La dernière bataille (partie 2)

ELENA

Mon cœur battait si fort que je commençai à douter de la résistance de mes artères. J'avançai prudemment, regardant de tous les côtés afin de savoir si j'étais suivie, visée par un tireur posté sur le toit du bâtiment ou n'importe quel autre danger potentiel qui pourrait anéantir mon plan.

C'est à cet instant que je les vis, tous les deux sortant des hautes herbes, non armés et complètement à découvert. Oh mon dieu mais que faisaient-ils ici ? Je me précipitai, avec le plus de discrétion possible, vers l'endroit où ils se trouvaient. Il fallait que je les arrête et je n'eus pas assez de temps pour réfléchir à une autre option : je me jetai sur l'un d'eux pour le plaquer au sol et lui couvrit la bouche de ma main pour l'empêcher de hurler.

Le regard de Princeton, d'abord empreint de rage et de colère, se détendit, puis finit par s'adoucir quand il comprit que ce n'était que moi. Je fis un signe silencieux à Jacob pour les inviter à s'éloigner un peu avec moi. Les deux jeunes hommes se regardèrent interloqués et finir par marcher dans mes pas. Quand nous fûmes cachés et assez éloignés pour que l'on n'entende pas notre conversation, je les interrogeai avec vivacité :

- Qu'est-ce que vous faites ici ? Où est Sacha ? Comment tu t'en es sorti Jacob et qu'est-ce que c'est que ce sang que tu as sur toi Princeton ? Comment va Bryan ?

Ce fut ma dernière question qui sembla jeter un froid autour de nous, comme si je leur avais tous les deux donner un immense coup de poing dans l'estomac. Leur visage était tourné vers le sol et ce fut Princeton qui releva en premier les yeux vers moi :

- Bryan est mort.

Ce furent trois petits mots qui eurent l'effet d'une tornade. Je savais à quel point le frère de Princeton comptait pour lui et je connaissais aussi l'histoire de sa famille. J'avais le cœur brisé pour cet homme et je n'osai imaginer la souffrance qu'il était en train d'endurer à cet instant. Il réclamait sa vengeance et rien que pour cela je me sentis missionnée de les protéger tous les deux, il n'y avait rien de pire que d'agir sur un coup de tête dans ce genre de situation. Si la stratégie n'était pas mûrement réfléchie, on courrait à sa perte.

- Je suis désolée...

Je repris mon souffle tant bien que mal afin de les briefer et de les empêcher de commettre l'irréparable :

- Mais vous devez rester en dehors de tout ça. Vous n'êtes pas armés, ni entraînés et je ne veux pas voir votre sang se déverser sur le sol de cet entrepôt. Alors, vous allez gentiment rebrousser chemin et vous cacher.

- Tu ne peux pas me demander ça Elena.

- À moi non plus. J'ai vu Bryan mourir de mes propres yeux et je peux te dire que je suis d'accord avec Princeton sur ce coup. Je suis loin d'être une « tête brûlée » mais là, c'est trop...

Quand je fixai mes yeux dans le regard des deux jeunes hommes que j'avais en face de moi, je pus y lire de la détermination mais aussi une haine farouche envers la vie, envers le destin mais aussi envers Irina Arazov. Quelles étaient mes options ? Les laisser se jeter dans la gueule du loup en espérant que, par miracle, les balles ne les atteignent pas ? Leur donner une arme alors que je savais pertinemment qu'ils ne sauraient pas s'en servir ? Je ne pouvais décemment pas les laisser entrer sans défense, c'était du suicide. Je soupirais bruyamment et réfléchis à un plan d'attaque qui n'impliquait plus une personne et une aide auxiliaire, mais trois combattants et un pauvre adolescent qui attendait qu'on lui donne le signal pour agir. Je sortis le pistolet mitrailleur de mon holster et le tendit à Princeton qui le prit sans la moindre hésitation dans le regard. Je détachai une grenade et un couteau de chasse de ma ceinture de combat pour les donner à Jacob.

- Bon, les choses vont se complexifier. Je sais que ne vais pas pouvoir vous convaincre de faire machine arrière, alors voilà ce que je vous propose : soit vous suivez mon plan et vous avez une chance de vous en sortir, aussi minime soit-elle, soit vous foncez dans le tas, tête baissée, et donc autant me dire ce que vous voulez mettre comme épitaphe sur votre tombe tout de suite.

- On te suit.

Je sentis dans les yeux de Princeton qu'il m'accordait toute sa confiance et c'était la réaction que j'attendais pour continuer dans cette voie.

- Ok. Alors, Jacob tu vas te poster juste dernière moi et Princeton tu fermeras la marche. Quand j'ouvrirai la porte, ce sera Jacob qui lancera le premier assaut grâce à la grenade. N'oublie pas qu'il faut que tu la lances sur le côté gauche, c'est l'endroit où ne sont pas les otages mais aussi là où se situent la plupart des soldats. Ensuite, ce sera à mon tour de rentrer. Je m'assurerai d'en tuer le plus possible pour vous laisser de l'avance. Princeton, tu te dirigeras vers Vera et tu tueras le garde qui la tient en joug. N'hésite pas, même pas un dixième de seconde. Toi, Jacob, tu fonces vers la porte rouge qui est au fond de l'entrepôt, si tu vois un morceau de papier dépasser du seuil, tu l'ouvres et tu prends le sac qui se trouve juste derrière. Ensuite, une fois Vera récupérée, je nous couvre jusqu'au couloir et là... Il va falloir courir parce que votre vie en dépendra.

Les deux garçons m'avaient écouté attentivement sans m'interrompre et étrangement je me sentis soulagée de prendre ce rôle : la directrice des opérations. Cela me donnait matière à réfléchir et empêchait mon cerveau de tourner en boucle.

- Est-ce que vous avez absolument tout retenu ?

- Oui.

- Oui.

- Bien, alors en route parce que le temps tourne et que l'on n'a vraiment pas le temps de discuter une seconde de plus.

Armée de mon M-16 je fis signe aux deux apprentis de décoller. Ils ne tremblaient pas et aucun doute n'envahissait leur regard, cela me rassura en tant que guerrière, mais je m'inquiétais pour leur état mental... Princeton était loin d'être violent, encore moins Jacob, qui d'ailleurs ne bégayait plus du tout, alors, les voir s'investir dans une intervention aussi musclée, me fit froid dans le dos pendant un court instant.

Quand Jacob fut prêt, j'ouvris la porte délicatement pour laisser le jeune homme glisser son poignet, armé de la grenade. Quand il la lança, nous reculâmes et attendîmes le bruit assourdissant. L'explosion fut violente et un morceau du mur de l'entrepôt s'effondra sous le souffle. Parfait : une entrée supplémentaire. Je vis Jacob courir pendant que les soldats étaient déboussolés par l'assaut surprise. C'est à ce moment que je choisis de tirer, j'avais repéré mon père qui avait profité de l'attaque pour échapper à ses mutineurs. Décidant de m'occuper de son cas plus tard, je visais les soldats qui tentaient d'abattre Jacob et me postai dos à Vera et ses ravisseurs. Les coups partirent et je fus ravie de constater que mes années d'entraînement au tir ne s'étaient pas perdues. Mes cibles tombèrent les unes après les autres, comme des poupées de bois à la fête foraine. Ils reculaient afin d'aller se réfugier derrière des caisses pour éviter mes tirs et recharger.

Il fallait courir maintenant car je vis que Jacob avait récupéré le sac et attendait près de l'escalier menant au couloir, mais quand je me retournai, je vis que Princeton était tenu en joug. Mes yeux s'accoutumèrent à la fumée dégagée par les tirs et encore une fois, mon pire cauchemar refit surface : Irina avait réussi à trouver un moyen de venir jusqu'ici et elle tenait en otage Princeton, Vera, Gordon et Diana.

Irina et son sourire de vainqueur me fit remonter un goût de bile dans la bouche. La vie était tellement injuste. Cela valait pour elle à une certaine époque mais elle avait à présent perdu le droit de se plaindre.

- Coucou petite sœur ! Je t'ai manqué ?

Je poussai un cri de rage. Comment osait-elle se foutre ouvertement de ma gueule ! Jamais je n'avais ressenti un tel besoin de tuer quelqu'un, il fallait que je l'abatte, quel qu'en soit le prix. Mais c'est là que mes yeux se posèrent sur les otages. D'abord Vera, qui m'avait toujours soutenu dans les pires moments de ma vie et m'avait offert son amour, puis Princeton qui avait su croire en moi et avait su mettre sa vie entre mes mains, et enfin Diana et Gordon, qui avaient protégé ma fille au péril de leur vie. Non... je n'étais pas elle... Je n'étais pas comme Irina et je refusais de me laisser envahir parce ce qui avait poussé cette femme à devenir un monstre sanguinaire. Si je devais mourir, je voulais me souvenir d'avoir partagé des moments d'amour et d'amitié avec des personnes qui comptaient pour moi. Ma fille était en sécurité et allait avoir une belle vie, il fallait que je baisse les armes et que je laisse le destin décider. 

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