3. Médée
Quand je vis ce bel étranger s'avancer vers mon père, je sentis mon coeur rater un battement. Puis repartir au triple galop lorsque j'entendis sa voix : belle, grave, rassurante, elle inspirait la confiance. Et je crus, quelle naïveté, que cet homme était envoyé par les dieux, pour moi. Que lui seul serait capable de m'aimer, sans être effrayé par mes dons.
Mes dons. Ce que tous appelaient "fléau", "sorcellerie", et j'en passe. Ils avaient peur de moi, comme ils ont toujours eu peur de ma tante Circé, magicienne elle aussi. C'est elle qui m'avait tout appris. Elle m'avait enseigné les potions, les sorts, mais également à ignorer les insultes, à éviter les jets de pierre, à garder la tête haute sous les regards apeurés, méfiants et haineux. Depuis ma plus tendre enfance, j'avais toujours inspiré la peur et le dégout. Apprendre à vivre seule s'était vite imposé comme une nécessité.
Mais cet homme, Jason, me semblait être celui qui me tirerait de ma solitude et m'aimerait malgré ma sorcellerie.
Lorsque mon père le congédia en riant de sa requête, je le suivis. Il n'avait pas l'air désespéré ou abbattu par les paroles du monarque comme tous ceux qui l'avaient précédé. Je le raccompagnai hors du palais. Il n'avait pas dit un mot, m'avait à peine jeté un regard, perdu dans ses pensées. Dans ses yeux déterminés, je lisai qu'il élaborait un plan pour s'emparer de la Toison d'or. Mais je savais qu'il ne pourrait jamais y arriver sans mon aide. S'il tentait de la voler, il mourrait. Et je n'aurais pas pu supporter qu'il souffre, qu'il meure, qu'il m'abandonne. Alors je lui proposai mon aide :
- La Toison d'or est trop bien protégée, tu ne pourras pas t'en emparer sans y laisser la vie. Les épreuves de mon père t'emmèneront tout droit au royaume d'Hadès, et ce serait de la folie de tenter de la récupérer par un autre moyen.
Intrigué, il planta enfin ses yeux clairs dans les miens. La flèche de Cupudon transperça mon cœur.
J'étais foudroyée par l'Amour.
Alors je me mis à aimer cet étranger comme aucune femme n'avait jamais aimé aucun homme. Une véritable tempête se leva en moi, balayant toutes mes certitudes. Mais dans mon esprit tourmenté, une évidence s'imposait : je ne pourrais plus vivre sans cet étranger. Je voulais croire qu'il m'apporterait tout ce que je recherchais. Et, aveuglée par cet amour infini, j'abandonnai pour lui.
- Jason, laisse moi t'aider à t'emparer de la Toison.
Maudits soient-ils, ces dieux qui jouent avec nos vies ! Maudit soient ces dieux qui ont placé Jason sur mon chemin !
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