chapitre 2 ; silencieuse et seule

𝐌𝐄𝐋𝐏𝐎𝐌𝐄𝐍𝐄
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chapitre deux —— silencieuse et seule
« You're gone, gone, gone away. »

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— Je suis rentrée ! lança Kanon en fermant la porte d'entrée.

Enfin de retour chez elle, la lycéenne allait pouvoir souffler un peu. Les cours l'épuisaient, aussi bien mentalement que physiquement. Avant, l'école se déroulait soit chez elle à l'aide de sites internet spécialisés, soit à l'hôpital avec des professeurs engagés exprès. Lorsqu'elle avait travaillé de cette façon, elle n'avait jamais ressenti autant de fatigue que maintenant. Mais c'était son choix d'aller au lycée, elle y avait longuement réfléchi et en avait décidé avec l'accord de ses parents. C'était une chance qu'elle avait pu saisir, alors elle n'allait pas se plaindre. Avoir un semblant de quotidien normal lui faisait plaisir.

Elle ôta rapidement ses chaussures puis se dirigea dans le salon. Sa mère était assise sur le canapé et pianotait de façon aisé sur le clavier de son ordinateur. Kanon embrassa doucement sa mère sur la joue, puis demanda :

— Papa rentre ce soir ?

— Malheureusement non, il est de garde cette nuit.

Le père de Kanon était garde de nuit dans un musée. Il s'absentait généralement toute la soirée et ne revenait que le lendemain matin. La jeune fille pouvait presque même le croiser lorsqu'elle partait au lycée. Elle fut un peu déçue de cette nouvelle, mais poursuivit la conversation :

— Tu sais, Fujiko voudrait qu'on aille ensemble demain soir voir un match de volley de l'équipe masculine de notre lycée. Est-ce que je peux y aller ?

Son corps se raidit à cette demande. Bien sûr, ce n'était pas la première fois qu'elle demandait à sa mère de sortir. Cependant, toutes ses tentatives s'étaient vouées à un refus net, sans moyen de négocier quoique ce soit. Alors, cette fois-ci, elle n'allait pas s'avouer vaincue aussi facilement.

— Pas question, contra sèchement sa mère. Tu as tes examens médicaux demain soir, tu ne peux pas les louper.

— Les médecins n'ont rien détecté de suspect dans mes derniers examens, et je me sens très bien ! Je me disais qu'on pouvait décaler ma visite médicale à samedi plutôt qu'à vendredi soir, non ?

Kanon avait bien préparé sa réponse. Elle observait longuement sa mère, plongée dans un profond silence, ses doigts qui continuaient de taper machinalement les touches de clavier. Kanon ajouta :

— Je n'ai jamais fait de sortie avec une amie. Je ne sors même pas du lycée. S'il y a un problème, il y aura des adultes et...

— Et si tu refais une crise ? interrompit sa mère, la voix ferme mais à la fois tremblante. Ce sera peut-être trop tard pour t'emmener aux urgences.

Kanon voyait bien que sa mère se faisait beaucoup de soucis. Était-elle égoïste à faire cette demande ? Pourtant, plus que tout, elle avait envie d'aller sortir avec son amie, voir un simple match de volley. Pour une fois, elle voulait faire quelque chose de normal. 

— Je ne ferais pas de crise, je me sens très bien. Je t'en prie, rien que cette fois ! Tu ne peux pas m'interdire de juste sortir avec une amie, sous prétexte que je vais...

Kanon stoppa net sa phrase, lorsqu'elle se rendit compte de ce qu'elle disait. Sa mère avait cessé d'écrire sur son ordinateur, le regard perdu dans le vide et les yeux devenus brillant.  L'adolescente sentit sa gorge serrée, elle se pinça la lèvre. Son essai de négocier la sortie été allé trop loin. Sa mère faisait tout pour la protéger du mieux qu'elle le pouvait, et c'était comme ça qu'elle la remerciait ? Seulement, Kanon voulait justement faire des choses normales, comme une adolescente banale pourrait les faire.

— Excuse moi, murmura Kanon, la tête basse. Je voudrai juste, pour une fois, faire quelque chose que j'ai envie. Je ne fais pas forcément d'activités en dehors des cours, je ne fais pas de sport, je ne suis jamais sortie avec mon amie. Alors, je me disais que je pourrai...

— Tu peux y aller, soupira sa mère face à sa fille. Mais je veux que tu promettes que si tu te sens mal durant le match, tu m'appelles immédiatement.

— Oui, promis. Merci maman !

Le sourire de nouveau aux lèvres, Kanon déposa tendrement un second baiser sur la joue de sa mère, avant de monter à l'étage. Même si elle pouvait se montrer stricte et sévère, Kanon la remerciait profondément de se soucier autant d'elle et de, parfois, l'autoriser à braver les règles. Elle était heureuse et à la fois excitée d'être demain, elle n'avait jamais assisté à un match de volley de sa vie ! Mais plus important, elle n'avait jamais passé un moment hors du lycée avec son amie. 

Je me demande s'il y aura ma sœur au match, se demanda Kanon qui se souvenait des paroles de Fujiko. Je vais aller lui demander.

Elle se dirigea au fond du couloir puis toqua à la porte de droite, avec inscrit sur un petit panneau "Maiko".

— C'est moi. Je peux rentrer ?

— Oui, bien sûr.

Kanon ouvrit et trouva sa petite sœur, à moitié allongée sur son lit, téléphone en mains. En entendant le son de la vidéo, Kanon reconnut des explications des règles sur le volley-ball. Curieuse, elle s'avança vers Maiko et s'assit au bout du lit.

— Tu fais quoi de beau ?

— Je regarde une vidéo sur le volley, lui répondit Maiko d'une voix neutre.

— Ah oui ? Je ne savais pas que tu t'intéressais à ce sport. Tu vas voir le match de Karasuno contre Fukurōdani, demain soir ?

Maiko se recroquevilla sur elle-même et tira comme une grimace.

— Oui... marmonna-t-elle.

— C'est Saki qui va t'y traîner, j'imagine ?

Saki était la seule et meilleure amie de Maiko. Elles passaient littéralement tout leur temps ensemble, et bien que leur personnalité soient presque comme la lune et le soleil, elles s'entendaient très bien et passaient toujours de bons moments.

— Pas du tout ! Ce n'est pas elle... ronchonna une nouvelle fois Maiko, encore plus bas. C'est lui...

— Lui ?

— C'est un garçon de ma classe qui m'est rentrée dedans durant la pause, expliqua la plus petite. Pour s'excuser, il m'a invité à le voir au match. Tu parles ! Je n'ai pas le choix, il m'oblige carrément à y aller. Je m'y serais bien passée, de son invitation. Alors j'y vais avec Saki. J'y vais juste parce qu'il arrêtait pas de me dire qu'il était fort. On va bien voir ça, il ne faisait que de se vanter !

Aujourd'hui, on se fait vraiment tous rentrer dedans, rit intérieurement Kanon en repensant à Akaashi qu'elle avait percuté tout à l'heure.

Mais ce qui l'étonnait plus encore, c'était la manière dont parlait sa petite sœur. Elle la trouvait bien bavarde et se justifiait un peu trop à son goût. Habituellement, elle n'adressait que quelques mots à Kanon, et la voilà partie sur cette histoire avec ce garçon.

Une pensée la traversa soudainement : Maiko allait aller à un événement avec beaucoup de monde.

— Mais... ça va aller ? demanda Kanon, soudain devenue très sérieuse.

— J'en sais rien, mais normalement, je ne suis qu'anxieuse que lorsque je suis le centre de l'attention, alors ça devrait aller.

— Tu as refait une crise ces derniers temps ? 

Kanon voyait bien que son insistance sur le sujet agaçait sa sœur. Celle-ci s'énervait souvent lorsque quelqu'un insistait sur un sujet qui lui déplaisait, ou bien la couvrait de questions. Pourtant, Kanon le voyait pertinemment : lorsque Maiko souffrait, elle se taisait. Alors, c'était à sa grande sœur de l'interroger, c'était comme son devoir. Et il s'avérait parfois bien difficile.

— Non, je n'en ai pas fait depuis la dernière fois, finit par répondre la benjamine, le ton presque sec. Les professeurs savent que j'ai des problèmes, alors généralement, ils ne m'interrogent pas et me laissent tranquille.

 — C'est cool alors. Viens me parler si tu as le moindre problème. Je serais là aussi au match, alors n'hésite pas à m'appeler si tu ne te sens pas bien.

A ces mots, Kanon se leva et sortit de la chambre de sa petite sœur. Même si celle-ci n'avait qu'un an de moins qu'elle, elle ressentait le besoin de la protéger. Elle ne souhaitait pas que sa sœur souffre une nouvelle fois, comme lors de sa dernière crise de panique.

Durant ses longs séjours à l'hôpital, elle et sa sœur s'étaient beaucoup éloignées, au point que, lorsque Kanon fut enfin autorisée à rentrer chez elle, Maiko ne lui avait pas adressé un mot. Depuis, Kanon faisait tout pour retrouver le lien fort qu'elle avait avec sa petite sœur, comme lors de son enfance. Mais cette mission n'était pas chose aisée, puisque Maiko gardait tout en elle, malgré l'oreille tendue de Kanon en cas de soucis. 

Je me demande pourquoi elle n'est plus venue me parler du jour au lendemain, s'interrogea Kanon avec un pincement au cœur. Saki, prends soin de ma petite sœur.









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Le match de volley entre le lycée Fukurōdani et le lycée Karasuno arriva vite. Kanon, accompagnée de Fujiko, entrèrent dans le gymnase, qui commençait à se remplir de lycéens des deux écoles japonaises.

— Je suis trop contente que tes parents aient dit oui ! se réjouit une nouvelle fois Fujiko d'une voix enjoué.

— Je te l'ai dis, ce n'était vraiment pas gagné avec ma mère, lui répéta Kanon avec un léger rire. Mais je suis très contente d'avoir pu venir. Je n'imaginais pas le gymnase aussi grand...

Kanon était presque émerveillée par le simple bâtiment. Le couloir qu'elle était en train de traverser s'allongeait toujours plus loin, semblait interminable. Les brouhahas des élèves au terrain s'entendaient jusqu'ici, à croire qu'il se trouvait dans la pièce d'à côté. Il y régnait une atmosphère à la fois détendue, et excitante. Kanon se laissait guider par son amie, puisqu'elle n'y avait jamais mis les pieds.

— C'est là où tu t'entraînais, lorsque tu jouais au volley ? demanda la jeune fille à Fujiko.

— Oui ! On croisait souvent les garçons de l'équipe masculine, je les connais bien.

—  Oh, est-ce qu'il y avait un Bokuto dans l'équipe ? Il est dans ma classe, et nous nous sommes vite-fait parlés hier, à la sortie.

Fujiko s'arrêta subitement et fit volte face en direction de Kanon.

— Bokuto Kōtarō ? Bien sûr que je le connais ! s'exclama-t-elle joyeusement. Il est l'un des meilleurs attaquants de tout le Japon ! Il est grand, beau, il en impose tellement ! Enfin, je veux dire... il est pas trop mauvais, mais pas aussi bon que moi. On s'est déjà parlés lorsque j'étais dans l'équipe féminine pour s'échanger des conseils. Il est dans ta classe ? La chance...

— Est-ce que tu connais aussi...

Fujiko interrompit son amie d'un geste de la main.

— Laisse moi deviner. S'il y avait Bokuto à la sortie, alors il y avait sûrement Akaashi Keiji, le passeur de l'équipe. Il est un peu moins... je dirais, expressif que Bokuto, mais il est très gentil aussi. Ils sont tous les deux inséparables, de vraies glues. Tu lui as parlé ?

— Et bien, on s'est rentrés dedans par ma faute, rit légèrement Kanon, embarrassée. Mais je l'ai trouvé...

— Mignon ?

— Quoi ? Non !

Les joues de Kanon prirent feu immédiatement. Elle secoua vivement la tête et balbutia quelque chose d'incompréhensible. Fujiko éclata de rire face à cette réaction, puis lui lança :

— Ne t'inquiète pas, je t'arrangerai un petit rendez-vous avec l'aide de Bokuto.

— Pas du tout, tu ne feras rien ! s'empressa de dire Kanon, tentant d'arrêter la bêtise de son amie. J'allais juste dire que je le trouvais gentil !

Alors que Fujiko continuait de la charrier haut et fort, Kanon accéléra l'allure à grands pas, sa tête rouge de gêne et baissée. Si elle pouvait s'enterrer six pieds sous terre, elle le ferait. A quoi pensait-elle en en parlant à Fujiko ?

Je ne l'ai vu qu'une fois et lui ai à peine parlé, alors pourquoi dès que Fujiko me parle de lui, ça me gêne ? se demanda la lycéenne avec une pointe de panique. D'accord, je le trouve gentil, peut-être aussi mignon et poli, mais il n'y a rien de plus...

Elle ne put terminer sa réflexion qu'elle fonça droit sur quelqu'un, une nouvelle fois.

— Je suis sincèrement désolée ! s'empressa-t-elle de s'excuser, en relevant la tête. J'étais perdue dans mes pensées et...

— Oh, encore toi ?









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CHAPITRE 2 TERMINÉ
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