Chapitre 14

Harry fut très surpris de recevoir un énorme hibou noir dans le salon des Dursley. Il ne travaillait pas ce jour-là et flânait donc dans la maison, aidant sa tante à la cuisine — la femme avait en effet compris que son neveu n'était pas un larbin —, ou s'occupant de lui.

— Mais à qui es-tu, toi ?

Le hibou, posé sur le dossier du canapé en cuir, sous le regard courroucé de l'Oncle Vernon qui avait serré ses doigts sur son journal, pencha la tête, la retournant presque.

— Tu m'apportes quoi ? demanda alors Harry.
— Arrête de parler à cette bestiole et prend ce qu'elle t'apporte ! gronda l'Oncle Vernon en retournant derrière son journal.

Harry esquissa un sourire. Après des années à l'avoir fait souffrir, il se vengeait, à petites doses, et si sa tante avait déjà abdiqué, son oncle, lui faisait de la résistance.

— Je connais ce sceau...
— Grm ? demanda l'Oncle Vernon.

Harry regarda sa tante et hocha la tête. Il se mordit la lèvre et soupira puis ouvrit l'enveloppe. Il n'avait rien à cacher à son oncle et sa tante. Tous deux savaient parfaitement qu'il avait eu une relation avec Drago Malefoy. Elle s'était mal terminée, ils en avaient souffert tous les deux, énormément.

— C'est Lucius... dit alors Harry en regardant sa tante avec surprise.
— Lucius... Malefoy ? demanda Vernon. Le père ?
— Oui... Je...
— Donne, dit alors Pétunia en s'approchant.

Troublé, Harry lui tendit la lettre et elle la parcourut rapidement.

— Eh bien... dit-elle. En voilà une surprise.
— Quoi donc ? demanda Vernon.
— Monsieur Malefoy désire rencontrer Harry, dit Pétunia à l'attention de son mari. Il a été mis au courant de l'identité de la personne avec qui sont fils s'est amusé un temps et désormais, il voudrait en savoir plus.
— En savoir plus... répéta Harry. Genre, si son fils et moi on a couché ensemble ?

Le ton était grinçant et Pétunia lui colla un coup sur la tête avec la lettre.

— Arrête, tu veux ? dit-elle, les sourcils froncés. C'est son père, il a le droit de savoir quel type de relation vous avez eue.
— Oui, sans doute, mais c'est ma vie privée, et celle de son fils et...

Harry serra les mâchoires et détourna la tête.

— Et c'est sa faute si on a dû prendre de la distance l'un l'autre.

Pétunia et Vernon échangèrent un regard. Ce dernier grommela quelque chose et Harry lui jeta un coup d'œil. Son Oncle n'aimait pas les homosexuels, de la même manière qu'il n'aimait pas les sorciers, mais avec son neveu qui avait joué sur les deux tableaux, il avait bien été obligé de revoir ses affections. Il n'aimait toujours pas les homosexuels ni les sorciers, mais Harry était son neveu et cette situation l'avait mis dans le désarroi le plus total pendant des semaines, tant et si bien qu'ils avaient été contraints de l'envoyer vivre chez Dudley pendant quelque temps pour qu'il s'éloigne de Londres.

— Dis-lui de venir ici, dit soudain Pétunia.
— Ici ? Mais...
— Ici sera très bien, marmonna Vernon en se levant. Si tu dois devenir un Malefoy un jour, Harry, alors cet homme devra négocier avec nous.

Harry regarda son Oncle sans comprendre. Pendant toute sa vie, cet homme l'avait rejeté et traité comme un moins que rien. Aujourd'hui, il tendait à accepter que son neveu soit un sorcier reconnu et puissant, et riche avec ça. Mais la pilule restait difficile à passer quand même et cela prendrait sans doute des années encore.

— Je vais lui répondre, dit soudain Pétunia.
— Non, je...
— Harry, ne t'occupe pas de ça, le coupa Vernon. C'est entre parents qu'une telle affaire se règle.

Il agita le menton et Harry, avec la sensation d'être redevenu un enfant, quitta le salon, perplexe, et monta dans sa chambre.

.

— Vous êtes sûr ?
— Regardez la signature, Miss... Pétunia Dursley...

Hermione haussa les sourcils.

— Ça alors, dit-elle. Et dire que les Dursley ont dénigré Harry pendant toute son enfance... Voilà qu'ils veulent négocier avec vous ? Que dit la lettre, exactement ?
— Pas grand-chose, sinon que je suis cordialement invité à prendre le thé, dimanche prochain, pour discuter de cette affaire entre nos fils.
Nos fils ? demanda la jeune femme.

Elle cligna des paupières puis s'ébroua.

— Il aura donc fallu attendre près de vingt ans pour qu'ils acceptent enfin Harry comme l'enfant qu'ils ont élevé, c'est un comble quand même, dit-elle.
— Potter est célèbre, Miss... dit Lucius, assis à son bureau. Célèbre et riche...

Hermione plissa le nez.

— Non, ça n'a rien à voir, dit-elle. Les Dursley se fichent de la vie sorcière d'Harry...
— Hm. Quoi qu'il en soit, ils veulent me rencontrer et je vais accepter leur demande, répondit l'homme blond.
— Faites, mais ne dites rien qui pourrait les pousser à refuser votre offre.
— Comment ça ?
— Ne parlez pas d'argent, dit Hermione. Les Dursley n'aiment pas les sorciers, ils se fichent de notre argent et ils ne voudront jamais que vous achetiez Harry, même s'ils ne l'aiment pas.
— Je n'ai pas l'intention d'acheter Potter... s'étonna Lucius.
— C'est pourtant ce que fait le mariage arrangé, non ? répondit Hermione en croisant les bras. Vous vendez votre fils à une famille riche pour en retour avoir de l'argent et redorer votre blason...

Lucius haussa les sourcils.

— Je... n'avait jamais vu cela ainsi, dit-il.

Un silence s'installa et Hermione inclina la tête puis tourna les talons. L'homme blond resta alors seul dans son bureau et observa la porte fermée pendant plusieurs secondes avant de s'ébrouer pour répondre aux Dursley.

.

— Surtout, vous ne parlez pas d'argent.
— Pourquoi ?
— Lucius Malefoy ne vous donnera pas une Noise, même pour que son fils soit heureux.

Harry, la Tante Pétunia et l'Oncle Vernon se tenaient dans le salon de la maison. Tous deux sur leur trente-et-un, ils attendaient fébrilement l'arrivée du sorcier. Pétunia avait préparé le thé et sortit le service des invités.

— Et s'il en parle quand même ? À combien est le change entre la monnaie sorcière et les euros ? demanda Pétunia.
— Je ne sais pas, pas grand-chose sans doute, mais vous verrez cela plus tard, ne parlez pas d'argent, dites-lui, je ne sais pas, que vous vous inquiétez pour moi, même si c'est faux, et...
— Ce n'est pas faux, Harry, dit Pétunia en croisant les bras. Depuis que la guerre est terminée, je m'inquiète pour toi parce que tu n'as pas revu tes amis sorciers une seule fois, tu n'y va même plus... Tu te contentes d'être comme nous et ça c'est... Ce n'est pas ce que ta mère aurait voulu.

Harry détourna la tête. Depuis la fin de la guerre contre Voldemort, Pétunia n'avait eu de cesses de revenir vers lui pour lui montrer que peu importe ce qu'ils lui avaient fait subir par le passé, ce n'était plus d'actualité. Mais le brun avait bien du mal à accepter ce revirement de situation, lui l'orphelin habitué à n'avoir ni famille ni amis avant d'entrer à Poudlard.
Il se redressa soudain et recula d'un pas.

— Il arrive, dit-il. Je serais dans ma chambre, s'il veut me voir...
— Entendu.

Le jeune homme détala aussitôt et il atteignait le palier quand la fausse cheminée des Dursley s'embrassa violemment et rejeta sur le tapis un homme de haute stature.

— Monsieur Malefoy, j'imagine ? demanda aussitôt Vernon en tendant la main.

Lucius le regarda puis inclina la tête.

— Vous devez être Monsieur et Madame Dursley, les tuteurs de Harry Potter, dit-il.

Vernon ramena sa main à lui en opinant vivement. Pétunia invita ensuite tout le monde à s'installer et, sur le palier de l'étage, Harry écouta un moment la conversation cordiale avant de s'ennuyer et d'aller s'enfermer dans sa chambre.

.

Au Manoir Malefoy, cependant, Hermione était dans la cuisine, devant une tasse de thé. L'Elfe de Maison qui s'occupait des repas évoluait sans se soucier d'elle.

— Dites-moi, dit alors la Gryffondor. À votre avis, combien vaut un garçon comme Drago ?

L'Elfe cessa de malaxer de la pâte à pain et regarda la jeune femme.

— Vous me parlez, Miss Granger ? demanda-t-elle.
— Oui, à qui d'autre ?

Les longues oreilles de la petite créature remuèrent et l'Elfe se redressa.

— Combien vaut Maître Drago ? demanda-t-elle. C'est-à-dire ?
— Le mariage arrangé entre Astoria et lui, cela a certainement été négocié contre quelque chose, dit Hermione. Combien Drago a-t-il coûté aux Greengrass ?

L'Elfe cligna des paupières.

— Il faudra le demander au Maître, car je l'ignore, Miss Granger...
— Allons, vous devez bien en avoir une idée, non ? Vous traînez toujours dans les environs, vous entendez tout, je le sais bien.

L'Elfe baissa le nez et appuya du bout des doigts sur sa pâte en train de gonfler. Elle se remit alors à la pétrir avec force puis répondit :

— Le Maître a obtenu l'équivalent d'une voiture et son attelage en échange de Maître Drago, dit-elle du bout des lèvres. Et ce n'était que pour les fiançailles. Concernant le mariage en lui-même, je ne sais pas, mais j'ai entendu dire par d'autres Elfes de Maison, que parfois, la dote était colossale.

Hermione hocha lentement la tête. Elle serra les lèvres et chercha le moyen de trouver un équivalent en argent réel car pour elle, une voiture à cheval et son attelage, ça n'avait gère de résonance... Elle n'avait aucune idée du prix d'un cheval, par exemple.

— Merci, répondit néanmoins la jeune femme.

Elle prit sa tasse de thé et remonta dans sa chambre. Là, elle invoqua son ordinateur personnel qu'elle avait laissé dans un carton au fond de l'armoire après son arrivée ici et elle entreprit de faire quelques recherches.

.

— Non, dit Lucius. Je ne suis pas contre une telle union, si cela rend mon fils heureux, cela me va, mais sachez tout de même qu je privilégie une union productive.
— Oui, c'est évident, répondit Vernon. Harry n'étant pas notre fils, nous ne sommes pas concernés par une hypothétique descendance, mais...
— Mais ma sœur aurait aimé avoir des petits-enfants, acheva Pétunia rapidement avant que son mari ne dise quelque chose de malheureux. Mais il va sans dire que si Harry est heureux, c'est l'essentiel. Et si vraiment, ils pourront toujours adopter un bébé... Vous savez, Monsieur Malefoy, Harry a...

Pétunia jeta un œil vers la porte du salon puis reprit la parole.

— Il nous a expliqué que votre fils ne serait sans doute jamais heureux avec cette jeune femme que vous lui avez choisie...
— Astoria, oui, dit Lucius. C'est malheureusement le risque à courir avec le mariage arrangé. Me concernant, mon couple avec Narcissa a été solide jusqu'à ce que je sorte de prison.
— Que s'est-il passé ? demanda Vernon.

Sa femme lui coula aussitôt un regard noir.

— Laissez, Madame Dursley, dit Lucius. Ma femme, mon ex-femme à présent, avait commencé à s'habituer au fait que je ne sois plus chez nous. Elle n'avait pas refait sa vie, mais je suis resté en prison pendant neuf mois et je n'étais pas censé en sortir avant ma mort... Lorsque j'ai été libéré pour bonne conduite et que je suis rentré, elle n'a pas supporté de m'avoir à nouveau dans son entourage, bien que je n'aie absolument rien exigé d'elle à mon retour.

Vernon inclina la tête et Pétunia soupira alors. Elle proposa de refaire du thé et Lucius refusa.

— Je vais rentrer, dit-il en jetant un coup d'œil par la baie vitrée. Miss Granger va m'attendre et je souhaiterais discuter avec mon fils.
— Miss Granger ? demanda Pétunia. Vous parlez d'Hermione ?
— Oui, je l'héberge pendant quelques temps, histoire qu'elle puisse retrouver du travail et un appartement.
— Ah ? Elle était à la rue ? Je l'ai vue il y a quelques jours, elle ne m'a rien dit...
— Elle n'était pas à la rue, mais elle a laissé tomber son travail et du coup, a dû rendre son appartement, et nous nous sommes rencontrés fortuitement sur le Chemin de Traverse, alors j'ai proposé de l'aider.
— Voilà une bonne action qui vous honore, Monsieur Malefoy, dit Vernon.
— Je n'ai pas été libéré pour bonne conduite pour rien, Monsieur Dursley.

Les deux hommes se levèrent puis Lucius regarda vers la porte du salon.

— Je sais que Potter est dans la maison, dit-il. Il a probablement écouté toute la conversation, mais dites-lui bien que je l'autorise à revoir mon fils, si le cœur lui en dit. Je vais revoir l'union de mon fils avec Astoria Greengrass, si ses parents ne peuvent m'offrir plus que ce que Potter offre, alors elles seront rompues.
— Comme je l'ai déjà mentionné, je ne prétends pas m'y connaitre en mariages arrangés, mais pour ce que j'en sais déjà, je ne trouve pas cela sain. C'est condamner son enfant à une vie de malheur pour quelques billets et un peu de notoriété.

Lucius regarda Pétunia puis s'inclina et transplana dans un grand craquement qui fit bondir les Dursley. Harry apparut quelques secondes plus tard dans le salon et son oncle et sa tante se tournèrent vers lui.

— Qu'en penses-tu ? demanda sa tante. Avons-nous bien géré ?

Harry opina et croisa les bras.

— Mais je ne sais pas si je reverrais Drago, dit-il. Nous avons essayé d'être amis et nous avons beaucoup de différences...
— Les différences s'estompent avec le temps, répondit Vernon en grommelant. Si je m'étais arrêté à cela avec ta tante, nous ne serions pas mariés.
— Ah bon ?

Pétunia esquissa un sourire.

— Tu finiras par apprendre, dit-elle en jetant un regard à son mari qui s'était replongé dans son journal. Allez, va maintenant.

Harry hocha lentement la tête. Il remonta dans sa chambre et s'assit au bord de son lit, pensif. Sa relation avec Drago n'avait pas duré deux mois, ils avaient rapidement compris qu'ils n'étaient pas faits pour être ensemble, pourtant ils s'entendaient bien, ce qui était étrange au vu de leurs passés réciproques.
Se décalant vers son bureau, Harry ouvrit le premier tiroir et prit une lettre, posée sur le dessus. L'enveloppe déchirée y était agrafée et le brun observa l'écriture arrondie, au stylo bille vert.

— Drago... dit-il doucement. Tu crois qu'on pourrait se retrouver ?

Il s'attendait presque à ce que le Serpentard lui réponde, mais seul le silence fut présent. Harry soupira. La lettre était l'une des rares d'une correspondance qu'ils avaient entretenue après la fin de la guerre quand Lucius avait été envoyé à Azkaban et que Narcissa s'était retrouvée seule. À l'époque, Drago ne savait pas quoi faire pour aider sa mère à surmonter la perte de son mari, il avait donc cherché la seule personne capable de lui expliquer tout ça.

De son côté, mortifié par ce qu'il avait été contraint de faire pour libérer son monde, Harry s'était replié sur lui-même et avait coupé les ponts avec ses amis. Il n'avait pas de nouvelles de Ron depuis plus d'un an maintenant, et il avait récemment appris qu'Hermione avait pris ses quartiers au Manoir Malefoy.

La première lettre de cette correspondance entre le Serpentard et lui, c'était au blond qu'elle revenait. Pour quelle obscure raison avait-il envoyé une lettre à son pire ennemi, personne ne le savait, mais le fait était là. La surprise passée, Harry avait répondu, comprenant entre les lignes que l'ancien leader de Serpentard était au plus bas.
Ils avaient donc larmoyé ensemble pendant plusieurs semaines avant de finalement se retrouver dans un bar de Londres. Peu à peu, ils en étaient arrivés à se donner rendez-vous ici ou là, mais toujours dans le monde Moldu, Harry refusant de remettre les pieds dans son monde.

Quelques semaines après, Drago apprenait que son père avait laissé des consignes le concernant, qu'il devait impérativement être marié pour aider sa mère, avant son vingtième anniversaire. Mais Drago n'en avait pas l'intention et avait laissé traîner, pensant à juste titre que son père ne sortirait jamais d'Azkaban.

Harry soupira. Si Lucius Malefoy n'avait pas été sage en prison, il ne serait pas sorti et Drago et lui seraient toujours ensemble. Mais le Gryffondor n'avait pas d'autre choix que d'accepter la décision de l'homme blond, c'était son fils, il était légitime qu'il veuille un bel avenir pour lui et sa famille.
Après tout, qu'est-ce que le Survivant, le Sauveur, pouvait bien apporter à la famille Malefoy, sinon de la renommée ?

Harry marmonna et rangea la lettre. Il était de moins en moins certain de vouloir retrouver Drago, surtout après la façon dont ils s'étaient séparés. Il se jeta sur son lit et observa le plafond, incapable de se décider.

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1 euro est actuellement égal à 2 Noises et 9 Mornilles. Source, site Encyclopédie Harry Potter.

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