Chapitre I : Presley McCarty

Puisqu'il faut bien trouver un début à tout, disons que tout avait commencé dans une salle de cinéma.

Il ne savait plus laquelle, il ne se rappelait plus de l'heure, il ne se rappelait même pas du titre du film qu'il avait vu.

Etait-ce un film français ou une bonne grosse production Hollywoodienne ? Cela avait-il une quelconque importance après tout ? Il savait seulement qu'à l'époque il n'avait eu que six ans. Un garçon de cet âge est très influençable.

Tout était donc de la faute de sa mère : Ella McCarty.

De sa faute... C'était peut-être un bien trop grand mot. A l'époque, elle n'aurait probablement pas pu anticiper l'impact qu'aurait pu avoir cet acte, somme toute anodin, sur le futur de son fils. Cependant, le mal avait été fait et elle en avait été à l'origine, que ce soit de son plein gré ou non.

S'il devait y avoir un coupable dans cette histoire, Ella remplissait parfaitement le profil.

Le père de Presley, Fred McCarty, était ce jour là, comme à son habitude, parti travailler à l'usine de caoutchouc. Le petit Presley jouait tranquillement dans le salon avec une des balles défectueuses que son père lui avait ramené de l'usine et sur un coup de tête, Ella avait décidé d'emmener son fils au cinéma.

C'était l'un des rares plaisirs qu'elle pouvait s'offrir, une des rare sortie qu'elle pouvait avoir, le seul moyen efficace qu'elle connaissait à l'époque pour compenser l'absence de son mari (c'était avant les réunions tupperware et la vulgarisation  du godemiché).

Ça avait eu le bon résultat de leur faire plaisir, mais comme on dit, "trop de plaisir tue le plaisir", regardez où il en était rendu maintenant...

C'était un film en noir et blanc, ça il s'en rappelait, mais il serait incapable de vous donner le nom des acteurs principaux... Ou secondaire d'ailleurs.

Il se souvenait juste que c'était un film de détective. Le thème du film était vraiment impossible à oublier. Le personnage principal était un très beau détective, dans le genre très noir, c'était la représentation à l'écran de l' " hardboiled detective", le détective dur à cuire, dur à tuer...

A cette époque là, il n'y avait eu que ça dans les romans, ce stéréotype du anti-héro à l'âme déchiré qui collectionnait les femmes, buvait comme un trou, avait de mauvaises fréquentations, un style de vie peu recommandable, mais tellement de classe.
Ce héro des temps modernes était si "à part" avec son abondance de singularité, qu'il ne pouvait qu'impressionner... et il avait impressionné.

Le petit Presley du haut de ses six ans n'avait retenu de ce film en noir et blanc que le côté glamour de ce héro, les femmes à ses pieds, l'argent, le danger, l'action... Cela lui avait plût... Quelle idiotie! (Sa mère aussi avait apprécié, mais surtout les scènes où la femme suspecté de meurtre tentait de séduire le héro pour le détourner de la vérité).

Depuis ce jour fatal, Presley McCarty n'avait vécu que pour le métier de détective. Il avait grandi, studieux et déterminé, s'était lancé dans le droit histoire d'avoir un diplôme et l'avait obtenue. A à peine 22 ans, il avait passé haut la main son concours d'entrée dans la police où il était resté deux ans avant de monter sa propre agence de détective. Cela faisait maintenant deux longues années qu'il était passé à son compte et il ne cessait de maudire le jour où il était allé voir ce satané film avec sa mère.

A quoi se résumait sa vie aujourd'hui à 26 ans? De vielles grabataires l'engageaient pour retrouver leur chat, leur chien, leur tortue, leur dentier, j'en passe et des meilleurs.

Dans la plupart des cas ces pauvres vieilles séniles s'apercevaient qu'elles avaient fait empailler l'animal avant que Presley n'ait à le leur rappeler. Des femmes mariées en mal de tendresse l'engageaient pour filer leur mari qu'elles « soupçonnaient» d'être infidèle, puis jouant les victimes éplorées en "découvrant" la vérité, elles finissaient irrémédiablement dans son lit. Des époux trompés et fort mécontents lui intentaient procès sur procès. Il avait tout juste de quoi payer sa bimbo de secrétaire, Cadance, qu'il savait amoureuse de lui donc pas trop regardante sur le montant de sa paye.

Cela faisait un an qu'il vivait dans son bureau, il n'avait les moyens de rien. Cadance était une jeune fille riche à peine sortie de l'adolescence, sans grande compétences, elle ne travaillait que pour être proche de Presley et passait son temps à choyer le planché qu'il foulait de ses chaussures italienne passés de mode. Il n'avait pas eu d'autre choix que de l'engager quant il avait apprit combien il aurait dû payer une vrai secrétaire.

Les dettes de ce pauvre Presley ne cessaient de s'accumuler tandis que son moral ne cessait de plonger dans les abysses, ayant déjà traversé les nombreux trous de ses chaussettes usées.

Il avait pourtant encore des rêves. Sans être pour autant naïf, il caressait l'espoir de se trouver une gentille femme qui lui remonterait le moral après une dure journée de filature. Il était encore (à l'époque) très romantique, malgré les nombreuses infidélités dont il avait été le témoin et parfois l'instigateur. On pouvait même dire qu'il était trop romantique parfois, c'était peut-être à cause de l'éducation qu'il avait reçut.

Ses parents n'étant pas très riches, sa mère avait dû prendre un emploi de serveuse à mi-temps pour pouvoir s'occuper de son fils. Quant à Fred McCarty, le père de Presley, il n'avait jamais été là. Soit parce qu'il était à l'usine, soit parce que comme Presley l'avait découvert lors d'une de ses très nombreuses « filature » (des jeux d'enfants), il était chez sa maîtresse: Béatrice Barns, la meilleure amie d'Ella.

Mme McCarty était une femme très aimante et soumise, même en apprenant les infidélités de son mari, elle avait été prête à rester à ses côtés. Seulement Fred avait préféré fuir avec Béatrice, et Presley s'était promis de ne jamais devenir comme son père.

Bien sûr Fred n'avait cessé d'envoyer de l'argent à Presley, histoire de se déculpabiliser un peu, argent qu'Ella avait mis de côté pour son fils. Mais jamais il n'était passé le voir, jamais il n'avait envoyé de carte à Noël ou aux anniversaires, Presley n'avait de lui que le souvenir d'un chèque de 250 dollars versé tous les mois sur un compte à son nom, et il en ressentait une énorme amertume.

Il n'avait jamais eu le modèle d'un père et se laissait maintenant manipuler par des femmes... pathétique!
Ella était morte d'épuisement et de chagrin à cause du départ de Fred. Elle avait dû prendre à plein temps un emploi de serveuse en plus de la couture qu'elle faisait le soir pour arrondir leurs fins de mois et garantir à Presley son entrée dans une grande université. Elle avait poussé son dernier soupir le jour de l'entrée de Presley dans la police. Son souvenir était la seule chose qui empêchait Presley de renoncer, elle avait tout donné pour lui, il se devait de persévérer pour elle.

En ce jour de Mars 2005, il avait prit une nouvelle résolution: Plus Jamais, il ne coucherait avec une cliente (il n'en avait plus les moyens).
Il y en avait d'ailleurs eu une très belle en face de lui, toutefois, il se fit cette promesse tout en écoutant l'affaire qu'elle lui proposait:

- Je vous écoute... Miss Norburry, c'est ça ? Que puis-je pour vous? Dit-il en se concentrant pour ne pas plonger son regard dans le décolleté que sa cliente secouait sous son nez.

- Oh! fit cette dernière, derrière son charmant mouchoir en lin. Mr McCarty! Je ne serais pas venu vous voir si ce n'était une urgence!

(Mais bien sûr avec ce genre de femme c'était toujours une urgence)

Elle était assise sur le bureau de Presley sur les nombreuses convocations au tribunal qu'il ne prenait même plus la peine de lire. La chose la plus dérangeante chez elle, était que dans son charmant tailleur rouge qui la moulait à merveille, son corps semblait avoir des courbes généreuse que Presley aurait volontiers exploré.
Agacé par ces pensés perverse qui ne cessait de l'assaillir, il fit de son mieux pour paraître distant :

- Il y a des sièges en face de mon bureau, Mme Norburry ! Fit-il sèchement.

- Oh ! S'exclama l'intéressé en se dirigeant de sa démarche chaloupée vers l'un des sièges défoncé qui se trouvait en face du bureau de Presley.

Il la regarda se déhancher avec la certitude que cette femme voulait le séduire. Elle croisa ses jambes parfaites faisant un peu plus remonter l'échancrure de sa jupe courte et la gorge sèche le détective reprit :

- Dites moi quel est votre problème, exactement ?

- C'est... C'est mon amie Petra qui m'a conseillé de venir vous voir... Je... Je...

- C'est très intéressant ce que vous me dites là, coupa-t-il sarcastique, mais que voulez vous exactement? Redemanda t-il en tentant de garder son calme devant la comédie qu'elle lui jouait.

- Oh! Oui, mon problème... Dit-elle comme en sortant d'une transe, elle releva la tête pour le regarder dans les yeux. Eh bien, il s'agit de mon mari.

- Oui, et alors? Vous le croyez infidèle? Vous voulez que je le file?

- Herbert? Infidèle? S'esclaffa t'elle avec méprit. Ne soyez pas ridicule! C'est un minable petit comptable, qui voudrait de lui?

- Vous apparemment... Intercéda Presley, dérangé par la soudaine dureté qu'elle montrait.

- Oui... Moi... En effet... Fit-elle, de nouveau songeuse.

- Je ne vois toujours pas votre problème miss Norburry... Reprit le détective pour empêcher sa cliente de reprendre sa scène.

- Appelez moi Janice...

- Je vous disais donc, fit-il en appuyant sur chaque syllabes, Miss Norburry, et si vous en veniez au fait!

- C'est que cela peut vous paraître stupide... Murmura t'elle soudain timide.

- Allez-y de toute façons cette entrevue vous est déjà facturée !

- Hum... eh bien, cela fait un an que j'ai épousé Herbert, il était si mignon avec son air paumé, commença Janice, je peux dire que ça a été le coup de foudre ! Nous ne savions rien l'un de l'autre à part que nous nous aimions beaucoup. Mais seulement voilà, nous venons de fêter notre premier anniversaire de mariage et je n'en sais toujours pas plus sur l'homme que j'ai épousé. Cela peut paraître futile, mais je veux des enfants, et je veux savoir exactement à qui j'ai affaire. Il refuse de me parler de son passé, je n'ai donc d'autre choix que de recourir à vos services... Je vous paierais ce qu'il faut, mais il faut que je connaisse la vérité sur mon mari, sans qu'il ne le sache.

- Cela risque de prendre du temps et de vous coûter extrêmement chère, ne serait-il pas mieux de lui parler...

- Soyez sûr que si l'argent avait une quelconque importance pour moi, je n'aurais pas épousé Herbert. Je suis une riche héritière, je vous le répète, l'argent n'est pas un problème... Mais la discussion n'est pas une option.

Presley ne voyait aucune bonne raison de refuser l'affaire, la seule autre chose qu'il avait à faire était de retrouver le chat de la vieille madame Corshack. Vu comment la vieille étouffait cette pauvre bête, il n'y avait rien d'étonnant à ce que Minette se soit encore enfuit.

Sommes toutes, il préférait laisser encore un peu de liberté à ce pauvre animal et s'occuper de cette affaire qui ne lui semblait pas bien compliqué. Il lui suffirait de se tenir à l'écart de la si séduisante, mais si énigmatique Janice Norburry.

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