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La rue était encore pleine de voitures, de collégiens qui rentraient chez eux et de touristes qui prenaient en photos tout ce qu'ils trouvaient sur leur passage, comme si la moindre affiche annonçant l'arrivée d'un cirque était magnifique sous prétexte qu'on était à Paris.

Maya se détourna de la fenêtre et regarda sa chambre. Il y avait un grand lit rouge collé au mur, une armoire avec une glace sur chacune des deux portes, un bureau bien rangé et une petite table de chevet. Les murs étaient blancs et un grand tapi orange était déroulé sur la quasi-totalité du sol.

D'habitude Maya aimait bien regarder les gens qui passaient dans la rue, cela l'occupait et ne l'avait jamais ennuyé. Pourtant, aujourd'hui, regarder toutes ces personnes qui avaient un but et qui savaient où aller ne l'amusait pas. Elle vérifia pour la troisième fois en une heure que tous ses devoirs étaient finis et qu'il ne lui en restait plus à faire pour les semaines à venir. Et, après un temps d'hésitation, elle se dirigea vers la cuisine pour laisser un mot à ses deux petits frères au cas où ils rentrent avant elle. Maya enfila ensuite son manteau, prit sa clé, et sortit de l'appartement. Elle se dirigea vers le petit escalier qui menait sur le toit de l'immeuble, et ouvrit la porte qui donnait sur l'extérieur.

Dès qu'elle s'ennuyait ou qu'elle était triste, Maya venait sur le toit où était installée une grande serre, puis grimpait dans un arbre que la concierge avait réussi à planter et à faire grandir. Il n'était pas bien haut, mais avait de nombreuses branches et Maya aimait beaucoup y grimper. Elle s'installait toujours sur sa branche préférée, celle qui était la plus haute et d'où on avait une vue magnifique sur, d'un côté le parc et de l'autre la rue et une rangée d'immeubles haussmanniens. Elle y était allée tellement de fois que la branche avait fini par prendre une forme courbée et cela faisait un excellent perchoir. Comme à son habitude, Maya se dirigea vers l'arbre et monta jusqu'à sa branche en fermant les yeux. C'était un défi, que lui avait lancé son frère Will, et qu'elle avait gagné facilement car ses bras et ses jambes connaissaient pas cœur le chemin. Elle avait gardé cette habitude car cela lui donnait une sensation de risque et elle aimait bien sentir les branches qui l'empêchaient de tomber. Une fois, son père, qui l'avait vue faire, lui avait demandé quelle sensation exactement cela lui procurait, parce qu'il ne voyait pas pourquoi on se mettrait volontairement en danger en grimpant dans un arbre les yeux fermés. Elle n'avait pas su l'expliquer.

Une fois perchée sur sa branche, Maya ouvrit un livre et commença à le lire. Après quelques minutes, son téléphone sonna. Elle le sortit de sa poche en veillant à ce qu'il ne tombe pas et vit le numéro de sa meilleur amie s'afficher. Elle décrocha : « Allô ? »

-Salut Maya ! Je te vois !

Maya se tourna vers l'immeuble en face du sien et vit la fenêtre de son amie s'ouvrir. Zoé, son téléphone à l'oreille, lui fit un grand geste de la main.

-Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda Maya. Tu n'es pas obligée de m'appeler à chaque fois que tu me vois par ta fenêtre.

-Oui, je sais ! Je t'appelle juste pour te dire que tes deux frères viennent de rentrer dans ton immeuble. Ils ont l'air en colère !

-Oh non ! J'y vais tout de suite ! Je raccroche.

Maya, habituée aux colères de ses frères, savait très bien qu'il fallait absolument essayer de les calmer. Les deux jumeaux s'énervaient facilement, et quand ils laissaient leur colère les envahir, ils étaient capables de casser n'importe quoi ! La dernière fois qu'ils n'avaient pas été calmés à temps, ils avaient fracassé le vase de l'entrée en laissant l'eau et les fleurs se répandre sur le sol, déchiré le rideau du dressing, et balancé par la fenêtre une lampe avant qu'on ne réussisse à les arrêter. Cela s'était passé deux ans auparavant et Maya avait dû agir à chaque fois pour qu'une telle pagaille ne se reproduise pas.

Elle arriva devant la porte de son appartement au moment où ses deux frères débouchaient dans le couloir. En la voyant, ils se mirent à hurler :

-Madame Bourdeau nous a encore punis parce qu'on n'a pas voulu danser en sport ! s'écria Will devant le regard interrogatif de sa grande sœur. 

-On devait faire des roues et des pirouettes ! continua Liam. Meilleurs moyen pour se tordre le cou et tomber sur la tête !

Les prénoms de ses frères avaient été trouvés le jour de leur naissance, leurs parents n'ayant jamais voulu savoir si le bébé allait être une fille ou un garçon. Ils voulaient la surprise, le prénom de fille qu'ils avaient retenu était Camille et celui de garçon William. Le problème fut que ce n'était pas un bébé mais deux, et garçons. Les médecins avaient tenu également secret le nombre d'enfants. Comme les deux parents se disputaient sur le nom du deuxième, Maya, alors âgée de quatre ans, avait résolu le problème : le prénom William avait été coupé en deux pour donner Will et Liam.

-Je pense... commença Maya, que votre maîtresse est un peu sévère mais c'est vrai que vous étiez en faute. Vous auriez pu essayer.

-J'ai trop envie de casser quelque chose ! dit Liam en tournant sur lui-même à toute vitesse.

-Pareil ! s'écrie à son tour son frère jumeau. Ça fait trop longtemps qu'on n'a pas tapé sur quelque chose !

-A ce sujet, dit Maya, j'ai quelque chose qui va vous aider !

Après leur avoir fait promettre de ne rien casser, Maya ouvrit la porte et les emmena dans leur chambre. La pièce était plus grande que celle de Maya, les murs étaient bleus et il y avait deux lits, deux étagères remplies de jouets, un placard et un grand bureau. Maya ouvrit le placard et sortit deux punchingballs. 

 –Et voilà ! Comme ça, quand vous êtes énervés, vous les sortez et vous tapez dessus au lieu de tout casser! C'est papa qui les a acheté ce matin.

Les jumeaux trouvèrent l'idée très bonne et commencèrent à se défouler sur les punchingballs dès que Maya sortit de la chambre. Mais à peine eut-elle fait trois pas qu'une douleur la saisit et la jeta à terre. Quelques secondes plus tard ce fut terminé mais une légère démangeaison persista entre ses omoplates.

Maya se releva et alla dans sa chambre. Elle enleva son pull et son t-shirt et regarda son dos dans la glace. Elle vit deux grosses bosses un peu ovale, une de chaque côté de sa colonne vertébrale, entre celle-ci et le bas des omoplates. La veille, Maya avait remarqué au même emplacement des sortes de bleus, elle pensait qu'elle s'était juste cogné quelque part mais maintenant, elle était sûr de ne pas s'être cogné le dos sans s'en rendre compte au point d'avoir des bosses. Un peu inquiète, elle remit son t-shirt et, comme tous les vendredis soir, alla à la pizzeria pour acheter trois pizzas. Depuis que Maya avait l'âge de pouvoir garder ses deux frères, ses parents allaient manger au restaurant le vendredi soir ensemble dès qu'ils avaient fini de travailler et leurs trois enfants mangeaient donc entre eux. Les parents leur laissaient de l'argent sur la table pour que Maya puisse aller acheter des pizzas, et rentraient très tard.

Quand elle rentra chez elle, Maya déposa les boîtes sur la table et appela ses frères. Ils arrivèrent en courant et se précipitèrent sur les pizzas.

-Tu as interdiction de rentrer dans notre chambre ! commença Will après dix minutes de silence.

-Pourquoi ?

-Parce que demain c'est ton anniversaire et on emballe ton cadeau ! expliqua Liam en prenant une nouvelle part. J'adore cette pizza !

Maya n'osa pas imaginer ce que pouvait être le cadeau préparé par ses frères. L'année précédente, ils lui avaient offert une bougie qui diffusait une odeur affreuse quand on l'allumait. Deux ans plut tôt, c'était un fromage qu'ils avaient ramené de leur voyage scolaire et qui avait séjourné toute une semaine dans leur valise... Du ballon Mickey qui était trop gonflé et qui avait éclaté au contact du sol jusqu'aux statues de pâte à sel pas cuites et qui s'étaient collées à la table pour ne pas se décrocher avant d'être cassées, tous ces cadeaux avaient été un désastre.

-Ne t'en fais pas ! dit Liam. Cette fois-ci ce ne sera pas une catastrophe !

Les pizzas furent vite terminées et Maya alla dans sa chambre, laissant les jumeaux s'occuper de son cadeau. A l'exception de ces cadeaux, ses anniversaires étaient toujours tranquilles : Zoé venait toute la journée, ses parents passaient la matinée chez sa grand-mère paternelle qui habitait le quartier où ils entreposaient les cadeaux, et revenaient déjeuner avec elle. Souvent, Zoé restait dormir et elles faisaient la fête toute la soirée. Maya sourit en pensant au lendemain avec une pointe de regret car son grand-père maternel ne pourrait pas venir à cause d'un voyage d'affaires. Elle espéra qu'il reviendrait bientôt car lui saurait quoi faire pour ses bosses : il était herboriste et médecin. Elle espéra aussi que les deux bosses allaient dégonfler pendant la nuit car elles lui faisaient de plus en plus mal.

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Bien le bonjour à vous !
Ceci est l'une de mes deux premières histoires sur wattpad, postées en 2017, donc autant dire que mon style a beaucoup évolué depuis : si vous continuez de lire, j'espère donc que l'histoire en elle-même vous plaira et que le style ne sera pas trop simple à votre goût (je n'ai pas eu le temps de la réécrire)  :)
Bonne lecture !

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