CHAPITRE 8
J'hallucine ! Cette fois-ci, c'est Léandre Hellespont qui a fait le premier pas. Je crois que c'est la meilleure nouvelle de la journée même si on est encore que le matin et qu'il est encore trop tôt pour se faire un avis des prochaines 24 heures.
Jusqu'à la fin de semaine, je n'ai fait que penser à ce jour. Le samedi arrive à grand pas et même si le temps paraît long, mon réveil sonne déjà pour me rappeler à l'ordre. Aujourd'hui, je vais voir Léandre Hellespont.
Oh non. Je dois me recentrer sur mon objectif car voilà que je me mets à faire ma Camille. Cette fille déteint sur moi. L'amitié est influençable. Chaque rencontre que nous faisons au fil de notre vie, la part de l'autre se glisse dans le panel de notre personnalité pour y laisser sa couleur. C'est une empreinte presque indélébile si l'on choisit de s'accrocher à cette teinte.
Je suppose que c'est de ma faute si sa personnalité influence la mienne car je refuse de couper ce lien.
Ce matin, je m'empresse de me coiffer, de m'habiller mais au final je ressemble à la moi de tous les jours. Ça ne change pas grand-chose, je suis presque déçue d'ailleurs. Peut-être que le maquillage pourrait me changer mais même si j'ai des bases en dessin, avec le maquillage c'est comme si j'avais deux mains gauches.
Une véritable catastrophe ambulante.
Donc, on se rejoint au même endroit que la dernière fois et à la même heure. Ça ne devrait pas être compliqué. Et même que j'ai le temps de lire un peu, vu l'heure.
***
Ok. Je retire ce que j'ai dit.
Plus jamais je me dis que j'ai le temps, plus jamais je lis alors que j'ai un rendez-vous. Enfin, ce n'est pas un rendez-vous. C'est juste pour le travail.
Pour en revenir au présent, je n'ai jamais couru aussi vite de ma vie. Je comptais sur le bus pour éviter la catastrophe mais il est passé devant moi sans s'arrêter. Je me suis sentie si trahie. Heureusement que la musique existe pour calmer ma colère.
Un point de côté ralentit aussitôt la cadence de ma course alors que j'arrive au bout. J'aperçois au bout de la rue la grande bibliothèque municipale. Le tramway passe et me cache la vue alors que mes jambes s'avancent de nouveau, pour marcher cette fois-ci.
Depuis toute petite, je crois, j'ai souvenir que j'ai toujours détesté courir. Même lorsque je suis pressée, je ne cours jamais. J'opte toujours pour la marche rapide. Alias, la méthode des fainéants. Un clan dont je fais partie, bien que je n'en sois pas si fière concernant certains aspects de ma vie.
— Hey ! Evelyne !
Un long frisson parcourt mon dos lorsque mon prénom chatouille mes oreilles.
Je me tourne vers cette voix, par simple curiosité. Car, il m'est souvent arrivé de me retourner pour rien comme si j'entendais des voix fantômes.
À ma plus grande surprise, je ne rêve pas. Il y a bien une voix qui m'appelle et c'est celle d'un grand blond qui court vers moi.
J'inspire une grande bouffée d'air lorsqu'il se pose face à moi, les lèvres entrouvertes pour laisser échapper son souffle puis il se remet droit et m'impose sa grandeur. Enfin, sa main passant dans ses cheveux.
Je déglutis.
— Ça va ? Je t'ai pas fait attendre j'espère ?
Je secoue la tête, comme muette.
Il soupire et mes poumons se bloquent car un sourire de soulagement se dessine sur ses jolies lèvres roses.
— Ça me rassure, ajoute-t-il. Bon, on y va ?
J'acquiesce puis on se dirige à l'entrée de la bibliothèque sauf que la porte ne s'ouvre pas une fois devant.
— Aïe…
Ma tête pivote sur Léandre Hellespont qui vient de faire un bond en arrière avant que sa main ne vienne frotter le bout de son nez.
Ne me dites pas qu'il a fait ce à quoi je pense ?
Un petit rire s'échappe de mes lèvres lorsque ma tête imagine cette scène.
Aussitôt, son regard se tourne vers moi avec un sourcil levé sur ma personne.
Je déglutis et je perds mes mots de nouveau comme si tous les mots que j'avais appris jusqu'à aujourd'hui venaient d'éclater comme des bulles.
Avec lui, je me sens idiote. Surtout à ce moment précis où j'ai osé rire parce qu'il s'est cogné contre la vitre par inadvertance. Ou alors, à cause d'un réflexe. Avec les portes automatiques, on acquiert le réflexe d'avancer à l'aveugle. Nous sommes trop habitués à ce que les portes s'ouvrent d'elles-mêmes. On oublie vite que les mains servent à faire toutes sortes de choses. Alors au fond, je le comprends même s'il me fait tellement penser à Marinette dans le film de New York.
Je n'ai pas pu m'empêcher de rire.
— Désolé, bredouillé-je.
Rien.
Aucune réponse.
Juste un silence insoutenable quand soudain, le même petit rire que j'ai lâché ressort de ses lèvres.
— Je suis con. Je n'ai pas fait gaffe.
Des petites rougeurs d'une couleur rosée apparaissent sur ses pommettes et s'allient bien à son sourire maladroit, si gêné que j'en ai le souffle coupé.
Je découvre des choses sur cet homme que j'ignorais. Je crois que j'étais trop noyé dans les clichés de l'homme populaire, l'homme rêvé de toutes les amoureuses de l'amour, celui qu'on considère comme l'homme parfait par excellence alors qu'au fond, si on l'observe, il est plutôt maladroit.
Et je dois admettre qu'être témoin de cette facette de lui m'attire un peu.
— C'est fermé, exceptionnellement.
— Comment ça ?
J'arrive auprès de lui pour lire le papier accroché à la porte.
Il est écrit que c'est fermé, comme il vient de le dire, sauf que ça ruine tous nos plans. Dire qu'on comptait travailler. On va devoir retarder et trouver un autre jour pour se donner rendez-vous et travailler pour finir le devoir maison.
Un soupir exaspéré s'échappe de mes lèvres.
Son regard est posé sur moi sans que j'y prête trop attention.
— Ce n'est pas grave. On n'a qu'à aller dans un café pour travailler, propose-t-il.
— Je veux bien mais je n'ai pas d'idée.
Son sourire se dessine et s'adresse à moi puis, avec un mouvement de la tête, il me dit :
— Suis-moi, je sais où on peut aller.
Je ne perds pas de temps pour le suivre car, après tout, c'est bien la seule option qu'on ait. Néanmoins, ça me fait très bizarre d'aller dans un café avec un garçon. Ça sonne comme un rencard. Il y avait moins cet aspect-là à la bibliothèque car ça résonnait comme un cadre de travail dans ma tête. Là, j'entends déjà Camille hurler. Elle serait capable de le faire si je lui disais que j'allais dans un café, un endroit chaleureux qui sonne comme un rendez-vous, avec un garçon. Et pas n'importe lequel ! Un mec beau et gentil.
Il faut sérieusement que j'arrête avec les stéréotypes. Je vais finir par me détester tellement ça craint d'avoir cette mentalité là.
Son soupir parvient à mes oreilles comme un tas de pierres qui s'écrase sur le haut de mon crâne.
— C'est fermé, soupire-t-il.
Cette fois, c'est une avalanche qui vient de faire tomber tout le poids de mon corps contre le bitume sec et dur.
J'avais une once d'espoir mais il vient de me la supprimer en seulement deux mots.
Alors qu'il se tourne vers moi, la mine dépitée, la tête baissée et encore cette grande main qui passe dans ses cheveux blonds, il y a comme une touche froide qui éclate sur le bout de mon nez.
Je lève les yeux au ciel quand soudain je cligne un œil.
Cette sensation, je la reconnais bien. C'est l'avalanche qui apparaît, qui ressort de mon esprit mais sous forme de gouttelettes d'eau pour enfoncer cette journée de malchance improbable.
— Putain, jure-t-il. Il pleut.
Super.
J'aime la vie, j'aime la journée, j'aime pas le soleil mais la pluie ne me ravit pas non plus.
Aussitôt que je pense, la météo semble être contre moi et entend toutes mes pensées car là : ce ne sont plus de simples petites gouttelettes qui nous tombent sur la tête mais bien une averse qui fait l'effet d'une bonne douche froide.
Je m'empresse de me tourner vers lui, en essayant de me couvrir un maximum, et lui dire :
— J'habite pas loin, viens on va chez moi !
Lui non plus n'a pas la tête à réfléchir car il acquiesce avec les bras croisés qui tremblent contre son corps.
Dès qu'on franchit le seuil de ma porte, je me retiens de me déshabiller entièrement pour me débarrasser de mes vêtements qui me collent à la peau comme du chewing-gum.
Mes jambes se dirigent vers le placard de la salle de bain alors que Léandre Hellespont reste à l'entrée puis je reviens à lui, muni d'une serviette blanche et propre que je lui tends.
— Je ne te propose pas de te doucher, je n'ai pas d'affaires de rechange à te donner mais tu peux aller te sécher un peu si tu veux.
Il acquiesce.
Sa mâchoire tremble et ses dents claquent entre elles.
Décidément, ça ne fait que peu de temps que je le côtoie et malgré ça, j'ai l'impression de découvrir beaucoup de choses en peu de temps. Léandre aime l'alcool, danser, la romance, il peut être maladroit, rougir mais il est aussi frileux. Et, même moi je ne tremble pas autant. Quoique…
Ma tête descend vers le bas. Mes jambes tremblent comme si elles dansaient le tango.
C'est incontrôlable.
Lorsqu'il ressort, il sèche ses cheveux vite fait.
Il est encore trempé mais il a l'air d'avoir moins froid. En revanche, par simple précaution, je saisis une couverture et la lui tend.
— Ça te dérange si moi je vais prendre une douche ?
Je souris bêtement comme si c'était un crime que je prenne une douche chez moi alors que lui n'a pas pu en prendre.
Il secoue la tête.
Je ne sais même pas pourquoi j'hésite encore à aller prendre une douche surtout lorsque la porte est déjà verrouillée, que mon corps est entièrement nu sous la douche et que ma main vient enclencher le mécanisme.
Le mal est déjà fait, je ne peux plus retourner en arrière alors il m'est désormais interdit de culpabiliser.
La serviette sur la tête, je frotte avec force pour les sécher alors que je sors de la salle de bain déjà en pyjama.
Oh la boulette.
En pyjama alors qu'un mec est chez moi, dans mon cocon et moi je n'ai pas la décence de m'habiller ! Non, la fille est juste en pyjama.
La honte.
Sa silhouette se dessine, son visage est éclairé par un écran. Pas celui d'un téléphone mais celui de la taille d'un ordinateur.
Mes yeux s'ouvrent en grand, prêt à sortir de leurs orbites alors que ma serviette tombe sur le sol comme une tartine qu'on laisse tomber par mégarde.
Interrompu par le bruit. Léandre se tourne vers moi, les jours rouges et un regard que je n'ai jamais vu dans les yeux d'aucun homme.
Bien qu'il s'approche de moi, je n'ose plus respirer ni faire le moindre bruit. Mon ventre se creuse pour se cacher alors que je ne sais plus où regarder jusqu'à ce que je tombe sur l'onglet de mon ordinateur, ouvert en grand comme pour me gifler. Une claque si énorme que j'ai envie de m'enterrer jusqu'au noyau de la terre pour qu'on ne me retrouve plus.
Ce qu'il vient de découvrir, c'est la honte la plus totale pour moi. Mon secret le plus intime, le plus inavouable. Même mes parents et même mes amies ne sont pas au courant.
Léandre Hellespont vient de franchir le seuil de mon intimité.
Son souffle s'abat sur moi alors que sa grandeur diminue pour que nos deux visages soient en face à face.
Il me force à le regarder, à ce que nos pupilles se croisent.
J'ai l'impression d'être coincé entre trois murs et en face de moi, le mur le plus imposant : Léandre Hellespont.
Puis ce dernier laisse échapper des mots qui chamboulent tout en moi :
— Dit, ça te dirait que je t'aide à réaliser ces fantasmes que tu écris ?
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Bonjooour ou bonsoir !
Petit message pour remercier ceux qui lisent mon roman ! On est peu nombreux mais ça me touche beaucoup de voir des lecteurs lire les nouveaux chapitres ^^
N'hésitez pas à vous manifester, je ne mords pas ! J'adore recevoir des avis !
Enfin bref, nous y sommes ! La fameuse demande de Léandre Hellespont, le seul qui a découvert le secret de notre héroïne. Un secret qui, pour elle, est une honte. Alors comment va-t-elle réagir à votre avis ? Va-t-elle accepter aussi vite ?
Qu'en avez-vous pensé de ce chapitre ?
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