Chapitre 7.

Les cours de la journée s'achèvent. Je rentre avec pour seule compagnie, mon téléphone. Les musiques de ma playlist passent les unes après les autres, me procurant un bien fou. Je ne sais pas comment je fais pour tomber sur des perles de ce genre. En tout cas, c'est un délice pour les oreilles!

Je prends l'ascenseur car j'ai la flemme de faire de la marche inutile. Même si c'est juste un étage, je n'ai pas la volonté...

Lorsque j'ouvre la porte de mon appartement, une masse se jette sur moi, manquant de peu de me faire tomber à la renverse. Deux bras étreignent mon cou avec force et je tombe nez à nez avec une casquette grise. Heureusement que la visière est à l'arrière sinon je serais devenu aveugle...

-Mathieu! 

Je reconnais cette petite voix enrouée immédiatement.

-Geek... Je sais que ça fait un moment que l'on ne s'est pas vu, mais ce n'est pas une raison pour tenter de m'asphyxier!

-Oh... Pardon...

Il se détache et me regarde avec des yeux larmoyants.

-Je ne t'ai pas fait trop mal...?

Je souris avec bienveillance et lui caresse le haut du crâne.

-Avec la force que tu as, ça m'étonnerait que tu blesses un vulgaire insecte.

J'ai toujours adoré charrier mon petit frère car je sais qu'il n'osera jamais se venger. Il a toujours été une victime. Cela m'a demandé une énorme responsabilité en tant que grand frère protecteur lorsqu'on était dans le même établissement. Geek a une année en moins que moi. Il est donc encore au lycée, en terminal. Pour quelqu'un de cette classe, il ne doit pas vraiment faire bonne figure. J'espère qu'il ne se fait pas harceler comme au collège...

-Tu es là depuis longtemps?

-Une demie-heure. 

-Ah ouais... Désolé d'avoir mis autant de temps.

-Ce n'est pas grave.

Je referme la porte et nous nous installons dans le coin salon. 

-Tu veux quelque chose à boire?

-Un soda, s'il te plaît.

Pendant que je le sors, je lui demande:

-Ça se passe bien à la maison? Les parents sont cool?

-Ouais. J'avoue qu'on se sent un peu seul sans toi...

Je souris, nostalgique. J'ai quitté la maison familiale depuis le début de l'année scolaire. Je ne les revois qu'en vacances et quand les week-ends ne sont pas trop chargés. Je dois avouer qu'à moi aussi, ils me manquent.

-Et l'école? Tu travailles bien? l'interrogé-je en lui ramenant sa boisson.

-On peut dire que ça passe. Même si les cours sont compliqués... Mais tant que j'ai la moyenne, les parents sont contents. 

Je ris. Quand il parle comme ça, on dirait un enfant. Toujours sous l'influence des parents.

-Et toi? Tu arrives à suivre les cours?

-Ouais, ça passe. Ce sont des trucs que j'aime, donc ça va.

-C'est sûr que tout ce qui touche à l'informatique t'a toujours plu. (Il prend une gorgée de son soda.) Tu continues les cours de théâtre?

-Oui. Là, on travaille sur une pièce que l'on va présenter au public. Si ça vous dit, vous pouvez toujours venir me voir.

-On serait ravi d'y être!

Ses joues se colorent de rouge. Il semble très heureux de savoir que je vais me présenter sur scène. En le regardant plus en détails, je remarque quelque chose de violet sur sa peau, à moitié caché par son t-shirt rouge avec Captain America pour le styliser. Je fronce les sourcils.

-On t'a frappé? demandé-je en passant mon doigt sur son cou.

Il se transforme soudainement en tomate, ce qui me rend perplexe. Il voulait me le cacher?

-C...Ce n'est pas ça...

-Alors c'est quoi ce bleu!? ... (Tout à coup, je comprends que je m'étais totalement trompé.) Oh...

Il semble embarrassé et il plaque sa main contre le bleu (qui n'a pas été produit par un coup...).

-C'est ton copain qui t'a fait ce suçon? lui demandé-je, sans gêne.

Il acquiesce d'un signe de tête, n'osant plus me regarder dans les yeux. Je fais mine de bouder et lui fais un câlin.

-Ce n'est pas juste! Panda a le droit de te toucher mais pas moi! 

Il se détend un peu et se met à rire de ma stupidité.

-T'es mon frère. Ce serait illégal de faire des choses déplacées.

-Mais les gens ne sont pas obligés de le savoir, si?

N'arrivant pas à contenir mon sérieux plus longtemps, j'explose de rire. Tout à coup, je me rends compte que j'ai un peu le même discours que Patron. Ce pervers est en train de m'influencer!

-D'ailleurs, ça se passe comment avec Panda? Il est toujours en train de penser qu'il est un vrai panda et qu'il doit sauver son espèce en se reproduisant avec un panda femelle?

Panda est le nom du petit-ami de Geek. Quand on y pense, je connais beaucoup de personnes avec des noms étranges.

-Il en parle tout le temps. Parfois, j'ai peur qu'il me laisse tomber pour un animal! 

Je le câline pour le rassurer. Quel idiot de frère...

-Mais sinon, il est toujours là pour moi et menace les personnes qui me veulent du mal pour que j'ai la paix.

Son petit sourire rêveur me laisse penser qu'il a trouvé la personne idéale à ses yeux. (Bien que celle-ci soit un parfait zoophile!) Quelque part, je suis jaloux. J'aimerais trouver quelqu'un qui me corresponde...

-Mathieu? J'aurais une question à te poser.

-Vas-y, je t'écoute.

-Tu es toujours célibataire?

Il lit dans mes pensées, ce n'est pas possible.

-À mon grand bonheur! Je suis libre comme l'air!

-Il n'y a même pas quelqu'un qui t'ait tapé dans l'œil?

-Personne. Je ne côtoie pas beaucoup de filles et les garçons que je connais ne correspondent pas à mes attentes.

Pourquoi je me mets à penser à Patron? C'est juste un dragueur qui essaye d'avoir mon cœur (et surtout mon corps!). Inutile de faire attention à lui.

J'ai fait mon coming-out de bisexuel à toute la famille. Étant donné que Geek avait fait le sien pour dire qu'il était homosexuel quelques mois avant, cela n'a posé aucun problème. Mes parents sont très ouverts d'esprit. C'est une chance unique de les avoir. C'est dans ces moments-là que je me dis que les gens devraient prendre exemple sur mes parents. Ils ne sont pas contre les différences et à aucun moment ils ne penseraient que certains types de personnes sont contre natures.

Mais malgré ma diversité, je n'arrive pas à trouver quelle personne pourraient me plaire. Quelle soit homme ou femme. C'est vraiment rageant par moment...

La main de mon frère se pose sur mon épaule et il me sourit gentiment, comme pour me réconforter.

-Tu trouveras la bonne personne. Que ce soit demain ou dans vingt ans. Mais tu finiras par la trouver.

-Je n'ai pas vraiment envie d'attendre trop longtemps non plus...

-C'est une façon de parler, Mathieu...

-Je le sais bien! m'esclaffé-je en lui ébouriffant les cheveux (enfin, plutôt sa casquette.).

Nous passons un moment à parler de tout et n'importe quoi. Quand l'heure arrive, nous dînons puis nous nous couchons. Nous avons cours demain matin. Et puis, il doit prendre son bus très tôt pour ne pas arriver en retard. Mon université se trouve assez loin de son lycée. C'est pourquoi je ne peux pas vraiment venir les voir quand j'en ai envie. 


Le lendemain, j'ai une tête de déterré. Nous n'avons pas arrêté de nous chamailler au lieu de dormir... Je suis claqué! J'imagine bien une réaction de Patron qui me dit: "T'as baisé toute la nuit, Gamin? Vas-y mollo! Je ne voudrais pas que tu te casses quelque chose." ou un truc du genre. Ça lui ressemblerait bien!

Voyant que mes potes sont avec d'autres personnes, je décide de monter directement à l'étage, sans venir les saluer. Je le ferai quand ils rentreront en classe. Je retrouve à l'autre bout du couloir Céleste. Mais elle n'est pas seule. Elle est en compagnie de la pire personne qui soit: Patron. Je serre les poings, le regard noir. Il ne la lâche toujours pas? Elle n'est pas intéressée et il ne le remarque pas!? Je me rapproche d'un pas décidé, énervé au plus haut point. En m'entendant arriver, ils se tournent tous les deux vers moi. 

-Tiens, voilà le gamin, fait remarquer Patron en souriant de toutes ses dents.

Je l'attrape vivement par le col de sa veste et le plaque au mur, furieux. Ce type profite de mon absence pour se taper une autre personne!? Il va me le payer!

Mais attendez... Pourquoi je réagis comme ça? Je m'en fiche qu'il en voit d'autres que moi! Pourquoi suis-je autant en colère?

Non, la raison est évidente: il s'en prend à mon amie! Je dois la protéger! Il n'a pas le droit de l'approcher sans son accord!

-Mathieu? s'étonne-t-elle en nous regardant avec des yeux ébahis.

-Va-t'en, Céleste. Je m'occupe de lui et je te rejoins plus tard.

-Mais...

Je lui lance un regard qui lui signifie de faire ce que je dis sans broncher. Elle se dépêche de prendre la cage d'escalier pour rejoindre son étage. J'entends Patron se moquer de moi.

-À croire que tu profites de n'importe quelle occasion pour te rapprocher de moi. Tu oses même me toucher. Je suis censé le prendre comment?

-Ne prends pas tes conclusions trop hâtivement.

Ignorant ma remarque, il se libère de mon emprise sur lui, comme si je n'avais pas de force et il m'attrape les poignets, qu'il maintient contre lui pour m'empêcher de fuir.

-Si tu me touches, je peux en faire autant, non?

Puis il m'embrasse, me congelant de la tête au pied. Je ne m'y attendais tellement pas que je manque de mourir, les poumons vidés de leur ressource vitale. Heureusement, je parviens à me délivrer de ses lèvres.

-Arrête ça... Ce n'est pas le moment!

Il glisse une main dans le bas de mon dos et me retient contre lui.

-Et quand sera le bon moment? Je ne peux pas attendre.

Je passe mon bras libre entre nos torses et tente de le repousser.

-Je ne sais pas mais pas maintenant!

Agacé par la situation, je me débats pour avoir assez d'espace pour m'enfuir de son étreinte. Étant plus petit, j'arrive à me sauver par-dessous. Mais il est plus vif que moi et m'attrape par les cheveux, prenant mon menton en coupe.

-Juste un dernier pour la route.

Puis il m'embrasse pour la énième fois, profitant au maximum de ce moment qui devient une habitude pour nous. À croire que c'est un signe pour nous saluer! Il prend ses distances et s'éloigne en me lançant un dernier regard. 

-Ce gars ne me laissera jamais en paix..., marmonné-je pour moi-même.

La sonnerie pour nous avertir de la reprise des cours résonne dans tout l'établissement.


Je retrouve Céleste au réfectoire et nous décidons de manger ensemble. Après quelques minutes à parler de sujets peu intéressants, je l'interroge sur ce qu'il s'est passé en début de matinée.

-Qu'est-ce que Patron te voulait? 

Elle me regarde d'un air perdu.

-C'est qui?

C'est vrai qu'elle ne connait même pas son nom...

-Le type qui était avec toi ce matin.

Elle fronce alors les sourcils.

-Comment connais-tu son nom?

Nous y voilà...

-On se croise de temps à autre. Alors on s'est échangé nos noms.

-Je vois...

Elle prend une gorgée de son verre d'eau et s'accoude à la table.

-Ça m'intrigue. 

-Quoi donc? lui demandé-je en approchant ma fourchette de ma bouche.

-Tu es sûr que vous n'êtes que de simples connaissances?

Pourquoi a-t-elle soudainement un doute?

-Bien sûr. Pourquoi?

Elle me fixe droit dans les yeux, ce qui me déroute un peu. Pourquoi est-elle aussi sérieuse?

-Quand il est venu me voir ce matin, il m'a posé des questions à ton sujet.

Je sens la douille arriver...

-Quoi par exemple?

-Tes centres d'activité, ce que tu aimes ou détestes, ton orientation sexuelle, ce que tu comptes exactement faire plus tard, ... Bref, il voulait en savoir plus sur toi.

... Hein? 

-Mais tu sais pourquoi il t'a posé toutes ces questions?

-Il a commencé directement en me disant qu'il savait que j'étais une bonne amie à toi et il m'a demandé si je pouvais le renseigner. (Elle se penche vers moi, sur le ton de la confidence.) Si tu veux mon avis, il s'intéresse à toi.

Je sens mes oreilles se réchauffer, me rendant fébrile. 

Patron... Qu'est-ce que tu cherches...?

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