𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐚𝐫𝐚𝐧𝐭𝐞-𝐧𝐞𝐮𝐟

« Escapade pt. 2 »

❘✶❘


Il y a quatre ans.
À pas de loup, Soobin se glissa hors du salon pour aller rejoindre Taehyun sur la terrasse, une couverture sur le dos. Il l'avait vu s'éclipser en toute discrétion après le repas, et son attitude l'avait interpellé. Il lui avait semblé ailleurs, dans la lune, et une telle attitude ne ressemblait pas tellement à Taehyun. Ce dernier leva à peine les yeux vers lui, le regard fixé sur quelque chose dans l'immense jardin que Soobin ne percevait pas. Avec douceur, il s'installa en tailleur juste à côté de lui, et lui tendit une seconde couverture qu'il accepta en silence.

– Comment tu vas Taehyun ?

Il le vit à peine hausser les épaules.

– J'ai l'impression que quelque chose ne va pas... C'est à cause de tout à l'heure ?

Le regard de Taehyun changea rapidement et il se tourna vers lui, un sourcil arqué.

– Tout à l'heure ?
– Pendant les bains.
– Ah.

Soobin se demanda si Taehyun avait songé, l'espace d'un instant, à quelque chose d'autre.

– Tout va bien, ne t'en fais pas, merci de t'en préoccuper.

Il ouvrit la bouche, avant de la refermer aussitôt. En l'espace de dix petites secondes, une montagne de souvenirs lui était revenue. Il avait été incapable de passer à côté de son regard légèrement paniqué au moment de se dévêtir. De sa gêne croissante quand Yeonjun l'avait hélé, sans penser à mal un seul instant. Et dans ce bref élan de panique, leurs regards s'étaient croisés et Soobin avait compris. Elles lui étaient revenues en mémoire, et il avait été incapable de les glisser dans un coin de son esprit pendant les premières minutes de leur baignade. Ces cicatrices, il se souvenait les avoir vues, très nettement. Il les avait effleurées, embrassées même, et un frisson de gêne l'avait alors parcouru en voyant Taehyun si mal à l'aise. Lui, avait gardé son masque de marbre, comme si de rien n'était. Il se demanda bêtement si Beomgyu, lui, était au courant.

– D'accord, souffla-t-il tout simplement.

Avec Taehyun, il était toujours délicat de savoir où se trouvait la limite, aussi, il opta pour ne pas remettre le sujet sur le tapis, bien que ce dernier lui brûlât les lèvres.

Cependant, quand il s'agissait de respecter l'intimité des autres, Soobin répondait présent. Il n'avait jamais été dans sa nature de forcer le dialogue, peu importe la personne qu'il avait en face de lui. Et quand il s'agissait de Taehyun... Les choses prenaient une tout autre ampleur. Personne n'avait envie de forcer la main à Taehyun. Il savait Yeonjun assez fou pour tenter sa chance mais... Lui, n'osait pas s'y risquer. Par respect, et parce qu'il tenait à sa vie.

– Et toi, comment tu vas ?

Il voyait bien tous les efforts déployés par son ami pour essayer de faire un brin de causette. Taehyun n'était pas bien bavard, encore moins quand ils se retrouvaient que tous les deux, mais il sentait qu'il avait à cœur de rectifier ça dès qu'il en avait la moindre occasion. Il se demanda à quoi Taehyun faisait allusion, s'il faisait allusion à quelque chose en particulier tout court, ou s'il parlait des généralités de sa vie barbante de lycéen. Ou s'il parlait de ce garçon dont il soupçonnait la présence dans sa vie, sans savoir qu'il s'agissait de Yeonjun, dormant à quelques mètres de là.


Yeonjun à qui il avait bien eu du mal à résister tout à l'heure, dans la cuisine. Soobin sentit ses joues chauffer un peu en y repensant. Le geste avait été risqué, mais il ne l'avait pas regretté un seul instant. Embrasser Yeonjun ailleurs que dans l'une de leurs chambres respectives avait quelque chose de grisant. Encore plus quand ce dernier l'acceptait pleinement. Il avait initié le geste, d'un seul regard, et Yeonjun ne l'avait pas repoussé. Il en avait oublié instantanément le reste du monde, comme à chaque fois que l'autre garçon posait ses lèvres sur les siennes. Il avait éclipsé les trois autres garçons dans la salle d'à côté, la possibilité que l'un d'entre eux rentre au mauvais moment dans la cuisine... Et en avait profité, tout simplement. Avec Yeonjun, il y avait ce sentiment de « dernière fois » à chaque fois qu'ils se voyaient. L'impression désagréable que leur baiser du moment serait le dernier. Il ne parvenait pas à mettre le doigt sur la raison le poussant à penser ainsi, ni même à comprendre comment l'idée lui était venue, mais elle refusait de le lâcher.


Et sans même s'en rendre compte, un sourire timide avait élu domicile sur son visage, réchauffant les traits doux de son visage.

– Je vois, marmonna Taehyun.
– Hein ?
– Je disais : je vois.
– C-comment ça ?
– Tu souris bêtement. Tu dois être dans la niaiserie jusqu'au cou.

Soobin lâcha un rire soudain beaucoup plus détendu et ne rata pas le haussement de sourcil circonspect de Taehyun.

– M'enfin, si tu es bien et heureux, je suppose que c'est ce qui compte.

Il passa une main dans ses cheveux, un poil gêné par le regard un peu interrogateur que son ami lui portait.

– Ah bordel Taehyun, ne change jamais, ok ?

Il lui donna une grande tape dans le dos, hilare.

– Pourquoi tout le monde me sort ça..., ronchonna-t-il.
– Parce que tout le monde t'apprécie comme tu es !

Il le vit froncer légèrement les sourcils, et Soobin se douta qu'il venait de lancer un débat dans son for intérieur. C'était tout lui après tout de s'interroger sur la nature des gens et des choses, et Soobin n'avait envie de le changer pour rien au monde. Quelque part dans un coin de sa tête, il ne put s'empêcher de se demander si Taehyun savait pour Yeonjun et lui, s'il avait fini par le déduire, où comment il réagirait en l'apprenant.

– On devrait aller se coucher... Les autres vont se demander ce qu'on fiche dehors à observer les étoiles, marmonna Taehyun.
– C'est notre côté romantique ça !
– Oh mon dieu Soobin, pitié...

Il laissa échapper un rire en le voyant lever les yeux au ciel, avant de se redresser.

– Tu ne restes pas faire des vœux avec moi ? minauda-t-il.
– Arrête ça bon sang !

Son regard outré eut raison de lui et il se leva à son tour pour le suivre.

– Ne fais pas de bruit, ils dorment, lui souffla Taehyun.
– Je pensais me mettre à chanter très fort, c'est bête ça, chuchota-t-il.
– Pour quoi faire ? Pourquoi voudrais-tu chanter très fort ?
– Taehyun... c'est de l'humour, un peu d'ironie...
– Ah... je vois... Mouais.

Il dut se retenir de pouffer, et le vit se glisser sous ses draps, non loin de Beomgyu qui dormait roulé en boule. Kai avait pris la place de deux matelas, et Soobin le poussa avec douceur pour se blottir à ses côtés, entre lui et Yeonjun. Il le crut endormi, jusqu'à sentir ses doigts s'entremêler aux siens, quelques secondes plus tard. Il battit des cils pour le découvrir bel et bien éveillé, souriant dans la pénombre. Il l'imita immédiatement, sentant une chaleur rassurante se faufiler sur le bout de ses doigts et remonter le long de son bras.

Les souvenirs du baiser dans la cuisine refirent surface, et son sourire gagna en intensité, ainsi que la pression de ses doigts sur sa main. L'envie de se réfugier contre lui était grande, mais Soobin se retint. Pas ici, pas devant eux. C'était déjà suffisamment risqué tout à l'heure... Et pourtant, il lui sembla l'espace de quelques secondes que l'idée avait également traversé l'esprit de Yeonjun.


❘✶❘ ❘✶❘ ❘✶❘


Quelque chose dans le monde qui l'entourait ne tournait pas rond, et Kai le réalisa au beau milieu de sa nuit. Il rêvait et en prit pleinement conscience alors qu'il se trouvait dans cet endroit étrange, pourtant si familier. À travers ses paupières closes, il essaya de se réveiller, forçant son esprit à se déconnecter du monde étrange dans lequel il se trouvait, en vain. Quelque chose le retenait ici, sans qu'il ne puisse y faire quoi que ce soit, et il se retourna dans ses draps. Il continua de fouler ce sol en terre, recouvert d'une cendre épaisse, tout en se demandant ce qui avait bien pu le conduire ici, au milieu d'un tas de ruines et de roches. Quelque chose sous son pied craqua, et il lui sembla distinguer une grande porte de bois, fendue en deux. Sur cette dernière, un miroir brisé lui renvoya une drôle d'image de lui, plus vieille, plus fatiguée. L'impression désagréable d'être épié le poursuivit encore, mais une nouvelle fois incapable de forcer son réveil, Kai continua de progresser avec pour seul compagnon de route le bruit de son souffle bruyant. Un miaulement plaintif le força à se retourner, et il sursauta en distinguant une petite silhouette féline tapie dans l'ombre, visiblement intimidée par sa présence. Il s'approcha, une main tendue, désireux de rassurer le petit chat au poil ras, quand tout à coup, un souffle glacial le figea.

Incapable d'esquisser le moindre mouvement, il assista avec horreur à l'effritement du paysage l'entourant, et à la fuite du chat, qui s'échappa dans ce qui restait des décombres environnants. Ce fut à ce moment précis qu'une voix familière – mais qu'il se retrouva incapable d'identifier clairement – lui parvint aux oreilles. Il eut le contact d'une main sur ses épaules, avant de sentir un nouveau souffle, tout prêt de son oreille.

Ne m'oublie pas, d'accord ?

Il essaya de se retourner, tentant de percevoir à qui appartenait cette voix qui sonnait si bien à ses oreilles. Mais ses pieds restèrent englués au sol, tout comme son corps, incapable de se mouvoir comme il en avait envie. Tout en lui lui hurlait de rester ici encore un peu plus longtemps : il y avait quelque chose dans ce rêve de différent de tous ceux qu'il faisait en temps normal.

Je...

Il articula avec peine un pauvre mot, inapte d'aller au-delà. Un éclair fracassant zébra le ciel, le souffle dans sa nuque disparut, et il hurla en sentant quelque chose frôler son poignet. Le chat fuyait, la queue entre les pattes, toutes griffes sorties. Désarmé, il loucha sur le haut de sa main, comprenant qu'il venait de le griffer.



Kai se redressa sur son matelas, le front en sueur, et le souffle court. Autour de lui, les quatre autres garçons dormaient encore à poings fermés. Il se leva en silence, le cœur battant, et enfila un sweat-shirt avant de se diriger dans la cuisine à pas lents pour se servir un verre d'eau. Remarquant que le soleil commençait à peine à se lever, il se faufila sur la terrasse pour assister à ce spectacle matinal en solitaire. Il s'installa en tailleurs, et en oublia presque momentanément la douleur qu'il avait ressentie lors de son sommeil. Les images de son rêve s'étaient effacées aussi vite qu'il avait été arraché aux bras de Morphée. Tout des ruines, de la porte et du miroir brisé lui échappa en un claquement de doigts, et Kai se demanda même s'il en avait réellement rêvé.

Il avait forcé sa mémoire, dans l'espoir de se souvenir de ce qui avait bien pu agiter autant sa nuit, en vain. Toutes les images de son cauchemar s'étaient envolées, aussi vite qu'il s'était réveillé. Ce fut le bruit léger d'une porte que l'on referme avec douceur qui le tira hors de ses pensées : Beomgyu venait d'apparaître dans son champ de vision, noyé dans des habits très larges et un pull difforme.

« Bien dormi ? »

Il acquiesça en silence, et Beomgyu lui adressa un joli sourire.

« J'ai eu la même idée que toi on dirait, j'aime beaucoup observer le lever du soleil ! »
– Tu le fais souvent chez toi ? énonça-t-il en signant.
« Parfois je grimpe sur le toit, oui. La fenêtre de ma chambre qui est au-dessus de mon lit donne dessus ! »
– Tu dois avoir une très belle vue alors !

Il le vit hausser des épaules, mais sans cesser de sourire.

« Je préfère celle-ci ! »

Kai ne fut pas réellement étonné, et se contenta de lui rendre son sourire. Et alors qu'il s'apprêtait à oublier de nouveau un peu sa présence pour profiter de l'aube, Beomgyu lui tapota à nouveau l'épaule.

« Tout va bien Kai ? »
– Oui, bien sûr !

Il fronça les sourcils, légèrement perplexe.

« Je trouve que tu as l'air ailleurs depuis quelque temps. Et puis, il y a eu ce jour où tu n'as quasiment pas parlé de toute la journée quand nous étions au lycée... Je me suis inquiété, mais je n'ai pas osé demander quoi que ce soit de peur de mettre les pieds dans le tas. »

Son sourire se crispa légèrement quand il réalisa de quelle journée Beomgyu voulait parler. Évidemment, cette soirée-là ne l'avait pas laissé indifférent. Après l'accident de sa grand-mère, l'ambiance était devenue étouffante, compliquée chez lui. Sa grand-mère refusait de lui parler, de l'approcher, marmonnant qu'il n'avait voulu que sa mort, et Kai s'était retrouvé face à un mur en tentant de s'expliquer.

– Ne t'en fais pas Beomgyu, je vais très bien.

Voyant que son ami peinait à être convaincu, il tapota doucement son avant-bras avant de se confier à voix basse.

– Je vois Jiwon de temps en temps hors du lycée.

Les yeux de Beomgyu se mirent à briller un peu plus fort.

– Ça me fait vraiment du bien.
« Vous faites quoi ? »
– Oh, on va surtout voir des films. Elle adore ça, moi aussi, alors nous avons décidé d'allier notre passion commune et de ne plus aller voir des films en solitaire !

Se confier à Beomgyu lui fit un bien fou. Le garçon en face de lui avait une sincérité dans ses gestes et dans ses regards qui lui était propre. Communiquer avec Beomgyu se faisait toujours sans l'ombre d'un jugement de sa part, et Kai le savait bien. Il était de ces gens à qui l'on confiait tout et absolument n'importe quoi, sans aucune crainte d'être jugé en retour, ou de voir ses histoires fuiter un jour.

– Ça te dirait de venir avec nous l'un de ces jours ?

Sans grande surprise, Beomgyu fut touché, et acquiesça. Et soudain, avant qu'il ne puisse rajouter quoi que soit, le blond agrippa l'une de ses mains, un regard apeuré sur le visage.

« Tu t'es fait mal ? Comment tu t'es fait ça ? » signa-t-il précipitamment.

Il haussa un sourcil et, surpris, remarqua une griffure légère sur le dos de sa main. Il serra les dents par réflexe, avant de l'effleurer, les sourcils légèrement froncés.

– Je n'en ai aucune idée..., murmura-t-il.

Et Kai eut beau fouiller dans sa mémoire, jamais le souvenir de s'être coupé depuis son arrivée ne lui revint.


❘✶❘ ❘✶❘ ❘✶❘


Yeonjun faisait défiler ses photos et celles prises par les autres garçons au cours de leur week-end, le sourire aux lèvres. Il se fit le commentaire que Beomgyu avait un œil singulier, et une manière de capturer les beaux souvenirs d'une manière particulièrement touchante et simple.

– J'aime beaucoup celle-là !

C'était celle des bains chauds. Il esquissa un sourire et tourna un ou plus son écran vers Soobin, allongé à ses côtés, la tête sur ses genoux.

– Ouais, moi aussi, murmura-t-il.

Il reposa son téléphone sur la table basse devant lui, et baissa les yeux vers l'autre garçon, passant une main dans ses cheveux sombres.

– J'avoue que j'ai très envie de demander à Taehyun si la baraque est de nouveau disponible pour qu'on y aille tous les deux.

Les yeux du plus grand des garçons se mirent à briller. Les mots lui étaient sortis de la bouche tout seuls, sans qu'il ne le veuille vraiment, mais ce rêve soudain de se retrouver seul à seul avec Soobin dans un lieu pareil remua quelque chose en lui qu'il peina à identifier.

– Rien que tous les deux ? bafouilla-t-il.
– C'est ce que je viens de dire oui ?
– L'idée me plairait carrément oui, murmura Soobin.

Yeonjun le savait déjà. Il se demanda comment tourner la chose auprès de Taehyun pour que rien n'éveille ses soupçons et il esquissa un sourire encore plus grand.

– J'organiserais ça alors.

Il se pencha légèrement pour embrasser son front et le sentir frémir sous lui, les yeux clos. Soobin leva une main avant de la passer dans son cou pour le garder un peu plus longtemps contre lui, et Yeonjun se laissa faire.

– Soo'...
– Mmm ?
– Qu'est-ce que tu m'as fait hein ?

Il l'entendit pouffer et passa une main dans ses cheveux sombres tombant sur son front en pagaille. La question semblait anodine en apparence, mais Yeonjun ne cessait de se la répéter, jour après jour. Il y avait toutes ces fois où il se demandait jusqu'où tout ça irait, combien de temps cela allait-il durer. Ces jours où il se demandait s'il ne rêvait pas, tout simplement. Et ces journées plus sombres où le moral était au plus bas, où il toussait un peu plus fort que les autres fois. Une main tiède s'invita sur sa joue et il réalisa que ses yeux s'étaient humidifiés sans même s'en rendre compte. Il le laissa se redresser, et s'installer sur ses genoux, le regard légèrement dans le vide.

– Ne sois pas triste Jun...
– Je le suis pas...
– C'est souvent pourtant que tu as le regard dans le vide comme ça.
– C'est pas de ta faute Soobin, je sais que tu le penses, alors arrête.
– Alors qu'est-ce qui te rend triste comme ça ?
– Un peu de tout, les études surtout ? C'est très prenant, et je ne veux pas décevoir mes parents.

Il y avait de ça... à peine. La réalité c'était ce grand compte à rebours qui le rapprochait lentement de la fin, à chaque journée qui s'écoulait. La réalité c'était ce sourire en face de lui qu'il avait peur de voir faner, et de perdre.

La sensation des lèvres de Soobin sur les siennes le fit revenir sur terre, et il ferma les yeux, s'autorisant à plonger à cœur ouvert dans ce moment de tendresse partagée.

– Tu ne vas pas les décevoir, tu es un bon élève.
– Si tu le dis...

Il se força à sourire et Soobin lui déposa un nouveau baiser léger sur les lèvres, avant de se laisser tomber un peu plus dans ses bras. Il laissa ses paupières lourdes se fermer avec lenteur, et noua ses mains derrière le bas de son dos, relâchant son corps au maximum. La tête renversée contre le dossier du canapé, le souffle de Soobin tout près de son oreille, il força son esprit à oublier toutes les idées noires qui revenaient au grand galop. À la place ils restèrent ainsi longuement, sans rien dire de plus, profitant simplement de la présence de l'un et de l'autre.


Le baiser dans la cuisine lui revint alors en mémoire, chassant tout le reste et il sentit un sourire fin étirer ses lèvres. Il s'était senti pousser des ailes en cet instant, oubliant l'endroit où ils étaient, et la présence des trois autres garçons dans la salle d'à côté. L'embrasser ainsi avait eu quelque chose de grisant, de terriblement excitant : le baiser en avait été que plus intense.

– Tu sais, parfois je repense à la première fois où je t'ai vu, murmura Soobin.
– Et ? Tu es tombé directement sous mon charme ?

Il le sentit pouffer contre son torse, et son sourire gagna en ampleur.

– On peut dire ça comme ça ouais... J'ai tout de suite espéré que l'on se rapproche tous les deux.

Son cœur se mit à battre un peu plus vite.

– Oh, Soobin...

Souvent, dans ces moments-là, il mourrait d'envie de lui demander pourquoi lui. Qu'est-ce que Soobin avait vu chez lui qu'il n'avait pas vu chez les autres ? Qu'est-ce que Soobin lui trouvait de plus ? La question lui brûlait les lèvres, sans jamais qu'elle ne s'en échappe. Je suis désolé Soobin, tellement désolé...

– Mais regarde nous maintenant, de quoi je me plains... Je sais que je te l'ai déjà dit, mais je suis tellement heureux de t'avoir, tu sais ?

La bouche sèche, il chercha ses mots, sentit son corps se crisper et resserra ses mains derrière son dos.

– Je ne vais pas te laisser, entendit-il.

Je sais. Soobin n'était pas celui qui gâcherait quoi que ce soit. Il se redressa pour plonger son regard dans le sien, un sourire presque timide aux lèvres.

– Tu le sais ça, hein ?

Il se contenta d'acquiescer en silence. Le sourire de Soobin se mua en quelque chose de plus mutin, et il haussa un sourcil, curieux de savoir ce qu'il avait derrière la tête. La réponse ne tarda pas à venir, et il se sentit frémir en sentant ses lèvres remonter le long de son cou. Il ne trouva pas la force de râler pour la forme, et le laissa faire, tout simplement. Soobin semblait le connaître par cœur, sur le bout des doigts : il ne lui avait pas fallu longtemps pour comprendre les attentions qui le rendaient dingue. Ses mains se firent plus aventureuses, plus intrépides aussi et il laissa échapper un rire léger en le sentant effleurer ses hanches du bout des doigts.

– Arrête tu vas me rendre fou...
– Qui te dit que ce n'est pas mon but ?

Il le fit taire d'un baiser qui s'enflamma bien trop vite et lui fit grimper le rouge aux joues. Et comme à chaque fois que Soobin l'embrassait, Yeonjun ne répondait plus de rien. Son corps devenu bouillant contre le sien, il en oublia momentanément qu'ils se trouvaient dans son salon, bien loin de sa chambre dans laquelle ils se laissaient aller le plus souvent. Il n'eut pas le temps de l'en empêcher ou de protester que le haut de Soobin qu'il triturait du bout des doigts lui échappa pour atterrir sur l'accoudoir à leurs côtés. Un rire gêné lui échappa, sans qu'il n'ose le toucher à nouveau, comme à chaque fois qu'ils se retrouvaient dans ce genre de situation. Il perdait ses mots, le fil de ses pensées, absolument tout. Il n'y avait plus qu'eux, et rien qu'eux.

– Jun ?

Et alors qu'il s'apprêtait à répondre, le bruit significatif du digicode se mit à retentir dans l'entrée de l'appartement.

Merde.

Plus vite que lumière, Soobin quitta ses genoux en feu et attrapa son haut qu'il enfila maladroitement. La télécommande de la télévision lui atterrit sur les cuisses et Yeonjun l'alluma sur la première chaîne venue, mortifié par tout ce qui était en train de se passer. Il passa une main dans ses cheveux, pria pour que la rougeur sur ses joues disparaisse au plus vite et Soobin l'imita, le souffle encore court.

– Soobin mon chéri ! Je suis rentrée !

Paniqué, il vit madame Choi apparaître dans le salon, tout sourire.

– Oh, bonjour Yeonjun !
– B-bonjour madame...

Elle plissa les yeux, balaya du regard la pièce dans laquelle ils se trouvaient et esquissa un sourire amusé.

– Vous ne devriez pas travailler plutôt que de regarder ce genre de chose à la télé ?

Il cligna plusieurs fois des yeux avant de réaliser qu'ils avaient allumé la télévision sur une chaîne de dessins animés pour enfants.

– Oui maman, on avait besoin de se détendre entre deux devoirs un peu chiants...
– Pas de gros mots dans mon appartement, sifflota-t-elle en s'éloignant vers la cuisine.

Yeonjun lui lança un regard inquiet, et Soobin tâcha de lui répondre en toute discrétion que la situation était sous contrôle.

– Vous avez déjà mangé ? Je vous commande quelque chose ?
– Oh je -
– Yeonjun mange avec ses parents, le coupa Soobin, comprenant que la panique le gagnait de plus en plus vite.
– Très bien !

Et au moment où il sentit son pouls se calmer légèrement, et sa pression redescendre, madame Choi passa à nouveau sa tête dans l'encadrement de la porte.

– Mon chéri, au fait, tu t'es rhabillé à l'envers, lui lança-t-elle avec un clin d'œil.

Yeonjun crut défaillir et Soobin sembla blêmir aussitôt.

– Fais chier, marmonna-t-il.


Oui, fais chier, pensa-t-il en retour.




─ 𝐊𝐔𝐊𝐈𝐇𝐈𝐌𝐄 𝐓𝐈𝐌𝐄 ─

Et voilà la fin de ce chapitre coupé en deux hihi j'espère qu'il vous aura plu ! Fin du fluff, la semaine pro on reprend sur l'île, j'espère que vous êtes prêt.es ! En attendant, j'espère que vous allez bien, prenez soin de vous et de vos proches, à la semaine prochaine ! !

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