Chapitre 2
Hermione arpentait le Chemin de Traverse pour faire quelques emplettes. Elle sortait de chez Gringotts où elle avait déposé sa « paie » de la semaine, et même si le Gobelin qui s'occupait d'elle à chaque fois savait quel travail elle faisait et le déplorait volontiers, il n'avait jamais fait une quelconque remarque déplacée et tenait sa langue envers ses collègues et ses autres clients.
Poussant la porte d'une boutique de vêtements, la jeune sorcière sourit à la vendeuse qui venait vers elle.
— Entrez, entrez, Jean ! dit-elle. J'ai reçu des nouvelles choses, je voulais vous les montrer avant de les mettre en rayon !
Hermione esquissa un sourire. Il n'y avait personne dans la boutique, c'était encore tôt, tout juste neuf heures du matin, et il n'y avait donc aucune crainte que quelqu'un la reconnaisse et ne fasse un lien quelconque avec ce que la vendeuse allait lui montrer, à savoir des sous-vêtements pour le moins affriolants...
En observant l'étalage sur le portant, Hermione se mordit la lèvre. Elle caressa une dentelle, puis une étoffe de satin, et soupira ensuite. Elle se souvint du jour où l'une des filles de la Rue Montier, une ruelle « hot » du quartier malfamé du Chemin de Traverse, lui avaient fait essayer un de ces dessous pour la première fois. Elle qui n'avait jamais porté autre chose que des dessous en coton depuis qu'elle était en âge de les porter, la première fois qu'elle avait revêtu une guêpière rouge à balconnet en dentelle avec porte-jarretelles, elle avait été aussi rouge que son costume !
Aujourd'hui, cela ne lui faisait plus ni chaud ni froid. Au travail, elle portait volontiers les tenues préférées de ses clients, et en dehors du travail, ses sous-vêtements en coton confortables, comme présentement.
— Vous voulez en essayer ? demanda la vendeuse.
Hermione lui adressa un sourire puis secoua la tête.
— Je n'ai pas de nouveau client, dit-elle. Peut-être une prochaine fois.
La vendeuse sourit et hocha la tête. Hermione s'éloigna ensuite dans le magasin et s'acheta une jupe en jean, un chemisier en satin crème avec un gros nœud noir au col et deux petits aux manches, et plusieurs paires de collants fins.
— Nous sommes à trente Gallions tout rond.
Hermione tendit les pièces et la vendeuse la remercia en poussant le sac en papier vers elle. La jeune femme retourna ensuite dans la rue et réduisit ses emplettes dans son sac à main, ce sac sans fond qui leur avait peut-être sauvé la vie, à Ron, Harry et elle, pendant qu'ils battaient la campagne anglaise à la recherche des Horcruxes de Voldemort...
Avec un soupir, Hermione prit la direction du parc situé derrière Gringotts et s'acheta un café et un cookie en chemin pour les déguster sur un banc, tranquillement, en observant des mamies qui donnaient des graines aux pigeons...
Depuis une semaine, les souvenirs affluaient à son esprit sans qu'elle ne puisse rien y faire. Chaque situation était bonne pour faire remonter un souvenir et cela la torturait. Elle avait fait tout ce qui était humainement possible pour oublier sa vie d'avant et tenter de se complaire dans l'actuelle, mais à part un Oubliette jeté sur son propre reflet, elle savait que rien ne pourrait obliger son cerveau à se taire, et encore moins en ce moment, où partout sur toutes les façades des maisons, jaillissaient des drapeaux violets et des slogans pour commémorer la fin du règne de Voldemort...
Assise sur un banc en train de grignoter le reste de son cookie, offrant les miettes aux pigeons, Hermione regardait autour d'elle sans vraiment regarder. Elle observait des enfants jouer dans un bac à sable quand quelque attira son œil sur la droite et elle tourna la tête.
Elle fronça les sourcils en voyant la silhouette enveloppée d'une cape noire qui effleurait le sol. La longue chevelure blond platine lui fit immédiatement remonter des souvenirs et elle se redressa.
Drago ? songea-t-elle. Non... Il est trop grand... C'est Lucius !
La jeune femme déglutit difficilement. Lucius Malefoy était censé être à Azkaban, c'était impossible qu'il erre ici, dans le parc de Gringotts !
Quand l'homme s'engouffra dans la petite église de type victorien qui marquait la limite du Chemin de Traverse pour ce côté, la jeune femme jeta le reste de son gâteau aux oiseaux et traversa le parc à grandes enjambées. Elle devait en avoir le cœur net.
Lucius Malefoy frissonna quand le froid de l'église coula sur lui. Il regarda autour de lui un moment, le temps que ses yeux s'habituent à la pénombre, puis il choisit un banc et alla s'asseoir sans un bruit.
Les sorciers n'avaient aucune religion, en règle générale, surtout ceux qui ne fréquentaient pas le monde Moldu, comme les Malefoy, mais parfois, pour réfléchir au calme, une église était toute indiquée. Personne pour vous regarder de travers et encore moins pour déranger ou vous en chasser !
Hermione s'arrêta devant l'église et leva son visage vers le sommet du clocher. Elle regarda ensuite vers la porte ouverte et déglutit. Elle n'avait pas le droit d'entrer dans ce lieu sacré, elle, la prostituée de bas étage...
Prostituée...
Ce mot sonnait comme une insulte aux oreilles de la jeune femme, mais elle n'avait pas eu le choix... Incapable de se remettre de l'amnésie qu'elle avait volontairement infligée à ses parents, et surtout, incapable d'être d'un quelconque soutient pour ses deux meilleurs amis, tous les trois abandonnés à leur sort par le Ministère, elle avait sombré dans la dépression la plus profonde, celle qui pousse aux actes les plus irréversibles. Mais elle n'avait jamais essayé d'intenter à sa vie, elle n'en avait pas le courage, même si parfois, une pensée noire traversait son esprit. Elle la chassait alors rapidement et oubliait tous ses souvenirs avec un bon verre d'alcool et un ou deux clients...
Regardant la façade de l'église, la jeune femme grimaça. Si elle entrait, elle serait immédiatement repérée par un sortilège spécial qui empêchait les habitants de l'Allée des Embrumes de venir « polluer » les gens normaux du Chemin de Traverse et elle n'avait aucune envie qu'on la calcule comme étant Hermione Granger ET comme vivant dans l'Allée des Embrumes...
Avec un soupir, la jeune femme s'assit donc sur un banc proche et attendit que sa « proie » sorte du bâtiment de pierres grises.
Lucius n'était pas venu dans cette église pour prier. Comme beaucoup de sorcier au sang pur, il était areligieux, tout comme Narcissa et Drago, mais rien ne les empêchait d'entrer dans une église, un temple ou une mosquée pour y trouver un peu de calme et pouvoir réfléchir tranquillement.
Cependant, le silence lui pesa rapidement et le froid de l'endroit eut tôt fait d'avoir raison de ses convictions et il décida de quitter l'église après seulement une quinzaine de minutes passées à ressasser sa discussion avec Narcissa, au début de la semaine.
Il avait finalement accepté de signer la demande de divorce, et sa femme avait déjà commencé à faire ses malles. Elle n'était pas encore partie ni divorcée pour autant, car il fallait encore passer devant un Juge et convenir de ce qui appartenait à l'un comme à l'autre.
Lucius était cependant sûr d'une chose, le Manoir était à lui. Du moins à sa famille. Donc Narcissa et leur fils avaient décidé de partir. Étrangement, le Conseil de Famille avait accepté que Drago héberge sa mère dans l'appartement Londonien que ses parents lui avaient acheté pour sa majorité.
En effet, une fois le divorce prononcé, Narcissa n'aurait plus le droit de porter le nom des Malefoy et encore moins de prétendre à un quelconque héritage. Cela avait donc étonné Lucius que le Conseil de Famille accepte qu'elle continue à être dans les parages de Drago.
Hermione releva la tête en apercevant du mouvement à l'entrée de l'église. Pour tromper l'ennui, elle avait enfoncé ses écouteurs dans ses oreilles et attrapé un livre.
En reconnaissant Lucius, la jeune femme l'observa. Il avait maigri, son visage était creusé et il affichait un air fatigué qu'elle ne lui connaissait pas. Mais ce n'était guère étonné après avoir passé presque un an à Azkaban. Oui, elle s'était renseignée. Elle avait fait une recherche sur le Sorcinet, une nouvelle base de données seulement accessible aux sorciers, équivalence de l'Internet pour les Moldus. Cette base de données, encore peu fournie, regroupait pour l'instant les coupures de presse des plus grandes enseignes journalistiques du monde sorcier, et quoi de mieux qu'un journal pour savoir quand un Mangemort avait été libéré...
Hermione avait donc appris que Lucius Malefoy et deux autres Mangemorts avaient été relâchés après neuf mois de prison à Azkaban, pour bonne conduite et repenti efficace. La jeune sorcière ignorait comment le Ministère avait bien pu s'y prendre pour convaincre Lucius Malefoy de s'excuser pour ses actes, mais si cela était vrai, alors il n'était plus le même homme qu'en entrant dans la prison. Car Lucius Malefoy ne s'excusait jamais !
Lucius s'arrêta sur le parvis de l'église pour apprécier le rayon de soleil qui réchauffait ce début d'année. Il n'avait pas neigé cet hiver, mais le froid et la pluie avaient été de la partie depuis fin novembre, alors tout rayon de soleil était apprécié à sa juste valeur.
Tout en se réchauffant, il regarda autour de lui. Il était quelque chose comme dix heures du matin, onze heures tout au plus, et il n'y avait pas grand monde dans le parc, quelques vieilles dames, des enfants... et une jeune femme en train de lire sur un banc tout en écoutant de la musique.
Lucius fronça les sourcils. Il avait l'impression de la connaitre. Cette silhouette, ces cheveux bruns bouclés indisciplinés qui lui donnait l'air de sortir du lit...
Ce n'est pas... ?
Hermione releva alors la tête et leurs regards se croisèrent. Lucius eut un sursaut et la jeune femme aussi. Elle ôta ses écouteurs tout en baissant son livre, et Lucius recula d'un pas, discrètement, avant de se détourner et de descendre les marches du perron d'un pas rapide comme si de rien n'était. Il transplana un peu plus loin et reparut dans le jardin du Manoir Malefoy...
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