7
Samedi matin, Maya se leva très tôt. Elle n'avait pas réussi à dormir beaucoup avec tous les évènements de la veille. Après avoir pris son petit déjeuner et s'être habillée, elle regarda ses ailes.
Elles avaient encore grandi. Repliées dans le dos de Maya, elles lui arrivaient au niveau des hanches. Le duvet rouge orangé avait été remplacé par de petites plumes de la même couleur, et les ailes s'étaient musclées. Elle étendit ses ailes et écarta ses bras. Le bout des ailes arrivaient à ses poignets. Maya avait hâte qu'elles grandissent encore pour pouvoir voler. Elle les fit battre un peu, puis passa un sweat par-dessus. Elle avait sélectionné quelques t-shirts, fait un trou au niveau des ailes pour pouvoir les regarder et les étendre quand elle ne portait pas de sweat. Elle regarda sa montre et vit qu'il était 9h30. Soudain, elle se rua dans la chambre de ses frères, alluma la lampe et leur cria :
-Levez-vous ! Vite ! On doit être en bas dans une demi-heure !
Will, qui était au bord de son lit et qui lui tournait le dos, se retourna vers elle et tomba par terre.
-Aïe ! Qu'est-ce qu'il se passe ? On est obligés de venir ?
-Oui ! Vous savez bien qu'on va voir les deux vieilles dames.
Vingt minutes plus tard, les trois Eyriniens étaient prêts à y aller.
-On va prévenir papa et maman, annonça Maya. Vous venez ?
Elle se dirigea vers la chambre de ses parents et toqua avant d'entrer. La chambre était encore dans le noir, son père dormait et sa mère mettait ses chaussons. Celle-ci leva la tête en voyant ses trois enfants s'approcher.
-Zoé nous a invité chez elle, commença Maya, on peut y aller ?
-Will et Liam aussi sont invités ? demanda sa mère en fronçant les sourcils.
-Oui, Cloé les a adorés hier soir à la soirée ! Zoé et Louis aussi ! Mais elle encore plus parce qu'ils aiment bien faire des expériences chimiques ! Et elle aussi. Alors ils sont invités parce que tout le monde les trouve sympa.
Maya sourit et espéra que sa mère ne se rendrait pas compte que c'était un gros mensonge. Parce que tout d'abord, Cloé détestait la chimie.
-Très bien... dit sa mère qui ne devait pas être au courant. Vous revenez à quelle heure ?
-On mange chez eux et ils nous ont proposé de passer l'après-midi aussi. Donc vers 17h30.
-C'est un peu tard, tout de même.
-Bon, 16h30 alors ?
-C'est d'accord... Quand partez-vous ?
-Euh... On peut y aller maintenant ?
Sa mère la regarda un instant, puis haussa les épaules :
-Si vous voulez. A tout à l'heure, les enfants.
Maya sourit et, suivie de ses frères, se dépêcha d'y aller tout de suite avant que sa mère ne change d'avis.
*
Arrivés devant la porte de l'immeuble de Zoé, Maya et les jumeaux trouvèrent Martine, Paul et Pauline assis sur les marches du perron.
-Salut ! lança Maya en arrivant devant eux. Vous êtes là depuis longtemps ?
-Non, répondit Paul. On vient juste d'arriver.
-Vous habitez où ? demanda Will.
Paul le regarda avec étonnement : le petit garçon avait enroulé une écharpe autour de sa tête, comme un turban, et avait attaché son manteau par les manches autour de sa taille.
-Dans une maison de l'autre côté du parc, répondit Pauline. Juste à côté du collège.
Maya hocha de la tête et sortit son téléphone pour demander à Zoé ce qu'elle faisait. Elle l'avait à peine allumé que celle-ci, Cloé et Louis sortaient de l'immeuble.
-Salut tout le monde ! dit Cloé avec un grand sourire. Oh ! Il ne fait pas très chaud !
Et elle fourra son nez dans son écharpe.
-A bon ? Tu trouves ? dit Zoé qui avait seulement un pull, et non un manteau comme sa sœur.
-Oui !
Louis proposa d'y aller et tout le monde le suivit.
Les deux dames habitaient à une rue de là, dans une grande, vieille et magnifique maison. Maya passait chaque jour devant en allant au collège et s'était toujours demandé qui pouvait acheter une maison comme ça à Paris ! Car en plus de sa taille gigantesque, la maison comportait aussi un grand jardin qu'on pouvait apercevoir en regardant entre les barreaux bleus du portail.
Louis sonna à l'interphone et le portail s'ouvrit. Maya suivit les autres et traversa un sentier de cailloux blancs qui passait entre la pelouse et les arbres. Louis, qui avait refermé le portail, reprit la tête du groupe et monta les quelques marches pour arriver devant la porte. Celle-ci s'ouvrit et Maya aperçut une petite silhouette d'environ un mètre. De grandes oreilles, un gros nez, de grands yeux, de gros pieds, un corps mince à la peau violette, des petites ailes (qui avait une peau à la place des plumes) et une salopette bleu marine. Interloqués par cette apparition les uns et les autres se regardèrent à l'exception de Louis qui avait l'air de trouver ça normal.
-Bonjour Dienaar. Je te présente mes deux sœurs, et ça ce sont les familles du feu et de l'air.
Il avait fait les présentations en pointant les concernés du doigt et en se penchant légèrement.
-Les amis, voici Dienaar, le serviteur d'Hélène et de Delphine, les deux dames dont je vous ai parlé. C'est un chepsel, une créature qui vient de Eyrini et que les deux dames ont emporté avec elle. En plus des embryons, Hélène et Delphine ont emmené avec elles les chepsels qui restaient car Mark voulait tous les tuer. Ceux-ci secondent généralement les gouverneurs et ils avaient refusé de le servir.
Les huit autres se regardèrent. Ils ne s'attendaient pas à ça. D'abord des ailes, puis une drôle d'histoire, et maintenant une créature plus qu'étrange ...
Le chepsel, qui regardait ses pieds nus, releva la tête et se racla a gorge.
-Excusez-moi mais le froid entre et vous serez mieux à l'intérieur. dit-il avec sa petite voix. Madame Hélène et Madame Delphine vous attendent dans le petit salon, suivez-moi s'il vous plait.
Il se retourna et tout le monde le suivit. Ils passèrent par plusieurs couloirs et arrivèrent dans un salon qui n'avait rien de petit. Il était deux fois plus grand que celui de Maya. Les meubles, les tapis et les rideaux avaient l'air de sortir d'un palais. Au fond, trois canapés rouges entouraient une table basse où étaient servis des gâteaux, des verres et des bouteilles. Deux vieilles femmes en robe à fleurs, l'une verte et l'autre bleue, étaient assises et se faisaient servir le thé par un autre chepsel, qui devait être une fille vu qu'elle portait une sorte de robe bleu clair au lieu d'une salopette et qu'elle avait l'air d'avoir un nez, des oreilles et des pieds un peu moins gros que Dienaar. Les deux dames avaient des cheveux blanc en chignon mais n'avaient pas l'air très vieilles à part ça. Quand le petit groupe entra dans le salon, les deux dames relevèrent la tête et les saluèrent d'un sourire. Ils s'assirent sur les deux autres canapés. Maya se retrouva entre Cloé et Martine.
-Bienvenue, commença celle qui avait une robe verte. Je m'appelle Delphine.
-Et moi c'est Hélène, dit la dame à la robe bleue. Je pense que si vous êtes ici, c'est que Louis vous a relaté votre origine.
-Oui oui... répondirent-ils en même temps.
Après qu'elles leur eurent demandé, ils leur expliquèrent comment ils s'étaient trouvés, puis comment ils s'étaient rencontrés. Les deux dames les écoutaient attentivement.
-Eh bien tout ça est très intéressant ! dit Hélène après qu'ils eurent fini. Mais revenons à ce pourquoi vous êtes là !
-Oui ! continua Delphine. Nous sommes là pour vous aider. Mais pour l'instant nous allons vous présenter les chepsels que nous avons réussi à sauver. Nous leur avons promis de vous présenter à eux lorsque vous seriez là.
Elle se retourna vers la chepsel qui lui servait le thé avant que le petit groupe n'arrive et lui dit :
- Fornuisse, préviens tous les chepsels que leur présence est requise.
La dénommée Fornuisse ferma les yeux et posa ses doigt sur ses tempes.
-Les chepsels ont de nombreux pouvoirs, expliqua Hélène. Ils peuvent se rendre invisibles, ressentir les intentions des gens, parler par télépathie... Et encore bien d'autres pouvoirs très utiles.
Maya fut aussi étonnée que les autres. Surtout quand elle vit arriver une quinzaine de chepsels dans le salon. Ils se mirent en ligne à côté d'eux et les regardèrent avec curiosité. Dienaar et Fornuisse les rejoignirent.
-Voilà quatorze des quinze que nous avons réussi à sauver. Et voilà Maan, la quinzième, qui arrive avec les trois petits qui sont nés ici.
Maya vit une chepsel entrer dans le salon avec un minuscule chepsel de la taille d'une main dans les bras, un enfant qui devait mesurer cinquante centimètres qui lui tenait la main qui tenait lui même la main à un troisième plus petit que lui qui devait mesurer trente centimètres. Ils se placèrent tous les quatre à coté de leurs semblables.
-Maan est la chepsel responsable des petits, dit Hélène. Voici Grote, le plus grand. Il a quatre ans. Le deuxième qui a bientôt deux ans s'appelle Dun. Et la dernière qui a sept mois s'appelle Kleine.
-Qui sont leurs parents ? demanda Cloé en regardant le bébé.
-La reproduction des chepsels est encore plus compliquée que celle des Eyriniens. C'est leurs âmes qui créent les bébés. Si deux âmes de deux chepsels se rencontrent et qu'elles peuvent se compléter, ce qui est rare, et si c'est un bon moment, les âmes se déchirent quelques petits morceaux et chaque morceau qui est délaissé s'unit avec un morceau de l'autre pour former une autre âme. La petite âme se crée un corps et ce corps apparaît dans les mains de la mère. On peut savoir qui est le père car quand cette rencontre se produit, les deux chepsels sont entourés d'un halo de lumière pendant une dizaine de secondes, puis ce halo disparaît et laisse les bébés dans les mains de la mère. Des bébés ne naissent pas à chaque fois que les parents se recroisent. Cela ne se produit qu'une fois. Mais ça peut se reproduire avec un autre chepsel. Sur Eyrini, les chepsels ont souvent une portée de deux à quatre bébés en même temps. Jamais un tout seul. Mais sur Terre, il semblerait qu'un seul ne naisse.
Maya essaya de s'imaginer un peu comment cela pouvait se produire, mais elle abandonna vite, c'était trop compliqué.
-Pour revenir à ta question, reprit Hélène, les parents de Grote sont Baanach et Roalia, dit-elle en montrant deux chesels côte à côte. Voici Minaa la mère de Dun et son père est Dienaar. Et enfin, voici le père de Kleine, Kaanoh et sa mère n'est autre que Maan.
-Je vous préviens tout de suite ! dit Paul. Je ne retiendrai jamais tous ces prénoms.
-Ne t'en fais pas, tu finiras par les connaître, fit Delphine. Comme je le disais avant, ou j'allais le dire, nous vous apprendrons ce que vous devez savoir sur vos pouvoirs quand vous aurez retrouvé la quatrième famille. A ce moment-là, on vous expliquera aussi votre mission.
-Mission ? dit Maya en fronçant les sourcils. Je ne comprends pas, on n'est pas censés juste aller à Eyrini.
-Oui, mais là-bas vous devrez reprendre le pouvoir à cette ordure de Mark ! Mais auparavant il faudra trouver l'entrée de Eyrini, c'est cela votre première mission.
-Vous ne savez pas où elle est ! s'etonna Cloé. Mais vous êtes arrivées où sur Terre ? C'est forcément à cet endroit !
-Le portail n'a qu'un sens. Quand on le prend, on peut se retrouver n'importe où sur la planète. C'est pour cela que nous ne savons pas où se trouve celui qui nous envoie sur Eyrini.
-On est dans la mouise ... fit Zoé en faisant la grimace.
-Mais avant d'effectuer cette première mission, dit Hélène, il faut retrouver la famille de l'eau et nous vous confions cette tâche.
-C'est comme si c'était fait ! s'exclama Louis avec ironie. On ne les trouvera sans doute jamais. Ils ont dû déménager loin, très loin !
-Je t'ai déjà dit qu'on a une chance de les retrouver si tu nous laisses faire ! lui chuchota Will à l'oreille, assez fort pour que les autres puissent l'entendre.
-J'ai dit non ! Je refuse de vous laisser faire n'importe quoi sur mon ordinateur !
-Tu devrais les laisser faire !
Louis se retourna vers Maya.
-Pourquoi ?
-Parce que s'il y a des personnes qui peuvent trouver la moindre information sur internet, ce sont mes frères. Ils trouvent tout ce qu'ils veulent dès qu'ils ont un ordinateur sous la main.
Tout le monde regarda Louis qui n'avait pas l'air convaincu.
-De toute façon c'est notre seule chance... dit Zoé à son frère.
Louis ne répondit pas.
-Je prends ça pour un oui. Allez ! On y va et on se met tout de suite au travail ! annonça Zoé en se levant.
-Une petite minute ! la coupa Hélène. Pour vous aider, nous allons vous donner la feuille que j'ai fait remplir à la femme qui s'est fait implanter l'embryon, dit-elle en la donnant à Pauline qui était assise à côté d'elle. Et ensuite, j'aimerais que vous héritiez dès à présent de votre chepsel ! Comme Louis a dû vous expliquer, les chepsels sont les serviteurs et amis des gouverneurs. Chacun en avait au moins un. Les chepsels peuvent d'instinct savoir quelle personne choisir comme maître. Il arrive que des non-gouverneurs soient choisis mais cela est très rare. Cependant un gouverneur peut également en posséder plusieurs qui lui sont fidèles. Les chepsels qui servent le même maître ont souvent des âmes qui se complètent et donc il y a souvent des bébés qui naissent entre les chepsels d'une même personne. Les bébés servent souvent la même personne que leurs parents ou la progéniture de cette personne. De plus, les chepsels vivent trois à quatre fois plus longtemps que les Eyrini. Donc environ neuf cents à mille ans, du coup ils continuent le plus souvent de servir dans la même famille : un enfant, un petit-enfant, un arrière petit-enfant... Il faut juste qu'il ait un lien de parenté assez fort avec son maitre, avant que celui-ci soit décédé bien sûr.
-Mais bon, reprit Delphine, il est temps que tous ces chepsels qui nous servaient en attendant de vous rencontrer vous servent.
-Euh... On n'attend pas l'autre famille ? demanda Cloé.
-C'est inutile, il y aura bien des chepsels qui ne vous sont pas destinés. Ils le seront sans doute pour les autres.
Comme l'avaient demandé Hélène et Delphine, les jeunes Eyriniens restèrent manger et faire leurs recherches pendant toute l'après-midi chez elles. Il fallait laisser le temps aux chepsels de les connaître un peu. Ceux-là s'étaient rendus invisibles et Maya et ses amis ne pouvaient pas savoir que les chepsels les observaient et sentaient leurs sentiments et leurs caractères.
-Vous avez trouvé quelque chose ? demanda Maya à ses frères.
-Je te parie ce que tu veux qu'ils ne trouveront rien ! dit Louis.
-Pari tenu ! s'exclama Maya. Celui qui perd devra commander des pizzas pour tout le monde à la prochaine réunion !
-Ok !
Et ils se tapèrent dans la main pour sceller le pari. Aussitôt après Liam poussa un cri de triomphe.
-J'ai trouvé quelque chose !
-Quoi ? demanda Martine en s'approchant.
-J'ai trouvé un blog, un certain Felix a eu d'énormes bosses sur le dos, sans doute en se cognant en faisant de l'escalade. Il demandait si c'était normal que ça le démange. Des gens lui ont recommandé une certaine crème au nom imprononçable. Il y a quelques jours, il a demandé si quelqu'un croyait aux fées parce que lui commençait à y croire.
-Les gens ont répondu quoi ? dit Paul.
-Ils ont répondu qu'il dérayait. Et il leur a rétorqué qu'il avait des preuves. Les gens ont répondu que c'était n'importe quoi, sauf une fille nommée Olivia qui a dit que son grand frère ne disait pas de bêtises. Elle a ajouté qu'elle était une fée et que son pouvoir c'était de reconnaître les gens qui sont aussi bêtes que leur pieds et qu'elle les détectait par centaine derrière les pseudos qui avaient envoyé tous ces messages. Ils sont forts ! Ils ont réussi à faire deviner qu'ils avaient des ailes au cas où quelqu'un les chercherait mais en même temps on ne peut deviner qu'il y a de la vérité dans cette blague qu'en sachant que les gens ailés existent.
-Vérifie quand même si Olivia a un frère jumeau. Et s'ils sont nés à Paris, dit Maya.
-Et aussi si leur nom de famille est Bichon et que leur mère s'appelle Marie, ajouta Pauline en regardant la feuille que les deux dames leur avaient donnée.
Liam rédigea un message et l'envoya.
-Voila ! Maintenant il faut attendre qu'un des deux réponde.
-Louis, t'as perdu ton pari ! annonça Will. J'ai fait des recherches et j'ai trouvé que Marie Bichon, enseignante dans un lycée de Montpellier et femme du peintre Adrien Bichon, a trois enfants : Félix et deux jumeaux, Olivia et Théo. Félix est né à Paris et les deux autres à Montpellier juste après leur aménagement.
-Mais comment t'as trouvé tout ça! s'étonna Louis.
-Mystère, mystère... se contenta de repondre Will en souriant à pleine dents. Un génie ne révèle jamais ses secrets...
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