bonne personne, Maiko, finit par dire Kanon en essuyant ses larmes. Pourquoi dis-tu que tu es horrible ?

— Depuis que tu es malade, j'ai toujours été seule. Les parents ne se préoccupaient plus que de toi. Ils n'ont jamais passé du temps avec moi, ni aidé lorsque j'avais besoin d'eux. J'ai toujours dû me débrouiller seule. Personne n'était là pour moi, personne ne m'a jamais complimenté ni valorisé, personne ne m'a montré la voie à suivre. J'aurais, moi aussi voulu, que quelqu'un s'intéresse à moi, m'accompagne et m'aime autant que nos parents t'aimaient.

Elle reprit peu à peu son calme, et poursuivit :

— Et quand tu es revenue à la maison, rien n'avait changé. C'était peut-être même pire : les parents ont commencé à me mettre la pression pour les cours, et en plus, ils te favorisaient toujours. Je n'ai jamais été assez bien pour eux, ni pour personne. Finalement, je ne sers à rien, et même pire, je suis une horrible personne, puisque j'en suis venue à te détester alors que tu n'as rien fait. Je me disais que, si tu n'existais pas, j'aurais pu vivre sans toute cette haine et cette douleurn

Les larmes commençaient à nouveau à inonder le visage de Maiko. Sans un mot, Kanon continuait de l'écouter avec une grande patience.

— J'ai essayé de parler aux parents, de dire tout ce que je pensais. Ils m'ont tellement disputée et rabaissée. Ils m'ont dit que j'étais la personne la plus horrible, que je n'étais qu'une princesse qui voulait toute l'attention, que tu ne méritais pas une sœur comme moi, que tu méritais une sœur qui t'apporte tout le soutien possible et qui t'aimait. Et finalement, ils avaient raison sur tout. Je t'ai toujours détestée alors que tu méritais tant de bonheur. Je n'ai jamais réussi à t'aimer, pourtant j'ai tellement essayé...

Maiko avait avoué tout ce qu'elle avait sur le cœur. Tout ce qu'elle gardait en elle depuis le début. Kanon ne dit rien. Elle resta plongé dans un profond silence, le temps de digérer tout ça.

Kanon n'en voulait absolument pas à sa sœur. Elle ne ressentait pas une once de haine pour elle, et au contraire, elle comprenait sa colère, qu'elle trouvait parfaitement légitime. Kanon n'avait jamais rien remarqué, n'avait jamais vu toute la souffrance de sa petite sœur. Et malgré tout, celle-ci continuait à lui parler comme si de rien n'était. Malgré sa haine pour elle.

Il était vrai que Kanon avait pris toute la place dans la famille. Si bien que, Maiko ne se sentait plus légitime. Elle avait dû se sentir invisible toute sa vie, sans personne pour l'écouter ou l'aider dans les pires moments.

La gorge de Kanon se noua. Un immense chagrin la prit. Alors, même sa propre existence avait causée de la peine à quelqu'un ? À sa propre sœur ? Elle aurait mieux fallu qu'elle meurt dès sa naissance. Elle n'aurait embêté personne.

— Je suis tellement égoïste. Je suis tellement désolée... sanglotait Maiko qui se répétait dans ses excuses.

— C'est moi qui suis désolée, finit par lui répondre Kanon en la prenant une seconde fois dans ses bras. Je t'ai causée tellement de peine, à toi et à tant d'autres personnes. J'aurais aimé être une meilleure sœur pour toi. Je suis désolée d'avoir tout gâché.

Elle ajouta dans un profond soupir :

— Tout le monde se serait mieux porté si je n'avais pas existé.

Maiko n'aurait pas été dans cet état. Elle aurait été une fille heureuse. Ses parents n'auraient pas été submergés par la montagne de charges et de temps qu'ils lui avaient accordés. Ils n'auraient jamais été aussi tristes. Ils n'auraient jamais ressentis de la culpabilité et de la peine en regardant leur enfant.

Pourquoi s'étaient-ils excusés ce jour-là, lorsqu'ils avaient appris pour la maladie incurable ? Ce n'était pas de leur faute, ils n'avaient rien fait. C'était à Kanon de s'excuser pour toute la souffrance qu'elle avait engendrée à chacun.

C'est ça. Finalement, je n'aurais été qu'un poids toute ma vie, songez Kanon avec un faible sourire.

— Non, Kanon ne dit pas ça ! s'exclama Maiko, la voix tremblante. Tout est de ma faute, ne te repproche rien ! Tu as toujours subi ta maladie et...

— Au final, je n'ai fait que faire souffrir les quelques personnes qui m'aimaient.

— Arrête de penser ça ! Ce n'est pas...

Mais l'instant d'après, Kanon sentit son cœur se serrer atrocement dans sa poitrine. Elle ne parvenait plus à respirer, aucun son ne sortait de sa bouche. Tous ses membres tremblaient, ses jambes ne la retenues pas longtemps : Kanon perdit l'équilibre et s'écroula par terre.

La douleur se déchaînait en elle. Elle grimaça, alors qu'elle entendait autour d'elle la voix paniquée de sa petite sœur de plus en plus loin. Elle lui semblait être un écho, perdue de plus en plus. Finalement, même la voix de Maiko disparut.

Kanon n'arrivait plus à bouger. Son corps refusait de lui obéir, et semblait aussi lourd qu'une enclume. Ses yeux se voilaient lentement d'un rideau noir. Elle se sentait partir. Et tout compte, Kanon se trouvait reposé. Elle se sentait bien, la douleur disparaissait, en même temps que sa conscience s'endormait.

Et puis, sans qu'elle s'en rende compte, Kanon plongea dans un profond sommeil.


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CHAPITRE 9 TERMINÉ
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