ℭ𝔥𝔞𝔭𝔦𝔱𝔯𝔢 13

Vernon se réveilla en sursaut, chassé une fois encore de ses songes par un mauvais rêve. Eurg... ma tête... Il se redressa péniblement et réalisa s'être endormi sur son duvet, au lieu d'en dessous.

Il se leva maladroitement et tangua jusqu'à la salle de bain où il but une grande gorgée d'eau. En croisant son reflet, il se rendit compte qu'il ne portait plus sa chemise bleu nuit... Il n'avait que son haut moulant sans manche. En voulant revenir dans sa chambre, il l'aperçut, roulé parterre, là où traînait sa toge la veille encore. Merde, ma lessive ! Un mal de crâne lui ordonna d'arrêter de réfléchir aussi fort. C'est alors qu'il crut voir un post-it sur son vêtement... Il se pencha pour le récupérer.

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Faut bien s'entraîder entre voisins. ;)

- Angel Dust

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Il se souvint alors s'être renversé un verre d'eau ; sa chemise avait dû lui être retirée pour éviter qu'il n'attrape froid... Il réalisa alors qu'Angel avait dû l'accompagner jusqu'à sa chambre. Cette pensée l'embarrassa d'un seul coup, au point qu'il sentit ses joues prendre feu.

Il se jeta sur son lit et remarqua que son téléphone était posé sur sa table de nuit, branché. Il le récupéra pour lire l'heure : six heures vingt-quatre.

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Il sortit les vêtements de la machine et constata qu'ils étaient légèrement humides encore et très froissés. Vernon les fourra dans le sèche-linge et déplia la planche à repasser. Le temps que le programme ne se termine, le jeune homme décida d'aller chercher son café matinal, à l'étage de la réception.

Il était le seul réveillé ce samedi matin-là, ce qui ne l'étonna pas.

Vernon se servit d'une généreuse tasse de café, qu'il manqua de renverser lorsqu'il fit face à la silhouette du démon de la radio, qui le toisait d'un regard étonné sans perdre son éternel sourire.

─ Vous m'avez fait peur.

─ Ravi de l'entendre !

Vernon le dévisagea en plissant des yeux. Il décida de ne poser aucune question.

─ Aviez-vous réfléchi à ma proposition ? demanda le démon en s'appuyant contre la table du bar.

─ Je... vous avoue que pas tellement. J'étais un peu préoccupé par mon intégration ici, désolé.

─ Ce n'est rien, il est tout à fait normal pour les âmes comme vous de se sentir impliquées dans leur assimilation au sein d'un groupe d'appartenance ! Et j'espère que vous vous y plaisez.

─ Plutôt, étonnamment, admit Vernon en haussant des épaules.

─ Vous n'avez pas chassé votre objectif céleste pour autant, n'est-ce pas ?

─ Non...

─ Fort bien ! Parce que ma proposition tient toujours, et il me tarde de vous partager mes connaissances en votre cause.

─ C'est que..., commença le plus jeune en serrant sa tasse contre lui. Votre contrepartie m'inquiète... Je ne sais pas si ça vaut la peine de vendre mon âme en échange...

Alastor sembla réfléchir un instant, un doigt sur le menton.

─ Si ce n'est que ça, je pourrais alléger ma contrepartie.

─ C'est vrai ? s'étonna le principal intéressé.

─ É-vi-dem-ment ! Toutefois, cela impliquerait un équilibre de votre côté également. Je devrais, de cette façon, vous restreindre l'accès à certaines informations. J'espèrerais donc que, dans le cas où vous accepterez cet allégement, vous puissiez songer à accepter la totalité de la contrepartie.

─ Un peu comme... une offre d'essai pour un abonnement longue durée ?

─ Si c'est ainsi le nom que vous lui donnez, alors oui, il pourrait s'agir d'une offre d'essai sans garantie.

Vernon réfléchit sérieusement à la proposition.

Au même moment, un démon débarqua dans l'interaction.

─ Bonjour Alastor, grogna Husk en s'interposant entre lui et Vernon.

─ Oh, mon cher Husker, vous êtes bien matinal pour un jour de weekend, siffla son employeur sans que Vernon ne puisse deviner s'il s'agissait d'une raillerie ou d'une réelle constatation. Nous en avions terminé de toute façon, n'est-ce pas, mon cher Cardioderma ?

─ Euh, oui, mentit Vernon en plantant son regard dans les iris dorés du barman.

─ Bien ! Une bonne journée à vous deux. ~

Et il s'évapora dans une aura de ténèbres.

Un instant de silence s'écoula.

─ Hum... Bonjour, Husk.

─ De quoi étiez-vous en train de parler ? gronda-t-il avec un l'air sévère qui fit ratatiner le plus jeune sur lui-même.

─ Euh... Je...

Il ignorait s'il avait le droit de le lui dire.

Tout à coup, un élan de lucidité le foudroya de plein fouet.

─ C'est de lui que je devais me méfier, c'est ça ? C'est ce que tu essayais de me dire hier, dans la laverie ?

─ Putain, t'es moins con que ce que je craignais, répondit simplement Husk en semblant profondément soulagé.

Dans ce cas, je peux sans doute lui expliquer la situation.

[...]

─ Non.

─ Quoi, non ? s'étonna-t-il.

─ Refuse. T'es pas obligé de connaitre ces informations pour aller de l'avant.

─ Mais, Husk, insista Vernon. Si je ne connais pas mon passé, comment aller de l'avant ?

─ Tu peux obtenir le pardon, tu es une bonne personne, Vernon ! Tu n'as pas besoin de savoir ce que tu as fait !

─ Alors pourquoi n'ai-je pas été accepté au Paradis dès ma mort ? implora le plus jeune, une main sur sa poitrine. J'ai sûrement fait un truc tellement horrible que même en étant moi-même, les anges n'ont pas voulu de moi ! J'ai besoin de sav-...

─ Oui, oui tu as fait un truc atroce et justement, je n'ai pas envie que tu foutes tes chances de rédemption en l'air pour ça !! s'emporta Husk en dépliant ses ailes de rage, avant de se ressaisir, ébahi par ses propres paroles.

Vernon recula d'un pas, laissant tomber sa tasse à ses pieds.

─ T-tu... donc tu sais ce que j'ai fait..., balbutia-t-il, le cœur au bord des lèvres.

─ Oui, c'est ça que j'essayais de te dire aussi, hier dans la laverie, expliqua Husk en serrant les poings.

Le jeune homme commençait à voir le monde tourner.

─ C'est Alastor qui t'en empêche...

─ Oui...

─ Putain...

J'ai fait un truc si horrible que ça le met dans cet état. Bordel, quel genre de monstre suis-je ?

─ Les gars, qu'est-ce qui se passe ? s'alarma Charlie en robe de chambre, au sommet des escaliers.

Vernon tourna la tête dans sa direction, mais il la voyait floue. Une main se posa sur son épaule : elle était tiède et duveteuse. Il dévia son regard pour les planter dans ceux de Husk. Ses lèvres bougeaient... Mais il n'entendit rien.

Est-ce que je suis en train de faire une crise de panique ?

À peine s'était-il posé la question qu'il devina la silhouette de Charlie devant lui, une lueur d'inquiétude dans son regard bienveillant.

Il eut un instant où son cerveau décida de ne plus lui retransmettre de signaux visuels non plus.

...

Lorsque les voix et la lumière arrivèrent enfin à percer sa bulle, il réalisa être assis sur une marche d'escalier, adossé contre quelqu'un chose.

─ Ah, il revient à lui, murmura une voix féminine qui n'appartenait pas à Charlie.

─ Oh, ça me rassure Vaggie, soupira la princesse.

Quelqu'un - il ne sut dire qui - lui glissa un verre d'eau dans les mains. Comme il ne réagissait pas, quelqu'un - toujours sans savoir qui - posa ses doigts sous son verre et le poussa jusqu'à ses lèvres pour qu'il en prenne une gorgée.

Au fur et à mesure que les secondes défilaient, il sentait son esprit recharger ses batteries.

─ Tu te sens comment, Vernon ?

─ Ça va... Qu'est-ce qu'il s'est passé ? parvint-il à demander.

─ Tu as brièvement perdu connaissance, annonça Vagatha qui ne portait qu'un peignoir.

─ On a entendu du raffut au rez-de-chaussée, nous étions inquiètes, expliqua plus clairement Charlie en robe de chambre.

Sa petite amie attira la princesse contre elle, une main protectrice sur sa hanche.

─ Et... Husk, où est-il ?...

Il entendit alors un raclement de gorge dans son dos.

Son cœur fit un bon dans sa poitrine lorsqu'il comprit qu'il était adossé contre le démon félin, lui-même assis sur une marche d'escalier. Il ne semblait pas plus gêné que cela, contrairement à Vernon qui ne sut quoi dire tant il se sentait intimidé par cette proximité...

─ Heureusement qu'il t'a rattrapé à temps, déclara Charlie en souriant.

C'était tout ce dont il avait besoin de savoir.

─ D'ailleurs, qu'est-ce qu'il s'est passé ?

─ Vu sa pâleur, je dirais une baisse de glycémie, diagnostiqua la Salvadorienne, parfaitement sûre d'elle.

─ Vernon, tu manges suffisamment, pas vrai ? Ce n'est pas parce que tu es mort une fois que ce corps n'a pas besoin d'être correctement entretenu, expliqua Charlie en se prenant les bras, l'air concernée.

─ Ce doit être ça, affirma Husk à la place de Vernon.

Ce dernier se mordit la lèvre, honteux. Il était vrai qu'il avait négligé son alimentation depuis son arrivée en Enfer. Il était préoccupé par tant de choses qu'il n'y pensait même plus.

─ Je vais bien, dit-il un peu durement en se levant difficilement, une main sur la rambarde.

Charlie tendit la main vers lui, mais Vagatha la retint.

─ Merci de vous inquiéter pour moi, mais ça va. Je dois m'occuper de ma lessive.

Il s'avança difficilement jusqu'au sous-sol, et personne ne le retint. C'était bien ainsi.

Lorsqu'il arriva dans la laverie, il fut satisfait de voir que la machine était déjà terminée.

─ Elles ont raison, tu ne devrais pas te négliger comme ça, entendit-il derrière lui.

Il n'eut pas besoin de se retourner pour deviner qu'il s'agissait de Husk.

─ Laisse-moi t'aid-...

─ J'ai envie de le faire moi-même, refusa Vernon en chassant la main qui s'était approchée de sa pile de vêtements.

Le démon n'eut pas l'air de vouloir montrer sa frustration, s'il y en avait une, et se contenta de plonger les mains dans ses poches. Vernon regretta instantanément, car un peu d'aide ne lui aurait pas été de refus en fin de compte. Il soupira simplement et souleva sa corbeille pour la rapprocher de la planche à repasser. Chacun de ses mouvements semblaient minutieux, sous le regard calculateur du barman.

─ J'ai juste une question, Husk, osa-t-il après un moment d'hésitation. Qui n'a rien à voir avec tout ça.

Le concerné haussa le sourcil. Vernon décida de passer outre cet insupportable tic et la posa.

─ Quand je me suis présenté, tu m'avais dit un truc. Sur mon prénom, je veux dire, compléta-t-il en se disant que ce qu'il essayait d'expliquer n'avait certainement aucun sens.

Husk resta silencieux, attendant patiemment la suite.

─ Tu as su donner plein d'informations sur l'aulne. Tu as un intérêt pour la dendrologie ?

Un moment de silence s'écoula. Puis deux. Puis trois.

Vernon entendit un bref ricanement.

─ Non, je ne suis pas un grand adepte des arbres.

Il leva le poing et, en dépliant les doigts, un as de cœur apparut entre son index et son majeur.

─ Je suis un adepte de la magie.

Vernon reposa le fer à repasser, stupéfié.

─ Donc, quand tu disais qu'avec le bois d'aulne on pouvait faire des baguettes magiques... C'était parce que tu avais un intérêt pour la magie ? essaya de comprendre le plus jeune, des étoiles dans les yeux. Mais, et pour mon côté sensible, comment tu l'as su ?

Husk fit disparaître sa carte en s'adossant nonchalamment contre le mur.

─ Pas besoin d'être un grand visionnaire pour remarquer ce trait de personnalité. Eh puis...

Il désigna la lumière plafonnière.

─ Hier aussi, tu avais mis la luminosité au minimum. Et au réfectoire, tu prends toujours la table la plus éloignée des autres résidants, à cause du bruit je présume.

Il le désigna de la tête.

─ Tu n'as pas peur de montrer tes émotions en public, comme la fois où tu devais sortir de l'hôtel mais que tu n'y parvenais pas, ou quand tu te mets à chialer.

─ M-mais attends, l'arrêta Vernon en secouant la tête. Tout ça, ça s'est passé après que tu m'aies dit que j'étais sensible, conformément à la signification de mon prénom. Comment pouvais-tu être aussi sûr de ça alors qu'on ne se connaissait pas encore ?

Husk étira un simple rictus.

─ Ah, ça. Hm... J'ai dû voir cette information sur ton prénom quelque part, de mon vivant, déclara-t-il avec un clin d'œil. Par contre assieds-toi deux minutes, tu risques de retomber dans les pommes... Tu es pâle comme un linge.

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